Octavon

Octavon

Mulâtre

Enfant mulâtre avec sa mère espagnole et son père noir en Nouvelle-Espagne par le peintre mexicain Miguel Cabrera (XVIIIe siècle).

Le terme mulâtre (au féminin mulâtresse) désigne l'individu né d'un père noir et d'une mère blanche, ou d'une mère noire et d'un père blanc ou de deux parents mulâtres. Il est tiré de l’espagnol mulo (mulet).

Le terme mulâtre a un peu vieilli en France, n’étant utilisé de façon relativement courante qu’aux Antilles (milat, mot créole dans les îles francophones), ou par des écrivains, des artistes. Les équivalents portugais et espagnols mulato (et mulatto) restent couramment utilisés. En anglais, le terme mulatto peut être considéré comme péjoratif ou raciste.

En français, bien que le terme mulâtre soit lié à l’esclavage, il n'est pas considéré comme péjoratif[1]. L’étymologie faisant référence au mulet peut être considérée comme peu honorable, mais il n'existe pas dans la langue française d'équivalent exact de ce terme. On peut lui préférer le terme de métis, mais celui-ci est moins précis car il comprend toute sorte de métissages, le terme mulâtre ne concernant lui que les personnes issues d'un parent blanc et d'un parent noir.

Sommaire

Vision historique

Contexte original du terme

La désignation des personnes selon leur couleur a eu une telle importance par le passé que chaque teinte entre le noir et le blanc avait son qualificatif. Dans les Antilles françaises, espagnoles et portugaises, au Brésil, dans le sud des États-Unis comme dans d'autres colonies, l'importance de l'origine raciale ne s'arrêtait pas à la première génération. Une classification raciste selon la part de « sang noir » s'est mise en place, ainsi traditionnellement:

  • Un enfant issu d'une union noir-blanc est un mulâtre (mulâtresse)
  • Un enfant issu d'une union mulâtre-blanc est un quarteron (quarteronne)
  • Un enfant issu d'une union quarteron-blanc est un octavon (octavonne)
  • Un enfant issu d'une union mulâtre-noir est un câpre (câpresse) ou un griffe

Le terme quarteron signifie que l'individu a un quart de sang noir et octavon qu'il en a un huitième (les qualificatifs ont par exemple été utilisés concernant Alexandre Dumas père et fils).

En langue anglaise la division ne s'arrêtait pas à octoroon (l'équivalent d' octavon), on avait donc ensuite le quintroon (c’est-à-dire la cinquième génération à partir de l'ancêtre noir), nettement plus fréquent que son synonyme hexadecaroon (qui signifie que l'individu a un seizième de sang noir). Ces derniers qualificatifs ont probablement été très peu utilisés car à ce niveau les individus n'ont plus aucune caractéristique les différenciant des blancs ou supposés blancs à 100%.

Ces termes ont été inventés en majorité par les esclavagistes pour qualifier les catégories intermédiaires entre les maîtres et les esclaves, entre les « blancs » (ou « békés » aux Antilles) et les « nègres » ; ceux qu'ils ne considéraient pas encore comme des égaux mais plus vraiment comme des bêtes de somme. Inspirés de l'élevage animal, ces termes avaient indéniablement un but de classification raciste pour savoir qui pouvait être considéré comme un esclave ou non.

Statut social du mulâtre

Juan de Pareja, né d'un père espagnol et d'une mère esclave.
Velasquez (1650)

Le mulâtre jouissait jusqu’au milieu du XXe siècle dans les Antilles et en Amérique latine (également dans le sud des États-Unis) du prestige du sang blanc et de la force noire (chaque nuance de couleur correspondait dans l'imaginaire collectif à une valeur et à un statut social). En même temps le mulâtre suscitait, à cause de sa position, un sentiment de haine et d’agacement aussi bien chez les blancs que chez les noirs, certains préférant être employés par un blanc raciste que par un mulâtre.

Chaque famille (noire) avait pour ambition d'éclaircir son sang génération après génération car cela signifiait à terme échapper à la condition pauvre et à l'esclavage (s'affranchir par une couleur libre). Sous certaines conditions, l'enfant mulâtre pouvait être affranchi (cf Code noir), mais dans d'autres cas et dans des colonies autres que françaises même les octavons pouvaient rester esclaves.

C'est pourquoi certains mulâtres furent adeptes de l’éclaircissement du lignage familial et évitaient au maximum le contact avec les noirs, en se mêlant si possible aux blancs (ou supposés blancs). Ceci a été longtemps le cas au Brésil même après l’abolition de l’esclavage, c’est ce qu'on a appelé le branqueamento. Les noirs, les métis ou les indiens recherchant systématiquement une femme plus claire.

Utilisation du terme

Concernant l'étymologie du terme mulâtre, la comparaison des métis à des mulets est logiquement fausse puisque le mulet, issu d'un cheval et d'une ânesse, est stérile, alors qu'un individu métis n'est bien sûr pas stérile. Cet état de fait contredit donc le raisonnement des races humaines qui avait cours à l'époque de l'esclavage.

Bien qu'il soit issu des raisonnements racistes précités, le terme mulâtre a été tellement interiorisé, entretenu et traditionnellement utilisé, qu'il n'est aujourd'hui pas à proprement parler raciste ni péjoratif.

La population métis s'est appropriée ces classifications par nuance de couleur et il en reste des traces dans les mentalités et le langage, notamment aux Antilles françaises. D'autres termes antillais existent, ils sont plus ou moins usités (certains sont péjoratifs) comme chapé coolie qui désigne les métis indiens ou encore chabin(e) qui désigne les métis à la peau claire (ou avec des yeux ou cheveux clairs) terme relatif à l'hybride animal le Chabin issu du mouton et de la chèvre.

En Amérique du sud, centrale et dans tous les pays des Antilles, l'utilisation du terme mulato ne fait aucun débat. Beaucoup s'identifient volontiers à ce terme, que ce soit à Haïti, au Brésil ou à Cuba.

Le terme mulato ou mulata est aussi utilisé en portugais pour désigner des métis mais au Brésil après 388 ans d’esclavage donc d’exploitation sexuelle des femmes noires,métisses et indiennes le terme de mulata est souvent synonyme de danseuse érotique de carnaval. Ces femmes sont parfois vues comme des femmes de milieu social pauvre et facile à séduire, toujours prêtes pour une relation sexuelle.

Aux États-Unis, le terme mulatto ayant autrefois été employé aussi pour les hybrides d'animaux, il est considéré comme raciste et insultant par certains, qui lui préfèrent biracial, alors que d'autres locuteurs anglophones considèrent que mulatto préserve une continuité qui fait défaut à biracial ou autres termes alternatifs.

La grande encyclopédie Larousse de 1974 donne comme synonyme à mulâtre le terme eurafricain.

Notes et références

  1. Les dictionnaires français n'indiquent pas le terme comme péjoratif, voir par exemple le dictionnaire Hachette.

Voir aussi

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Voir « mulâtre » sur le Wiktionnaire.

Lien externe

Carminella Biondi, «  Le problème des gens de couleur aux colonies et en France dans la seconde moitié du XVIIIe siècle », Cromohs, 8 (2003), p. 1-12 [lire en ligne]

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