- Nimber
-
Pour le verbe nimber (orner d'un nimbe), voir Nimbe.
En mathématiques, dans la théorie des jeux combinatoires, les nimbers sont des jeux particuliers, définis comme les tas du jeu de Nim avec un nombre éventuellement infini d'allumettes. Plus précisement, le nimber correspondant au nombre ordinal α, souvent noté *α est défini comme le tas d'allumettes du jeu de Nim avec un nombre α d'allumettes.
Les nimbers interviennent en particulier dans la théorie des jeux impartiaux : en effet, d'après le théorème de Sprague-Grundy, tout jeu impartial est équivalent à un certain nimber.
Sommaire
Structure de corps
Il est possible de définir sur les nimbers des opérations d'addition et de multiplication, ce qui munit la classe des nimbers d'une structure de corps commutatif[1]. Cette construction théorique a été décrite en 1976 dans On Numbers and Games, par John Horton Conway.
Il est à noter que l'on parle en général de structure algébrique pour des ensembles. Cependant, les nimbers, de la même façon que les nombres ordinaux, ne forment pas un ensemble, mais une classe propre. On considère donc la structure, non pas de l'ensemble des nimbers, ce qui serait une expression incorrecte, mais de la classe des nimbers.
Opérations d'addition et de multiplication
La définition des opérations d'addition et de multiplication nécessite au préalable la fonction mex, dite de Minimum EXclus. Le mex d'un ensemble d'ordinaux est défini comme le plus petit ordinal n'appartenant pas à cet ensemble. Par exemple :
- Mex(1, 2) = 0
- Mex(0, 1, 5, 6) = 2
- Mex(0, 1, 2, 3, ..(tous les entiers).., ω, ω + 5) = ω + 1.
On utilise exactement la même définition du mex pour un ensemble de nimbers, à savoir que le mex d'un ensemble de nimbers est le plus petit nimber n'appartenant pas à cet ensemble.
Les opérations d'addition et de multiplication de deux nimbers α et β peuvent alors s'écrire :
Structure de groupe abélien
L'opération d'addition définie sur les nimbers possède les propriétés remarquables suivantes :
- le nimber 0 est un élément neutre : α + 0 = α
- commutativité : α + β = β + α
- associativté : (α + β) + γ = α + (β + γ)
- Tout nimber possède un opposé (lui-même) : α + α = 0 et donc − α = α
Ces propriétés munissent la classe des nimbers d'une structure de groupe abélien.
Structure de corps commutatif
Par ailleurs, l'opération de multiplication possède les propriétés suivantes :
- le nimber 1 est un élément neutre : α * 1 = α
- commutativité : α * β = β * α
- associativité : (α * β) * γ = α * (β * γ)
- distributivité par rapport à l'addition : (α + β) * γ = α * γ + β * γ
- Tout nimber non nul possède un inverse
Ces propriétés munissent en fait la classe des nimbers d'une structure de corps commutatif.
La propriété la plus surprenante est le fait que tout nimber possède un inverse. Cela se démontre grâce à une formule explicite qui permet de construire l'inverse de façon inductive. On définit un ensemble S par induction :
- si alors pour tout α' < α, on a :
On peut alors montrer que vérifie α * β = 1, c'est-à-dire .
Sous-corps remarquables
Certains sous-ensembles de nimbers sont stables pour les opérations d'addition et de multiplication. Pour n > 0 donné :
- l'ensemble des nimbers de 0 à 2n − 1 est stable pour l'opération d'addition
- l'ensemble des nimbers de 0 à est stable pour l'opération de multiplication
Il s'ensuit que l'ensemble des nimbers de 0 à est un corps fini à éléments distincts, donc isomorphe à .
Exemple du sous-corps fini F16
Pour illustrer les opérations d'addition et de multiplication, on peut donner les tables suivantes, qui montrent le résultat de l'addition et de la multiplication des nimbers compris entre 0 et 15. L'ensemble des nimbers de 0 à 15 est clos pour ces opérations, c'est-à-dire que le résultat est lui-même un nimber entre 0 et 15. On obtient ainsi une structure isomorphe au corps fini F16.
Table d'addition des Nimbers[1] + 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 0 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 1 1 0 3 2 5 4 7 6 9 8 11 10 13 12 15 14 2 2 3 0 1 6 7 4 5 10 11 8 9 14 15 12 13 3 3 2 1 0 7 6 5 4 11 10 9 8 15 14 13 12 4 4 5 6 7 0 1 2 3 12 13 14 15 8 9 10 11 5 5 4 7 6 1 0 3 2 13 12 15 14 9 8 11 10 6 6 7 4 5 2 3 0 1 14 15 12 13 10 11 8 9 7 7 6 5 4 3 2 1 0 15 14 13 12 11 10 9 8 8 8 9 10 11 12 13 14 15 0 1 2 3 4 5 6 7 9 9 8 11 10 13 12 15 14 1 0 3 2 5 4 7 6 10 10 11 8 9 14 15 12 13 2 3 0 1 6 7 4 5 11 11 10 9 8 15 14 13 12 3 2 1 0 7 6 5 4 12 12 13 14 15 8 9 10 11 4 5 6 7 0 1 2 3 13 13 12 15 14 9 8 11 10 5 4 7 6 1 0 3 2 14 14 15 12 13 10 11 8 9 6 7 4 5 2 3 0 1 15 15 14 13 12 11 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 Table de multiplication des Nimbers[1] × 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 2 0 2 3 1 8 10 11 9 12 14 15 13 4 6 7 5 3 0 3 1 2 12 15 13 14 4 7 5 6 8 11 9 10 4 0 4 8 12 6 2 14 10 11 15 3 7 13 9 5 1 5 0 5 10 15 2 7 8 13 3 6 9 12 1 4 11 14 6 0 6 11 13 14 8 5 3 7 1 12 10 9 15 2 4 7 0 7 9 14 10 13 3 4 15 8 6 1 5 2 12 11 8 0 8 12 4 11 3 7 15 13 5 1 9 6 14 10 2 9 0 9 14 7 15 6 1 8 5 12 11 2 10 3 4 13 10 0 10 15 5 3 9 12 6 1 11 14 4 2 8 13 7 11 0 11 13 6 7 12 10 1 9 2 4 15 14 5 3 8 12 0 12 4 8 13 1 9 5 6 10 2 14 11 7 15 3 13 0 13 6 11 9 4 15 2 14 3 8 5 7 10 1 12 14 0 14 7 9 5 11 2 12 10 4 13 3 15 1 8 6 15 0 15 5 10 1 14 4 11 2 13 7 8 3 12 6 9 Références
- On Numbers and Games 2nd edition, AK Peters (2000), p.50 à 63 J. H. Conway
- (en) Elwyn Berlekamp, John Conway et Richard Guy, Winning Ways for your Mathematical Plays, A K Peters Ltd, 2001--2004, 2nde éd. (ISBN 1-56881-130-6, ISBN 1-56881-142-X, ISBN 1-56881-143-8, ISBN 1-56881-144-6)
Wikimedia Foundation. 2010.