- Martial Guéroult
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Martial Gueroult, né au Havre le 15 décembre 1891 et mort à Paris le 13 août 1976, est un philosophe et historien de la philosophie, notamment de la philosophie du XVIIe siècle.
L'œuvre de Guéroult est traversée par deux caractéristiques : un grand soin apporté à l’histoire de la philosophie, qui n'est pas « moins noble » que la production philosophique, et une grande rigueur et une forte exigence systématique (ou structurale, ou encore, selon le mot de Canguilhem, « internaliste »), refusant tout recours philosophique à la transcendance.
Sommaire
Biographie
Gueroult intègre l'École Normale Supérieure en 1912 ; il est presque aussitôt appelé au service militaire, pour trois ans. Jules Vuillemin raconte en ces termes l'expérience militaire de Gueroult :
- « Mobilisé le 2 août 1914, Gueroult est blessé le 20 août à la bataille de Lorraine [plus précisément à la bataille de Biderstroff], d'une balle qui l'atteint à la tête sans léser le cerveau. Laissé pour mort, il fut ensuite porté à un poste de secours, qui fut attaqué par l'ennemi. Sur les trente blessés, tous furent achevés sauf trois, dont Gueroult, qui fut ajusté et manqué. Il obtint la Légion d'honneur à titre militaire. » (« Gueroult (Martial) », Association amicale des anciens élèves de l'École Normale Supérieure, 1977, p. 59)
Prisonnier en Allemagne, il entreprit la rédaction de sa thèse sur Fichte. Regagnant l'ENS en mars 1919, il décroche l'agrégation de philosophie la même année. Il enseigne au lycée de Chartres de 1920 à 1922, puis enseigne l'histoire de la philosophie générale à l'université de Strasbourg. Déprimé, il quitte Strasbourg en 1923, et enseigne six ans au lycée de Vendôme. Ses thèses de doctorat, présentées en 1922, ne sont soutenues qu'en 1930. De retour à l'université de Strasbourg en avril 1929, il la suit lors de son repli à Clermont-Ferrand.
Il enseigne ensuite à la Sorbonne, où il occupe la chaire de Léon Brunschvicg, à partir de 1945, et enfin au Collège de France de 1951 à 1963, où il succède à Étienne Gilson ; il donne à sa chaire le nom d’« Histoire et technologie des systèmes philosophiques ». Il est élu membre de l'Académie des sciences morales et politiques en 1957.
Son épouse décède le 16 mars 1973 ; mariés depuis le 3 janvier 1920, ils avaient eu deux filles. Lui-même tombe malade et ne peut plus travailler ; il décède le 13 août 1976.
Œuvre
Histoire de la philosophie
Guéroult a écrit plusieurs ouvrages d'histoire de la philosophie, dont plusieurs sont devenus des références :
- L'Antidogmatisme de Kant et de Fichte, 1920
- La Philosophie transcendantale de Salomon Maimon, 1929
- L’Évolution et la structure de la doctrine de la science chez Fichte, 1930
- Leibniz, Dynamique et métaphysique. Suivi d'une note sur le principe de la moindre action chez Maupertuis, 1934
- Étendue et psychologie chez Malebranche, 1939
- Berkeley. Quatre études sur la perception et sur Dieu, 1956
- Malebranche, 1953-1958
- Descartes selon l'ordre des raisons, 1953
- tome 1 : L'Âme et Dieu
- tome 2 : L'Âme et le corps
- Spinoza, 1968-1974
- tome 1 : Dieu (Éthique, livre I)
- tome 2 : L'Âme (Éthique, livre II)
- Études sur Fichte, 1979
Le livre sur Spinoza n'a pas été achevé, Guéroult ayant rencontré des problèmes à construire le passage du livre II au livre III de l'Éthique ; il est mort avant de pouvoir le récrire.
Dans ses œuvres, Guéroult s'efforce de montrer en quoi le discours philosophique se passe de transcendance : il se constitue lui-même selon sa propre logique interne.
Polémique sur Descartes
Une polémique l'opposa à Ferdinand Alquié au sujet de Descartes : Guéroult l'étudiait « selon l'ordre des raisons », c'est-à-dire de manière systématique, tandis que Alquié l'étudiait comme un parcours existentiel.
Dianoématique
Historien de la philosophie, Guéroult a étudié à plusieurs des plus grands auteurs ; mais philosophe, il n'a cessé de s'intéresser aux conditions de possibilité d’une histoire de la philosophie en général.
Le couronnement de l’œuvre de Guéroult devait être la Dianoématique ; mais il mourut avant de l'achever. Celle-ci est composée de deux livres :
- livre 1 : Histoire de l'histoire de la philosophie
- volume 1 : En Occident, des origines jusqu'à Condillac, 1984
- volume 2 : En Allemagne, de Leibniz à nos jours, 1988
- volume 3 : En France, de Condorcet à nos jours, 1988
- livre 2 : Philosophie de l'histoire de la philosophie, 1979
Le premier livre (composé de trois volumes) examine les divers rapports que la philosophie a pu entretenir avec son histoire. Le second pose la question : comment une histoire de la philosophie est-elle possible, si l'on tient compte des exigences apparemment contradictoires de la philosophie comme étude de vérités éternelles, et de l'histoire comme école de scepticisme ?
Influence
Guéroult a exercé une grande influence sur :
- Pierre Bourdieu, qui fit sous sa direction un mémoire sur les Animadversiones de Leibniz ;
- Gilles Deleuze, qui admire ses livres sur Spinoza, Leibniz, Malebranche et leur rigueur scientifique ;
- Michel Foucault, pour la rigueur de l'analyse des systèmes philosophiques ;
- Geneviève Rodis-Lewis ;
- Jules Vuillemin, qui se considérait comme son disciple.
Bibliographie
- Ginette Dreyfus, « La méthode structurale et le Spinoza de M. Gueroult », L'Âge de la science, 1969, p. 240-275
- Jules Vuillemin, « Gueroult (Martial) », Association amicale des anciens élèves de l'École Normale Supérieure, 1977, p. 59-63
- Jules Vuillemin, Ginette Dreyfus, Louis Guillermit et Victor Goldschmidt, « Martial Gueroult », Archiv für Geschichte der Philosophie, 1977, p. 289-312
Lien externe
Catégories :- Philosophe français du XXe siècle
- Personnalité normande
- Historien de la philosophie
- Historien de la philosophie moderne
- Historien de la philosophie allemande
- Professeur au Collège de France
- Académie des sciences morales et politiques
- Naissance en 1891
- Naissance au Havre
- Décès en 1976
- Élève de l'École normale supérieure (rue d'Ulm)
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