- Le Nazi et le Barbier
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L'ouvrage Le Nazi et le Barbier (Der Nazi & der Friseur) de l'écrivain juif-allemand Edgar Hilsenrath est un roman grotesque sur la Shoah pendant l´époque du national-socialisme, publié pour la première fois en 1971.
Sommaire
La perspective du criminel
Le récit, raconté par le criminel lui-même, est conçu comme la biographie d'un SS, auteur d'innombrables meurtres, surveillant dans un camp de concentration, Max Schulz, qui, après l'effondrement du Troisième Reich, a usurpé une identité juive et a gagné Israël, afin d'échapper aux poursuites en Allemagne.
Le grotesque est caractérisé par le fait que les attentes du lecteur sont déçues de manière calculée et par le renversement des clichés habituels, par exemple ce qui concerne l'Allemand Max Schulz et son ami et camarade d'école le juif Itzig Finkelstein:
« Mon ami Itzig était un blond aux yeux bleus, il avait le nez droit, les lèvres bien dessinées et de bonnes dents. Moi, au contraire, Max Schulz, j'avais des cheveux noirs, des yeux de grenouille, le nez crochu, de grosses lèvres et de mauvaises dents. »[1]
Une autre particularité souligne la perspective du criminel, pour les lecteurs allemands de l'époque une nouveauté:
« Les lecteurs allemands sont depuis des années familiers avec des romans, des récits et des pièces de théâtre qui ont pour sujet la persécution et l'anéantissement des Juifs sous Hitler et sont traités de façon satirique-poétique et comique-grotesque. Mais tous sont conçus sous l'angle de la perspective des victimes, Hilsenrath au contraire choisit pour son roman la perspective du criminel. »[2]
Publication
Hilsenrath a eu des difficultés pour la publication de l'ouvrage en Allemagne comme cela avait déjà été le cas pour son premier roman La Nuit, parce qu'il brisait le tabou philosémite qui voulait que dans la littérature allemande d'après-guerre les juifs ne soient représentés que d'une manière positive, comme des sortes de héros.« L'air du temps est au philosémitisme. Effroyable spectre aux yeux embués. Qui un jour sécheront. » (Livre Troisième, chapitre 7, p. 234)
Hilsenrath au contraire décrit les juifs comme il décrirait d'autres hommes, avec leurs côtés positifs et négatifs, et il considère le philosémitisme comme un bonnet retourné dont on les aurait coiffés, donc comme une forme cachée d'antisémitisme toujours présent.
Bien que l'ouvrage ait déjà été publié aux États-Unis en 1971 et eût été fort bien accueilli, le manuscrit fut refusé par de nombreux éditeurs en Allemagne, sous prétexte qu'on ne doit pas écrire ainsi sur les Juifs. Ce n'est que six ans après la publication aux États-Unis que l'ouvrage est paru en 1977 en Allemagne chez un petit éditeur de Cologne, Helmut Braun.
- En France, le roman a été publié aux éditions Attila (2010). La traduction est de Jörg Stickan et de Sacha Zilberfarb.
Réception
Aux États-Unis, la publication du roman avait rencontré un grand succès, alors qu'en Allemagne à cause du tabou philosémite elle suscita bien des controverses. Heinrich Böll rendit hommage, dans une critique, à la qualité littéraire de l'œuvre et à son style, « qui foisonne plein de sève et pourtant touche souvent juste, déployant une poèsie à la fois sombre et calme. » Le Nazi et le Barbier jouit depuis lors, de même que l'ensemble de l'œuvre d'Hilsenrath, d'une popularité croissante en Allemagne. En 1979 Le Nazi et le Barbier fut cité en Suède comme l'un des trois meilleurs livres parus. La valeur académique de l'œuvre d'Hilsenrath est désormais reconnue en Allemagne et à l'étranger - avant tout aux États-Unis.
Le début
« Je me présente : Max Schulz. Fils illégitime mais aryen pure souche de Minna Schulz, au moment de ma naissance servante dans la maison du fourreur juif Abramowitz. Mes origines aryennes pure souche ne font aucun doute, car l'arbre généalogique de ma mère, ladite Minna Schulz, sans aller jusqu'à la bataille d'Arminius, remonte au moins jusqu'à Frédéric le Grand.»
Notes et références
- Edgar Hilsenrath, Le Nazi et le Barbier.
- http://www2.hs-fulda.de/hilsenrath/friseur2.php Manfred Rieger: A la recherche de la faute perdue. Roman grotesque-réaliste d'Edgar Hilsenrath sur un Nazi, déguisé en Juif,
Catégories :- Littérature de la Shoah
- Œuvre ayant pour thème le nazisme
- Roman paru en 1971
- Roman allemand
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