Lac Nyos

Lac Nyos
Lac Nyos
Lac Nyos, juste après la catastrophe, Cameroun
Administration
Pays Cameroun
Province Nord-Ouest
Géographie
Latitude
Longitude
6° 26′ Nord
       10° 18′ Est
/ 6.44, 10.30
6° 26′ N 10° 18′ E / 6.44, 10.30 
Type lac de cratère
Superficie 1,58 km2
Longueur 2,0 km
Largeur 1,2 km
Altitude 900 m
Profondeur 210 m

Le lac Nyos (en réalité lac Lwi, devenu populaire sous le nom de lac Nyos, Nyos étant le nom du village voisin du lac) est un lac de barrage volcanique situé dans la province du Nord-Ouest du Cameroun, aux coordonnées 6° 26′ N 10° 18′ E / 6.44, 10.30. Le lac Nyos est un lac situé à 1 200 mètres d’altitude, sur le flanc d’un volcan inactif près du mont Oku, le long de la ceinture camerounaise de volcans actifs longue de 1 400 kilomètres ; le mont Cameroun (4 095 mètres) restant le seul volcan en activité de cette chaîne. Un barrage naturel de roches volcaniques piège les eaux du lac.

Sommaire

Éruption limnique du 21 août 1986

Le 21 août 1986, dans la soirée, le lac Nyos, au nord-ouest du Cameroun, a explosé et libéré environ un kilomètre cube de dioxyde de carbone (CO2). En effet, le lac Nyos est un lac de cratère. De ce fait, le gaz carbonique s'accumule au fond du lac. On a estimé à 300 millions de m³ le volume du gaz carbonique contenu dans le lac. Le lac Nyos est situé au-dessus d'une poche magmatique. Il existe des lignes de failles qui partent de cette poche magmatique et entrent en contact avec le fond du lac. C'est donc une zone de volcanisme actif. Les émanations gazeuses s'accumulent en permanence au fond du lac, contrairement aux lacs de cratère des zones tempérées qui connaissent un brassage de leurs eaux du fait de l'alternance des saisons : en hiver, les eaux lourdes de la surface s'enfoncent du fait de leur poids pour remplacer les eaux de profondeur qui remontent, permettant ainsi des dégazages constants. Mais, les lacs des zones tropicales ne connaissent guère de brassage. De ce fait, les émanations gazeuses vont s'y accumuler en quantités très importantes. Mais ces gaz ne peuvent s'échapper à cause de la stratification des eaux avec trois couches qui s'étendent sur près de 210 mètres. Il existe une première couche très dense, une couche intermédiaire, et une couche superficielle. La catastrophe de Nyos qui a entraîné de nombreuses victimes a été causée par la chute d'un pan de la falaise[1] qui surplombe le lac. Cette chute de roches a entraîné un brassage assez rapide des eaux : les eaux contenant le gaz carbonique se sont ainsi retrouvées en surface, ce qui a favorisé les émanations gazeuses. Comme le gaz carbonique est une fois et demi plus lourd que l'air, il va s'échapper et causer la mort des villageois et de leurs troupeaux[2]. Une opération de dégazage est aussi menée sur le lac Monoun depuis 2003</ref>. Au total, on évalue à 915 le nombre de tués sur le territoire de Nyos. À Su-Bum, situé à 14 km du lac, malgré une plus forte population, les pertes ont été moindres : on y a recensé 700 morts. Avec 70 victimes, le petit village de Cha a perdu tous ses habitants. À l’ouest, plusieurs hameaux dispersés le long de la vallée de la Fang ont subi la colère du lac. Bilan total : 1 746 morts retrouvés dans un paysage quasi intact, portant seulement, à certains endroits, les traces d’un violent coup de vent. Plus de 3 000 personnes ont dû quitter leurs maisons et ont été regroupées dans des camps.

Selon l’une des thèses proposées pour expliquer cette éruption atypique, le dioxyde de carbone, d’origine mantellique, serait progressivement stocké dans les eaux profondes du lac et s’en échapperait sous l’'effet d’un « renversement » du lac, provoqué par un séisme ou un glissement de terrain. Le phénomène est connu sous le nom d’éruption limnique.

Le processus d’ex-solution s’est amorcé et s’est développé dans l’ensemble des eaux du lac par une réaction en chaîne. Une explosion gazeuse a projeté dans les airs une colonne d’eau à une hauteur dépassant 80 mètres. L’énorme quantité de dioxyde de carbone libérée, étant plus dense que l’air, a ensuite « coulé » dans les vallées avoisinantes en asphyxiant toute forme de vie jusqu’à 30 km du lac.

La thèse du retournement des eaux du lac fut et reste formellement contredite par des scientifiques français et italiens (Haroun Tazieff et son équipe[3]). Leurs analyses établissent la permanence de la stratification des eaux du lac, y compris lors de nouvelles explosions observées ultérieurement. Pour cette équipe, les analyses de la chimie des gaz et de celle des eaux montrent toutes que l’hypothèse d’un dégazage des eaux profondes consécutif à une inversion des strates inférieures et supérieures du lac ne peut rendre compte du phénomène. Parmi les nombreux faits observés, l’apparition dans la partie centrale du lac d’un cercle de teinte rouge soutenu d'environ 75 mètres de rayon renforce d’autant plus l’hypothèse d’une éruption phréatique que les analyses de la teneur en CO2 des eaux du lac effectuées chaque jour de la fin août à la fin septembre 1986 établissent que très peu de CO2 dissous a été libéré lors de la catastrophe. Le dégazage a créé une vague inégale (1 mètre au nord, 80 mètres au centre et 20 mètres au sud) qui ne peut s’interpréter que par un jaillissement d’eau relativement puissant. Le granite des bords du lac fut décapé sur une bande étroitement localisée, ce qui ne peut également être expliqué que par la retombée d’une importante masse d'eau, depuis une hauteur de 100 à 200 mètres au-dessus de la surface affectée. Selon Tazieff, l’hypothèse d’un processus éruptif (éruption phréatique) permet seule d’en rendre compte, comme elle a pu rendre compte de la catastrophe de Dieng (1979)[4], en Indonésie.

La controverse qui divise les scientifiques[5] est évidemment cruciale en matière de prévention des risques pour les populations environnantes. Le dégazage des eaux de lacs de maars ne fait donc pas l’unanimité des chercheurs.

Orgues de Nyos

Orgues de Nyos

Depuis janvier 2001, une équipe française dirigée par le professeur Michel Halbwachs mène une opération de dégazage du CO2 piégé au fond du lac, afin d’éviter que la catastrophe de 1986 ne se reproduise. L’opération, dénommée « Les orgues de Nyos », utilise un tuyau vertical en polyéthylène reliant les eaux profondes du lac saturées en CO2 à la surface.

Le pompage est réalisé par autosiphon : une pompe mécanique aspire l’eau en tête de colonne. Le liquide prélevé dans les eaux profondes du lac (riche en gaz dissous) s’élève dans la colonne. Sa pression diminue et l’eau approche de la limite de saturation. Lorsque celle-ci est atteinte, des bulles commencent à se former qui s’élèvent naturellement dans la colonne. De nouvelles bulles apparaissent qui entraînent le liquide. Une fois le processus amorcé, l’action de la pompe est inutile et celle-ci peut être arrêtée. Un jet d’eau et de dioxyde de carbone jaillit à l’orifice de la colonne et le dioxyde de carbone se dissipe en quantité inoffensive dans l’atmosphère. Le jet formé au lac Nyos s’élève à 50 m au-dessus du lac. Le système est prévu pour fonctionner plusieurs années afin d’éliminer le risque d’une nouvelle éruption limnique. Le risque est cependant difficile à évaluer. Actuellement il existe un risque double, à la fois d’un dégazage brusque mais aussi d’une rupture des digues naturelles qui encerclent le lac et menacent de se rompre[6].

Nyos n’est pas le seul

Après plusieurs recherches réalisées sur les lacs africains par des scientifiques, il s’avère que le lac Nyos n’est pas le seul lac concerné par une possible éruption limnique. Le lac Monoun est lui aussi potentiellement dangereux, il contient dans ses eaux 10 millions de m³ de CO2, à comparer aux 300 millions de m³ contenus dans le lac Nyos. En 1984, une éruption se produisit et tua au moins 37 personnes. Une opération de dégazage est aussi menée sur le lac Monoun depuis 2003[7],[8].

Le lac Kivu, en Afrique centrale, serait également susceptible de telles éruptions, mais à une échelle bien plus grande (sa superficie est de 2 700 km2 et plusieurs millions de personnes vivent sur ses rives).

Notes et références

  1. Documentaire National geographic
  2. Ndobo Éric Martial, enseignant de géographie du lycée Joss
  3. Document
  4. [PDF]Crater lakes of Java: Dieng, Kelud and Ijen
  5. Selon Frédéric Lavachery, le fils de Tazieff, 5% de "la communauté scientifique" est convaincue par l'hypothèse de l'éruption phréatique
  6. Cameroon-Info.Net : Lac Nyos : Camerounais et Nigerians menacés de mort
  7. Degassing Nyos
  8. Description of the Gas Disasters in Lakes Nyos and Monoun

Annexes

Article connexe

Liens externes

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Webcam dirigée vers le système de dégazage du lac Nyos.

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Lac Nyos de Wikipédia en français (auteurs)

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