La méthode d’analyse en groupe

La méthode d’analyse en groupe

La méthode d’analyse en groupe est un livre de Luc Van Campenhoudt et al. qui présente une méthode d'analyse en groupe qui part du postulat que l’acteur est compétent. Sur lui-même et sur ses propres expériences, l’acteur produit une connaissance réflexive.

L’objectif de cette méthode d’analyse en groupe est de rassembler des participants tous concernés par une problématique commune tout en occupant des positions diversifiées. Le but poursuivi n’est pas de mettre tous les participants d’accord sur une interprétation unanime de la situation, mais de les mettre d’accord sur une formulation de leurs désaccords.

Selon les auteurs, l’analyse en groupe tend à se développer dans un contexte de mutations culturelles et de transformations structurelles (désajustement des trajectoires sociales, extension et approfondissement des inégalités sociales, métamorphoses de la question sociale, hétérogénéité des expériences, affirmation d’un sujet réflexif, etc.). Cette méthode poursuivrait une ambition explicative des mutations à l’œuvre.

Dans la lignée constructiviste, l’ambition des auteurs est d’articuler des exigences souvent présentées comme contradictoires : la mobilisation de la réflexivité des individus et la prise en compte des limites de la subjectivité, la singularité des expériences individuelles et la construction collective des phénomènes sociaux, la rupture épistémologique et la continuité entre savoirs ordinaires et savoirs savants. Les problèmes et les enjeux doivent être appréhendés dans leur co-production sociale entre des acteurs aux positions et aux points de vue divergents. Les auteurs soutiennent que, dans le jeu des interactions, des relations et des rapports sociaux entre acteurs se (re)produisent les réalités sociales.

Les présupposés épistémologiques de l’analyse en groupe sont davantage ceux du paradigme du conflit, « au sens d’une prise en compte de la conflictualité du jeu social et d’une reconnaissance de la capacité d’action des individus et des groupes sociaux dans une société divisée. (…) C’est donc le principe de la coopération conflictuelle, au cœur de la dynamique des rapports sociaux, qui sous-tend le dispositif de l’analyse en groupe se distinguant tant du paradigme de la domination, que de ceux de l’intégration et de la compétition » [1]. L’originalité de la méthode tient notamment dans la double démarcation épistémologique qu’elle propose : d’une part, la confrontation des divers points de vue des participants, et d’autre part, la confrontation entre les apports des participants et ceux des chercheurs. Les hypothèses et les éventuels apports théoriques des chercheurs sont discutés en groupe et contribuent à faire progresser l’analyse. La conception du sujet engagé dans ce dispositif est celle d’un sujet réflexif qui met en œuvre non seulement des compétences pratiques mais aussi des capacités critiques. Selon les auteurs, cette compétence sociale s’exercerait dans certaines conditions que le dispositif de l’analyse en groupe permettrait d’établir.

Les caractéristiques de la méthode

Les auteurs présentent cinq caractéristiques centrales de la méthode d’analyse en groupe.

  1. Un dispositif associant les acteurs.
    La méthode vise à approcher le sens pratique, en se basant sur l’analyse des expériences vécues et présentées par les acteurs. La méthode attribue aux acteurs une « compétence pratique », en associant les acteurs concernés à la construction de l’analyse. Elle tente de déconstruire le clivage entre acteurs et chercheurs, les premiers étant souvent présentés comme de simples « fournisseurs d’informations ». L’ambition de l’analyse en groupe est d’associer les participants à l’analyse en mobilisant leurs compétences réflexives et critiques.
  2. Une approche « par le bas ».
    La méthode vise à rendre compte des expériences de terrain dans leur diversité et leur dynamique. Il s’agit d’une approche inductive où la théorisation est ancrée dans l’expérience des participants. Au départ, chaque participant propose un récit détaillé d’une expérience vécue qui lui apparaît comme révélatrice des enjeux sur lesquels porte la recherche. Il s’agit d’une « situation-problème » concrète. Suite à l’exposé de ces situations, le travail d’analyse consiste à examiner comment les acteurs impliqués dans le groupe interagissent, en intégrant progressivement les interprétations des participants dans une synthèse.
  3. Une analyse interactive d’un système de relations.
    L’analyse prend en compte le caractère relationnel du social. Au lieu de s’adresser aux individus de manière isolée et désocialisée, les auteurs proposent une analyse constituée à partir des relations et des rapports entre les individus. Il ne s’agit pas d’additionner ou de juxtaposer des points de vue, mais de saisir la dynamique des relations sociales qui les réunit et les oppose autour d’un même enjeu.
  4. Une continuité et une double démarcation épistémologique.
    Dans l’analyse en groupe, la connaissance sociologique s’élabore à partir des catégories interprétatives des participants, mais à l’aide d’un double décentrement.
    *La confrontation des divers points de vue favorise une compréhension élargie et intersubjective des situations. La prise en compte des divergences et des convergences interprétatives entre participants permet de dégager une vision élargie des enjeux.
    *L’analyse en groupe organise la confrontation entre les apports des participants et ceux des chercheurs. Leurs hypothèses et éventuels apports théoriques contribuent également à faire progresser l’analyse.
  5. L’analyse en groupe, un débat organisé de manière procédurale.
    Cette analyse prend la forme d’un débat organisé, réglé par des procédures et des consignes précises. « Pour pouvoir être libres, les échanges ne sont pas spontanés ». Les prises de parole, pour ne pas être des prises de pouvoir, respectent un protocole rigoureux dont l’animateur est le garant.

L’insistance des auteurs sur la procédure tient au fait que l’analyse en groupe n’est pas une méthode d’observation. Les conditions et les règles du débat répondent à l’objectif de permettre et de favoriser un travail réflexif dans une démarche de production collective de connaissance validée intersubjectivement.

Notes et références

  1. Luc Van Campenhoudt, Jean-Michel Chaumont, Abraham Franssen,, La méthode d'analyse en groupe, Dunod, 2005 , page 36

Bibliographie

  • Luc Van Campenhoudt, Jean-Michel Chaumont, Abraham Franssen,, La méthode d'analyse en groupe, Dunod, 2005 

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article La méthode d’analyse en groupe de Wikipédia en français (auteurs)

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