Krematoriumskommando

Krematoriumskommando

Sonderkommando (camps d'extermination)

Les Sonderkommandos (initialement Krematoriumskommandos, les commandos du crématoire) étaient des unités de travail dans les camps d'extermination, composées de prisonniers, Juifs dans leur très grande majorité, forcés à participer au processus de la solution finale. Le mot vient de l'allemand et signifie unité spéciale. Attention néanmoins : ce terme est parfois rencontré dans une autre acception car il a également été utilisé auparavant pour qualifier les Einsatzgruppen de sinistre mémoire qui, eux, étaient Allemands et participaient à ce qu'on appelle désormais la « Shoah par balles » sur le front de l'Est.

Sommaire

Un sursis au prix de l'horreur

Sélection et affectation

Les membres des Sonderkommandos étaient des déportés choisis au hasard par les SS à la descente des trains, lors de la Selektion faite immédiatement sur la Rampe (le quai) ou après la période de quarantaine. Ils étaient choisis sur des critères physiques (jeunes et en bonne santé apparente) et en fonction des besoins en main d'oeuvre. Ils vivaient ensuite définitivement séparés des autres prisonniers jusqu'à leur mort. À Treblinka, par exemple, ils étaient dans le Todeslager (camp de la mort), partie du camp isolée qui comprenait les chambres à gaz et les fosses de crémation. À Auschwitz 1 (camp souche) ils furent d'abord regroupés au Block 11 (prison du camp), puis dans un Block séparé, entouré de murs et gardé (le Block 13 du camp de Birkenau), et dans un troisième temps, ils vécurent entièrement au Krematorium (complexe comprenant la salle de déshabillage, la ou les chambres à gaz, la salle des fours et les éventuelles fosses de crémation) auquel ils étaient rattachés. Tous contacts avec les autres prisonniers du camp étaient théoriquement interdits afin que ce qui s'y passait ne soit jamais connu. Même l'équipe de gardes SS était spécifiquement affectée.

Le travail des membres du Sonderkommando consistait à regrouper les effets personnels des déportés qui venaient d'être envoyés à la chambre à gaz. Des camions venaient chercher ces ballots de vêtements qui seraient alors triés et envoyés vers l'Allemagne. Ils étaient chargés ensuite de sortir les corps des chambres à gaz. Ils devaient raser les cheveux des femmes (dans certains camps d'extermination, on le leur faisait faire avant la chambre à gaz), prendre les bijoux et dents en or puis porter les corps vers la salle des fours (parfois à l'extérieur sur des bûchers lorsque les victimes étaient trop nombreuses par rapport à la capacité des fours) pour les y brûler.

De même que la fermeture des chambres à gaz sur les victimes, le jet du Zyklon B par des trappes et la réouverture des chambres à gaz étaient toujours effectuées par des gardes SS sous surveillance d'un « médecin » SS. La durée du gazage au Zyklon B allait de 10 à 20 minutes, en fonction du nombre de victimes entassées dans la chambre à gaz et de la chaleur qui y régnait. Ce procédé ne laissait pas de survivant à la réouverture des portes. Le témoignage de Rudolf Höß lui-même, chef du camp d'Auschwitz, le confirme. Seules deux exceptions sont connues sur plus d'un million de victimes, c'est à dire sur l'ensemble des années de fonctionnement à Auschwitz et Birkenau (un SS les a alors abattus). Il semble que le procédé par gaz d'échappement utilisé à Chełmno, Sobibor, Treblinka ou Belzec ait pu être moins constant.

Le « renouvellement » des équipes

Cette vie terrifiante dans l'enfer de l'enfer ne durait pas longtemps en règle générale parce que, toujours par souci de ne pas laisser de témoins, les membres des Sonderkommandos étaient régulièrement "renouvelés", envoyés à leur tour dans la chambre à gaz. Une nouvelle équipe leur succédait alors, choisie parmi des déportés arrivés par un nouveau convoi. Contrairement à ce qui est souvent affirmé, il ne s'agissait pas de renouvellement à date régulière, mais en fonction de ce qu'on leur avait fait faire, donc de ce dont ils avaient été témoins. Par exemple, l'ensemble des membres du Sonderkommando ayant participé au vidage des fosses communes à l'automne 1942 (opération que les SS ont appelée « Aktion 1005 ») a été exterminé à l'issue de l'opération de crémation des corps.

Révoltes et témoignages

Le 7 octobre 1944 le Sonderkommando s'est révolté à Auschwitz-Birkenau. Il n'a pas été suivi par un soulèvement de l'ensemble du camp et cette révolte s'est terminée dans un bain de sang. La quasi totalité des prisonniers du Sonderkommando du crématoire IV ont été tués mais certains témoignages confirment que quelques personnes ont pu s'échapper. Par ailleurs les prisonniers avaient incendié leur bâtiment qui n'a plus été utilisable. Les survivants du camp principal de Birkenau disent néanmoins que cette révolte était pour eux source d'espoir. Une révolte a par ailleurs été fomentée par les membres des Sonderkommando à Treblinka.

Il y eut quelques survivants : moins de cent pour Auschwitz-Birkenau sur les plus de deux mille qui furent forcés à accomplir ces taches. Ils réussirent à se mélanger à l'ensemble de la population des prisonniers dans la confusion de l'évacuation du camp le 18 janvier 1945. Leurs témoignages sont toujours peu connus. Ils ont été nombreux à écrire et enterrer des textes destinés à témoigner. Six manuscrits ont été retrouvés par hasard, près des crématoires, au fil du temps. Cinq d'entre eux ont été réédités sous le titre Des Voix sous la cendre. Des témoins du Sonderkommando ont également déposé auprès de la Commission soviétique en 1945 après la libération du camp, et aux différents procès concernant Auschwitz (à Lüneburg, Cracovie et Francfort). Filip Müller a également écrit un livre très précieux pour témoigner de tout ce qu'il a vu.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Philippe Mesnard, Des voix sous la cendre : Manuscrits des Sonderkommandos d'Auschwitz-Birkenau, Calmann-Lévy/Mémorial de la Shoah, 2005 (ISBN 2-702-13557-9) réédité en Livre de poche 2006
  • Filip Müller, Trois ans dans une chambre à gaz d'Auschwitz, Pygmalion, 1980 (ISBN 2-85704078-4)
  • Shlomo Venezia, Sonderkommando : Dans l'enfer des chambres à gaz, Albin Michel, 2007 (ISBN 2-226-17593-9)
  • Ber Mark, "Des voix dans la nuit", Plon, 1982
  • Georges Didi-Huberman, Images malgré tout, Editions de minuit, 2003.

Filmographie

Liens externes

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