- Johannes hispalensis
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Jean de Séville
Jean de Séville (Latin: Johannes Hispalensis ou Johannes Hispaniensis) est un mathématicien espagnol du XIIe siècle, traducteur de l'arabe d'ouvrages de philosophie et de mathématiques.
Sommaire
La reconquête de Tolède
Tolède fut reconquise par Alphonse IV de Castille en 1085. Cette reconquête ouvrait la richesse des bibliothèques aux érudits des quatre coins d’Europe. En 1135 l’archevêque Raymond de Toulouse y fonde un collège de traducteurs où des Italiens, des Français, des Anglais, des Juifs, des Flamands s’illustrent aux côtés des Espagnols dans un gigantesque projet de traduction.
Des traducteurs mercenaires
Les premières traductions de l’arabe vers le latin sont opérés vers 1140 par Dominique Gundissalvi (Gondissalvi ou gunsaldinus). Mais l’archidiacre Gondisalvi ignore l'arabe et il est aidé dans sa tâche par des traducteurs premiers qui livrent une version en castillan que leur maître traduit ensuite en latin.
Parmi ces traducteurs supposés, ou en marge d'eux, se détachent quatre figures, celle de Jean de Séville - Hispanus, celle d’un juif converti nommé Aven-dreath, celle d’un maÎtre Johannes et enfin, celle d’un traducteur indépendant, qu’on appelle également Jean de Luna, ou de Limia. Longtemps on a pu croire que ces traducteurs ne faisaient qu'un.
Johannes parmi ces traducteurs ?
Longtemps, on a assimilé Johannes Hispalensis avec un ou chacun de ces quatre traducteurs. On l'a identifié avec le converti Aven-Dreath, avec le traducteur Johannes Hispanus, avec David Toletanus... De nombreux noms se croisent sur les manuscrits primitifs ou dans les commentaires qu'on a émis dessus : Jean de Séville, Jean de Tolède (toletanus), Aven-dreath, Ibn D’d, Avendauth, Avendehut, Aven Daoud, Jean de la Luna ou de Limia, Magister Iohannes... Aujourd'hui certains historiens doutent que le véritable Johannes Hispalensis ait réellement travaillé pour le compte de Gondisalvi (1110-1181).
Si on sait le distinguer d’un autre Jean, Johannes Hispalensis, mort en 1166 et archevêque de Séville, avec lequel on l'a également confondu, on ne sait pour autant que peu de chose de sa vie.
Il mentionne Limia comme un des lieux où il a habité dans sa jeunesse. Directement entré au service de l'archevêque de Tolède Raimond (1130-1150), qui l’occupa à des traductions d'ouvrages arabes sur la philosophie et les mathématiques, ainsi que des commentaires sur Aristote, il a publié à son propre compte un traité d’arithmétique, le premier qui en occident fit mention des chiffres arabes et du zéro.
D'autre part, il ne mentionne jamais avoir vécu à Tolède et abandonne tout surnom dans ses traductions après son passage chez l’archevêque Raymond. Un nom supplémentaire formé lors de ses premières traductions semble assuré : Johannes Hispalensis et/atque Limiensi qu’il aurait abandonné lors d’une réécriture utérieure de ses premières traductions.”
Le fait qu'il ait traduit lui même de l'arabe vers le latin, et la constance de sa signature laisse penser qu'il ne fut jamais aun traducteur premier, et qu'il se trouva méler aux autres traducteurs de façon fortuite.
Identification avec Avendreath
L’identification de Jean de Seville avec Aven-Dreath ou Avendeut (Avendehut, Aven Daud ou Avendar) est cependant toujours discutée. Ce savant d’origine israélite est l’auteur présumé de la lettre de Tolède, prévision d'une catastrophe, en 1185. Il s'est consacré essentiellement aux mathématiques, à l’astronomie et à quelques œuvres philosophiques et médicales. Comme Hispalensis, il aurait travaillé à Limia, au Portugal, puis à Tolède, en collaboration avec le même archidiacre Dominique Gundissalvi. Des raisons pour ne pas confondre Hispalensis, Avendrath et Jean l’espagnol sont données par Robinson
Sans doute le premier algébriste d'occident !
Au XIX ème siècle, le prince Baldassare Boncompagni publia un livre à ce sujet : Alghoarismi de practica arismetrice, de Johannes Hispalensis et fut soutenu dans ses efforts par Michel Chasles
Selon l’historienne Maureen Robinson, Johannes Hispalensis est un traducteur important de ces temps, qui a été inextricablement joint à Gundissalvi par des erreurs de la part des scribes et des historiens.
Pour preuve, elle mentionne que les oeuvres qui lui sont attribuées sous ces différentes versions de son nom feraient de lui un être bien trop prolifique.
On luit doit
- Secretum Secretorum
- De differentia spiritus et animae traduit du philosophe arabe (IXe siècle) Qusta ibn Luqa
- Alghoarismi de practica arismetrice ou Algorithmes de la pratique artihmétique, traduit d'un manuscrit postérieur à Al-Khawarizmi.
Un destin ténébreux
Ces difficultés d'identification s'ajoutent au privilège que l'imagination de Lovecraft lui prête d'avoir eu dans ses mains le Necronomicon. S'il est probable qu'on doit à Hispalensis le Secretum Secretorum, traduction du Kitab sirr al-asrar, dans lequel on trouve le fameux texte alchimique de la Table d'émeraude, il est douteux qu'il eut dans ses mains le Necronomicon.
Dans une lettre à Clark Ashton Smith datée du 27 novembre 1927, H.P. Lovecraft affirme en effet que le dernier exemplaire arabe d'Al-Azif a été perdu après 1228; il affirme également qu'une traduction en espagnol de la version arabe se trouvait à la bibliothèque de Buenos Aires. Il prête à Avendreath l'acquisition en 1164 des ouvrages de la bibliothèque de l'Andalous Ibn Yulyul, qui selon lui servit sous Hisham II dans la seconde moitié du Xe siècle. Parmi les textes médicaux et botaniques, Lovecraft prétend que Johannes Hispalensis, qu'il identifie avec Avendeath, trouva une copie d'Al-Azif mais que, peu enclin à des poursuites religieuses, il donna le livre au savant Abd-Al-Kadir Guilânî Musli. Quoique ces filiations soient amusantes, elles n'en sont pas pour le moins autres choses que des rêveries.
Bibliographie
- M.Robinson. The History and Myths surrounding Johannes Hispalensis, in Bulletin of Hispanic Studies vol. 80, no. 4, October 2003, pp. 443-470, abstract.
- DELISLE (Jean) et WOODSWORTH (Judith) (dir.), Les traducteurs dans l’histoire, Canada, Presses de l’Université d’Ottawa (Éditions UNESCO), coll. « Pédagogie de la traduction », 1995, 348 p.
Liens externes
Pour la part de rêve associé à Lovecraft, consulter :
Plus sérieusement :
- un article de Maurren Robinson disponible en pdf [3]
- Une évocation du métier de traducteur au XII ème siècle : [4]
- Un travail effectué par l'académie de Besançon [5]
- La page wikipedia allemande sur les traducteurs de Tolede en traduction automatique : [6]
D'autres points de vues :
- Un livre Google sur le traducteur et l'église : [9]
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Catégorie : Traducteur du Moyen Âge
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