- Jean-Jérôme Colonna
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Jean-Jérôme Colonna, dit Jean-Jé, de son vrai nom Jean-Baptiste Jérome, né le 24 juin 1939 à Sartène, est décédé dans un accident de voiture en Corse-du-Sud le 1er novembre 2006 à l'âge de 67 ans. Il est un parrain présumé de la Corse-du-Sud. Il eut pendant longtemps un casier vierge.
Sommaire
"Carrière" dans le Milieu corse
Vengeance contre les assassins de son père
Légende du milieu de Corse-du-Sud, il ne participa pas à la guerre du Combinatie. Mais son père, Jacques Colonna, un marchand d'huile tué à Ajaccio dans sa Traction-Avant le 18 juillet 1955 devant ses yeux, probablement à la suite d'une méprise avec son oncle Jean Colonna, futur maire de Pila-Canale en Corse-du-Sud. Jean-Jérôme Colonna dit Jean-Jé n'avait en effet à l'époque que 16 ans. Il consacra, durant une dizaine d'année, à poursuivre les assassins de son père et à les tuer un à un, incarnant pour certains corses le "bandit d'honneur". Sans remords, « Je ne suis ni fier ni honteux de ce que j'ai fait » confessera-t-il en août 2002 au mensuel Corsica, dans la seule interview qu'il ait jamais donnée[1].
Trafic de stupéfiants avec la French Connection
Le nom de Jean-Jé apparaît en tête de liste des suspects, avec une demi-douzaine de comparses. En fait, son "affaire" arrive près de cinq ans après celle de la French connection mais il est dénoncé à la DEA américaine par un ancien de ce réseau Michel Nicoli contre la promesse d'une libération rapide. Michel Nicoli deviendra d'ailleurs une taupe appointée du service anti-drogue américain. À l'automne 1974, le patron des stups de Marseille, le commissaire Lucien Aimé-Blanc, reçoit ces informations et vérifie le tout. Le juge René Saurel, spécialiste de la French Connection, dirige l'instruction. Filatures et témoignages concordent. Le 30 janvier 1975, Jean-Jé est arrêté, puis inculpé pour trafic de stupéfiants, avec ses amis. Craignant de porter le chapeau de cette affaire, après une incarcération de 6 mois, Jean-Jé se fait hospitaliser à l'Hôtel-Dieu et se fait la belle en pyjama en juillet 1975[1].
Il se réfugiera sous un faux patronyme au Brésil, aux États-Unis, sans oublier quelques discrets séjours en Corse, où il garde de précieux appuis. Ses ex-complices comparaissent pour trafic de stupéfiants à Marseille le 13 janvier 1978. Ils écopent de 10 à 15 ans de prison pour infraction à la législation sur les stupéfiants. Les juges sont encore plus sévères avec l'homme en fuite, Jean-Jé, condamné par défaut à 17 ans de prison. Cette condamnation est motivée par le faît « d'être un organisateur au sommet, ayant tiré un bénéfice financier du trafic, objet de très mauvais renseignements, joueur, ne mérite aucune indulgence ».
Mais voila, en appel, la cour d'appel d'Aix-en-Provence se penche sur cette affaire en octobre 1978. Les peines des complices de Colonna sont confirmées, voire alourdies. Mais contre toute attente, les magistrats ne se prononcent pas sur le cas de Jean-Jé, repoussant à plus tard l'examen de son dossier. Puis, le temps passe, Colonna est toujours introuvable. La cour d'appel oublie curieusement de juger dans les délais légaux. La prescription de 10 ans s'applique. Sa première condamnation à 17 ans disparaît. Plus de trace dans son casier, désormais vierge. Le miracle judiciaire a eu lieu. C'est ainsi qu'il a pu revenir en France vers la mi-1985.
Semi-retraite: activités occultes dans l'hotellerie
Rentré en Corse, plus personne ne peut le poursuivre. Il commence alors une seconde carrière de chef de clan. Officiellement peu actif, il aide son épouse qui a acheté l'hôtel Miramar à Propriano et gère des supérettes, il règle des affaires dans le sud de l'île, il était soupçonné d'activités occultes dans l'hôtellerie sans que jamais il ait pu être prouvé quoi que ce soit malgré une enquête fiscale de dix années. Habitant Pila-Canale, il fut un proche de son ancien maire, Robert Feliciaggi, abattu sur le parking de l'aéroport d'Ajaccio en mars 2006, possiblement par des tueurs proches du gang de la Brise de mer[1].
Rapport Glavany en 1998
Le rapport (dit "Rapport Glavany") remis en septembre 1998 par la commission d'enquête parlementaire sur "l'utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en Corse", présidée par Jean Glavany (PS), le qualifiait de "seul véritable parrain", influent et incontournable dans l'île. Jean-Jé Colonna s'est toujours défendu de ce qualificatif, assurant n'être qu'un "juge de paix" arbitrant les conflits. Une assertion qui lui vaudra d'être mis sur surveillance, sans grandes suites par les services de police en mars 1999. Ce qui le poussera à affirmer dans le mensuel Corsica en août 2002 : « Je ne suis pas le parrain de la Corse »[1].
Mise en accusation
Poursuivi en 2002 pour des prises d'intérêt occultes, il entre en cavale durant deux ans, avant de se présenter au procès. À l'issue du procès en juin 2004, puis de l'appel en 2005, il sera en définitive lavé de tous les chefs de mise en examen à l'exception d'un seul (emploi fictif) qui lui vaudra 3 ans de prison dont six mois ferme et 330 000 euros d'amende : être employé à raison de 1 500 euros par mois… par sa propre épouse gérante d'une supérette SPAR au lieu-dit Abbartello. Il s'était pourvu en cassation. S'il avait été condamné, cela aurait été la seule condamnation inscrite à son casier judiciaire[1].
Décès
Le 1er novembre 2006, Jean-Jérôme Colonna roulait près de Porto-Pollo (Corse-du-Sud), lorsque son véhicule a percuté le parapet d'un petit pont puis a effectué une sortie de route au niveau d'un pont et s'est encastré contre la pile droite du pont avant de s'enflammer[2].
L'absence de traces de freinage a intrigué les policiers mais le décès fut tout d'abord attribué à un malaise cardiaque précédant la sortie de route. Les résultats de l'expertise médicale a initialement attribué le décès à une rupture de l'aorte.
Cependant, début février 2007, la presse fait état de plusieurs éléments de l'enquête en cours remettant en doute une mort naturelle. L'expertise mécanique du véhicule a mis au jour la présence d'un élément mécanique étranger au moteur. Cette pièce comportait des traces d'un composant chimique qualifié de "brisant" intégré à un explosif. L'examen autopsique a révélé une absence de "lésion" et "un muscle cardiaque en parfaite santé".
Jean-Jérôme Colonna n'a pas eu, avant de mourir, d'infarctus du myocarde. Les recherches ont également mis en doute une rupture spontanée d'un anévrisme de l'aorte. L'arrachement de l'aorte serait dû "à l'effet de blast" produit par l'explosion.
Cependant, les conclusions de l'enquête scientifique de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) contredisent l'hypothèse d'un attentat. Le tube étranger serait en réalité un élément du climatiseur de la voiture. Le morceau de tuyau aurait de surcroît été retrouvé déformé par la chaleur et n'aurait donc pas explosé. Les nitrates détectés sont utilisés dans les appareils électriques et électroniques, ils émanent donc très probablement de la climatisation elle-même.
Références
- Le juge Duchaîne se déchaine (consultable sur abonnement
- (fr) Le "parrain" de l'île se tue dans un accident sur lefigaro.fr
- Requiem for a Colonna, bakchich.info, 3 novembre 2006
- Mort du "parrain" corse Jean-Jérôme Colonna, nouvelobs.com, 1er novembre 2006
- Fin de cavale pour "Jean-Jé" à la veille d'un procès pour emplois fictifs, AFP, 16 juin 2004
- Mandat d'arrêt contre Jean-Jé Colonna, Nouvel Observateur, 25 octobre 2002
- Nécrologie : "Jean-Jé" Colonna, Le Monde, 2 novembre 2006
- Un rapport d'enquête met en lumière les irrégularités financières de la Cadec, Le Monde, 20 octobre 1998
- Corse : « L'émergence d'un système pré-mafieux », Le Monde, 10 septembre 1998
- La mort de "Jean-Jé" Colonna, parrain corse, ne serait pas accidentelle, Le Monde, 5 février 2007
- Corse : Jean-Jé Colonna serait bien mort accidentellement, Le Figaro, 8 février 2007
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