- Gottfried Helnwein
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Gottfried Helnwein (né le 8 octobre 1948 à Vienne) est un artiste d’origine autrichienne, performer, dessinateur, peintre, et photographe.
Helnwein étudie la peinture à l'Académie des Beaux-Arts de Vienne. Il reçoit le prix Kardinal König, le prix Meisterschul ainsi que le prix Theodor Körner. Le film documentaire Helnwein de 1984 (régie de Peter Hajek, co-production de la télévision autrichienne ORF et allemande ZDF) obtient le prix Adolf-Grimme, le prix Eduard Rhein et le Goldene Kader de la ville de Vienne.
Il utilise les techniques et moyens stylistiques les plus divers : en plus du dessin, de l'aquarelle, de la peinture à l'acrylique et à l'huile et des techniques mixtes, c'est surtout la photographie, souvent en relation au travail de performance, qui est son moyen d'expression préféré. Les dessins de Gottfried Helnwein semblent issus des angoisses kafkaïennes; ils ressemblent à des haies épineuses envahies de toiles d'araignées où ses psychoses retiennent l'être humain prisonnier. Son art et sa technique évoluent constamment entre sur-définition plastique et dissolution conceptuelle. La subtilité photographique de son dessin, étrangement apte à reproduire aussi fidèlement que possible les visions de l’artiste, réalise la géniale illusion de fondre les différentes réalités visible et invisible entre elle.
Helnwein acquiert une certaine notoriété dans les années 70 et 80, par ses collaborations avec la presse et de nombreuses personnalités comme William S. Burroughs, les Scorpions, les Rolling Stones, Michael Jackson, etc. C’est un artiste médiatisé, il est le photographe apprécié des stars du rock. L'homme lui-même et sa vie sont devenus, jusque dans les signaux vestimentaires qui reprennent les codes du hard rock, l'œuvre d'un artiste-vedette moderne, une partie essentielle de l'œuvre, une griffe. Gottfried Helnwein met son image en avant dans des autoportraits qui ne sont pas autobiographiques. « La raison pour laquelle je me suis tourné vers l'autoportrait, pourquoi j'ai dès le début mis ma propre personne en scène, est que j'étais une sorte de représentant. Il n'y a rien d'autobiographique là-dedans, ce n'est pas une thérapie, on n'y trouvera rien de personnel. Je n'ai rien à voir avec cela, je me prends uniquement parce que je suis toujours disponible en tant que modèle. Je veux montrer un Homme». Helnwein réalise des œuvres qui figure l’Homme sous les traits de son propre visage. Sa carrière a d’ailleurs débuté par l’art performance qui mettait en scène son propre corps. L’idée sous-jacente à ces mises en scène était de placer un obstacle imprévu dans le cours tranquille du quotidien. Elles visaient à provoquer une réaction chez les passants. Mais les gens ne réagissaient pas forcément, ce qui ne réduisait en rien le résultat de l’action, car même ignorer un événement est une réaction; qui plus est, c’est une réaction qui démasque la personne.
Depuis les années 90, il se concentre de plus en plus sur la photographie digitale et les installations grand format en espace public, ayant pour la plupart un propos socio-politique. Il crée les décors de théâtre pour Maximilian Schell (Los Angeles Opera), Jürgen Flimm (Hamburgische Staatsoper), Hans Kresnik (Volksbühne Berlin, Staatstheater Stuttgart, Deutsches Schauspielhaus Hamburg), Gregor Seyffert (Robert Schumann-Festival, Düsseldorf) et Gert Hof (Hamletmaschine, d'Heiner Müller, Berlin, Munich).
Sommaire
Discours artistique
Les œuvres comme celles de Gottfried Helnwein électrisent le spectateur qui les perçoit alors comme un anathème de la réalité. Ces images sont suggestives et ouvrent en même temps de vastes horizons sans pareils. De plus, Helnwein force au-delà de leurs limites les langages de différentes techniques, le dessin, l’aquarelle, la peinture et la photographie. Gottfried Helnwein utilise l’art «comme une arme, comme un scalpel, pour émouvoir le spectateur.» Sa démarche esthétique ne réside pas tant dans l’objet artistique, l’œuvre d’art, mais dans la perception humaine. Il se considère en ce sens bien plus comme un artiste conceptuel, bien qu’il s’oppose à leurs théories imprégnées de l’idée de l’œuvre d’art autonome. Mais au lieu de produire des images de marque incisives, il cultive une attitude esthétique qui reste sévère à l’égard de son environnement social. Gottfried Helnwein est résolument un artiste de son temps, qui prend en considération le passé, le présent et le futur de notre société contemporaine. Son message dénonce les grands drames survenus ces derniers siècles. Il ne les combat pas pour autant car c’est une entreprise vouée à l’échec. Le nazisme, le viol, l’inceste, le meurtre, la difformité et la maladie sont les figures de la dégénérescence des valeurs morales qui frappe notre société.
L’image de l’enfant
Durant les années 70, dans sa première période de performance, Helnwein met en scène des actions spontanées dans la rue. Il choisit souvent des enfants comme protagonistes de ses actions. Il les enveloppe de bandages fixés par des instruments chirurgicaux. «Le thème central de mon art était les enfants. J’ai trouvé des enfants, et parfois même des adultes, avec qui j’organisais des actions dans les rues. Par exemple, j’enveloppais un enfant de bandes, j’ajoutais des pinces chirurgicales, puis je l’allongeais ainsi ficelé sur le sol. J’en parlais toujours avec eux avant; je leur expliquais ce que j’allais faire. Pour eux c’était une sorte de jeu.»
Les pansements
La tête recouverte de pansements n'a cessé d'être un poncif mal compris par le public encore trop insensible aux codes du glauque. La tête pansée d'Humphrey Bogart dans le film Dark Passage en 1947 présentait pourtant déjà l’idée du visage en devenir. Chez Helnwein, les pansements et les instruments chirurgicaux sont également un symbole de métaphore de l'être perdu dans l'anonymat : une « personne » momifiée de notre époque semblant descendre tout droit de la table d'opération ou sortir d'un sarcophage égyptien. Il attend qu'un nouveau visage se forme comme dans un cocon abritant une vie en création. Tous les tourments et les horreurs de ce monde sont réunis dans ce visage bandé, comme un faisceau des manifestations de l'angoisse. Les autoportraits sont donc aussi l'expression du martyre de cette fin du siècle, et le spectateur s'y reconnaît.
L’image de la femme
Gottfried Helnwein crée aussi pour le théâtre, avec par exemple l’adaptation de la pièce « Macbeth » de Shakespeare. On retrouve ces personnages féminins aussi dans le clip « Mobscene » de Marylin Manson et dans la présentation théâtralisée des œuvres d’Helnwein accompagnant l’album « The golden age of grotesque » en 2003. Femme au visage mutilé, au sourire affreusement déchiré, elles incarnent l’ambivalence entre la femme moderne, forte, et l’archétype de la soumission. Elle se présente à nous dans de vieux sous-vêtements des années 1940, salis, aux bas filés. Elles ressemblent à des femmes battues, presque mortes et maintenues en éveil par un sentiment de vengeance. Souvent affublées d’un dispositif de correction médicale telle une minerve métallique, elles sont maintenues droites, comme des poupées usées et souillées.
Chronologie
- En 1982, Helnwein décline l'offre d'une chaire de professeur à l'École supérieure de design à Hambourg.
- En 1985, exposition au Albertina, Vienne.
Rudolf Hausner propose Helnwein comme son successeur pour la direction de la Meisterklasse, section peinture, à l'Académie des beaux-arts de Vienne, mais Helnwein choisi alors d'élire domicile en Allemagne.
- En 1988, rappelant la Kristallnacht [1] de 1938, Helnwein érige l'installation Nuit du neuf novembre entre le Musée Ludwig et le dôme de Cologne.
Coopération avec Hans Kresnik pour la mise en scène du drame chorégraphique Macbeth d'après Shakespeare, production à laquelle sera attribuée le Theaterpreis Berlin.
- En 1989, exposition au Folkwang Museum, Essen.
- En 1997, Helnwein élit domicile en Irlande.
La même année a lieu la plus grande rétrospective jusqu'à ce jour au Musée Russe de Saint-Pétersbourg.
- En 2000, expositions au San Francisco Museum of Modern Art et au Los Angeles County Museum of Art.
- En 2001, il crée à la Hamburgische Staatsoper les décors pour l'opéra Rake's Progress d'Igor Stravinski, mise en scène de Jürgen Flimm.
- En 2002, il établit un atelier à Los Angeles.
- En 2003, première projection du documentaire Nuit du neuf novembre au Museum of Tolerance, Simon Wiesenthal Center [2], Los Angeles.
Projets de vidéo et de cinéma expérimental avec Marilyn Manson (Helnwein et Manson revendiquent un mouvement commun, the Celebritarian corporation) et Sean Penn.
- En 2004, l'Enfant, rétrospective au San Francisco Fine Arts Museum.
- Helnwein obtient la nationalité irlandaise.
- En 2005, collaboration avec Maximilian Schell pour l'opéra Der Rosenkavalier [3] de Richard Strauss, dirigé par Kent Nagano au Los Angeles Opera.
Rétrospective au Musée national des Beaux-Arts de Pékin.
- Gottfried Helnwein vit et travaille en Irlande et à Los Angeles.
Citations
« Donald Duck m'a appris bien plus que toutes les écoles où j'étais. »
Gottfried Helnwein« La fonction de l'artiste consiste en l'évocation de l'expérience d'une reconnaissance mêlée d'étonnement : montrer au spectateur ce qu'il sait mais qu’il ne sait pas qu'il le sait. – Helnwein est maître en cette reconnaissance mêlée d'étonnement. »
William S. Burroughs [4]« Comment Helnwein, cette aimable personne, supporte-t-il que son excellente peinture devienne le miroir de la terreur de siècle ? Ou bien ne supporte-t-il tout simplement pas qu'elle ne le soit pas ? S'agit-il uniquement du miroir d'un comportement du siècle ? MIEUX VAUT UNE TERREUR SANS FIN QU'UNE FIN AVEC TERREUR. Ce comportement résulte de sa tabouisation par les statistiques. Tout comme Persée guillotine les Gorgones à l'aide d'un miroir et lorsque la tête tombe, elle devient sa propre tête. Dans l'ère chrétienne des miroirs, combien de têtes un homme a-t-il ? »
Heiner Müller [5]Bibliographie
- Robert Flynn Johnson, Harry S. Parker
The Child, Works by Gottfried Helnwein
Exposition particulière, 2004, San Francisco Fine Arts Museums, ISBN 0-88401-112-7
- Alexander Borovsky, Klaus Honnef, Peter Selz, William Burroughs, Heiner Müller, H.C. Artmann
Helnwein, Monographie – Gottfried Helnwein, Retrospektive, 1997
Musée national russe de Saint-Pétersbourg, ISBN 3-930775-31-X et Koenemann, 1999, ISBN 3829014481 - Klaus Honnef
Le Pouvoir Subversif de l’Art, Gottfried Helnwein – Un Artiste Conceptuel à l’Orée du Siècle Nouveau. - Peter Selz
Helnwein: L’Artiste, le Provocateur
- Peter Gorsen
Autoportraits. Les métamorphoses esthétiques du double
Der Untermensch, 2004, Édition Braus, Musée d'Art Moderne Strasbourg, Exposition particulière, 1986
1988
- Galia Fischer
Le nazisme dans l'œuvre d'Anselm Kiefer et Gottfried Helnwein
Université Paris I. Panthéon-Sorbonne
Mémoire de Maîtrise d’Histoire de l'art
2003
- Andreas Mäckler
Gottfried Helnwein - l'horrible et le sublime
Benedikt Taschen Verlag
1992
- mika, artiste plasticienne
Théorie de l'esthétique du glauque, images d'une réalité altérée
Université Michel de Montaigne, Bordeaux
Mémoire de Master Arts et Recherche, 2007.
Article rédigé à partir du chapitre Sôma eikon, une réalité égocentrique
Liens externes
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