Extinction du crétacé

Extinction du crétacé

Extinction du Crétacé

Fossile de Tarbosaurus

L'expression extinction du Crétacé ou extinction KT (de l'allemand Kreide-Tertiär-Grenze) désigne l'extinction massive des dinosaures, à l'exception des oiseaux, à la fin du Crétacé, il y a 65 Ma environ. Ce sujet passionne le grand public et les spécialistes depuis des décennies.

Cette extinction n'a pas touché que les dinosaures, mais aussi une grande proportion d'espèces animales et végétales de l'époque. La théorie la plus communément acceptée comme ayant le plus contribué à cette extinction de masse est la chute d'une météorite dans l'actuel Mexique[1].

Sommaire

Théories

Avec le développement des recherches, il s'est avéré que de nombreux groupes d'animaux, et pas seulement des dinosaures, avaient disparu à cette époque. Les familles d'insectes semblent bien passer la limite entre le Crétacé et le Tertiaire, mais les groupes de reptiles marins (Mosasaures, Plésiosaures), de reptiles aériens (Ptérosaures), de nombreux animaux aquatiques et de nombreux groupes de mammifères disparurent aussi.

Toute explication sur la disparition des dinosaures doit donc aussi faire état de la disparition de ces autres espèces.

Trois théories sont dominantes au début du XXIe siècle pour expliquer cette disparition de masse :

Cratère de Chicxulub

Article détaillé : Cratère de Chicxulub.
Vue d'artiste d'une chute de météorite

À la fin des années 1970, l'exploration de certaines couches géologiques a révélé une couche d'argile de quelques centimètres d'épaisseur entre les strates du Crétacé et du Tertiaire. On parle d'elle sous le nom de limite Crétacé-Tertiaire, de limite CT ou de limite KT. Cette limite géologique, bien visible en certains points du globe, présente un taux anormal d'iridium. Cet élément est rare sur Terre mais plus abondant dans certaines météorites. En 1980, un groupe de scientifiques[2] a alors émis l'hypothèse de la chute d'une météorite à cette période[3].

À la même époque, dans un autre contexte, les scientifiques[4] ont commencé à réfléchir à la notion d'« hiver nucléaire » : un hiver mondial de plusieurs mois à plus d'une année, que provoquerait l'utilisation de milliers d'armes nucléaires projetant des dizaines de millions de tonnes de poussières dans l'atmosphère, et la refroidissant par une sorte de crépuscule artificiel.

En lien avec ces recherches, le physicien et géologue américain Luis Walter Alvarez et son fils, le physicien Walter Alvarez, ont émis l'hypothèse selon laquelle la chute de météorite qu'ils suspectaient aurait pu entrainer un « hiver d'impact », aux effets similaires.

Mais le cratère de cette hypothétique météorite restait à être découvert. Quelques années plus tard, on découvrit le cratère de Chicxulub au nord de la péninsule du Yucatán au Mexique. Dans l'intervalle, de nombreuses autres traces de cet impact ont été découvertes, comme des quartz « choqués » (portant la marque d'un choc énorme).

Doutes sur la théorie

Certaines études indiqueraient que l'impact de Chicxulub n'est pas le responsable de l'extinction massive du Crétacé survenue il y a 65 millions d'années et qui a vu disparaître de très nombreuses espèces animales et végétales, dont les dinosaures. Ainsi, la chute de l'astéroïde de Chicxulub précéderait l'extinction massive du Crétacé d'au moins 300 000 ans[5]. En 2009 des scientifiques identifiaient 52 espèces présentes à la fois dans les couches de sédiments précédents et suivants l'impact de Chicxulub, démontrant que la chute de l'astéroïde n'avait pas entrainé une diminution catastrophique de la biodiversité[6],[7].

Effets de l'impact

Si la réalité de l'impact de Chicxulub (peut-être accompagné d'autres impacts non détectés à ce jour) est aujourd'hui bien documentée, ses conséquences précises sont toujours sujettes à discussion.

Tous les animaux de grande taille ont disparu, ce qui suggère des dysfonctionnements des chaînes alimentaires à l'échelle de la planète[8]. Les animaux plus petits, qu'ils soient à sang chaud ou à sang froid, ont mieux supporté la transition crétacé-tertiaire, même si beaucoup d'espèces disparurent. C'est ainsi que de nombreux reptiles de petite taille (lézards, tortues, crocodiliens, serpents), mais aussi des mammifères ou des insectes, ont survécu.

Diverses hypothèses ont été avancées pour éclairer le rapport entre l'impact et ces effets sur l'environnement.

Hiver d'impact

Cette hypothèse est la plus ancienne, puisqu'elle est celle d'Alvarez, l'auteur de la théorie de « l'astéroïde tueur ». L'idée est que l'impact a projeté dans l'atmosphère des millions de tonnes de poussières, rejointes par des millions de tonnes de cendres générées par les incendies causés par l'impact.

Cette hypothèse a été critiquée, car des espèces d'animaux à sang froid ont survécu à la chute. À l'inverse, les dinosaures, dont on sait que certains pouvaient vivre dans des zones assez froides (pôles ou montagnes), ont disparu.

Les partisans de l'hiver global pensent que les survivants, assez petits, avaient la capacité de se cacher dans des terriers, protégés des froids les plus extrêmes, ce que n'ont pu faire les dinosaures. Il est également possible que des zones aient été moins touchées par le froid.

Baisse de la photosynthèse

Certains auteurs pensent qu'un obscurcissement partiel de l'atmosphère a surtout provoqué un ralentissement de la photosynthèse, donc une crise alimentaire. C'est celle-ci qui aurait provoqué les plus gros dégâts dans les zones épargnées par l'impact, plus que le froid lui-même.

Ainsi, le paléontologue Eric Buffetaut écrit « La cause principale des extinctions semble être la rupture de nombreuses chaînes alimentaires provoquée par une réduction drastique de la photosynthèse, elle-même due à l'obscurcissement de l'atmosphère par l'énorme quantité de matière pulvérisée projetée par l'impact. Les êtres vivants ne dépendant pas immédiatement de végétaux vivants pour leur alimentation (y compris nombre de mammifères et de petits reptiles insectivores) paraissent avoir beaucoup mieux résisté que les autres à une catastrophe d'une relativement courte durée, mais d'une intensité considérable[9] ».

Mégatsunamis

La chute d'un astéroïde aussi gros ne serait pas restée sans effet sur l'océan ou la mer dans laquelle il est tombé. Des théoriciens avancent que l'impact aurait généré des vagues gigantesques de plusieurs kilomètres de haut.

Pluies acides

Selon une étude publiée début 2008 dans Nature Geoscience : « l'astéroïde tueur de dinosaures est tombé dans une zone plus profonde que l'on ne l'imaginait. En conséquence, l'énergie libérée, qui devait être équivalente à 5 milliards de fois l'énergie de la bombe atomique d'Hiroshima, aurait vaporisé au moins 6,5 fois plus d'eau que ne le laissaient penser les anciennes estimations. Or, en plus de modifier la température de la Terre, cette vapeur d'eau supplémentaire aurait aussi augmenté la quantité d'aérosols soufrés dans l'atmosphère. Un tel apport brutal a bien sûr influé sur le climat en changeant le bilan radiatif de l'atmosphère et, surtout, a dû provoquer d'abondantes pluies acides »[10].

Hydrocarbures
« Une nouvelle étude, publiée en mai [2008] dans la revue Geology, fait état de la découverte de petites billes, appelées cénosphères, dans les sédiments CT sur huit des treize sites examinés. Ces sphères microscopiques se forment suite à la combustion de charbon et de pétrole brut. Les chercheurs pensent donc que l’astéroïde de Chicxulub a pu s’écraser dans un immense réservoir de pétrole et projeter dans l’atmosphère d’immenses quantités d’hydrocarbures enflammés. Cette boule de feu s’est propagée sur des centaines de kilomètres et a initié le processus d’extinction des grandes formes de vie en épargnant les plus petites, comme les ancêtres des mammifères. Cette théorie permet d’expliquer la présence de suie dans les sédiments, elle n’apporte pas, en revanche, de précisions sur l’évolution de la Terre (réchauffement, nuage occultant, pluies acides…) immédiatement après l’impact[11].  »
Synthèse des théories sur les conséquences de la chute d'un astéroïde

Les conséquences précises de la chute de Chicxulub ne font toujours pas consensus. Des modifications climatiques et dans les cycles alimentaires sont couramment admises, mais leurs détails ou leurs poids respectifs ne le sont pas.

Volcans du Deccan

Article connexe : Trapps du Deccan.

On a constaté qu'aux environs de la fin du Crétacé d'énormes éruptions volcaniques se produisirent sur une période estimée à 500 000 années, dans la région du Deccan (ou Dekkan) de l'Inde actuelle.

Des couches de lave gigantesques ont en effet été retrouvées dans cette région (Trapps du Deccan) : il peut y avoir jusqu'à 2400 mètres d'épaisseur de basalte, et la surface actuellement couverte dépasse les 500 000 km2 (à partir d'une surface originelle sans doute supérieure à 1 500 000 km2).

Les simulations informatiques sur les effets de ces éruptions indiquent que les quantités de poussières, de cendres et de gaz carbonique (CO2) rejetées auraient pu avoir un effet climatique très perturbant pour les écosystèmes.

Néanmoins, comme pour toute simulation, il reste d'importantes incertitudes sur les effets environnementaux exacts de ce phénomène.

Régression marine

Il semble que l'époque ait été marquée par un recul des océans. Il est donc supposé que ce recul aurait pu entrainer des modifications climatiques de grande envergure, qui auraient provoqué la disparition des groupes susmentionnés.

Si cette hypothèse est la bonne, on devrait donc trouver des traces d'un déclin progressif des espèces concernées durant les derniers millions d'années avant la fin du crétacé.

Compte tenu du manque de données sur une courte période, il est difficile de trancher quant à l'évolution des populations animales et végétales sur quelques millions d'années seulement. Il semble cependant, en particulier en Amérique du Nord, que de vastes communautés dinosauriennes existaient peu de temps avant la fin du Crétacé. Une modification de ces espèces semble cependant s'opérer à cette période. Un changement climatique a donc peut-être bien eu lieu.

Synthèse

Aujourd'hui, l'existence de la météorite de Chicxulub et le caractère cataclysmique de son impact font consensus dans la communauté scientifique. Mais son influence exacte dans l'extinction des dinosaures et des autres groupes disparus de la fin du Crétacé fait toujours débat :

  • rôle marginal, donnant le coup de grâce à une faune et une flore affaiblie par la régression marine ainsi que par la « pollution » des volcans du Deccan, qui lui est antérieure ;
  • rôle partiel, mélangé avec ces mêmes causes ;
  • rôle dominant ;
  • rôle exclusif.

L'analyse des articles scientifiques parus entre 2000 et 2005 montre une domination de la troisième thèse, qui fait de la météorite de Chicxulub (peut-être d'ailleurs associée à d'autres météorites) le facteur essentiel de l'extinction de masse marquant la fin du Crétacé. L'aspect de cause exclusive semble plus incertain, car des activités volcaniques importantes accompagnent aussi les quatre autres grandes extinctions, et celles du crétacé sont antérieures à la chute du bolide[8].

La difficulté à trancher de façon définitive vient de l'impossibilité actuelle de définir un biotope sur quelques milliers ou même millions d'années de façon très précise. Seule cette précision permettrait de dire si les groupes d'espèces ont disparu en quelques jours (ce qui confirmerait définitivement la thèse de la météorite comme cause dominante), ou en quelques centaines de milliers d'années (ce qui ferait plutôt pencher pour les trapps du Deccan, ou pour un mixte Deccan — régression marine et météorite).

Autres théories

Ces théories (anciennes) sont aujourd'hui très minoritaires dans le monde scientifique, car :

  • Il est peu vraisemblable que toute une classe d'espèces ait disparu relativement rapidement et à l'échelle terrestre suite à une prédation sur ses nids. D'autant plus que cette disparition de masse ne touche pas que les dinosaures.
  • Pour l'épidémie, difficile qu'elle se soit propagée à l'échelle intercontinentale, touchant autant d'espèces différentes, y compris des animaux marins.
  • Les dinosaures n'étaient pas tous végétariens. De plus, une telle disparition n'aurait pas été aussi rapide.
  • Concernant l'inversion du champ magnétique terrestre, cela s'est produit maintes fois avant et après dans l'histoire géologique de la Terre, sans catastrophe de grande ampleur.

Autres extinctions de masse

Article détaillé : Extinction massive.

L'extinction de masse de la fin du Crétacé n'est pas la seule enregistrée. Les scientifiques estiment en avoir repéré au moins cinq autres comme celle du Dévonien où 50% des espèces disparurent et celle qui marque la fin du Permien où plus de 90% des espèces animales disparurent.

Notes et références

  1. (en) Vincent Courtillot, Joe McClinton, Evolutionary Catastrophes: The Science of Mass Extinction, Cambridge University Press, 2002, 173 p. (ISBN 9780521891189), « An asteroid impact - A general conflagration », p. 43 
  2. « Extraterrestrial cause for the Cretaceous–Tertiary extinction », par LW Alvarez, W Alvarez, F Asaro, et HV Michel, 1980, Science, volume 208, pages 1095 à 1108.
  3. Voir aussi Famille d'astéroïde Baptistina.
  4. N° spécial de la revue Ambio de 1982, étude « TTAPS » de 1983, par R.P. Turco, O.B. Toon, T.P. Ackerman, J.B. Pollack, et Carl Sagan.
  5. Gerta Kelle. La météorite innocentée. La Recherche n°379. 01/10/2004. texte complet
  6. Les dinosaures n'auraient pas été tués par la chute d'un astéroïde., techno-science.net, 30 Avril 2009.
  7. Le cratère du Chicxulub n’a peut-être aucun lien avec la disparition des dinosaures, maxisciences.com, 30 Avril 2009.
  8. a  et b Conférence Pour la Science du 13 février 2008 à l'Hôtel de ville de Paris, par Eric Buffetaut (paléontologue au CNRS) et Vincent Courtillot (géologue à l’Institut de physique du globe de Paris).
  9. Eric Buffetaut, « Le message des dinosaures », 13/09/2003 sur Futura Science.
  10. Laurent Sacco, « Chicxulub : l'impact du tueur de dinosaures plus violent que prévu », Futura-Sciences. Mis en ligne le 25 janvier 2008, consulté le 1er février 2008.
  11. « La fin des dinosaures », article publié sur NOUVELOBS.COM / Sciences et Avenir.com, le 30.04.2008.

Annexes

Articles connexes

Lien externe

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