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Adûnaic
L'adûnaic (parfois aussi écrit adunaic sans accent) est une langue construite imaginée par le romancier et philologue J. R. R. Tolkien. Dans l'univers de fiction dans lequel se déroulent les récits de la Terre du Milieu, l'adûnaic (« Langue de l'Ouest ») est la langue des Hommes de Númenor pendant le Second Âge.
Sommaire
Histoire externe
Première phase - Peu après la Seconde Guerre mondiale, Tolkien s'attela pour un temps à un nouveau récit, The Notion Club Papers[1]. Repartant des idées qu'il avait ébauchées dans son roman inachevé La Route Perdue[2], Tolkien développa l'histoire de l'île de Númenor et de sa chute sous la domination du maléfique Sauron. Il conçut alors les premiers éléments de l'adûnaic, une langue dont la structure trilitère rappelle légèrement les langues sémitiques[3]. En marge du récit où apparaît brièvement cette nouvelle langue (par le biais de rêves effectués par l'un des personnages, dénommé Alwin Lowdham), Tolkien en donna un compte-rendu assez détaillé, mais lui aussi inachevé, dans un « rapport » prétendument écrit par Lowdham, Lowdham's Report on the Adunaic Language[4].
Seconde phase - Comme souvent dans ce domaine, les conceptions de Tolkien sur ses langues construites étaient changeantes. Un peu moins d'une dizaine d'années plus tard, alors qu'il travaillait à la rédaction des appendices du Seigneur des Anneaux, Tolkien hésita sur l'idée que les Hommes de Númenor auraient en fait abandonné leurs langues premières pour adopter une langue elfique, le sindarin[5]. Finalement, il conserva néanmoins l'adûnaic et cita plusieurs noms de rois de Númenor dans les appendices. La publication du Seigneur des anneaux figea donc dans le marbre cette dernière position. D'autres textes de cette période ont été publiés dans Contes et légendes inachevés, et « La Lignée d'Elros » vient compléter la liste des noms adûnaics connus.
Contrairement aux autres langues inventées par Tolkien, qui firent l'objet de constantes révisions tout au long de sa vie (en particulier le sindarin et le quenya), il semble bien que Tolkien n'ait travaillé sur l'adûnaic que pendant ces deux phases. Les données du Lowdham's Report ne semblent pas entièrement compatibles avec les informations provenant des appendices du Seigneur des anneaux. Nous ne connaissons cependant pas l'ampleur des changements que Tolkien aurait apportés à sa présentation de l'adûnaic s'il avait cherché à en donner une version plus définitive.
Histoire interne
L'adûnaic dérive des langues des peuplades humaines qui s'établirent sur l'île de Númenor au début du Second Âge, et plus particulièrement de celle du peuple de Hador.
Il semble que dans un passé lointain, les hommes aient été en contact avec le peuple des Nains et que leurs idiomes alors naissants aient été influencées par la langue de ces derniers[6]. Comme pour le khuzdul des Nains, le vocabulaire adûnaic se base sur des racines consonantiques trilitères, ou parfois bilitères. Par ailleurs, lorsqu'ils créa les Nains, le Vala Aulë conçut pour eux le khuzdul, et certains ressemblances entre le valarin et l'adûnaic pourraient s'expliquer par des emprunts via le khuzdul — ainsi pourrait-on par exemple rapprocher le valarin iniðil de l'adûnaic inzil[7]. Plus tard, l'influence des langues elfiques, en particulier du quenya et du sindarin, se fit aussi sentir : on peut comparer l'adûnaic bêth (Sauron Defeated, p. 427) avec le sindarin peth « mot », ou beth sous forme mutée.
Au cours du Second Âge, les Hommes de Númenor établirent plusieurs colonies en Terre du Milieu. Il s'y développa une langue véhiculaire mêlant l'adûnaic aux langues locales, à l'origine destinée au commerce et à l'inter-compréhension avec les autochtones. Ce pidgin se répandit et évolua vers ce qui devint ensuite le « parler commun » de la Terre du Milieu, l'occidentalien[8].
Après la submersion de l'île de Númenor, les Númenoréens en exil formèrent les royaumes de Gondor et d'Arnor en Terre du Milieu. L'adûnaic disparut au profit de la langue commune. Cependant, les habitants de Dol Amroth, qui étaient de souche númenoréenne mais dont l'établissement en Terre du Milieu datait d'une colonisation antérieure, continuèrent apparemment à se donner des noms en adûnaic, même s'ils n'usaient plus probablement de cette langue au quotidien : ainsi Imrahil, prince de Dol Amroth pendant le récit du Seigneur des Anneaux, porte un nom adûnaic..
Notes
- ↑ Publié en 1992 dans Sauron Defeated, volume 9 de l'Histoire de la Terre du Milieu.
- ↑ Publié en 1987 dans La Route Perdue et autres textes, volume 5 de l'Histoire de la Terre du Milieu.
- ↑ Sauron Defeated, p. 240, à nuancer avec ibid., p. 415 et suivantes.
- ↑ Sauron Defeated, p. 413-440.
- ↑ Cf. The Peoples of Middle-earth, volume 12 de l'Histoire de la Terre du Milieu, p. 63. Une idée semblable lui était déjà venue dans La Route Perdue, cf. La Route Perdue et autres textes, p. 75.
- ↑ Cf. toute l'introduction du Lowdham's Report, théorie reprise plus tard dans The Peoples of Middle-earth, p. 317.
- ↑ Édouard Kloczko, p. 26
- ↑ En anglais westron — rendu par « ouistrain » dans la traduction française des appendices du Seigneur des Anneaux, sur même modèle que Westernesse en référence à Númenor, traduit en « Ouistrenesse » par F. Ledoux (qui s'est peut-être inspiré du nom de la ville normande Ouistreham). Édouard Kloczko préfère traduire par « occidentalien » dans son dictionnaire (p. 1), en songeant peut-être à l'occitan ou encore à l'occidental (une langue construite aussi appelée interlingue). D'autres ont aussi suggéré « ponantin » (= du ponant, comme levantin l'est au levant).
Bibliographie
- (en) J. R. R. Tolkien et Christopher Tolkien, Sauron Defeated, HarperCollins, 2002, 482 p. (ISBN 0-261-10305-9)
- J. R. R. Tolkien (trad. Tina Jolas), Contes et légendes inachevés [« Unfinished Tales of Númenor and Middle-earth »] [détail des éditions]
- Édouard Kloczko, Dictionnaire des langues des Hobbits, des Nains, des Orques, Arda, 2002, 179 p. (ISBN 2-911979-04-4)
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