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Dendrochronologie
La dendrochronologie est une méthode scientifique permettant en particulier d'obtenir des datations de pièces de bois à l’année près en comptant et en analysant la morphologie des anneaux de croissance des arbres. Elle permet également de reconstituer les changements climatiques et environnementaux.
Depuis peu, on l'applique aussi aux herbacées.Sommaire
Principes
La dendrochronologie a été inventée et développée au cours du XXe siècle par A.E. Douglass, le fondateur du Laboratory of Tree-Ring Research de l’Université d'Arizona. Plusieurs siècles auparavant Leonard de Vinci avait déjà décrit le principe des cernes de croissances et leurs variations en fonction des conditions climatiques. Edmund Schulman (1908-1958) et Fritz Schweingruber (1935-) ont également largement contribué au développement scientifique de la discipline.
Sous des latitudes moyennes, les arbres poussent en produisant du bois lorsque les conditions climatiques sont favorables (du début du printemps à la fin de l'été). Au printemps, les cernes sont clairs car les vaisseaux conduisant la sève sont plus larges, ce qui permet des flux plus importants.
L'analyse d'un échantillon de bois en repérant ses anneaux de croissance et en attribuant à chacun d'entre eux un millésime de formation, permet de déduire les conditions climatiques contemporaines à la vie de l'arbre.
En prenant des échantillons dans différents sites d'une même région et ayant poussé à des époques différentes mais se recoupant, il est possible de recomposer une séquence sur plusieurs siècles et de créer une chronologie de référence permettant de réaliser des études paléo-climatiques. L'idéal est bien sûr d'avoir une tranche d'arbre multi-centenaire. La comparaison du profil de croissance d'un morceau de bois d'une époque indéterminée avec cette chronologie de référence permet sa datation exacte à l'année près.
Cette propriété a permis d'établir des courbes de calibration pour corriger les résultats de la datation par le carbone 14, qui supposait une concentration de carbone 14 constante dans l'atmosphère au cours des siècles alors que celle-ci a varié. Depuis quelques décennies, les datations par le carbone 14 sont calibrées et donc plus précises.
Dendrochronologie et paléoenvironnement
Des analyses microchimiques de chaque cerne permettent de déterminer les concentrations de certains polluants dans l'environnement (plomb par exemple) pour les années et décennies antérieures (tant que le bois reste en bon état et qu'il n'a pas subi de contamination secondaire).
L'analyse dendrochronologique apporte également des indices sur la pluviométrie et la température qu'il faisait au moment où l'arbre produisait un cerne. Les données sont pondérées par l'analyse de nombreux arbres pour gommer certains artefacts, par exemples liés à des attaques de certains insectes défoliateurs (qui peuvent stopper la croissance d'un arbres jusqu'à 5 ans durant par des attaques répétées). Ce principe est à la base d'une sous discipline de la dendrochronologie, la dendroclimatologie. De même en présence de certains mammifères (bisons, cervidés) qui écorcent partiellement les arbres, la croissance des cernes peut être provisoirement modifiée le temps de la cicatrisation.
La compréhension des évolutions passées - face aux changements climatiques notamment - peut éclairer le présent et le futur des forêts. Ainsi les satellites montrent un allongement de la saison de végétation dans le nord de l'hémisphère nord, mais l'étude des cernes de l'épinette blanche en Alaska et des teneurs du bois en isotopes du carbone montrent (sur 90 ans) que la croissance radiale des arbres a - dans cette région - été ralentie quand il faisait plus chaud (et trop sec ?), ce qui est contraire à ce qu'attendait nombre d'experts, et qui doit faire réviser les théories sur la capacité de la forêt boréale à stocker plus de carbone si le réchauffement se poursuit [1].
Dendrochronologie appliquée à certaines herbacées (vivaces)
Les herbacées dicotylédones peuvent vivre jusqu'à plusieurs décennies et leur racines (ou tiges quand elles sont pérennes) sont également porteuses de cernes de croissance parce que les vaisseaux de sève sont plus épais au printemps qu’en fin d'été[2]. Le botaniste bâlois Heinrich Zoller avait déjà publié dans les années 1950 une étude montrant et utilisant la présence de cernes annuels chez certaines herbacées. Il avait grâce à cela évalué l'âge de plusieurs herbacées de végétation de steppe sèche du Valais, mais ses travaux sont passés relativement inaperçu [2].
Des essais récents réalisés dans des champs en Suisse [3] ont montré qu’il s’agit bien de véritables cernes annuels, même s'ils sont plus fins que ceux des arbres et plus difficiles à observer car ne mesurant que de 0,04 à 0,5 millimètre de large. L'étude[4] par Fritz Schweingruber de sections de racines pivotantes de saxifrages faux aïzoons (Saxifraga aizoides) a permis de trouver des individus de 22 ans[2]. Un âge de 19 ans a été démontré pour une campanule à feuilles de cranson (Campanula cochleariifolia). Des pied-de-chat étaient âgés de dix ans (Antennaria dioeca) alors que certaines bruyères (Erica carnea) avaient atteint les 70 ans[2].
La dendrochronologie des herbacées pourra aider à mieux comprendre rétrospectivement la dynamique des populations de communautés végétales et l'âge de certaines plantes qu'on ignorait jusqu'ici, notamment pour des espèces menacées ou au contraire invasives. Dater l'apparition et l’expansion d’une espèce invasive dans différents types d'habitat peut permettre d'affiner des scénarii de progression future.
La largeur des cernes est également un indicateur jugé fiable des conditions locales et temporelles de bonne ou mauvaise croissance de la végétation, les plantes réagissant de manière plus marquée à la plupart des aléas que les arbres dont les racines plongent plus profondément dans le sol[2].
Voir aussi
Notes
- ↑ Valerie A. Barber, Glenn Patrick Juday and Bruce P. Finney, 2000, « Reduced growth of Alaskan white spruce in the twentieth century from temperature-induced drought stress », Nature, 405, 668-673.
- ↑ a , b , c , d et e Page de waldwissen.net relative aux cernes de croissance chez les herbacées
- ↑ Les essais en champs ont été conduits par Hansjörg Dietz et Georg von Arx de l’Institut de Géobotanique à l’EPF de Zurich
- ↑ Schweingruber F.H., Poschlod P., 2005: Growth Rings in Herbs and Shrubs: life span, age determination and stem anatomy. For. Snow Landsc. Res. 79, 3: 195-415.
Articles connexes
Bibliographie
- C. Lavier, P. Perrier, S. Vincenot et G. Lambert, « Pratique de la dendrochronologie », Histoire et Mesure, III, 3, 1988, p. 279-308.
- F. Guibal, « Remarques sur quelques difficultés propres à la dendrochronologie en France méditerranéenne », Revue d'archéométrie, Supplément Colloque d'archéométrie, Périgueux, 1995, 1996, p. 39-43.
Liens externes
- Application aux oeuvres d'art et mobilier ancien
- (en) Laboratory of Tree-Ring Research
- Glossaire multilingue de dendrochronologie
- Une application de la dendrochronologie : architecture et évolution de deux villages néolithiques dans le lac de Paladru à Charavines en Dauphiné
- Une application : datation d'une maison ancienne au Québec
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