- Crevettes Bigeard
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Crevette Bigeard
L'expression Crevettes Bigeard désignait les personnes qui auraient été exécutées illégalement, en étant précipitées par hélicoptère en mer Méditerranée, lors de la Guerre d'Algérie (1954-1962) et plus particulièrement pendant la Bataille d'Alger en 1957. Parfois, elles auraient été jetées du quai du port d'Alger.
Bien qu'ayant reconnu l'usage de torture pendant la guerre d'Algérie, le général Bigeard a toujours nié que les troupes sous son commandement s'y soient livrées [1], à la différence du général Paul Aussaresses [2].
Sommaire
Terme « crevette »
Le terme « crevette » représente l'allégorie des Algériens capturés, prisonniers des deux pieds insérés dans du béton coulé, et lâchés ainsi au fond de la Méditerranée[3].
Le terme de « crevette » était employé par les militaires français.
Histoire
Le sergent de la Légion Henryk Szarek a révélé dans un livre paru en 1988 [4], l'utilisation pendant la guerre d'Indochine de cette technique de disparition, qui sera perfectionnée pendant la guerre d'Algérie [4]. Il raconte ainsi qu'un soir de 1951, il voit une Jeep s'arrêter, malgré l'interdiction, au milieu du pont Doumer, à l'entrée d'Hanoi, et découvre le lendemain que des cadavres lestés ont été jetés dans le fleuve Rouge [4].
C'est l'ancien secrétaire général de la police algéroise, Paul Teitgen[5], qui révéla que plusieurs centaines de personnes ont été exécutées par cette méthode, sans procès, sur ordre des généraux Marcel Bigeard et Jacques Massu, alors disposant de pouvoirs étendus et d'un blanc-seing du pouvoir politique pour stopper les attentats à répétition du Front de libération nationale (FLN). Ancien résistant et déporté durant la Seconde Guerre mondiale, il avait démissionné le 12 septembre 1957 de son poste, en réponse aux actes de tortures (qu'il avait lui même subis de la part de la Gestapo) et à ces exécutions extra-judiciaires.
La dictature argentine à l'école française
La dictature argentine a repris ce procédé d'exécution dans le cadre de l'opération Condor.
Impliqué dans cette opération, le capitaine Adolfo Francisco Scilingo a été condamné en avril 2005 à 640 ans de prison par la justice espagnole pour crimes contre l'humanité[6]. Il a déclaré :
« En 1977, j'étais lieutenant de vaisseau affecté à l'ESMA. J'ai participé à deux transferts aériens de subversifs. On leur annonçait qu'ils allaient être transportés dans une prison du sud du pays et que, pour éviter les maladies contagieuses, ils devaient être vaccinés. En fait, on leur injectait un anesthésique à l'Esma puis une deuxième dose dans l'avion, d'où ils étaient jetés à la mer en plein vol. Il y avait des transferts chaque mercredi.[7] »Références
- ↑ Marcel Bigeard, un soldat propre ?, L'Humanité, 24 juin 2000
- ↑ Paul Aussaresses, Services spéciaux, Algérie 1955-1957 : Mon témoignage sur la torture, Perrin, 2001, ISBN 2262017611
- ↑ Documentaire « Histoire coloniale », partie 6 « La Bataille d'Alger », cité par Libération lors de la diffusion sur France3
- ↑ a , b et c Barett Verlag, Soldatenleben, Düsseldorf, 1988, cité par Yves Benot, Massacres coloniaux, 1944-1950 lui-même cité in Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l'école française [détail des éditions] (2004, chap. IV, p.55)
- ↑ Témoignage de Paul Teitgen dans le film d'Yves Boisset, Que reste-t-il de la bataille d'Alger. Voir [1].
- ↑ Amnesty International Belgique, Argentine - Uruguay / Impunité, Info-Bulletin n°12, mis en ligne le 31 juillet 2005
- ↑ Horacio Verbitsky (créateur du Centre d'études légales et sociales (Cels), une des organisations de défense des droits de l'homme argentines), El Vuelo (Le Vol)
Bibliographie
- Escadrons de la mort, l'école française, un film documentaire et un livre de Marie-Monique Robin, septembre 2004
Voir aussi
- Portail de l’Algérie
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