- Cinésias
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Cinésias (en grec ancien Κινησίας) est un poète dithyrambique du Ve siècle av. J.‑C., principalement connu par les critiques d'Aristophane, Lysias, Platon et Plutarque.
Cinésias naît dans une famille de joueurs de cithare athéniens : il est le fils de Mélès[1], décrit par Platon comme le pire des citharèdes, et le petit-fils de Peisias[2]. Il se tourne lui aussi vers la poésie et la musique, se consacrant particulièrement au dithyrambe, genre mêlant danse et dialogue chanté entre chœur et coryphée.
Platon l'accuse de composer pour la galerie au lieu de faire de ses auditeurs des hommes meilleurs[3]. Il est une tête de Turc d'Aristophane, qui le met en scène de manière ridicule dans Les Oiseaux : le Cinésias de théâtre clame que « tout le brillant des hymnes héroïques est dans le vaporeux, le ténébreux, les bleuités lustrées et les bercements d'ailes[4] ». Dans Les Grenouilles, Dionysos souhaite la damnation de « tout individu qui a appris le Ballet martial de Cinésias[5]. Dans son Chiron, le poète comique Phérécrate représente la Musique se plaignant amèrement du sort que lui font subir les nouveaux poètes comme Cinésias[6]. Strattis lui consacre une comédie entière, aujourd'hui perdue, où il est tourné en ridicule et Platon le Comique s'en prend également à lui dans l'une de ses œuvres, également perdue. Peut-être pour se venger, Cinésias s'emploie à faire supprimer la subvention de la comédie par le chorège (mécène des représentations théâtrales), ce qui lui vaut le sobriquet khoroktonos, le « tueur de chœurs[7] ». Cinésias se retire ensuite de la vie littéraire, devient indicateur et amasse de grandes richesses[8].
Cinésias est également renommé pour son impiété : il appartient au cercle des Kakodaimonistai, littéralement « les adorateurs du diable », nom choisi, selon l'orateur Lysias, « pour se moquer des dieux et des coutumes athéniennes[8] ». L'objectif est apparemment de railler la superstition de leurs concitoyens, puisqu'ils choisissent les jours néfastes pour leurs dîners. Le poète est accusé par ailleurs de s'être soulagé contre une statue d'Hécate[9]. Lysias précise que tous ces esprits forts meurent jeunes et que Cinésias, l'unique survivant, finit affligé d'une maladie chronique si douloureuse que seuls ses pires ennemis la pourraient lui souhaiter[10] — peut-être la tuberculose[11] — et qui semble avoir marqué les esprits, puisque Galien s'intéresse au cas clinique plusieurs siècles plus tard[12].
Notes
- Platon, Gorgias [détail des éditions] [lire en ligne], 501e.
- Scholie à Aristophane, Les Oiseaux [détail des éditions] [lire en ligne] 858, citant Phérécrate, frag. 6K.
- Platon, Gorgias, 501e-502a.
- Victor-Henry Debidour pour Gallimard, 1966. Aristophane, Les Oiseaux, 1388-1390. Extrait de la traduction de
- Les Grenouilles [détail des éditions] [lire en ligne], 152-153.
- Plutarque, De la musique, 1141e. Phérécrate, frag. 145K = pseudo-
- Lawler, p. 79.
- Athénée, Deipnosophistes [détail des éditions] [lire en ligne], XII 551e. Lysias, Pour Phanias, frag. 73 Thalheim =
- Scholie à Aristophane, Grenouilles 366, voir aussi L'Assemblée des femmes, 330.
- Aristophane y fait allusion dans Les Oiseaux, 1377.
- Lawler, p. 80.
- Galien, Sur les aphorismes d'Hippocrate, VII, 322.
Bibliographie
- (en) Lillian B. Lawler, « “Limewood” Cinesias and the Dithyrambic Dance », Transactions and Proceedings of the American Philological Association, vol. 81 (1950), p. 78-88.
- P. Maas, article « Kinesias », Realencyclopädie der Altertumswissenchaft, XI, p. 479-481.
Catégories :- Littérature grecque classique
- Poète de la Grèce antique
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