Thomas Devaux

Thomas Devaux

Thomas Devaux né en 1980 à Marcq-en-Barœul est un photographe français. Il vit et travaille à Paris. Lauréat du Concours "Bourse du Talent Mode 2011" organisé par "Photographie.com" avec la participation de Nikon, l'Express et Picto.

Biographie

Thomas Devaux quitte très tôt le Nord de la France pour habiter à Lépanges-sur-Vologne en Lorraine, pour ensuite vivre à Mulhouse, Londres ou encore Montpellier où il étudie le cinéma. Il décide enfin de rejoindre Paris, où il obtient une Licence en cinéma. S’intéressant à l’image, il expérimente parallèlement à ses études plusieurs supports tels que la photographie, le cinéma expérimental, la peinture mais aussi et surtout le collage. Pour sa pratique du collage, il utilise des livres d’art anciens dont il se sert pour assembler de grandes compositions qu’il scanne ensuite afin de les retoucher informatiquement. Il parvient alors par ce biais à troubler les frontières entre dessin et photographie.

Ses études se terminant, Thomas Devaux intègre l’équipe de « Fashion Insider », un magazine de mode Américain, grâce auquel il participe à de nombreuses fashion week dans le monde (France, Italie, Brésil, Portugal, Géorgie, Serbie, Londres, Turquie, Danmark, Chypres, Malte, Ukraine… Il publie dans nombreux de ces pays des photographies.

Cette ouverture vers le monde de la mode marquera sa pratique. Il y puise, en effet, la trame qui constitue aujourd’hui son travail photographique. Un travail qui se situe, cette fois-ci, entre la photographie et la peinture.

Il expose régulièrement dans des galeries parisiennes. Son travail est également dans de nombreuses parutions de magazines de photographies contemporaines : une des plus fameuse est celle dans le magazine Eyemazing ("EYEMAZING WINNER OF THE LUCIE AWARDS: BEST PHOTOGRAPHY MAGAZINE OF THE YEAR 2008!" & "EYEMAZING WINNER OF THE SAPPI AWARDS: BEST PRINTED MAGAZINE OF THE YEAR 2010!")

"ATTRITION

Sombre et élégant, le travail de Thomas Devaux semble exister dans la dualité qui confronte la plupart de ses personnages. C'est en effet un autre qui est ici dépeint, surpris au plus profond de son intériorité, questionnant le caractère éphémère d'une beauté déjà évanescente. Débordant de références classiques et de personnages tirés d'une mythologie réinventée, Thomas Devaux se joue des médium qu'il utilise et brouille les pistes. Partant de ses photographies du monde de la mode dont il extrait les personnages et les matières, pour les dupliquer, les décomposer pour les recomposer, il déplace les frontières de la photographie pour se rapprocher d'une pratique du collage dont le rendu se rapproche de la lithographie. Thomas Devaux aime la destruction autant que l'équilibre. Plus exactement, le concept d'un équilibre contrôlé et construit dans le but exclusif de sa propre destruction finale, sa conception dramatique de l'isolement, du dédoublement de ses personnages est même devenu son esthétique fondamentale. Ces corps qui accomplissent leur propre destruction, et qui étaient il y a peu encore "armures impénétrables du Beau et du Vrai" sont confrontés à cette vérité qui n'a rien d'idéal: "la Beauté est structurée de néant". Attendent ils la fin de ce qu'ils sont ?" (Thomas Devaux)

Thomas Devaux construit clairement son style entre sacré et profane, entre corps et fragments.


Son travail photographique est visible sur son site: http://www.thomasdevaux.com

Texte sur son travail par Didier de Faÿs:

"Beauty :The Story of a Murderer


Thomas Devaux aurait pu se retrouver photo-journaliste en Irak ou en Afghanistan, mais c'est lors des défilés de mode qu'il découvre la photo et court la planète. Dans les backstages il se nourrit de la mode. Portraits de couturiers, les snap-shots des plus célèbres mannequins sur le podium. Impressionné, il conjure sa peur en shootant les égéries de loin, gardant la distance du reporter, sans jamais chercher à leur arracher des poses standardisées. Car la maitrise de ses images n'est pas au moment de la prise de vue. Le travail de création, c'est lors du développement en chambre blanche que le photographe le réalise. Pendant de longues heures, il re-dessine corps, mains, bras et robes. La lumière, il la recrée. Il ne ressent alors plus aucune limite. Toutes ses visions portées sur des matières sombres peuvent s'exprimer. Ses personnages se dévorent, ou se retrouvent face à leur visage perdu, effacé. Mais si la manière de travailler s'apparente à celle d'un peintre, il refuse de perdre son identité. Le photographe se sent en porte-à-faux avec la qualification de peintre… Dans cet aveu, on touche un point sensible. Thomas Devaux ne cherche pas à faire de belles images.

Certains y verront des morts vivants, d'autres des anges. La mort rejoint la mode, la matière se dégrade, les visages s'effacent. Depuis ses premiers films expérimentaux où il joue des textures, puis de ses collages initiatiques, Thomas Devaux explore un univers aux confins du surréalisme. Il déchirait alors des anciens livres d'art imprimés en héliogravure noir et blanc, recomposait des images puissantes qu'il retouchait ensuite sur ordinateur pour leur donner un aspect plus contemporain et s'amuser avec la matière dupliquée indéfiniment. Le geste se poursuit aujourd'hui plus rapide lors des défilés où surtout dans le backstage, il prend de la matière, saisi des mannequins, capture les robes. Sur l'écran il retrouve un univers plus sombre encore, avec des déformations plus radicales. Chirurgien, il s'empare d'un bras, le duplique, découpe des cheveux, les assemble. Des mannequins, il construit ses images comme des collages, des sculptures irréelles où il prend des yeux de l'une, change une bouche, transforme les mains, recompose les visages. Les coutures entre les différentes photos sont approximatives. Aucun soucis de réalisme. Les formes ne sont pas parfaites. Les matières s'abiment. Frottements. Les heures s'écoulent dans cette chambre blanche. Images de plus en plus sombres. Usure. Usure de la matière, des tissus, des visages. Usure de l'humain.

Usure, le mot prend sens, se transforme. L'image malaxée a besoin du verbe qui lui même évolue. Ce mot d'usure dans sa traduction du français à l'anglais en entraine un autre : l'attrition dont les différents concepts résonnent violemment avec le travail de Thomas. Ce mot féminin du latin attritio qui signifie frottement se décline de la physique à la théologie. Il fallait s'y attendre car à trop contempler les icônes pour mieux les détruire, on peut éprouver le regret d'avoir offensé Dieu. Le sens militaire de l'attrition est illustré de celui en usage dans la médecine. Mais derrière couve une fronde face aux tyrannies du marché.


Attrition [at.ʁi.sjɔ̃] 1. (Physique) Action de deux corps durs qui s’usent par un frottement mutuel. 2. (Théologie) Regret d’avoir offensé Dieu, causé par la crainte des peines du purgatoire ou de l’enfer. 3. (Militaire) Lors d'une guerre, une stratégie d'attrition est une stratégie dans laquelle l'objectif est d'user les forces combattantes et les réserves ennemies, plutôt que la progression en terrain ennemi ou la destruction/occupation d'objectifs ennemis. 4. (Médecine) L'attrition désigne une perte de substance organique au niveau des viscères par broiement, écrasement, frottement ou usures diverses. L'attrition désigne également les écorchures causées par des frottements violents. 5. (Économie) Perte de client, probabilité d'un individu de quitter une marque.


Attrition, donc. Un mot aux portées multiples sur des images qui s'adressent elles-mêmes aux différents champs de la photographie. La méthode de prise de vues employée pour capturer les différentes matières est documentaire. Les lieux et les protagonistes sont ceux de la photographie de mode. Puis dans le long processus de développement hérité des pictorialistes se révèle le sujet très contemporain de ce travail. Sans chercher à reproduire les éternels clichés de la mode, Thomas Devaux ne réalise t-il pas un reportage en profondeur sur l'époque ? Ces portraits ne nous renvoient-elles pas aux icônes religieuses ou aux portraits de cours qui eux-mêmes étaient les images de mode d'alors? Tout est donc de la photographie. Des instantanés d'une époque. Les frontières des champs photographiques ne sont qu'illusion. Décryptage. Le temps de pose n'est plus celui de Brassai qui mesurait l'exposition de ses photos nocturnes le temps de fumer une Gauloise ou une Boyard s'il faisait plus sombre. Le temps de Thomas Devaux est celui qui nous permets d'accéder aux mondes intérieurs. C'est aussi celui d'une inspiration. Les clefs sont là devant nous. Mais comme ses modèles, fermons les yeux pour y accéder. Ces moment figés par le reporter sont des moments précieux, les instants d'un retour sur soi-même, une méditation introspective qu'il nous recommande. Il n'y a rien de négatif. Au contraire, il attire notre attention sur tout ce qui nous construit, les fluides, la chair, le sang, tout ce l'on rejette. Dans ces moments passés en apnée entre inspiration et expiration se trouvent tout l'amour et la passion d'une vie. Et pourtant dans ces moments de grâce, Thomas Devaux charcute le visage de ses mannequins. Ce n'est que de la matière organique qui va pourrir nous montre t-il. Il choisit des personnes magnifique, des mannequins superbes, des égéries. Elle représentent la beauté. Pourtant dans les back-stages, il en voit aussi la laideur. Leur maigreur le trouble lorsqu'il les voit nues se changer frénétiquement entre les différents passages sur le podium. Celles qui représentent la beauté, la vie, le luxe, lorsqu'on les regarde sans vêtements elles représentent la mort. Les belles filles sont les maquilleuses, les coiffeuses, ce sont elles qui excitent les photographes. "Les mannequins de défilés sont grandes, minces jusqu'à l'anorexie." Dans les vêtements somptueux qu'elles portent Thomas Devaux est fasciné. Ce sont des extra-terrestres. Il travaille dans son enquête sur l'orgueil de l'humain, son état de sur-puissance face à la nature. Il sanctifie ses sujets, les transforme en icônes qu'il brise d'un détail subtil, balayant d'un coup toutes les vanités.

Histoire d'un meurtrier. Lorsqu'il croise des mannequins qui l'attirent, le photographe peut ressentir l'excitation de Jean-Baptiste Grenouille face à ses vierges. C'est le jeu des attitudes de la mode qui le nourrit. Ce sont les expressions stéréotypées des professionnelles qui sont offertes aux photographes avant de repartir dans des éclats de rire avec les copines de podium. C'est le monde du faux. On y présente de somptueux univers mais tout y est faux. "C'est du marketing. Leur but est de vendre le vêtement ou un univers et cela pervertit tout. " Le point commun que partage Devaux avec Grenouille c'est que le meurtrier sait exactement pourquoi il tue. Dès sa première victime, il sait ce qu'il veut obtenir : le plus beau parfum. Il sait l'importance qu'elles ont pour son travail. Thomas Devaux fonctionne de la même manière. "Je suis assez cynique" avoue t-il. Il ne demande jamais rien au mannequin. Il essaye de prendre ce qu'il ressent chez elles. S'il ne l'obtient pas, il ne s'attarde pas. C'est en les rejetant qu'il les tue. Il ne les utilise pas comme prévu. Il les utilise à sa manière sans leur demander de pose. "Elle vous proposent tout. C'est de la vente. Ce sont des professionnelles. Vous prenez les pages que vous voulez." Lui prend ses photos à la marge de la mode, comme un voleur. Ses personnages évoquent dans la série Attrition le système malsain de la mode qui conjugue la maigreur à l'expression de la sublime beauté. "Lorsque l'on va dans les back-stages et que l'on voit les mannequins très connues, on se rend compte que ce n'est pas que la beauté qui se dégage même si c'est faux. Il y a des éclats où l'on se rend compte qu'elles ont quelque chose de profond à donner. Ce sont des monstres et en même temps ce sont des anges." Dans les matières profondes des tirages iconoclastes de Thomas Devaux, les mannequins représentent enfin l'ambivalence de l'humain. Révélation photographique.

"Elles ont quelque chose de noir mais les monstres peuvent avoir des ailes. Chacun a tout en lui." "


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Thomas Devaux de Wikipédia en français (auteurs)

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