- Idéologie et rationalité dans l'histoire des sciences de la vie
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Idéologie et rationalité dans l'histoire des sciences de la vie est un ouvrage du philosophe et épistémologue Georges Canguilhem paru en 1977 (éd. Vrin, 2000). Il traite de l'usage idéologique des théories biologiques, c'est-à-dire de l'utilisation à des fins éthiques, politiques et sociologiques des thèses et des résultats expérimentaux issus de la biologie.
Canguilhem y développe le concept d'« idéologie scientifique », dont il a proposé une définition lors de sa conférence intitulée : Qu'est-ce qu'une idéologie scientifique ? donnée en octobre 1969 à Varsovie[1].
Georges Canguilhem définit une idéologie scientifique d'abord comme une sorte de proto-science, c'est-à-dire une science qui n'est pas encore arrivée à maturité, qui prend son modèle sur une science déjà constituée, mais qui du fait qu'elle n'appréhende pas son objet dans sa spécificité a un fondement mal assuré et utilise des méthodes approximatives. L'idéologie vient alors suppléer le manque de précision et de rigueur dans la définition de cet objet, en projetant sur lui des idées et des valeurs qui lui sont étrangères, mais qui en retour légitiment les pratiques sociales et l'ordre politique et économique.
Canguilhem illustre cette définition avec l'évolutionnisme tel que le concevait Herbert Spencer :
- L'idéologie évolutionniste [de Spencer] fonctionne comme une auto-justification des intérêts d'un type de société, la société industrielle en conflit avec la société traditionnelle d'une part, avec la revendication sociale d'autre part. Idéologie anti-théologique d'une part, anti-socialiste d'autre part. Nous retrouvons ici le concept marxiste d'idéologie, comme étant la représentation de la réalité naturelle ou sociale dont la vérité ne réside pas dans ce qu'elle dit, mais dans ce qu'elle tait.
- Canguilhem, op. cit., 1977.
Selon Gérard Nissim Amzallag (La raison malmenée, De l'origine des idées reçues en biologie moderne, CNRS Éditions, Paris, 2002) et André Pichot (Éléments pour une théorie de la biologie, éd. Maloine, 1980), la biologie moderne, et notamment le darwinisme, la génétique et la biologie moléculaire, répondraient à cette définition. Le caractère idéologique de la biologie actuelle serait attesté par le fait qu'il n'existe pas à l'heure actuelle (même si ces dernières années de nombreux chercheurs commencent à percevoir l'importance du problème) de définition scientifique de la notion de vie qui fasse l'unanimité. Étrange « science », en effet, que celle qui n'a guère pris la peine de définir ce qui caractérise son objet, les êtres vivants, ni d'examiner en quoi ces corps diffèrent des objets inanimés de la physique-chimie et des machines.
Références
- Cette conférence sera par la suite publiée dans la revue Organon, n°7, Varsovie, 1970.
Catégories :- Œuvre philosophique
- Idéologie
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