Clause générale de compétence

Clause générale de compétence

La clause générale de compétence est, en France, un concept juridique traduisant la capacité d'initiative d’une collectivité territoriale dans un domaine de compétences au-delà de celles qui lui sont attribuées de plein droit, sur le fondement de son intérêt territorial en la matière.

Bien que le terme soit très répandu, aucun texte, de loi ou constitutionnel, ne comporte les termes de « compétence générale ».

Sommaire

Définition

Une collectivité territoriale, commune département ou région, peut intervenir dans un domaine de compétences dès lors que l’intérêt de son territoire peut être invoqué. Cette notion d’intérêt traduit une approche finaliste qui permet de dépasser ou d’élargir les compétences strictement attribuées par les lois en vigueur ; elle est ainsi susceptible de justifier les décisions de création d’un service public local, l’octroi de subventions ou d’aides matérielles, la réalisation de travaux, etc[1].

Cette notion n’est toutefois pas extensible à l’infini. La jurisprudence en a défini les contours. Elle ne permet en particulier pas de s’affranchir de règles de fond, telles que[1] :

  • le droit communautaire de la concurrence ou les dispositions législatives particulières en matière d’aide aux entreprises ;
  • la liberté du commerce et de l’industrie en matière de création de services publics ;
  • le principe de neutralité, qui interdit par exemple aux collectivités de s’immiscer dans un conflit collectif du travail par le soutien financier à l’une des parties.

Fondements législatifs

Communes

L’article L. 2121-29 du Code général des collectivités territoriales énonce : « Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune./ (…) Le conseil municipal émet des vœux sur tous les objets d’intérêt local  » ;

Cette clause apparaît dès la première loi de constitution du régime juridique des communes précisant l’organisation et les attributions des conseils municipaux, la loi du 5 avril 1884. L’article 61 de cette loi dispose, dans son premier alinéa : «  Le conseil municipal règle, par ses délibérations, les affaires de la commune.  » [2].

Départements

L’article L. 3211-1 du même code dispose : «  Le conseil général règle par ses délibérations les affaires du département./ Il statue sur tous les objets sur lesquels il est appelé à délibérer par les lois et règlements et, généralement, sur tous les objets d’intérêt départemental dont il est saisi (…) »  ;

Comme pour les communes, cette clause apparaît dès la loi du 10 août 1871, formant les conseils généraux et définissant leur organisation. L’article 48, 8 ème alinéa, précise : «  Le conseil général délibère : […] 5°/ sur tous les autres projets sur lesquels il est appelé à délibérer par lois et règlements, et généralement sur tous les projets d’intérêt départemental dont il est saisi, soit par une proposition du préfet, soit sur l’initiative d’un de ses membres ».

Cet article est communément interprété comme un principe de clause générale de compétence. Dans sa décision du 9 décembre 2010, le Constitutionnel précise toutefois que « ces dispositions n'ont eu ni pour objet ni pour effet de créer une « clause générale » rendant le département compétent pour traiter de toute affaire ayant un lien avec son territoire ; que, par suite, elle ne saurait avoir donné naissance à un principe fondamental reconnu par les lois de la République garantissant une telle compétence » [3],[4].

Régions

L’article L. 4221-1 prévoit : « Le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région./ Il a compétence pour promouvoir le développement économique, social, sanitaire, culturel et scientifique de la région et l'aménagement de son territoire et pour assurer la préservation de son identité, dans le respect de l’intégrité, de l’autonomie et des attributions des départements et des communes./ Il peut engager des actions complémentaires de celles de l’Etat, des autres collectivités territoriales et des établissements publics situés dans la région, dans les domaines et les conditions fixés par les lois déterminant la répartition des compétences entre l'Etat, les communes, les départements et les régions.  »

Fondements constitutionnels

Certains considèrent que cette notion est intrinsèquement liée à la notion de collectivité territoriale au sens de l’article 72 de la Constitution. C’est en effet cette notion qui différencie les collectivités des établissements publics (y compris de coopération intercommunale), gouvernés quant à eux par le principe de spécialité[1].

De même peut-on considérer la clause générale de compétence comme l’une des composantes de la libre administration des collectivités locales garantie par les articles 34 et 72 de la Constitution[1].

Fondements européens

Les articles 2 et 3 de la Charte européenne de l’autonomie locale, signée à Strasbourg le 15 octobre 1985 dans le cadre du Conseil de l’Europe et approuvée par la France après la promulgation de la loi du 10 juillet 2006, stipulent respectivement que «  le principe de l’autonomie locale doit être reconnu dans la législation interne » et que « par autonomie locale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part effective des affaires publiques  » . L’article 4, paragraphe 2 de la même Charte qui prévoit que « les collectivités locales ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n’est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité ».

Ainsi peut-on dire que la clause générale de compétence est également inscrite dans le droit européen, avec la nuance toutefois que celle-ci ne peut être exercée si elle est explicitement exclue des compétences de la collectivité ou si elle est exercée par une autre collectivité.

Suppression pour les départements et régions en 2010

Un des objectifs principaux de la loi de réforme des collectivités territoriales était, dès lors que l’option de suppression des départements n’était pas retenue, de clarifier les compétences respectives de chaque collectivité, ce qui devait se traduire par la mesure phare de suppression de la clause générale de compétence. La loi votée le 16 décembre 2010 met en œuvre cette disposition pour les départements et régions, mais introduit quelques exceptions.

En ce qui concerne le conseil général, l’article 73 de la loi précise en effet que le premier alinéa de l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales, libellé ainsi : « Le conseil général règle par ses délibérations les affaires du département »[5], est complété par « dans les domaines de compétence que la loi lui attribue ». Ceci contribue de fait une suppression de la clause générale de compétence et à un retour à un bloc de compétences bien identifiées.

Mais le deuxième alinéa qui était rédigé ainsi : « Il statue sur tous les objets sur lesquels il est appelé à délibérer par les lois et règlements et, généralement, sur tous les objets d'intérêt départemental dont il est saisi. » est remplacé par celui-ci : « Il peut en outre, par délibération spécialement motivée, se saisir de tout objet d’intérêt départemental pour lequel la loi n’a donné compétence à aucune autre personne publique. » Un exception est ainsi introduite pour les compétences spécifiques qui n'auraient pas été attribuées à une autre collectivité.

Une disposition similaire est prise en ce qui concerne les conseils régionaux de métropole et d'outre-mer avec la modification de l'article L. 4211-1 du code général des collectivités territoriales.

Le Conseil constitutionnel, saisi sur la constitutionnalité d’une telle décision précise dans sa décision du 9 décembre 2010 « que les dispositions critiquées permettent au conseil général ou au conseil régional, par délibération spécialement motivée, de se saisir respectivement de tout objet d'intérêt départemental ou régional pour lequel la loi n'a donné compétence à aucune autre personne publique ; que, par suite, doit être écarté le grief tiré de ce que les dispositions critiquées seraient contraires au principe de libre administration des collectivités territoriales ; que n'est pas non plus méconnu le deuxième alinéa de l'article 72 de la Constitution qui dispose que ces dernières « ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon » [3],[4].

Sources

Notes et références

  1. a, b, c et d Collectif sous la présidence de Edouard Balladur, « La clause générale de compétence » sur www.reformedescollectiviteslocales.fr/ Site du Comité pour la réforme des collectivités locales,, 5 mars 2009. Consulté le 28 février 2011
  2. Loi municipale du 5 avril 1884 sur www.cdg90.fr/. Consulté le 28 février 2011
  3. a et b Décision n° 2010-618 DC du 9 décembre 2010 sur www.conseil-constitutionnel.fr. Consulté le 26 février 2011
  4. a et b Communiqué de presse du Conseil constitutionnel du 9 décembre 2010 - “Communiqué de presse - 2010-618 DC sur www.conseil-constitutionnel.fr, 9 décembre 2010. Consulté le 26 février 2011
  5. article L3211-1 du code général des collectivités territoriales

Bibliographie

Annexes

Voir aussi

Liens externes


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