Charles de Menditte

Charles de Menditte

Charles Marc de Berterèche de Menditte (août 1869 - 27 janvier 1931) était un officier français, originaire du Pays basque.

Sommaire

Biographie

Charles de Menditte est entré à Saint-Cyr en 1892. Attiré par l’aventure coloniale, il choisit la Légion étrangère à sa sortie d’école.

Après une année à Sidi-bel-Abbès, il est affecté en Indochine en 1895. Avec ses légionnaires il participa aux opérations de pacification du Haut-Tonkin et lutta contre les Chinois Pavillons-noirs. Pendant deux ans, sous l’autorité du colonel Gallieni et du commandant Lyautey, il a appris son métier, fait preuve de ses qualités d’entraîneur d’hommes et connu le baptême du feu. En deux ans, il avait parcouru 2000 km à pied, à cheval ou en sampan, créé 3 postes sur la frontière entre le Tonkin et la Chine, balisé 100 km de nouvelles pistes et borné 50 km de frontière.

Très apprécié par ses supérieurs, Charles de Menditte aurait pu faire carrière dans le sillage de Lyautey. Mais il tenait à sa liberté et il relativisait son expérience indochinoise. Il avait le sentiment que l’épopée coloniale allait se terminer et surtout que c’était en Europe que les affaires sérieuses allaient se passer dans les prochaines années. Au lieu de repartir outre-mer, il demanda donc sa mutation dans l’infanterie. Il fut affecté au 8ème Bataillon de Chasseurs à Amiens en 1898, année où il se maria avec la sœur d’un de ses camarades de régiment. Il connut ensuite la vie de garnison à Verdun avec le 151ème R.I. de 1906 à 1910, et à Mont-de-Marsan avec le 34ème R.I. de 1910 à 1913. En 1914, il est affecté au 144ème R.I. à Bordeaux pour commander une compagnie. La Grande Guerre va être pour lui l’épreuve de vérité. Capitaine âgé de 45 ans, il commandait une compagnie depuis 8 ans. Qualifié de "modèle parfait de l’officier de campagne", Charles de Menditte allait aborder l’épreuve de la guerre avec lucidité et détermination. Il estimait que cette guerre serait longue et meurtrière alors que la France envisageait plutôt une guerre rapide et facile. Mais il était inquiet sur le niveau de préparation de l’armée française et sur ses capacités à affronter les mitrailleuses et les canons allemands. Le manque d’expérience de l’encadrement de l’armée, les modalités de promotion au sein de la hiérarchie basées sur les relations politiques plus que sur le professionnalisme, les scandales de l’époque, l’antimilitarisme latent… tout cela n’était pas fait pour le rassurer. Il faisait pourtant preuve de détermination car il allait participer à une guerre qu’il jugeait indispensable pour la France. Il se sentait sûr de lui et prêt pour l’action après 20 ans de service et de commandement. En août 1914, le 144ème R.I. débarqua en Lorraine avant d’être engagé dans une opération offensive improvisée sur Charleville en Belgique qui tourna au désastre. Il participa ensuite au coup d’arrêt de Guise sur l’Oise pendant la retraite précipitée des armées, avant d’être engagé dans l’offensive de la Marne destinée à repousser les armées allemandes au delà de l’Aisne. Le bilan de ces deux mois de guerre a été particulièrement lourd pour le régiment de Bordeaux : 1940 hommes soit les 2/3 du régiment ont été mis hors de combat, dont 132 hommes appartenaient à sa compagnie. Charles de Menditte a été grièvement blessé le 24 septembre 1914 à Craonne. Autant dire que ce début de la guerre a été pour lui un drame personnel sur le plan physique et une déception sur le plan professionnel. Il allait en effet y perdre sinon la vie du moins ses espoirs de carrière en se retrouvant cloué sur un lit d’hôpital pendant une année avec plus de 50 éclats d’obus qu’il allait conserver dans le corps pendant toute sa vie.

Nommé chef de bataillon en 1916, il est alors désigné pour participer à la mission française en Roumanie dirigée par le général Berthelot. Pendant 18 mois, il a été confronté à un double défi : former en quelques mois 6.000 officiers selon les méthodes françaises, pour encadrer les unités de la nouvelle armée roumaine. Une mission réussie qui lui valut d’être décoré de l’Ordre de la Couronne de Roumanie par le roi Ferdinand. Conseiller ensuite le Commandement russe pour éviter l’effondrement du front oriental au moment où la guerre était en train de basculer sur le front ouest en faveur de la France et de ses alliés. Avec un corps d’armée russe, il participa à la dernière offensive contre les Allemands sur le front des Carpates en août et septembre 1917. Pendant cette mission en Roumanie, il n’a pas ménagé sa peine pour permettre à la Roumanie de reprendre sa place sur le front aux cotés d’une Armée russe qui, minée de l’intérieur par la révolution, allait se désintégrer sous ses yeux malgré la qualité de son encadrement.

De retour en France en 1918 après une traversée de la Russie devenue soviétique, il a été affecté au 415ème R.I. Homme d’honneur et de devoir, animé par une volonté et une énergie peu commune, il avait repris un commandement malgré son handicap physique, à la tête d’une formation d’Infanterie pour participer à la victoire finale. De Mourmelon à Vrigne-Meuse, il participa à la Campagne de France. C’est à la tête du 415ème R.I. que Charles de Menditte commanda la dernière opération de la guerre 1914-1918. Cette ultime opération de franchissement de la Meuse à Dom-le-Mesnil pour conquérir une tête de pont dans la région de Vrigne-Meuse, a commencé le 9 novembre 1918 au soir et a été interrompue le 11 novembre à 11 heures du matin par le clairon de l’armistice du soldat Delalucque mettant un terme à la Grande Guerre. "… L’ordre était de passer la Meuse, coûte que coûte : le régiment a passé…. ". Cette phrase est extraite du discours qu’il a prononcé lors de l’inauguration du monument de la 163ème Division à Vrigne-Meuse en avril 1929. Elle résume la mission et la situation. Mais sur le plan national, cette ultime opération est restée confidentielle pendant 20 ans et largement méconnue pendant 90 ans. Comme si cette traversée de la Meuse et ces derniers combats qui coûtèrent la vie à une centaine de soldats - dont Augustin Trébuchon, tué le 11 novembre 1918 à 10 heures 50 - n’avait jamais eu lieu. Aujourd’hui, ce fait d’armes est aujourd’hui reconnu dans toute la France.

Mais, Charles de Menditte n’a pas eu l’honneur de participer au défilé de la Victoire sur les Champs Elysées le 14 juillet 1919. Ce jour-là, il défilait à Beyrouth à la tête d’un bataillon du 415ème R.I. Il avait été désigné pour prendre le commandement de la première formation des Troupes du Levant envoyées en Syrie pour relever les Anglais dans cette région confiée à la France. Sous l’autorité du général Gouraud, il participa aux opérations contre les troupes de l’Emir Fayçal et à la conquête de Damas qui eurent raison de sa santé. En 1920, il regagna Bordeaux où il retrouva sa famille après 6 années de guerre. Il retrouva aussi le 144ème R.I. dont il prit les fonctions de commandant en second jusqu’en 1922. Après une dernière affectation à Coblence en Allemagne, il prit sa retraite comme colonel en 1926, et se retira à Abense-de-Haut dans sa propriété du Pays basque.

En janvier 1931, ayant tenu à assister à Paris aux obsèques nationales du maréchal Joffre, l’homme qui lui avait redonné confiance dans les capacités offensives de la France, il prit froid lors des cérémonies militaires et il décéda à Paris le 27 janvier. Il avait 62 ans.

Au cours de ses affectations en Algérie, au Tonkin, en France, en Roumanie en Syrie et en Allemagne, Charles de Menditte a côtoyé des rois et une reine, et il a servi des généraux de différentes nationalités dont certains devinrent maréchaux. Pourtant le commandement n’a pas été particulièrement reconnaissant puisqu’il n’a été nommé colonel qu’en 1926 ! De caractère indépendant et fier, il n’a jamais été un courtisan faisant carrière dans le sillage d’un chef militaire ou d’un homme politique ; officier de troupe profondément croyant, il n’a jamais caché ses idées cléricales à une époque où la franc-maçonnerie avait une influence notable dans l’avancement des cadres de l’armée. Quant à sa ferveur républicaine, elle n’allait certainement pas jusqu’à en faire un militant comme l’aurait souhaité le régime en place. Charles de Menditte était un officier passionné par son métier, mais pas un carriériste. Réfléchi mais aussi intuitif, cultivé, très professionnel, il était particulièrement exigeant pour lui-même et pour les autres. C’était un officier qui se sentait responsable et même comptable de la vie de ses hommes. Profondément humain, ferme voire intransigeant, il avait des convictions profondes. Ayant le sens du devoir et de l’honneur, toujours loyal et d’une parfaite rigueur intellectuelle et morale, c’était un officier courageux qui connaissait les exigences de la guerre et qui en acceptait les risques et les contraintes. Un exemple d’officier qui fait honneur à sa famille et à son pays.

Source

  • Archives de Charles de Menditte conservées par sa famille

Voir aussi

Bibliographie

  • La vie militaire dans le Haut-Tonkin, édité par Le Service Historique de l'Armée de terre, 2003
  • Alain Fauveau, Le vagabond de la Grande Guerre, souvenirs de la Guerre 1914-1918 de Charles de Berterèche de Menditte, officier d'infanterie, 2008, Geste éditions

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Charles de Menditte de Wikipédia en français (auteurs)

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