Adlène Hicheur

Adlène Hicheur
Adlène Hicheur
Naissance 1976
Domicile Genève, Suisse
Nationalité Français


Adlène Hicheur (né en 1976) est un physicien des particules français qui a suivi le Master de physique théorique de l’École Normale supérieure de Lyon avant de rejoindre le LAPP (Laboratoire d'Annecy-le-Vieux de physique des particules) pour y préparer une thèse sur l'expérience BaBar située au Centre de l'accélérateur linéaire de Stanford. Cette thèse, soutenue en 2003, traitait de la production de mésons Eta prime de haute énergie dans les désintégrations de mésons B. Après cela, il fut post-doctorant en Angleterre au Laboratoire Rutherford Appleton (en), où il a travaillé sur le détecteur ATLAS au LHC (Large Hadron Collider). Il rejoint ensuite le département de physique des hautes énergies de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et travaillait lors de son arrestation sur l'expérience LHCb du CERN, tout en enseignant aux étudiants de la classe de physique.

Sommaire

Arrestation en octobre 2009

Le 8 octobre 2009, selon L'Humanité, un groupe de policiers débarque au petit matin "avec fracas" dans un appartement de Vienne (Isère), menotte puis embarque "sans ménagement"[1] Adlène Hicheur, de passage chez ses parents. Trois jours plus tard, l’homme est mis en examen pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste », puis placé en détention provisoire à la prison de Fresnes[2],[3],[4],[5] [6]. Il aurait été en contact, via Internet, avec l’organisation terroriste Al-Qaida au Maghreb islamique. Deux semaines après son arrestation les médias algériens[7] ont rapproché son cas de celui de Lotfi Raissi, qui fut soupçonné de terrorisme avant d'être libéré sans être inculpé.

Le Directeur général de la Police nationale, Frédéric Péchenard, a déclaré en novembre 2009 que Hicheur projetait un attentat contre le 27e bataillon de chasseurs alpins d'Annecy (Haute-Savoie), d'où sont parties des compagnies pour l'Afghanistan [8]. Des accusations réitérées par la suite par Bernard Squarcini, le patron de la DCRI, qui se félicitait en septembre 2010 que ses services aient déjoué l'attentat prévu par Adlène Hicheur, « cet ingénieur du Cern qui avait proposé ses services via Internet à Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) » [9].

Selon Adlene Hicheur lui-même, s’il échangeait avec des internautes sur divers forums internet, il n a jamais manifesté le souhait ou le désir de commettre des actes violents, de financer ou de monter un réseau terroriste et n a jamais été en contact avec des gens d AQMI. Des affirmations confirmées par ses avocats qui soulignent le caractère purement « virtuel » du dossier ou il n y a que des conversations entre internautes mais aucun élément matériel, Adlène Hicheur ayant toujours refusé de donner suite aux sollicitations de ses interlocuteurs. Pourtant, au 26 juillet 2011, Adlène Hicheur demeurait en détention provisoire à Fresnes depuis plus de 21 mois, une durée proche du maximum autorisé par la loi (24 mois) dans ce genre d'affaires.

Le délit d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste

Il désigne comme acte de terrorisme « le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d’un des actes de terrorisme mentionnés dans les articles précédents ». L’association de malfaiteurs relève de la compétence du Tribunal correctionnel et non de celle la Cour d’assises, et la peine maximale encourue est de 10 ans d’emprisonnement. En France, la détention provisoire peut dans une telle affaire durer jusqu’à 24 mois, contre 12 mois dans les affaires « ordinaires ». La garde à vue lors de l’arrestation peut elle durer 4 jours, contre un seul jour dans les affaires « ordinaires ».

La longueur de la détention provisoire ainsi que l’arbitraire des critères utilisés pour décider de l’arrestation de suspects et de l’ouverture d’une instruction ont été dénoncés à plusieurs reprises par des organisations internationales telles que Human Rights Watch[10], la FIDH[11] et le comité des droits de l'homme de l'ONU [12]. Ces organisations ont également critiqué les liens étroits entre les juges d’instruction spécialisés et les services de renseignement dans les affaires de terrorisme, qui mettent sérieusement à mal le droit des accusés à un procès équitable.

D'après un rapport de la FIDH datant de 1999[11], l’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste permet d’étendre presque à l’infini, sinon arbitrairement, le champ d’application des procédures et le nombre des personnes visées sans aucune présomption de commission d’« actes terroristes » au sens exact du terme[11]. Dans leurs conclusion (page 33, paragraphe 2), les auteurs de ce rapport préconisent donc la suppression de ce délit, en soulignant "qu'il s’agit d’une incrimination « fourre-tout » dont il est démontré qu’en pratique, son usage repose sur un minimum de preuves objectives et indépendantes - en particulier de la perpétration effective d’actes terroristes vérifiables - et sur un maximum de spéculations, de déductions et d’insinuations, dont une bonne part est fournie par des sources dont l’intégrité et l’impartialité sont pour le moins sujettes à caution"[11]. Au contraire, selon les fonctionnaires du ministère de la justice, "La France est dotée d'une législation antiterroriste certes spécifique, mais dont la mise en œuvre respecte le nécessaire équilibre entre, d'une part, les garanties procédurales d'un État de Droit, et, d'autre part, les impératifs de protection de ses concitoyens et d'efficacité de la lutte contre le terrorisme"[13]. On consultera également utilement sur le site du sénat la question écrite de M.J.L.Masson, sénateur N.I. de la Moselle, ainsi que la réponse du ministère de la justice[14].

Comité de soutien international

Un comité international de soutien[15] [6] a été organisé par les amis et collègues de M. Hicheur pour demander une enquête équitable. Dans ses lettres au président de la république et au ministre de la justice[16],[17], signées par plus de cent physiciens du monde entier, le comité de soutien a souligné que de simples présomptions de contacts sur internet ne sauraient en aucun cas justifier près de 21 mois de détention provisoire. Il demande en conséquence la libération, au besoin assortie d’un contrôle judiciaire, de M. Adlène Hicheur jusqu’à ce que l’instruction présente ses conclusions et souligne que si des faits concrets et avérés devaient le mettre en cause, M. Adlène Hicheur, comme tout citoyen, doit avoir droit à un procès contradictoire dans des délais raisonnables, tandis qu’en l’absence de charges convaincantes M. Hicheur doit être complètement innocenté et dédommagé du préjudice grave causé par une incarcération injustifiée, selon le comité.

Des demandes similaires ont été envoyées par le comité des droits de l’homme de la société française de physique (Prof. G.Panczer), le CODHOS de l’académie des sciences (Présidé par le prix Nobel Claude Cohen Tanoudji) et la sénatrice de Paris Madame Nicole Borvo, seule personnalité politique à avoir accepté de s’engager. Les réponses reçues, assez similaires dans leur forme, soulignent que les droits de la défense sont respectés par la justice et la loi et insistent sur l’impossibilité d’intervenir dans une affaire en cours d’instruction.

  • Réponse du Ministre de la justice au comité de soutien[13].
  • Réponse du Garde des sceaux à la Société Française de Physique (SFP) [18] en date du 30 mai 2011.
  • Réponse du Garde des sceaux à la sénatrice N.Borvo [19] en date du 30 juin 2011.

État des procédures judiciaires

Le 7 juin 2011 le JLD (Juge des libertés et de la détention) a renouvelé le mandat de dépôt pour 4 mois, ce qui portera vraisemblablement la durée de la détention provisoire à deux ans, le maximum autorisé par la loi avant la clôture de l'instruction. Suite à l'appel de cette décision, la chambre de l’instruction a à son tour confirmé le maintien en détention début juillet, malgré le mémoire des avocats qui soulignait le « caractère injustifié » de la détention provisoire, Adlène Hicheur présentant, selon eux, toutes les garanties de présentation devant la justice.

Adlène Hicheur et ses avocats ont fait plus de 20 demandes de liberté depuis le début de l’affaire[réf. nécessaire]. Toutes ont été systématiquement refusées[réf. nécessaire]. Ayant épuisé tous les recours légaux, AH a déposé un dossier auprès de la CEDH (Cour Européenne des droits de l'homme). Son recours porte sur les conditions de la garde a vue ainsi que sur la détention provisoire arbitrairement longue et injustifiée[20]. Dans les arrêts de la cour, elle n’est pas motivée par des arguments précis mais seulement par des généralités, et par l’intitulé du délit (Association de malfaiteur en relation avec une affaire terroriste) et non par son contenu.

  • arrêté de la cour de cassation daté du mardi 9 novembre 2010[21].

État de santé

Suite à une double hernie discale, AH avait été en congé maladie de février à juillet 2009, avant de reprendre son travail de collaborateur scientifique à l'EPFL à mi-temps [22]. Il est depuis sous traitement antalgique au long cours. Dans son arrêté du 15 mars 2011, la cour de cassation a cependant jugé son état médical compatible avec la détention[23]. Il a été souligné par les avocats devant la chambre de l'instruction que cette maladie chronique a un retentissement psychologique accentué par la détention. Suite à son transport à Paris et à la garde à vue, les conséquences de cette maladie avaient d'ailleurs nécessité l’hospitalisation d’AH à l’infirmerie de la MA de Fresnes durant les 4 premiers mois de son incarcération[24].

Perspectives

Selon les avocats il est vraisemblable que, malgré l'absence d'éléments, on s’achemine vers un procès en correctionnelle, car compte tenu de la longueur de la détention il est très improbable que la justice renonce aux poursuites. Le délai pour fixer la date d’un procès serait alors de huit mois et la remise en liberté en attendant le procès n'est pas acquise. En cas de procès, Adlène Hicheur serait jugé par une chambre de trois magistrats professionnels et pourrait être condamné à une peine de quelques années de prison si les éléments retenus contre lui le justifient aux yeux de la cour.


Notes et références

  1. http://www.humanite.fr/22_11_2010-%C2%ABcollisionneur%C2%BB-de-soup%C3%A7ons-458302 «Collisionneur» de soupçons], L'Humanité, 22 novembre 2010
  2. Physicist working at CERN arrested, Nature news,9 octobre 2009
  3. Particle physicist 'falsely accused', claims brother, Nature news,13 octobre 2009
  4. Un physicien mis en examen pour ses liens avec Al-Qaida au Maghreb islamique, Le Monde, 14 octobre 2009
  5. Le "brillant" chercheur était "ciblé" par les services français, France Soir, 29 juillet 2009
  6. a et b Un comité de soutien pour Adlene Hicheur, soupçonné de terrorisme, Le Dauphiné Libéré, 17 décembre 2010
  7. Adlène Hicheur: Une seconde affaire Raïssi ?, Le jour d'Algérie, 17 octobre 2009
  8. L'ingénieur du CERN soupçonné de terrorisme ciblait les chasseurs alpins, lemonde.fr, 17 novembre 2009
  9. Squarcini : « Nous déjouons deux attentats par an », lefigaro.fr, 29 juin 2010
  10. La justice court-circuitée Les lois et procédures antiterroristes en France, © 2008 Human Rights Watch
  11. a, b, c et d France: la porte ouverte à l'arbitraire, rapport de la FIDH © 1999 FIDH
  12. Voir les observations finales (2008) du comité des droits de l'homme de l'ONU en ce qui concerne la France et en particulier les points 14 et 15 en page 4
  13. a et b >Réponse du Garde des sceaux au comité de soutien en date du 8 février 2011
  14. Délimitation précise du délit d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste Question écrite n° 13584 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI) publiée dans le JO Sénat du 26/08/2004 - page 1893
  15. Comité international de soutien à Adlène Hicheur
  16. Première lettre du comité de soutien au Président de la République
  17. Seconde lettre du comité de soutien au Président de la République
  18. Réponse du Garde des sceaux à la Société Française de Physique (SFP)
  19. Réponse du Garde des sceaux à la sénatrice N.Borvo
  20. Case H. v. France (21489/11) : Detained for 18 months pending secret investigation, European Court of Human Rights News, 2 mars 2011
  21. arrêté de la cour de cassation daté du mardi 9 novembre 2010
  22. La vie très discrète du docteurH., physicien présumé terroriste 24 heures, vendredi 16 octobre 2009
  23. arrêté de la cour de cassation daté du 15 mars 2011
  24. Accusé de «surfs gênants», AdlèneH. croupit toujours à Fresnes 24 heures, 6 avril 2010

Liens externes


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Adlène Hicheur de Wikipédia en français (auteurs)

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