- Élections présidentielles sous la Deuxième République
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Élection présidentielle française de 1848
L'année 1848 est riche en événements. En effet, de juillet 1847 à février 1848 à lieu la campagne des Banquets (libéraux), l'interdiction de l'un de ces banquets par le pouvoir pour empêcher les idées politiques de s'exprimer entraîne la prise des armes par le peuple parisien en février 1848.
Cette insurrection populaire a pour conséquence la proclamation de la Seconde République le 24 février 1848. Avec cette proclamation, on adopte le suffrage universel (masculin).
En juin 1848, une nouvelle insurrection à lieu. Les ouvriers réclament « du pain ou du plomb ». Selon les contemporains de cette insurrection, c'est la première qui divise la société en deux classes ennemies. Cette insurrection est très fortement reprimée par le général Cavaignac, alors ministre de la guerre.
Le 23 et 24 avril 1848 a lieu l'élection de l'assemblée constituante. Une fois en place, l'Assemblée choisit le 10 et 11 décembre 1848 pour l'élection du président de la République, première élection au suffrage universel masculin, aussitôt la campagne présidentielle se met en place. Cette élection doit mettre fin au provisoire.
Sommaire
La campagne présidentielle
Après le vote de la constitution, le 12 novembre place de la Concorde, l'Assemblée choisit pour les élections la date la plus proche, voulant la mise en place rapide d'un pouvoir fort.
L'élection aura lieu le 10 et 11 décembre, il ne reste qu'à peine un mois pour les candidatures officielles. Mais en réalité, la campagne officieuse a commencé depuis la mi-octobre, depuis que la décision d'élire le président de la République au suffrage universel a été prise. Apparaît alors le nom des candidats.
Le général Louis-Eugène Cavaignac
Officier aux convictions républicaines, il fut envoyé en Algérie en 1832 et en fut nommé gouverneur général en 1848. Il est rappelé a Paris et devient ministre de la guerre, il reprime l'insurrection de juin 1848 très sévèrement. Le 28 juin 1848, il devient chef du conseil.
Il est soutenu pendant sa campagne par le National et par de grands journaux libéraux tels que Le Siècle et le Journal des débats. Il apparaît comme le champion des républicains modérés. Il a le soutien de l'administration, ainsi que celui des représentants du peuple. En revanche, il est haï des ouvriers, qui le surnomment « le prince de sang », en référence à sa répression pendant les journées de juin 1848.
Alexandre Ledru-Rollin
Avocat, il combat le régime de la monarchie de juillet et prend la défense des journalistes. Élu député en 1841, il siège à l'extrême gauche avec les radicaux. Lors de la campagne des Banquets, il est partisan d'une République démocratique et sociale. Il est exclu du pouvoir après les journées de juin 1848. Il se présente comme le candidat des républicains avancés, partisans des réformes sociales.
François-Vincent Raspail
Biologiste, chimiste et homme politique français, il participe à la révolution de 1830 et fonde le journal Le Réformateur. En 1848, il est l'un des premiers à proclamer la République. Il se présente comme candidat socialiste.
Le général Nicolas Changarnier
Il se distingue au cours de la conquète de l'Algérie après avoir été dans la garde de Louis XVIII, il est gouverneur d'Algérie après Cavaignac. Il se présente comme le candidat des légitimistes.
Alphonse de Lamartine
Poète français, membre du gouvernement provisoire et ministre des affaires étrangères en février 1848. Il perd son prestige lors des journées de juin 1848. Pensant avoir retrouvé son prestige, il se présente en tant que candidat républicain.
Louis-Napoléon Bonaparte
Il est le troisième fils de Louis Bonaparte, frère de Napoléon Ier. À son retour en France, en février 1848, il est élu à l'assemblée constituante. Il est largement influencé par les œuvres de Saint-Simon, le souvenir de la légende napoléonienne et la crainte de la bourgeoisie après les journées de juin 1848. Membre de l'Assemblée, il n'y fait que des interventions insignifiantes. Il se réclame républicain progressiste dans son manifeste du 30 novembre 1848. C'est en tant que défenseur de l'ordre, de la famille, de la religion et de la propriété que Louis-Napoléon se présente aux Français. Il reçoit le soutien du comité de la rue de Poitiers mais également celui d'Adolphe Thiers, d'Odilon Barrot et de Louis-Mathieu Molé.
Résultats nationaux
Candidat % Louis-Napoléon Bonaparte (Bonapartiste) 74,44% Eugène Cavaignac (Républicain Centriste) 19,65% Alexandre Ledru-Rollin (Social-Démocrate) 5,08% François-Vincent Raspail (Socialiste) 0,49% Alphonse de Lamartine 0,28% Nicolas Changarnier (Légitimiste) 0,07% La participation quoique élevée (75% des électeurs inscrits) est en recul par rapport aux élections à l' Assemblée nationale en avril 1848 (84% des inscrits).
- Louis Napoléon Bonaparte obtient 5 587 759 voix soit 74% des suffrages et 56% des inscrits
- Louis Eugène Cavaignac obtient 1 474 687 voix soit 19% des suffrages
- Alexandre Ledru-Rollin obtient 381 026 voix soit 5% des suffrages
- François-Vincent Raspail obtient 37 121 voix soit 0,5% des suffrages
- Alphonse de Lamartine obtient 21.032 voix soit 0,3% des suffrages
Louis Napoléon Bonaparte obtient plus de 90% des suffrages dans 6 départements (dont la Creuse et l'Oise) et plus de 80% dans 34 départements sur 83 et à Paris il obtient 58%. Le général Cavaignac n'est majoritaire que dans 4 départements (Finistère, Morbihan, Bouches du Rhône et Var).
Résultats départementaux
Ardèche
En Ardèche, Louis-Napoléon Bonaparte arriva largement en tête bien que son score départemental soit bien inférieur à la moyenne nationale. La particularité locale réside surtout dans les bons résultats obtenus à la fois par Eugène Cavaignac et Alexandre Ledru-Rollin.
Nombre % Inscrits 100 441 Votants 60 115 59,85%[1] Exprimés 59 805 99,48%[2] Blancs et nuls 310 00,52%[3] Abstention 40 326 40,15% Candidat Suffrages % Louis-Napoléon Bonaparte (Bonapartiste) 39 719 66,41% Eugène Cavaignac (Républicain Conservateur) 16 284 27,23% Alexandre Ledru-Rollin (Républicain de gauche) 3 703 06,19% Alphonse de Lamartine (Libéral) 50 00,08% Nicolas Changarnier (Légitimiste) 11 00,02% François-Vincent Raspail (Socialiste) 4 00,01% Divers[4] 34 00,06% Résultats par cantons
Canton de Saint-Martin-de-Valamas
Candidat Suffrages % Louis-Napoléon Bonaparte (Bonapartiste) 886 82,19% Eugène Cavaignac (Républicain Conservateur) 188 17,44% Alexandre Ledru-Rollin (Républicain de gauche) 1 00,09% Alphonse de Lamartine (Libéral) 2 00,19% Nicolas Changarnier (Légitimiste) 0 00,00% François-Vincent Raspail (Socialiste) 0 00,00% Divers 1 00,09% Interprétations des résultats
Tous les contemporains de cette élection s'accordent à dire que ce n'est pas la victoire d'un candidat mais plutôt d'un nom, celui de Napoléon. En effet, beaucoup d'électeurs ont votés pour l'héritier de la légende impériale, pour le sauveur providentiel capable de résoudre les problèmes de l'époque.
Pour Karl Marx (philosophe et économiste allemand, fondateur du communisme), cette victoire est « le coup d'État des paysans et une réaction de la campagne contre la ville »[réf. nécessaire].
Pour Alexis de Tocqueville (historien et homme politique français auteur de De la démocratie en Amérique, référence du libéralisme économique et politique), qui est consterné par cette victoire : « Louis-Napoléon me paraissait la pire fin de la République et je ne voulais pas y tremper »[réf. nécessaire].
François Guizot (homme politique et historien, membre du parti de la résistance) exprime très bien dans ses Mémoires l'alchimie du vote : « l'expérience a révélé la force du parti bonapartiste, ou pour dire plus vrai du nom de Napoléon. C'est beaucoup d'être à la fois une gloire nationale, une garantie révolutionnaire et un principe d'autorité. Il y a de quoi survivre à de grandes fautes et à de grands revers ».
Enfin, Louis-Auguste Blanqui (théoricien socialiste et homme politique français) y voit comme une confirmation de son diagnostic « après une révolution, il faut une dictature populaire »[réf. nécessaire].
Le 2 décembre 1851, ne pouvant se représenter à l’élection présidentielle, Louis-Napoléon Bonaparte fait un coup d'État et instaure un an plus tard le Second Empire.
Voir aussi
Bibliographie
- Inès Murat, La Deuxième République, Fayard
- Jean Garrigues, La France de 1848 à 1870, Paris, Armand Colin, 2000
- Histoire de la France Contemporaine 1789-1980, tome III, éditions sociales, 1979
- Louis Girard, La Deuxième République 1848-1851, Calmann-Lévy, collection Naissance et Mort
- Antoine Olivesi et André Nouschi, La France de 1848 à 1914, Armand Colin
Articles connexes
- Constitution française de 1848
- Révolution française de 1848
- Journées de Juin
- Deuxième République (France)
- Second Empire
Notes et références
- ↑ Le pourcentage des votants est calculé par rapport au nombre des inscrits.
- ↑ Le pourcentage des exprimés est calculé par rapport au nombre des votants.
- ↑ Le pourcentage des votes blancs et nuls est calculé par rapport aux suffrages exprimés.
- ↑ Lors du scrutin du 10 décembre 1848, les électeurs pouvaient voter, soit en se munissant de bulletins imprimés au nom des candidats et disponibles dans le bureau de vote, soit en se munissant d'un bulletin vierge sur lequel ils pouvaient inscrire le nom du candidat à qui ils souhaitaient accorder leur suffrage. Figurent dans la catégorie "Divers" les voix revenant à des individus ne s'étant pas portés candidats mais dont le nom fut retrouvé sur des bulletins de vote rédigés par des électeurs et placés dans l'urne. Dans le cas du département de l'Ardèche, on trouva ainsi quelques bulletins portant le nom de Napoléon Ier, de Bugeaud, d'Odilon Barrot, de François Arago ou encore d'Armand Barbès.
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