Théorie du premier gradient

Théorie du premier gradient

La théorie du premier gradient est une théorie permettant de modéliser la puissance des efforts intérieurs dans un milieu continu en supposant qu'elle s'exprime à l'aide d'une densité de puissance qui est une forme linéaire du premier gradient du champ de déplacement du solide. Cette théorie est très répandue et permet de modéliser de façon très satisfaisante une grande part des phénomènes étudiés en mécanique des milieux continus. Elle connait cependant quelques limites que des théories comme celle du second gradient cherchent à pallier.

Sommaire

Contexte d'utilisation

La théorie du premier gradient s'utilise en mécanique des milieux continus dans le but de modéliser les efforts intérieurs d'un milieu. On la présente généralement comme inscrite dans la démarche de modélisation que constitue le principe des puissances virtuelles.

Les fondements de cette théorie sont donc le principe des puissances virtuelles et l'hypothèse que la puissance des efforts intérieurs peut s'exprimer comme l'intégrale d'une densité massique ou volumique de puissance dans le domaine, densité qui peut s'exprimer comme une forme linéaire du gradient de champ de déplacement.

Démarches d'obtention

La théorie du premier gradient peut être obtenue de différentes manières. L'approche mathématique consiste en l'application du principe des puissances virtuelles avec une hypothèse sur la modélisation de la puissance des efforts intérieurs. Cette approche est assez générale, et permet d'exhiber des opérateurs, tels que le tenseur des contraintes de Cauchy, permettant de représenter les efforts intérieurs.

On peut aussi obtenir cette théorie, en partant d'une approche plus physique, qui est la modélisation du milieu à l'échelle microscopique, qui permet de reconnaître dans l'expression de la densité de puissance un gradient discrétisé. En repassant à l'échelle mesoscopique, on obtient donc un gradient.

Démarche mathématique

Problème de référence

Problème mécanique type.

On considère ici un milieu continu occupant à chaque instant t le domaine Ωt de frontière \partial\Omega_t. Sur une partie de la frontière \partial_1\Omega_t, on a une condition de Dirichlet, c'est-à-dire de déplacement imposé. Sur une partie \partial_2\Omega_t on a une condition de type Neumann, c'est-à-dire d'effort surfacique imposé \underline{T}. Le milieu est soumis à la densité d'effort volumique \underline{f}.

Les champs virtuels considérés sont les champs \underline{v}^\star suffisamment réguliers, c'est-à-dire à énergie finie.

Hypothèse fondamentale

Pour appliquer le principe des puissances virtuelles, on a besoin de se donner une description pour \mathcal{P}_i^\star, la puissance des efforts intérieurs du système Ωt considéré dans le champ de vitesse virtuel v^\star. Dans la théorie du premier gradient on fait l'hypothèse suivante concernant la puissance des efforts intérieurs :

  1. Il existe une densité {p}_i^\star de puissance des efforts intérieurs, telle que la puissance intérieure de tout sous-système ωt \mathcal{P}_i^\star soit l'intégrale de {p}_i^\star sur domaine ωt.
  2. La densité p_i^\star est une fonction linéaire de v^\star et de ses dérivées spatiales d'ordre 1.

Conséquences

Ces hypothèses ont pour conséquences d'une part que la puissance des efforts intérieur dans un milieu continu peut s'écrire à l'aide d'un opérateur tensoriel d'ordre 2 symétrique, noté \underline{\underline{\sigma}} et appelé tenseur des contraintes de Cauchy, et d'autre part les équations locales usuelles d'équilibre des milieux continus à savoir :


\left\{\begin{align}
      \underline{div}~\underline{\underline{\sigma}}+\underline{f}-\rho\underline{\gamma}=0 & \mbox{ dans } \Omega_t\\
      \underline{\underline{\sigma}}\cdot\underline{n}=\underline{T}& \mbox{ sur } \partial\Omega_t       
\end{align}\right.

Démonstration

On peut montrer que la partie liée aux dérivées d'ordre 0 de v^\star est nulle (voir gradient d'ordre 0 ici). On recherche donc p_i^\star sous la forme :

p_i^\star=-\underline{\underline{t}}:\underline{\underline{\nabla}}~\underline{v}^\star

\underline{\underline{t}} est un tenseur d'ordre 2, et \underline{\underline{\nabla}} est l'opérateur gradient tensoriel et : désigne le produit doublement contracté.

On décide de décomposer \underline{\underline{t}} et \underline{\underline{\nabla}}~\underline{v}^\star en partie symétrique et antisymétrique comme suit :

\underline{\underline{t}}=\underline{\underline{\sigma}}+\underline{\underline{\alpha}}

\underline{\underline{\nabla}}~\underline{v}^\star=\underline{\underline{D}}+\underline{\underline{\Omega}}

On rappelle que le produit doublement contracté d'un tenseur symétrique avec un tenseur antisymétrique est nul.

On peut alors écrire p_i^\star=-\underline{\underline{\sigma}}:\underline{\underline{D}} - \underline{\underline{\alpha}}:\underline{\underline{\Omega}}

Soit \underline{v}^\star=\underline{v_0}^\star + \underline{\Omega_0}^\star\wedge\underline{x} un champ de vitesse rigidifiant (avec \underline{v_0}^\star et \underline{\Omega_0}^\star uniformes), on a alors : \underline{\underline{D}}=\underline{\underline{0}} et \underline{\underline{\Omega}}=\left(\begin{matrix} 0& -{\Omega_0}_3& -{\Omega_0}_2\\{\Omega_0}_3& 0& -{\Omega_0}_1\\
{\Omega_0}_2& {\Omega_0}_1& 0\end{matrix}\right)

En utilisant la nullité de la puissance virtuelle des efforts intérieure pour un mouvement rigidifiant, on obtient la relation suivante :

-\underline{\underline{\Omega}}:\int_{\omega_t} \underline{\underline{\alpha}}d\omega_t=0,\forall \Omega_0^\star,\forall\omega_t\in\Omega_t

On a donc nécessairement \underline{\underline{\alpha}}=\underline{\underline{0}}

On vient donc de montrer que suivant les hypothèses du premier gradient, la puissance des efforts intérieurs peut s'écrire :

-\int_{\Omega_t}\underline{\underline{\sigma}}:\underline{\underline{D}}=-\int_{\Omega_t}\underline{\underline{\sigma}}:\underline{\underline{\nabla}}~\underline{v}^\star

Arrivé à ce stade, on peut écrire l'autre volet du PPV :

\mathcal{P}_i^\star+\mathcal{P}_e^\star=\mathcal{P}_a^\star

En utilisant les expressions naturelles pour les puissances des efforts extérieurs et la puissance d'accélération, et en appliquant le théorème de la divergence sur l'expression de la puissance des efforts intérieurs, on obtient :


\int_{\omega_t} (\underline{div}~\underline{\underline{\sigma}}+\underline{f}-\rho\underline{\gamma})\cdot\underline{v}^\star d\omega_t + \int_{\partial\omega_t}(\underline{T}-\underline{\underline{\sigma}}\cdot\underline{n})\cdot\underline{v}^\star dS = 0, \forall \underline{v}^\star,\forall \omega_t

Ce qui n'est autre que la formulation faible du système d'équation suivant : 
\left\{\begin{align}
      \underline{div}~\underline{\underline{\sigma}}+\underline{f}-\rho\underline{\gamma}=0 & \mbox{ dans } \Omega_t\\
      \underline{\underline{\sigma}}\cdot\underline{n}=\underline{T}& \mbox{ sur } \partial\Omega_t       
\end{align}\right.

Démarche physique

Participation à la puissance des efforts intérieurs d'une liaison

Pour cette approche, nous allons modéliser la contribution dP_i^\star d'une liaison entre deux molécules à la puissance des efforts intérieurs. On considère une liaison entre deux molécules, i et j, centrée au point \underline{x}. On note \underline{F_{ij}} l'effort de i sur j, et \underline{v_i}^\star la vitesse virtuelle de la particule i. On pose \underline{R_{ij}}=\underline{x_j}-\underline{x_i}

Le principe des actions réciproques permet d'écrire que \underline{F_{ij}}=-\underline{F_{ji}}

La puissance élémentaire est donnée par :


\begin{matrix}
dP_i^\star= \underline{F_{ij}}\cdot\underline{v_j}^\star + \underline{F_{ji}}\cdot\underline{v_i}^\star\\
= \underline{F_{ij}}\cdot(\underline{v_j}^\star - \underline{v_i}^\star)
\end{matrix}

Or, comme on a choisi ici une échelle microscopique, il est raisonnable de relier les vitesses \underline{v_k}^\star à la vitesse \underline{v}^\star(\underline{x}) à l'aide d'un développement limité :

 \underline{v_j}^\star=\underline{v}^\star(\underline{x}) + \frac{1}{2}\underline{\underline{\nabla}}~\underline{v}^\star{\underline{R_{ij}}}+o(\|\underline{R_{ij}}\|)

 \underline{v_i}^\star=\underline{v}^\star(\underline{x}) - \frac{1}{2}\underline{\underline{\nabla}}~\underline{v}^\star{\underline{R_{ij}}}+o(\|\underline{R_{ij}}\|)

Ceci nous permet d'écrire que :


\begin{matrix}
dP_i^\star=\underline{F_{ij}}\cdot(\underline{\underline{\nabla}}~\underline{v}^\star\underline{R_{ij}})\\
=\underline{F_{ij}}\otimes\underline{R_{ij}} : \underline{\underline{\nabla}}~\underline{v}^\star\\
=-\underline{\underline{t}}: \underline{\underline{\nabla}}~\underline{v}^\star
\end{matrix}

Cette expression permet d'écrire la participation à la puissance des efforts intérieurs d'une liaison, hors en un point il peut y avoir plusieurs couples reliés. De plus on n'a aucune information a priori sur  \underline{F_{ij}} ce qui ne permet pas d'obtenir beaucoup d'information sur l'opérateur \underline{\underline{t}}.

Arrivé à ce stade, on retombe sur les raisonnements développés dans l'approche mathématique. L'approche physique ne sert qu'à donner une jusitification à l'existence de la densité de puissance des efforts intérieurs.


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Théorie du premier gradient de Wikipédia en français (auteurs)

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