Siège de Saint-Jean-d'Acre (1291)

Siège de Saint-Jean-d'Acre (1291)
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Siège de Saint-Jean-d'Acre
SiegeOfAcre1291.jpg
Guillaume de Clermont pendant le Siège d'Acre
(peinture de Dominique Papety (1815-1849), salles des Croisades du Château de Versailles)
Informations générales
Date du 5 avril au 28 mai 1291
Lieu Saint-Jean-d'Acre
Issue Victoire musulmane
Belligérants
Royaume de Jérusalem Mamelouks
Commandants
Guillaume de Beaujeu
Jean de Villiers
Al-Ashraf Khalil
Forces en présence
700 chevaliers
1 300 sergents
14 000 fantassins
60 000 cavaliers
160 000 fantassins
Croisades

Le siège de Saint-Jean-d'Acre est une opération militaire livrée en 1291 qui se solda par la prise de la ville et la fin de la présence franque en Terre Sainte.

Sommaire

Une paix précaire

Profitant des discordes entre les différentes factions de la ville de Tripoli, le sultan mamelouk Qala'ûn avait pris la ville de Tripoli le 28 avril 1289.

Henri II, roi de Chypre et de Jérusalem réussit cependant à négocier en mars 1289 une trêve de dix ans avec Qala'ûn, lequel meurt le 6 décembre 1290. Son fils Al-Ashraf Khalil n'attend qu'une occasion pour reprendre les hostilités. L'ancien royaume de Jérusalem se réduisait alors aux villes de Saint-Jean-d'Acre, Beyrouth, Tyr, Saïda et la forteresse d'Hatlith[1],[2],[3].

La croisade populaire des Italiens

Une croisade de pèlerins non combattants arrive alors à Saint-Jean-d'Acre. Ils n'ont aucune expérience militaire et ils imaginent que leur bonne volonté suffirait à reprendre Jérusalem. Sans connaissance de la situation politique de la Terre sainte, ils accusent les Latins d'Orient de complaisance à l'égard des musulmans, n'hésitant pas à les qualifier de traîtres à la cause chrétienne. Ils refusent le principe de la trêve. Par sécurité, une interdiction de quitter la ville leur est intimée[1].

Ils vont passer à l'action dès le 13 mars 1291, en massacrant des paysans musulmans venus en ville vendre leur production[4]. Ils ne s'arrêtent pas à ce premier massacre. Ils décident d'envahir le bazar et ils égorgent les marchands supposés musulmans[5].

Atterrés, les consuls de la ville et les grand-maîtres des Ordres militaires préférèrent avertir directement le sultan Al-Ashraf, lequel réclame le châtiment des coupables[6],[7],[8]. Seul Guillaume de Beaujeu, grand maître de l'Ordre du Temple plaide pour l'exécution des criminels. Les autres membres du conseil de Saint-Jean-d'Acre sont persuadés que le sultan se contentera d'excuses. De plus, ces derniers ne croient pas par la déclaration de guerre du mamelouk, pensant qu'il s'agit uniquement de menaces. Par conséquent, ils envoient des ambassadeurs chargés de présents pour l'amadouer. Al-Ashraf les jette en prison[7],[9].

Le siège de la ville

Le sultan Al-Ashraf arrive devant Saint-Jean-d'Acre le 5 avril 1291 et entame immédiatement le siège. En plus d'une armée de 220 000 soldats, il dispose de nombreuses machines de siège. La ville abrite 30 000 à 40 000 habitants, dont 16 000 soldats[10].

Le sultan commence par placer ses quatre énormes catapultes à des emplacements stratégiques, face aux plus importantes tours de défense de la ville, et des mangonneaux et balistes dans les intervalles. Le 15 avril, Guillaume de Beaujeu tente une sortie à la tête de Templiers. Ils surprennent les avant-postes, mais leurs chevaux trébuchent dans les cordages et les musulmans se ressaisissent. Les Templiers parviennent difficilement à retourner en ville et leur tentative d'incendier une des catapultes a échoué. Ils retentent l'opération quelques jours après, mais les mamelouks, prévenus, les tiennent encore en échec[11].

Le 4 mai, le roi Henri II débarque à Saint-Jean-d'Acre, avec 200 chevaliers, 500 fantassins et des vivres en quantité. Le courage des assiégés remonte et Henri II, en tant que roi de Jérusalem essaye de traiter avec le sultan, qui ne veut rien savoir, exige la reddition pure et simple de la ville, mais accorde la vie sauve aux habitants. Le 7 mai, Henri repart vers Chypre, en laissant son armée sur place[12],[13].

Plan de la ville de Saint-Jean-d'Acre au XIIe siècle.

Le bombardement de la ville par les machines mamelouks s'intensifient, et des esclaves creusent des mines sous les principales tours. Le 15 mai, une partie de la Tour Neuve s'écroule. Guillaume de Beaujeu fait construire une tour en bois (ou chat) pour combler la brèche, mais n'y arrive que de manière incomplète. Une tempête au large empêche l'évacuation des femmes et des enfants par la mer. Les quelques navires déjà partis sont obligés de revenir se réfugier dans le port. Le vendredi 18 mai 1291, à l'aube, les Musulmans lancent l'assaut. Ils prennent pied sans problème dans la Tour Neuve, puis se divisent en deux groupes pour s'emparer de la zone entre les deux enceintes et bombarder les assiégés de feux grégeois et de flèches[14],[15].

Guillaume de Beaujeu, grand-maître du Temple, et Jean de Villiers, grand-maître de l'Ordre des Hospitaliers, longtemps rivaux et réconciliés à l'heure du danger, défendaient le point le plus menacé, la Porte Saint-Antoine. Atteint d'une flèche sous l'aisselle, Guillaume se retire du combat. Des croisés lui crient : "Pour Dieu, sire, ne partez pas, car la ville sera bientôt perdue !", ce à quoi Guillaume répond « Seigneurs, je ne peux plus, car je suis mort, voyez le coup. » On l'emporte à la Commanderie du Temple où il expire quelques heures plus tard. Jean de Villiers, également grièvement blessé, est transporté sur un navire en direction de Chypre. Les Mamelouks prennent alors la Porte Saint-Antoine et se ruent dans la ville, massacrant les habitants. Certains tentent de fuir avec les navires dont quelques uns, surchargés, coulent[14],[13].

10 000 habitants ont pu se réfugier dans la Voûte d'Acre, la citadelle des Templiers, qui tient encore. Cette citadelle donne sur la mer et les rescapés peuvent embarquer et se réfugier à Chypre. Pendant dix jours, la citadelle résiste aux bombardements incessants, avant de succomber à son tour, le 28 mai[16],[17].

Conséquences

Cette prise marque la fin de la présence franque en Terre Sainte. En effet, la bailli de Tyr et sa garnison évacuent peu après cette place-forte, qui passait pourtant pour l'une des mieux fortifiées de Terre Sainte. Le nouveau grand-maître des Templiers, Thibaud Gaudin, et les Templiers s'étaient repliés à Sidon. Sa population est évacué et Thibaud part pour Chypre, prétendant aller chercher des renforts, mais ne revint pas. Sidon est prise le 14 juillet. Se fiant aux promesses de paix du sultan, les habitants de Beyrouth lui ouvrirent les portes le 21 juillet et sont réduits en esclavage. Les Templiers qui tenaient la commanderie sont pendus[18].

Les places fortes de Tortose et de Château-Pèlerin sont évacuées sans combat les 3 et 14 août. Seules deux cités de Terre Sainte restent chrétienne : l'îlot d'Arouad, au sud de Tortose est tenue par les Templiers[18], et la ville de Gibelet, dont le seigneur, Pierre Embriaco, était un ami du sultan. Celui-ci la lui avait rendue en 1289 après l'avoir prise au comte de Tripoli. Ces deux ports sont abandonnés en 1302[19].

Sources

Robyn Young L'Ame du Temple T1 et T2 roman historique Fleuve Noir

Notes et références

  1. a et b Grousset 1936, p. 733
  2. Maalouf 1983, p. 291
  3. Pernoud 1990, p. 253
  4. Régine Pernoud donne la date du 13 mai 1290, qui paraît cependant très tôt. On ne comprend pas en effet pourquoi le sultan aurait attendu aussi longtemps avant de passer à l'offensive. Peut-être y eut-il un premier massacre le 13 mars 1290, et un second massacre au début de 1291, où la populace croisée s'en prit aussi aux marchands.
  5. des marchands byzantins ont également été massacrés, leur barbe les ayant fait passer pour des musulmans
  6. Grousset 1936, p. 733-4
  7. a et b Maalouf 1983, p. 292
  8. Pernoud 1990, p. 253-4
  9. Grousset 1936, p. 734-5
  10. Grousset 1936, p. 736-7
  11. Grousset 1936, p. 736-740
  12. Grousset 1936, p. 740
  13. a et b Pernoud 1990, p. 254
  14. a et b Grousset 1936, p. 740-3
  15. Maalouf 1983, p. 294
  16. Grousset 1936, p. 745-6
  17. Pernoud 1990, p. 255
  18. a et b Grousset 1936, p. 746-7
  19. Jonathan Riley-Smith, Atlas des Croisades, Paris, Edition Autrement, coll. « Atlas/Mémoires », 1996 (réimpr. 1996), 192 p. (ISBN 2-86260-553-0), p. 114 

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