- Ryôkan
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Ryōkan
Pour les articles homonymes, voir Ryokan.Ermite, poète et calligraphe japonais, Ryōkan (良寛) (1758-1831) est l'une des grandes figures du bouddhisme zen de la fin de la période Edo. Au Japon, sa douceur et sa simplicité ont fait de lui un personnage légendaire.
Sa vie d'ermite est souvent la matière de ses poèmes. Un soir où il franchit le seuil de sa cabane au retour d'une promenade, Ryōkan s'aperçoit que ses maigres biens ont disparu. Il compose alors ce haïku :
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- Oubliée par le voleur :
- la lune
- à la fenêtre.
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Une vie d'ermite
Ryōkan est né à une date incertaine, en 1758, à Izumozaki, petit village sur la côte ouest du Japon, dans l'actuelle préfecture de Nīgata, le pays des neiges. Son nom de naissance est Eizō. Son père est chef du village et prêtre shinto. Enfant, il étudie les classiques japonais et chinois. Vers l'âge de 20 ans, Ryōkan se rend dans un temple zen Sōtō du voisinage et devient novice. Il y rencontre un maître de passage, Kokusen, et part avec lui pour le sud du pays. Pendant douze ans, il se forme à la pratique du zen. En 1790, Kokusen le nomme à la tête de ses disciples et lui confère le nom de Ryōkan Taigu, esprit simple au grand cœur. À la mort du maître un an plus tard, Ryōkan abandonne ses fonctions et entame une longue période d'errance solitaire à travers le Japon. Il finit par s'installer, à l'âge de 40 ans, sur les pentes du mont Kugami, non loin de son village natal, et prend pour domicile une petite cabane au toit de chaume, Gogōan.
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- Dans la forêt verdoyante,
- mon ermitage.
- Seuls le trouvent
- Qui ont perdu leur chemin.
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- Aucune rumeur du monde,
- le chant d'un bûcheron, parfois.
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- Mille pics, dix mille ruisseaux,
- pas une âme qui vive.
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Mendiant chaque jour sa nourriture selon la stricte règle monacale et pratiquant assidûment la méditation assise ou zazen, Ryōkan cependant ne célèbre aucun rituel ni ne dispense aucun enseignement. Jamais non plus il n'évoque un point de doctrine ou ne fait état d'un quelconque éveil, petit ou grand. En été, il se promène ; en hiver, il souffre, trop souvent, du froid, de la faim et la solitude. Parti pour mendier, il s'attarde pour jouer à cache-cache avec les enfants de ses voisins, cueillir un brin de persil au bord d'un sentier, soigner un malade au village ou partager un flacon de saké avec les fermiers du pays.
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- Demain ?
- Le jour suivant ?
- Qui sait ?
- Nous sommes ivres
- de ce jour même !
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Les calligraphies de Ryōkan, aujourd'hui très prisées par les musées, suscitaient déjà bien des convoitises autour de lui. Aussi, chaque fois qu'il va en ville, c'est à qui, petit boutiquier ou fin lettré, se montrera le plus rusé pour lui soutirer quelque trésor issu de son pinceau. Ryōkan, qui a pour émule Hanshan, le grand ermite chinois de la dynastie Tang, calligraphe et poète comme lui, n'en a cure.
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- Moine benêt l'an passé,
- cette année tout pareil.
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Au bout de vingt ans passés dans la forêt, affaibli par l'âge, Ryōkan doit quitter Gogōan. Il trouve alors refuge dans un petit temple un peu à l'écart d'un village. Il soupire après la montagne, compare sa vie à celle d'un oiseau en cage. À l'âge de 70 ans, il s'éprend d'une nonne appelée Teishin, elle-même âgée de 28 ans. Ils échangent de tendres poèmes. À Ryōkan qui se lamente de ne pas l'avoir vue de tout l'hiver, Teishin répond que la montagne est voilée de sombres nuages. Ryōkan lui réplique qu'elle n'a qu'à s'élever au-dessus des nues pour voir la lumière. Il meurt entre ses bras le 6 janvier 1831.
Son mode de vie non conformiste, sa totale absence de religiosité, ont suscité bien des querelles d'érudits. Son bouddhisme était-il authentique ? Était-il oui ou non un homme éveillé ? À ces questions, Ryōkan, pour qui le zen ne pouvait être que profonde liberté, avait livré sa réponse :
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- Que laisserai-je derrière moi ?
- Les fleurs du printemps,
- le coucou dans les collines,
- et les feuilles de l'automne.
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Références
- (en) John Stevens, Three Zen Masters: Ikkyū, Hakuin, and Ryōkan, Kodansha, Tokyo, 1993.
- (en) Ryuichi Abe et Peter Haskel, Great Fool: Zen Master Ryokan: Poems, Letters, and Other Writings, University of Hawaii, 1996.
- (fr) Ishigami-Iagolnitzer Mitchiko, Ryôkan, moine zen, Editions du CNRS, Paris, 1991.
- (fr) Ryōkan, Les 99 haïku de Ryōkan, Verdier, Lagrasse, 1986.
- (fr) Ryōkan, Contes zen : Ryôkan, le moine au cœur d'enfant, Courrier du Livre, Paris, 2001.
- (fr) Ryōkan et Teishin, La Rosée d'un lotus, Gallimard, Connaissance de l'Orient, Paris, 2002. Recueil de waka et de longs poèmes, tel Le Lapin de la lune, publié par Teishin en quatre ans après la mort de Ryōkan.
- (fr) Ryōkan, l'oublié du monde. Dominique Blain. Editions Les deux océans, 2007.
Liens externes
- (fr) Haïkus de Ryōkan
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