- Relativisme moral
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Relativisme culturel
Le relativisme culturel est une thèse selon laquelle les croyances individuelles sont relatives à la culture où elles sont formulées. Le relativisme culturel est parfois ramené à sa composante de relativisme moral, thèse selon laquelle il n'est pas possible de déterminer une morale absolue ou universelle mais que la morale émerge de coutumes sociales et d'autres institutions humaines. Ce relativisme considère les valeurs morales comme applicables uniquement à l'intérieur de frontières culturelles.
Le relativisme culturel est souvent confondu avec le relativisme moral qui soutient que la morale peut-être partagée uniquement à l'intérieur d'un groupe disposant d'un même code moral et s'engageant à des actions communes, par exemple une minorité ethnique dans une situation hostile. D'un autre côté, un relativiste culturel pense, qu'en de telles circonstances, les gens ne suivent pas un code moral commun car leurs actions ne découlent pas de leurs penchants personnels dus à la pression sociale.
Sommaire
Histoire
Le relativisme culturel est une thèse peu défendue avant le XIXe siècle. Il peut se retrouver, d'une certaine façon, chez Hérodote, en ce qu'il s'attacha à décrire les us et coutumes des peuples qu'il a visités sans porter de jugement extérieur. On le retrouve aussi chez les sceptiques, qui remettaient en cause de façon plus générale l'accès à la vérité. Platon, dans le Théétète, décrit Protagoras de manière polémique comme l'un des défenseurs d'un relativisme individuel.
L'idée de Protagoras est que « l'homme est la mesure de toutes choses ». Protagoras considère que chaque individu croit ce qui est vrai pour lui. En ce sens il peut être considéré comme un précurseur philosophique du relativisme culturel, pour qui chaque individu tient pour vrai ce que sa culture tient pour vrai. La pensée relativiste nie en effet la possibilité de partager une moralité, excepté par convention culturelle.
Ce point de vue peut se traduire par : « Chacun crée sa propre morale à partir de la même histoire ». L'individu se comporte donc en accord avec son sentiment, acceptation ou rejet de tout ou partie de cette histoire.
Mais le relativisme culturel et par suite, le relativisme moral, s'est développé en Occident surtout à partir de la rencontre avec d'autres civilisations (cf. Montaigne), bien que la domination européenne se soit accompagnée d'une prétention à la supériorité de ses valeurs morales.
Le développement de l'anthropologie a néanmoins réduit progressivement cette prétention, notamment à partir de la fin du XIXe siècle, grâce à des études de terrain qui nécessitent une véritable immersion dans des cultures différentes, laissant de côté ses propres valeurs afin d'être capable de comprendre ces cultures. Par cette voie, l'Occident a découvert des points de vue extérieurs sur lui-même, ce que Montesquieu illustrait déjà dans les Lettres Persanes et Voltaire dans ses contes.
La pensée relativiste exclut l'existence d'une morale absolue. En ce sens elle s'oppose aux thèses de certaines religions révélées, qui proposent une morale absolue dont l'origine et la garante est la divinité. Selon le pape Benoît XVI, le relativisme consiste à « laisser entraîner “à tout vent de la doctrine” » [1] et a comme « mesure ultime uniquement son propre ego et ses désirs ».
Relativisme moral et morale absolue
L'expression relativisme moral peut prendre plusieurs sens :
- dans un sens descriptif, c'est le constat empirique qu'il y a des différences morales entre les sociétés, à travers les âges et à travers l'espace ;
- du point de vue de la réflexion éthique (ou méta-éthique), le relativisme concerne la justification des valeurs et des jugements moraux : il y a des divergences importantes entre les différentes manières de rendre compte de la morale et ces différences justifieraient l'idée que l'on ne peut logiquement résoudre le problème de savoir si une morale peut faire autorité (et laquelle) et servir de norme. En conséquence, la normativité d'une morale est relative à son origine sociale, qu'elle soit imposée par l'ensemble de la société ou par un groupe. Elle ne peut se comprendre que dans le contexte de croyances, de traditions et de pratiques collectives.
- dans le cas précédent, le relativisme ne nie pas toute justification morale parce qu'il est raisonnable pour un individu de suivre la morale imposée par sa culture, sa société ou son groupe. Cependant, on remarque que ces justifications ne sont ni vraies ni fausses et cet aspect peut conduire au refus d'attribuer une valeur de vérité, un sens et un statut ontologique (anti-réalisme) aux jugements moraux et aux valeurs morales. Ce relativisme peut être appelé nihilisme.
Le relativisme moral s'oppose à la morale absolue. Pour celle-ci la morale est fixée par une nature humaine absolue (John Rawls), par une source externe comme des déités pour la plupart des religions ou par la nature même de l'univers (objectivisme). Les disciples d'une morale absolue sont souvent très critiques envers le relativisme ; certains le considèrent même comme de l'immoralité ou de l'amoralité. La morale universelle est un néologisme humaniste qui prône l'utilisation de la logique et de normes éthiques communément acceptées pour former une alternative philosophique à la morale relativiste et absolue.
- conception objectiviste, qui affirme que les lois morales ne dépendent pas de l'homme, mais :
- sont des lois de la nature (philosophie grecque en général);
- sont des commandements divins ;
- sont des lois de la raison, en tant que tout être raisonnable (donc l'homme) doit leur obéir.
Dans la conception objectiviste (ou réaliste), les valeurs morales sont éternelles et universelles ou au moins, absolues ; on ne peut donc ni les changer ni les détruire. Au contraire, dans la seconde conception, les valeurs morales sont variables d'une société, d'un groupe ou d'un individu à l'autre. Pour cette conception, souvent présentée de manière descriptive, il est difficile de condamner des pratiques qui appartiennent à d'autres sociétés (peine de mort, soumission des femmes, etc.), alors que la morale normative du premier type prétend s'imposer à tout être raisonnable, de tous temps et en tous lieux.
Ethno-centrisme et relativisme culturel
Le relativisme culturel est parfois placé en contraste avec l'ethnocentrisme : juger la norme morale d'une société par les membres d'une autre est une forme d'ethnocentrisme ; certains relativistes culturels pensent que les gens ne peuvent être jugés qu'à l'aune du code moral de leur propre société, d'autres considèrent qu'étant donné que les codes moraux diffèrent entre les divers sociétés seules les parties communes de ces codes peuvent être utilisées pour émettre de tels jugements.
Une conséquence de ce point de vue est que tout jugement d'une société basée sur le code moral de l'observateur est invalide ; les individus doivent être jugés en fonction des normes de leur société et il n'y a pas de contexte plus large dans lequel ces jugements sont corrects. Ceci est une source de conflit entre morale relativiste et absolue car, pour cette dernière, une société dans son ensemble peut être jugée pour son acception de pratiques immorales tels l'esclavage, le maintien des femmes dans une position d'infériorité ou la peine de mort. De tels jugements peuvent être considérés comme arbitraires, bien que certains relativistes condamnent l'esclavage.
Le philosophe David Hume suggère des principes similaires à ceux du relativisme moral dans Enquiry Concerning the Principles of Morals (1751). Avant lui, Montaigne utilisa le relativisme culturel sans tenter de le définir précisément.
Voir aussi
Notes et références
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