- Ratapoil
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Le nom de Ratapoil, qui est surtout lié à l’œuvre graphique et sculptée de Honoré Daumier, est apparu pour la première fois dans un texte du Charivari du 12 août 1850 : "Proclamation du Colonel Ratapoil"[1]. Il représente un demi-solde efflanqué, à l'image de ces agents électoraux, qui à la veille du rétablissement de l'Empire, s'étaient répandus dans la population pour favoriser les idées bonapartistes. Comme à son habitude, l'artiste a réalisé cette sculpture afin de s'en servir notamment entre 1850 et 1851 dans certaines lithographies de la série "Actualités"; dans ces œuvres, il accentue souvent la ressemblance avec le futur Napoléon III. Républicain convaincu, Honoré Daumier milita jusqu’au dernier moment au sein du journal Charivari pour sauver la IIe République. Dès 1875, le substantif masculin "Ratapoil" apparait dans le Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle, qui donne la définition suivante : "de rat, de à, et de poil. Familier. Partisan du militarisme, et particulièrement du césarisme napoléonien"[2].
Sommaire
Historique du modèle
Ce modelage terriblement moderne tend déjà vers l'expressionnisme. Si les traits de Ratapoil ne caricaturent pas directement ceux de Louis-Napoléon, la moustache à l'impériale demeure l'emblème immédiatement reconnaissable de l'ennemi.
C'est ainsi que Daumier fut félicité par Jules Michelet lors d'une visite à son atelier: "Ah ! Vous avez atteint en plein l'ennemi ! Voilà l'idée Bonapartiste à jamais pilorisée par vous"[3]. La femme du sculpteur eut tellement peur que cette sculpture renvoie à nouveau son mari à la prison Sainte-Pélagie qu'elle la cachât quelque temps dans un paillon à bouteilles.
Les éditions
La terre originale du Ratapoil, dont il n'existait qu'un état, fut moulée par Geoffroy-Dechaume et probablement détruite lors de cette opération (en 1851 ?). Le plâtre original, connu sous le nom "Plâtre Geoffroy-Dechaume", est aujourd’hui conservé à l’Albright-Knox Art Gallery de Buffalo ; il servit à partir de 1891 à la première édition en bronze chez le fondeur Siot-Decauville, puis en 1929, à la seconde, initiée par Henry Bing chez le fondeur Eugène Rudier, l’année du cinquantenaire de la mort de Daumier. Toutes les conclusions de cet article viennent de l'analyse et de la mise en relation des ouvrages cités plus bas en bibliographie.
- 1re édition (sur le plâtre original Geoffroy Dechaume, débutée en 1891)
1891 : 8 ou 10 épreuves, signées "Daumier" numérotées et marquées[4] Siot-Decauville Fondeur Paris (n°1 à Oxford, Ashmoleum Museum ; n°2 au musée des Beaux-Arts de Marseille; n°4 à Paris, musée d’Orsay [1] ; n°5 à Karlsruhe, Staatliche Kunsthalle ; n°6 à Munich, Neue Pinacothek…). Après 1891, numérotation plus élevée (n°16 à Philadelphie, Philadelphia Museum of Art ; n°17 à Washington, National Gallery of Art ; n°19 à Mannheim, Städtische Kunsthalle ; n°20 à Copenhague, Ny Carlsberg Glyptotek…).
- 2de édition (sur le plâtre original Geoffroy-Dechaume, débutée en 1929)
Tirage de Henry Bing, fontes chez Alexis Rudier. Édition annoncée à 21 épreuves, non signées, numérotées de 0 à 20/20 et probablement arrêtée à moins[5] (n°0 à Los Angeles, County Museum of Art LACMA ; n°7 à Hambourg, Hamburger Kunsthalle ; n°9 à Francfort, Städelsches Kunstinstitut ; n°13 à Winterthur, Kunstmuseum Winterthur).
- Tirage reproductif (sur un autre plâtre[6], débuté dans les années 1959-1960 après expiration de la période couverte par les droits d’auteur) :
Fontes par C.Valsuani[7]. Tirage annoncé à 15 épreuves avec le cachet "Cire perdue Valsuani", numérotées de 1 à 12 et 3 épreuves d’essai marquées E1, E2 et E3.
Notes et références
- Anonyme, "Proclamation du colonel Ratapoil, chef de la Société du Dix-Décembre", Le Charivari, 12 août 1850, n°224, p.2. Le grade faisait allusion aux revues militaires multipliées par le "Prince-Président", jusqu'à l'automne, qui se transformaient régulièrement en manifestations bonapartistes.
- XIXe siècle...par M. Larousse, t.13, Paris; Administration du Grand Dictionnaire universel, 1875, p.721. Grand Dictionnaire universel du
- "Arsène Alexandre, H. Daumier. L'Homme et l’œuvre, H. Laurens, Paris, 1888.
- Sur les épreuves de 1891, le cachet est en général une pastille insérée dans la fonte ; sur les épreuves postérieures, il est plutôt estampillé. Il existe un petit nombre d’épreuves surmoulées de grossière qualité et quelques faux de meilleure qualité.
- Il existe aussi un grand nombre d’épreuves, plus que de bonnes, sans justificatif de tirage (contrefaçon effective de la marque Rudier avec ou sans certificat de Georges Rudier, toutes fausses) ; et aussi fausses numérotations ainsi que des surmoulages nombreux.
- Obtenu par surmoulage du plâtre original, ancienne collection Borletti di Arosio, Milan.
- Un nombre important d’épreuves surmoulées et surtirées, plus que de bonnes, avec contrefaçon de marque et de numérotation.
Bibliographie
- Monographie DAUMIER, 1808-1879, Réunion des Musées Nationaux, 1999.
- Jean-Claude Romand, Daumier sculpteur, Les bustes des Parlementaires, Galerie Sagot-Le Garrec, Les Presses Artistiques, Paris, 1979.
- Marcel Lecomte, Daumier sculpteur, Les figurines et autres sculptures, Les Presses Artistiques, Paris, 1979.
- Maurice Gobin, Daumier sculpteur, Ed. Pierre Cailler, 1952.
- Arsène Alexandre, H. Daumier. L'Homme et l'œuvre, H. Laurens, Paris, 1888.
Liens
Catégorie :- Sculpture en France
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