Racine de nombre complexe

Racine de nombre complexe

Racine d'un nombre complexe

Une racine carrée d'un nombre complexe z est un nombre complexe w vérifiant w2=z. Tout nombre complexe a exactement deux racines carrées distinctes, excepté 0, dont 0 est la seule racine carrée. Par exemple, les deux racines carrées de -1 sont i et -ii est l'unité imaginaire. Plus généralement, une racine n-ième de z est un nombre complexe w vérifiant wn=z. Hormis 0, tout nombre complexe admet exactement n racines n-ièmes distinctes. Par exemple, j=(1+\mathbf{i}\sqrt{3})/2 est une racine troisième de -1.

Les racines n-ièmes de l'unité 1 forment un groupe pour le produit, noté Un, qui est un groupe cyclique d'ordre n.

Il n'existe aucune détermination continue d'une racine carrée sur C. Plus exactement, il n'existe aucune application continue f:\mathbf{C}\rightarrow \mathbf{C} telle que f(z)2=z.

Sommaire

Formules

En coordonnées cartésiennes.

Un nombre complexe z s'écrit a+iba est la partie réelle et b est la partie imaginaire. Les racines carrées sont les nombres complexes w tels que w2=z. Si b est non nul, elles sont au nombre de deux et sont explicitement données par les formules suivantes :

w=\pm\left(\sqrt{\frac{\sqrt{a^2+b^2}+a}{2}}+ i\frac{b}{|b|}\sqrt{\frac{\sqrt{a^2+b^2}-a}{2}}\right).

Ici, \sqrt{ } désigne la racine carrée d'un nombre réel positif (qui est donc positive).

Les racines carrées de -a avec a>0 sont au nombre de deux et sont données par \pm i\sqrt{a}.

En coordonnées polaires.

En coordonnées polaires, un nombre complexe s'écrit z = reiθr est positif. Si z est non nul, r est positif. Les racines k-ièmes de z sont les nombres complexes w tels que wk=z. Elles sont au nombre de k et sont explicitement données par :

w=\sqrt[k]{r}e^{i\theta/k}e^{2i\pi q/k}q=0,\dots, k-1.

Pour k=2, on retrouve une description des racines carrées. La vérification est une application de la formule de Moivre.

Vérifications.
Pour w comme ci-dessus, la formule de Moivre donne :
w^k={(\sqrt[n]{r}e^{i\theta/k}e^{2i\pi q/k})}^k=r e^{i\theta}e^{2i\pi q}=z.
Les racines k-ièmes de z sont par définition les zéros du polynome Xkz. Or on dispose déjà de k zéros distincts de z. On peut donc commencer par factoriser le polynome par un produit de k polynomes de degré 1 deux à deux distincts. Il n'y a pas d'autres facteurs possibles car Xkz est de degré k. On dispose donc d'exactement k racines k-ièmes distinctes de z, données par les formules ci-dessus.

Existence

Les formules ci-dessus démontrent l'existence des racines carrées et des racines k-ièmes de l'unité. Néanmoins, les formules pour les racines k-ièmes s'appuient sur la définition de l'exponentielle complexe et sur la formule de Moivre. Cette application se définit comme d'une série entière et est un exemple de fonction entière. Il est implicitement fait appel ici à l'analyse complexe.

Le théorème fondamental de l'algèbre

Carl Friedrich Gauss à qui on doit les premières preuves rigoureuses du théorème fondamental

Le théorème fondamental de l'algèbre peut s'appliquer ici, et montre que tout nombre complexe non nul admet exactement k racines complexes distinctes.

Preuve.
D'après le théorème fondamental de l'algèbre, tout polynôme se factorise en un produit de polynomes de degré 1. Donc, en particulier, Xkz se factorise en un produit de polynome de la forme Xww est nécessairement une racine k-ième de z. Il faut justifier que les racines sont deux à deux distinctes. Ou encore, que Xkz n'est pas divisible par (Xw)2.
Sinon, Xkz = (Xw)2P(X). Par dérivation, il vient : kXk − 1 = (Xw)2P'(X) + 2(Xw)P(X). L'évaluation en w donne : kwk − 1 = 0. Donc w=0 et donc z=0.

Le théorème fondamental de l'algèbre possède de nombreuses preuves. Certaines sont détaillées dans l'article dédié. La plupart utilisent des outils de topologie et d'analyse, voire d'analyse complexe. L'appliquer ici pour éviter la formule de Moivre a un sens seulement si on dispose d'une preuve qui utilise l'algèbre seule. Une telle démonstration a été publiée par le collectif Nicolas Bourbaki en 1952, corrigeant une idée présentée par Laplace en 1795[réf. nécessaire].

Utiliser la preuve attribuée à d'Alembert et à Argand ne serait pas valable ici. Cette preuve, en réalité achevée en 1941 par Littlewood, s'appuie sur une construction des racines k-ièmes des nombres complexes. Cette construction ne doit pas faire appel à la formule de Moivre.

Preuve de Littlewood

La preuve proposée par Littlewood en 1941 établit l'existence de racines k-ièmes des nombres complexes par récurrence sur k. Elle s'appuie sur la définition des racines sur R+ et fait appel à un peu de topologie, mais évite l'utilisation de la formule de Moivre.

  • Pour k=2, les formules données en coordonnées cartésiennes fournissent les racines carrées des nombres complexes.
  • On suppose l'existence connue pour k<2q. Si z est un nombre complexe non nul, z admet deux racines carrées distinctes w et u. Par hypothèse de récurrence, w et u ont chacun q racines q-ièmes distinctes et ces racines ne sont pas communes, évidemment. Par suite, on dispse de 2q racines 2qièmes distinctes de z.
  • On suppose l'existence connue pour k<2q+1. En suivant Littlewood, l'existence d'une racine k-ième est établie en imitant la preuve donnée par d'Alembert et corrigée par Argand et Cauchy. Le polynôme étudié est Q(X) = X2q + 1z, et soit w un complexe réalisant le minimum de | Q(w) | sur le plan complexe. Par l'absurde, on suppose Q(w) non nul.
    • Si w est non nul, on peut écrire Q(w + h) = (w2q + 1z) + (2q + 1)w2qh + h2R(X) pour un certain polynôme R. Pour |h|<1, on a | h2R(h) | < α | h | 2α est la somme des modules des coefficients de R. Pour h=-t\frac{w^{2q+1}-z}{(2q+1)w^{2q}} avec 0<t<1, il vient | Q(w + h) | < (1 − t) | Q(w) | + α't2. D'où une contradiction.
    • Pour w=0, le problème est qu'on ne connait pas a priori l'existence des racines k-ièmes (c'est ce qu'on cherche à établir). Les racines quatrièmes de l'unité sont 1, -1, i et -i. On pose u0 = z / | z | , qui est un nombre complexe de module 1. On choisit u parmi 1, -1, i et -i de sorte que | uu0 | < 1. Le complexe u est une approximation de u0 pour laquelle on connait les racines d'ordre impair. En particulier, soit v dans 1, -1, i et -i tel que v2q+1=u ; et on pose y=\sqrt[2q+1]{|z|}v. Si Q(X)=X2q+1-z, alors |Q(y)|=||z|u-z|<|z|=|Q(0)|. D'où une nouvelle contradiction.

La preuve originale de Littlewood vise aussi à démontrer en même temps le théorème fondamental de l'algèbre par récurrence sur le degré.

Racines de l'unité

Article détaillé : Racine_de_l'unité.
Racines 12èmes de l'unité, positionnées sur le cercle unité.

Les racines k-ièmes de l'unité 1 sont parfois appelées les nombres de Moivre. Le produit d'une racine n-ième de 1 et d'une racine k-ième de 1 est une racine r-ième de 1, où r = pgcd(k,n). En particulier, l'ensemble Uk des racines k-ièmes de 1 est stable par multiplication complexe. C'est un groupe fini. Les racines k-ièmes de 1 s'écrivent :

\exp\left[2i\pi\frac{q}{k}\right]q=0,\dots, k-1.

Le groupe Uk est cyclique et ses générateurs sont appelés les racines primitives de 1.

Toutes les racines k-ième de l'unité sont situées sur le cercle unité et sont les sommets d'un polygone régulier à k côtés ayant un sommet d'affixe 1.

Détermination continue

Si U est un ouvert de C, une détermination continue d'une racine carrée sur U est une application continue f:U\rightarrow \mathbf{C} telle que f(z)2 = z.

Il n'existe aucune détermination continue d'une racine carrée sur C-0.
SuiviContinuRacineCarrée.png
Preuve.
Sinon, on aurait une fonction continue qui à un nombre complexe z = reiθ associe l'une de ses racines distinctes, ou bien \sqrt{r}e^{i\theta/2}, ou bien -\sqrt{r}e^{i\theta/2}. La continuité de f implique que le signe reste constant lorsque r varie à θ fixé. Par conséquent, f\left(re^{i\theta}\right)=\epsilon(\theta)\sqrt{r}e^{i\theta/2}, où \epsilon(\theta)=\pm. Mais comme f doit être continue, ε doit être localement constant, et par conséquent, constant par un argument de connexité.
Par suite, f\left(re^{i\theta}\right)=\pm\sqrt{r}e^{i\theta/2}. Mais alors, remplacer θ par θ + 2π pose problème. Le terme de droite devient \mp\sqrt{r}e^{i\theta/2} alors que le terme de gauche reste inchangé. D'où une contradiction.

L'image à droite illustre la preuve. Pour un tour complet effectué le long d'un cercle de centre 0 implique de faire, le suivi continu d'une racine carrée ne parcours qu'un simple demi-tour.

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