Pierre à poisson (Montbéliard)

Pierre à poisson (Montbéliard)

Pierre à poissons

La pierre à poissons, située place Denfert à Montbéliard en France est le seul monument médiéval entier à subsister dans la ville. Elle aurait permis à Guillaume Farel de prêcher la Réforme.

Histoire

la pierre à poisson

La plus ancienne mention de la pierre à poissons dans un document remonte à 1470, mais rien n’interdit de penser qu’elle était en place auparavant. Elle se trouve au débouché de la rue de Fèbvres, au coin du bourg de la Halle, dernier né des quartiers du Moyen Âge montbéliardais.

Enclos vers 1300, séparé de la ville par un mur et communiquant avec elle par la porte de l’Horloge, le bourg est un carrefour, une place publique, un centre commercial, et donc le principal lieu d’animation de la cité. La pierre sert, comme son nom l’indique, d’étal au marché du poisson. Les poissons d’eau douce, pêchés dans les rivières et étangs environnants, et dont la consommation est beaucoup plus importante à l’époque (plus de 150 jours maigres par an) y sont débités et vendus à la criée.

Au Moyen Âge, la pierre est enclose dans une maisonnette de bois. Sur cette table, Guillaume Farel aurait prêché la Réforme. Jules Vittini, artiste de la tradition montbéliardaise, a même peint cette scène, mais aucun document historique ne relate cet épisode, pourtant profondément ancré dans la mémoire collective.

En 1523, Guillaume Farel est à Bâle où il fortifie sa doctrine au contact du réformateur et humaniste local, Œcolampade. Il est appelé par le comte Ulrich VI de Wurtemberg pour prêcher la Réforme à Montbéliard. Depuis quelques années, la cité connaît une certaine effervescence, marquée par des relations plus tendues entre la ville et les chanoines de Saint-Maimboeuf et par une volonté à modifier l’institution ecclésiastique, les mœurs et la foi. Dans ce climat, Ulrich pense que les idées de Luther peuvent faire des adeptes.

Farel est à Montbéliard entre juillet 1524 et mars 1525, prêchant sans relâche et avec véhémence, s’attaquant par l’insulte et les violences verbales à la messe et aux rites. Cela suscite des incidents violents et des débats contradictoires avec des franciscains envoyés de Besançon et avec des chanoines de Saint-Maimboeuf. Une partie de la population accepte mal les excès du prédicateur, alors que les cantons suisses, inquiets d’un tel voisinage, obtiennent d’Ulrich son départ. Il quitte donc la ville et regagne Bâle. Son séjour montbéliardais lui permet de prendre pour la première fois, la parole en tant que réformateur indépendant. Cette expérience lui inspire sa « Sommaire et brève déclaration », premier traité de liturgie évangélique en français. Par la suite, il s’efforce de répandre la Réforme dans le pays de Vaud à Neuchâtel, puis à Genève où il rencontre Jean Calvin en 1536.

Le passage de Farel à Montbéliard n’est pas inutile ; il prépare le terrain à l’installation définitive de la Réforme luthérienne. En 1538, Pierre Toussain l’impose dans la ville avec l’abolition de la messe et des cérémonies catholiques. Une chose et donc sûre, Guillaume Farel a bien prêché la Réforme à Montbéliard. Une chose l’est moins, qu’il l’ait fait, perché sur la pierre à poissons.

Après plus de huit siècles, la tradition est toujours présente et l’on peut s’interroger sur une telle persistance. La pierre est située dans un lieu de passage très fréquenté et imaginer Guillaume Farel sur celle-ci n’est pas absurde. Il aurait ainsi pu profiter de la présence d’une foule importante pour diffuser ses idées. D’autre part, Farel n’a pas de lieu où prêcher en raison de la vigoureuse opposition du clergé et des nombreux catholiques. La pierre devient donc une tribune d’où il peut dominer ses auditeurs et se faire plus facilement entendre. D’ailleurs, l’image du prêcheur haranguant avec passion les fidèles en gesticulant et en pointant un doigt vengeur correspond bien au tempérament du bouillant prédicateur. Toutes ces hypothèses peuvent expliquer la légende de la pierre à poissons. Aucun élément historique, en revanche, ne vient la confirmer. C’est ce qui fait son charme ! aujourd'hui, cette pierre ancestrale est toujours bien présente ; la place sur laquelle elle est érigée porte le nom de square Farel.

Sources

  • Société d’Emulation de Montbéliard, François Vion-Delphin
  • La Principauté de Montbéliard, Daniel Seigneur
  • Portail de la Franche-Comté Portail de la Franche-Comté
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