Nations de Bruxelles

Nations de Bruxelles

Les Neuf Nations de Bruxelles sont un organisme de droit urbain bruxellois au sein duquel étaient choisis une partie du Magistat de la Ville: à savoir, entre autres, le Second Bourgmestre, six Conseillers (chargés comme les échevins de l'exécutif), une partie des Maîtres ou Proviseurs de la Suprême Charité etc...

Également le second Doyen et la moitié des Huit (Acht en thiois) du Tribunal de la Draperie ou Gilde Drapière. Auparavant les dix membres de la Gilde Drapière, qui était à la fois un tribunal et une chambre de commerce, à savoir les deux Doyens et les Huit assesseurs, étaient tous choisis parmi les lignages de Bruxelles, après la révolte de 1421, les Nations purent élire le Second Doyen et quatre assesseurs les Huit (en latin Octovir).

Les membres des Nations étaient élus parmi les Doyens des 49 corporations privilégiées de la Ville.

Sommaire

Origines

Ce nom de Nation vient du fait qu'il fallait être natif de Bruxelles pour en faire partie. On dit que leur nombre de Neuf fait référence aux Neuf Muses. (Il est inexact de prétendre que leur nombre viendrait des Huit assesseurs de la Gilde Drapière, ceux-ci n'étant pas élus selon leur corporation, mais selon leur Lignage et, pour les cinq membres des Nations, selon leur degré de fortune personnelle).

Un pouvoir bourgeois

Loin d'être un pouvoir démocratique ou populaire, comme l'écrivent si souvent certains historiens, les membres des Nations étaient les représentants les plus importants du pouvoir économique de leur époque et d'ailleurs dans la plupart des villes européennes sans privilège lignager, ils appartenaient à cette classe sociale appelée patricienne qui de Paris à Amsterdam dirigeait les villes. Il est donc inexact, comme le font nombre d'historiens contemporains, d'appeler "plébeiens" les représentants des Nations, transposant une notion tirée de l'histoire romaine, et employant un mot tout à fait étranger des institutions bruxelloises! Les vrais plébéiens étaient les "inhabitants" ("ingesetene") n'ayant pas la qualité de "Bourgeois de Bruxelles".

Deux pouvoirs antinomiques à Bruxelles: Lignages et Nations

Le partage du pouvoir avec les Lignages de Bruxelles n'existe que depuis la révolte de 1421 et ne s'est pas fait sans terribles combats avec les Lignages qui n'entendaient pas partager leur domination sans coup férir.

Déjà en 1306 une sanglante révolte des Métiers (En thiois Ambachten. Certes, à par le mot, ils ne sont pas à confondre avec les ambactes, un vieux mot d'origine celtique "ambactos" , qu'on retrouve déjà chez César, pour désigner ses auxiliaires militaires Gaulois, mais qui par la suite aura comme équivalent en latin tardif "servus" et restera dans le Néerlandais avec le sens d'homme de métier). Les Métiers ( "ambachten") avaient contraint les gens des Sept Lignages (Zeven Geslachten) à se réfugier dans la forteresse de Tervuren. Mais le duc de Brabant ayant pris fait et cause pour les Lignages, ceux-ci purent entreprendre une contre offensive contre les Métiers qui furent taillés en pièce près de Vilvorde en 1306.

Ce fut alors une période de domination absolue des Lignages qui dura plus d'un siècle, les chefs des Métiers, affaiblis, n'osant plus broncher. Cette période fut en contrepartie une grande époque de développement économique de la ville. La paix civile était également provoquée par les graves menaces extérieures que l'ambition des comtes de Flandre, faisant officiellement partie du Royaume de France, faisait peser sur Bruxelles, terre d'Empire. La ville fut ainsi occupée par les Flamands en 1356. Mais Everard t'Serclaes, du lignage Sleeuws, à la tête d'une troupe de jeunes lignagers bouta l'envahisseur dehors.

L'attitude des gens de métiers qui furent solidaires des Lignages contre l'ennemi extérieur démontra qu'ils pouvaient mériter la confiance des Lignages dont le but était de défendre la cité avec force pour conserver son indépendance, de la diriger avec sagesse et de la rendre plus belle et plus prospère.

Ceci montra qu'ils étaient mûrs pour un futur partage du pouvoir.

C'est ainsi que dès 1356 et 1357, en récompense de leur attitude patriotique, des tisserands et des foulons furent choisis parmi les échevins, et que dès 1359 des membres des métiers purent participer avec les lignages au contrôle des comptes des receveurs. Les membres des Métiers ("Ambachten") purent également se regrouper en corporations et en 1368 un tribunal des apaiseurs fut créé, composé de quatre Lignagers et quatre gens des Métiers ("Ambachten").

Cette période de paix intérieure florissante voit en 1402 le début de la construction de notre splendide hôtel de ville et l'épanouissement des arts de la paix: tapisserie, peinture et le début de l'École de sculpture bruxelloise.

Et pourtant, cette tranquillité fut à nouveau troublée par des luttes cruelles qui ensanglantèrent encore le pavé bruxellois et fit couler le sang en abondance dans les ruisseaux de la Ville.

Comme c'est souvent le cas, c'est de la tête que partit tout le mal qui affecta le corps.

Arrivée au pouvoir des Nations de Bruxelles et partage avec les puissants Lignages de Bruxelles.

Le duc Jean IV de Brabant, que les chroniqueurs présentent comme un prince faible et tout entier adonné au plaisir, était dominé par sa femme, une allemande arrogante, Jacqueline de Bavière. Elle était à ce point détestée qu'un jour le maître d'hôtel du duc, Everard t'Serclaes, refusa de lui servir à table ainsi qu'à ses dames de compagnies hollandaises les portions qu'elles voulaient. Offensée elle quitta Bruxelles, et son mari, le faible Jean IV, la suivi en exil. Mal lui en pris, car Philippe de Saint-Pol, frère du duc, s'empara du pouvoir en tant que "Ruward du Brabant" en 1420 et fut plébiscité par les Métiers.

Les toujours redoutables Lignages quant à eux, fidèles à la légitimité prirent le parti de Jean IV, et firent un retour en force à Bruxelles avec une troupe de 1500 cavaliers le 26 janvier 1421. Les métiers pleins de colère s'emparent de la Grand-Place, assiègent l'Hôtel de Ville, massacrent cinq membres des Lignages et en torturent vingt et un autres.

Pour faire renaître la paix, Philippe de Saint-Pol, promulgue son édit du 11 février 1421, qui fut approuvé par le duc Jean IV le 15 juillet suivant: désormais le pouvoir serait partagé entre Lignages et Ambachten et les corporations regroupées en Nations (représentant le pouvoir économique opposé au pouvoir traditionnel des Lignages, possesseurs du sol et des libres alleux bruxellois) éliraient désormais presque la moitié du magistrat jusqu'à la fin de l'Ancien Régime.

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