- Nahda
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Au XIXe siècle, la Nahda (النهضة) fut une véritable renaissance arabe moderne, à la fois politique, culturelle et religieuse. Initialement, cette mouvance était concentrée largement en Égypte. Elle est liée à la décomposition politique de l'Empire ottoman et au moment de réinvention identitaire du monde arabe qui l'accompagne. Elle se développe en deux phases :
La première est déclenchée par Méhémet Ali, un égyptien modernisateur. Il arrive au pouvoir après que Napoléon fut passé par l'Egypte entre 1798 et 1801. Or cette expédition française a une influence importante. Muhammad Ali décide donc d'envoyer des émissaires en France pour en apprendre plus sur celle-ci. Parmi ceux-ci, un lettré, Rifa'a al-Tahtawi. De retour en Egypte, il fonde une école de traduction et commence la diffusion d'ouvrages. L'imprimerie se développe. Il apporte aussi les Tanzimat (voir plus bas).
Mais la modernité technique ne peut pas s'importer séparément des idées modernes. C'est ainsi que débute la seconde phase de la Nahda qui est l'affirmation dans le Moyen-Orient de trois principales idées importées d'Occident :
- Le principe de la raison
- La participation au pouvoir, c'est-à-dire la démocratie
Le premier penseur, iniatateur de ce mouvement est Jamal Al-Din (dit Al-Afghani). Mais Al-Afghani n'écrit pas - c'est pourquoi l'essentiel de sa pensée nous provient de Muhammad Abduh, son élève egyptien (un autre penseur contemporain est le syrien Abd al-Rahman al-Kawakibi). Abduh développe les trois idées de la nahda :
- L'unité (Tawhid) dans ses deux sens : unité politique de l'Oumma et unité religieuse (annuler les divisions de l'Islam et revenir au fondement).
- L'interprétation (Ijtihad) des textes religieux: pendant trop longtemps seule l'imitation (Taqlid) a eu cours. Il convient de réinterpréter au regard de la modernité.
- La consultation (Shura): le mot apparaît dans un Hadith. On trouve donc le concept de démocratie dans la Sunna.
Cette pensée est donc un fondamentalisme, qui prône un retour aux sources de l'islam; mais ce retour aux sources doit permettre une réinterprétation au regard de la modernité. A l'issue de cette renaissance une classe de personnes éduquées et modernes émerge.
La période de la Nahda coïncide avec celle des Tanzimat (ce sont les "règlements") dans l'Empire ottoman, qui participe du même souci d'adaptation à la modernité sur un modèle européen : organisation administrative, institutionnelle et militaire mais aussi transformation de la structure politique conformément au modèle européen. C'est une promotion de la démocratie et des droits de la femme et une volonté de traitement égal des citoyens quelle que soit leur religion.
Les intellectuels s'ouvrent aux doctrines occidentales, en partant faire leurs études à l'étranger par exemple. Ils entament une réflexion historico-sociologique pour faire le point sur la situation sociale et culturelle de leur société, déterminer les causes de leur retard par rapport à l'Occident, et en trouver la solution. La Nahda a été initiée notamment par les familles maronites Al-Boustani (surtout par Boutros al-Boustani, fondateur de la Al-Medrassa al-watania, l'École nationale, en 1863) et Al-Yaziji, importatrices du modèle européen de scolarisation.
Une autre famille syrienne, les Marrash, contribua au développement de la Nahda. Francis Marrash fut l'un des premiers représentants syriens de la Nahda, avec Ghabat al-haqq, considéré comme le premier roman moderne arabe, roman allégorique aux idées rousseauistes. Il influença les écrivains des XIXe et XXe siècles, notamment Khalil Gibran, et fut un précurseur du nationalisme arabe. Il prône entre autres une modernisation des écoles arabes, une séparation de l'État et de la religion, la libération féminine, exprimant l'optimisme européen du XVIIIe siècle. Il introduit aussi un renouveau stylistique dans son œuvre poétique. Sa sœur Maryana Marrash incarnait la libération féminine : ayant réintroduit la tradition des salons littéraires dans le monde arabe, elle fut aussi la première femme à écrire dans la presse arabe.
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