Moishe Postone

Moishe Postone

Moishe Postone (né en 1942 au Canada) est professeur d'histoire à l'Université de Chicago.

Il vécut à Francfort-sur-le-Main de 1976 à 1982 où il obtint un doctorat en 1983 à l' Université Johann Wolfgang Goethe.

Sommaire

Parcours

Philosophe et historien de la pensée allemande, il est spécialiste de l'antisémitisme moderne et de l'histoire des idées en Europe mais ses recherches incluent aussi la théorie sociale, en particulier la critique de la modernité, l'Allemagne au vingtième siècle et les transformations globales contemporaines. Moishe Postone est surtout un des fondateurs de la " nouvelle critique de la valeur " (Anselm Jappe), critique que l'on peut suivre en pointillés et de manière inaboutie au travers de textes de Lukacs, Adorno, Krahl, Backhaus, Colletti ou Perlman, mais qui est élaborée surtout depuis 1986/87 par plusieurs penseurs en différents endroits du globe et dans des versions peu différentes (Robert Kurz en Allemagne autour de la revue Krisis, Jean-Marie Vincent, et donc Postone aux États-Unis qui élabore le début de son interprétation dans son célèbre texte sur l'antisémitisme de 1986[1]. En France, André Gorz, au soir de sa vie, racontait dans une de ses dernières interviews, que " Ce qui m'intéresse depuis quelques années, est la Nouvelle Interprétation de la théorie critique de Marx publiée par Moishe Postone chez Cambridge University Press. Si je peux faire un vœu, c'est de la voir traduite en même temps que les trois livres publiés par Robert Kurz"[2].

Idées

Moishe Postone publia Time, Labor and Social Domination en 1993 (traduit en français en 2009). Dans cet ouvrage, il tente de réinterpréter complètement la théorie critique de l'économie de Karl Marx, en fondant l'argumentaire de celui-ci sur la valeur, le capital et le travail, en tant que catégories centrales et déterminantes de l'ensemble de l'analyse marxienne. En s'inspirant de manière très critique de théories marxistes hétérodoxes (comme Isaac Roubine, Roman Rosdolsky, etc.), de certains auteurs de l'École de Francfort (comme Sohn-Rethel qui est resté marginal dans cette école) dont il montre les présupposés de leur tournant pessimiste avec Horkheimer, Postone interprète les écrits critiques sur l'économie de Marx (en particulier Le Capital dans sa 1re édition, et les Grundrisse) comme l'élaboration d'une théorie sociale de la valeur.


Au cours de l'écriture des Grundrisse, Postone pense que Marx arrive à la conclusion qu'une théorie critique adéquate doit être complètement immanente à son objet. La critique ne peut pas être entreprise d'un point de vue externe à l'objet, mais doit apparaître dans le mode immanent de la présentation elle-même. Le Capital est alors structuré de cette façon immanente, ce qui rend son interprétation particulièrement difficile. En effet, précisément à cause de la nature fermement structurée, immanente du mode de présentation de Marx, l'objet de la critique de Marx (par exemple, la valeur, aussi bien que le travail qui la constitue, qui en réalité, explique Postone, sont analysés comme des formes historiquement spécifiques au capitalisme, et ne peuvent pas être utilisés pour d'autres sociétés) est fréquemment pris comme le point de vue de cette critique. Les sections méthodologiques des Grundrisse clarifient donc non seulement ce mode de présentation, mais d'autres sections rendent explicites que les catégories du capital comme de la valeur sont historiquement spécifiques à la formation sociale capitaliste, que la prétendue théorie de la valeur-travail n'est pas une théorie de la richesse (transhistorique) créée par le travail (lui aussi perçu transhistoriquement comme métabolisme de l'homme avec la nature). Précisément parce qu'ils ne sont pas structurés de façon immanente, les Grundrisse fournissent une clef pour lire Le Capital. C'est là la clé de la réinterprétation de l'œuvre du Marx de la maturité, qu'opère Postone.


En partant donc d'une mise en évidence du caractère historiquement spécifique de la critique de Marx, il dégage alors une nouvelle théorie critique qui s'attaque à l'essence même du capitalisme : la forme de travail spécifique à la formation sociale capitaliste. En effet, dans les sociétés non capitalistes, le travail est distribué par des rapports sociaux manifestes. Un individu acquiert les biens produits par d'autres par le médium de rapports sociaux non-déguisés. Les activités du travail reçoivent leur signification et sont déterminées par des rapports personnels, ouvertement sociaux et qualitativement particuliers (différenciés selon le groupe social, le rang social, le large éventail des coutumes, des liens traditionnels, des rapports de pouvoir non déguisés, des décisions conscientes, etc.[3]). Or, dans une formation sociale capitaliste, "les objectivations du travail sont le moyen par lequel on acquiert les biens produits par d'autres ; on travaille pour acquérir d'autres produits. C'est donc à quelqu'un d'autre que le producteur que sert le produit (en tant que bien, en tant que valeur d'usage) - au producteur, il sert de moyen pour acquérir les produits du travail des autres producteurs. C'est en ce sens qu'un produit est une marchandise : il est à la fois valeur d'usage pour l'autre et moyen d'échange pour le producteur. Cela signifie que le travail a une double fonction : d'un côté, c'est un type de travail spécifique qui produit des biens particuliers pour d'autres, mais d'un autre côté, le travail, indépendamment de son contenu spécifique, sert au producteur de moyen pour acquérir les produits des autres"[4]. Cette fonction du travail, qui est spécifique à la vie sociale dans le capitalisme, est à la base de la socialisation moderne : on l'appelle le "travail abstrait". Posé dans sa fonction de nouvelle médiation sociale des rapports sociaux, le travail sous le capitalisme n'est plus une activité extérieure au capitalisme, qui s'opposerait au capital, et qu'il faudrait "libérer". Il est le fondement du capitalisme, et donc c'est le travail qu'il faut abolir.


Il apparaît de plus en plus aujourd’hui que le nouveau concept de “fétichisme de la marchandise”, qui n'a plus rien à voir avec une mystification de la conscience (une représentation inversée), constitue la partie centrale de l’héritage intellectuel de Marx. Le “fétichisme de la marchandise” n’est pas seulement une fausse représentation, et encore moins une adoration exagérée des marchandises. Le "fétichisme" va désormais être référé à la structure même de la marchandise. C'est alors une théorie du "fétichisme objectif" (Jappe) ou radicalisé, c'est-à-dire que tant qu'existent la valeur (objectivation de la fonction spécifique qu'a le travail sous le capitalisme), la marchandise et l'argent, la société est effectivement gouvernée par l'automouvement des choses créées par elles-mêmes, et non pas par une manipulation subjective des classes dirigeantes. Les sujets ne sont pas les hommes, mais ce sont bien plutôt leurs relations objectivées qui sont au cœur de la socialisation sous le capitalisme. C'est que le fétichisme, note Postone, doit être analysé "en termes de structure de relations sociales constituée par des formes de praxis objectivantes et saisie par la catégorie du capital (et donc de la valeur). Le Sujet de Marx, comme celui de Hegel, est alors abstrait et ne peut pas être identifié avec quelque acteur social que ce soit" (Postone, Time, p.75-76, version américaine). Ici le fétichisme consiste donc dans des rapports réifiés, réellement aliénés. Il est le monde “réellement renversé” du capital, où le travail abstrait (qui n’est pas le travail immatériel !) devient le lien social, une médiation sociale qui se médiatise par elle-même, en réduisant le travail concret à une simple expression du travail abstrait. Le travail abstrait est alors à la source de l'aliénation.


C’est à partir de ce concept qu’on peut bâtir une critique radicale de la marchandise, de l’argent, de la valeur, du travail et de la politique, c’est-à-dire une critique qui ne se limite pas à décrire les luttes menées autour de leur gestion et de leur distribution (la “lutte des classes” traditionnelle), mais qui reconnaît que ces catégories elles-mêmes font problème : elles sont propres à la seule modernité capitaliste, et sont responsables de ses côtés destructeurs et auto-destructeurs.

Théorie de l'antisémitisme moderne et théorie de la valeur : la personnification de l'abstrait

Dans son article de 1986, " Antisémitisme et national-Socialisme ", Moishe Postone élabore une réflexion inédite sur l'antisémitisme moderne et plus particulièrement sur l'idéologie national-socialiste. Mais on pourrait aussi décrire le résultat auquel il aboutit, comme un élément majeur dans l'élaboration d'une théorie socio-historique de la conscience et de la subjectivité déterminées par des formes sociales au cours de la socialisation sous le capitalisme, puisque ce qui est dit sur l'antisémitisme moderne peut aussi décrire une tendance de l'anticapitalisme vulgaire qui cherche la personnification des objets pris dans sa critique. Mais s'il faut dénoncer l'antisémitisme latent de beaucoup de théories qui se veulent anticapitalistes, il faut également s'opposer à ceux qui dénoncent toute critique du capitalisme comme antisémite. La critique de la valeur aboutit justement à une critique des mécanismes structurels du capitalisme qui n'attribue pas les méfaits de celui-ci aux agissements de groupes humains particuliers.

Postone montre que l'antisémitisme moderne est très diffèrent de la plupart des formes de racisme et de l'antisémitisme chrétien (contre le peuple déicide qui a tué Jésus). Il diffère d'eux parce qu'il projette un énorme pouvoir invisible global des Juifs, il y a l'idée d'une conspiration mondiale qui est intrinsèque à l'antisémitisme moderne. Par rapport à cette singularité qu'a l'antisémitisme dans la modernité, Postone essaye d'analyser l'antisémitisme par rapport à la notion marxienne du caractère duel de la catégorie de marchandise. Ainsi il observe que les caractéristiques que l'antisémitisme discerne chez les Juifs, sont les mêmes que celles concernant la valeur : abstraction, invisibilité, automatisme, domination impersonnelle. Postone soutient que la forme de la socialisation sous le capitalisme (par la fonction historiquement spécifique qu'a le travail sous le capitalisme) rend justement possible la séparation du concret (comme étant socialement « naturel », sain, vrai, etc.) et de l'abstrait, abstrait que l'on voit comme empiétant sur le concret, le dénaturant et le déformant.

Cette opposition entre le concret et l'abstrait déterminée par les formes sociales, irrigue toutes les formes de subjectivité, et permet donc de comprendre une caractéristique centrale de l'idéologie nationale-socialiste. Car cette idéologie n'était pas fondamentalement antimoderne et ce serait une erreur de l'étiqueter comme telle. Il est vrai qu'elle a revendiqué la défense de la paysannerie et du travail artisanal, mais elle a aussi affirmé la production technologique et industrielle moderne. Le nazisme a été au contraire une forme vulgaire d'anticapitalisme. Le rejet de la bourgeoisie et de ses valeurs est présent dans le nazisme. Il y a plus de sens à voir l'idéologie nazie comme l'affirmation de la dimension concrète - qui inclut la technologie et la production industrielle, aussi bien que la paysannerie et le travail manuel - comme cœur de la vie sociale saine, organique, et cela contre la dimension abstraite, matérialisée par le capital financier. L'abstrait est au contraire rejeté - et il est personnifié par les Juifs. Postone analyse la figure du Juif dans l'antisémitisme moderne comme incarnation de la valeur abstraite et les camps d'extermination seront alors interprétés comme des "usines" pour détruire la valeur.

Notes et références

  1. Voir le texte de M. Postone " Antisémistisme et national-Socialisme "
  2. Le Nouvel Observateur, le 14/12/2006. Voir aussi son dernier livre théorique, Ecologica, Galilée, 2008, p. 110 et suivantes. Voir aussi une critique de Gorz, dans Anselm Jappe, Les Aventures de la marchandise, p. 269.
  3. Moishe Postone comme Anselm Jappe, reconnaissent la pertinence jusqu'à un certain point de l'oeuvre de Karl Polanyi, La Grande Transformation : "Karl Polanyi souligne également la nature historiquement unique du capitalisme moderne : dans les autres sociétés, l'économie est enchâssée dans les rapports sociaux, alors que, dans le capitalisme moderne, les rapports sociaux son enchâssés dans le système économique", in Temps, Travail et domination sociale, p. 223, version française
  4. Postone, Temps, travail et domination sociale, p. 222-223, version française

Bibliographie de Moishe Postone

  • Time, Labor and Social Domination: A Reinterpretation of Marx's Critical Theory, New York and Cambridge: Cambridge University Press, 1993.
  • Marx Reloaded: Repensar la teoria critica del capitalismo, Madrid: Traficantes de Suenos. 2007
  • Deutschland, die Linke und der Holocaust - Politische Interventionen, Freiburg, Germany: Ca Ira Verlag, 2005.
  • " History and the Critique of Capitalism ", conférence de Moishe Postone le 25 novembre 2009 à Lille (France).
  • Catastrophe and Meaning: The Holocaust and the Twentieth Century, [Co-editor with Eric Santner] Chicago: University of Chicago Press, 2003.
  • Bourdieu: Critical Perspectives, (Co-Editor with Craig Calhoun and Edward LiPuma), Chicago and Cambridge: University of Chicago Press and Polity Press, 1993.
  • Theorizing the Contemporary World: David Harvey, Giovanni Arrighi, Robert Brenner, in R. Albritton, B. Jessop, R. Westra (eds.), Political Economy of the Present and Possible Global Future(s), London, New York, Delhi: Anthem Press. 2007.
  • Reflections on Jewish History as General History: Hannah Arendt's Eichmann in Jerusalem, in Raphael Gross and Yfaat Weiss (eds.), Jüdische Geschichte als Allgemeine Geschichte, Göttingen, Germany: Vandenhoeck and Ruprecht, 2006.
  • ""Critique, State, and Economy in Fred Rush (éd.) The Cambridge Companion to Critical Theory, Cambridge: Cambridge University Press, 2004.
  • The Holocaust and the Trajectory of the Twentieth Century, in M. Postone and E. Santner (eds.) Catastrophe and Meaning. University of Chicago Press, 2003.
  • Lukács and the Dialectical Critique of Capitalism, in R. Albritton and J. Simoulidis, (eds.), New Dialectics and Political Economy, Houndsmill, Basingstoke and New York: Palgrave Macmillan, 2003.
  • Contemporary Historical Transformations: Beyond Postindustrial and Neo-Marxist Theories, Current Perspectives in Social Theory. vol. 19, 1999. Stamford, Conn: JAI Press Inc., 1999.
  • Deconstruction as Social Critique: Derrida on Marx and the New World Order, [review essay on Jacques Derrida, Specters of Marx] in History and Theory, October, 1998.
  • Rethinking Marx in a Postmarxist World, in Charles Camic (éd.), Reclaiming the Sociological Classics. Cambridge, Mass.: Blackwell Publishers, 1998.
  • Political Theory and Historical Analysis, in C. Calhoun (éd.), Habermas and the Public Sphere, Cambridge, Mass.: MIT Press, 1992.
  • History and Critical Social Theory (Review essay on Jürgen Habermas, The Theory of Communicative Action) in Contemporary Sociology. vol. 19, no 2, March, 1990.
  • After the Holocaust: History and Identity in West Germany, in K. Harms, L.R. Reuter and V. Dürr (eds.), Coping with the Past: Germany and Austria after 1945, Madison: University of Wisconsin Press, 1990.
  • Anti-Semitism and National Socialism, in A. Rabinbach and J. Zipes (eds.), Germans and Jews Since the Holocaust, New York: Holmes and Meier, 1986.

En français :

Sur Moishe Postone

Interview

Voir aussi

  • Concernant la critique de la valeur:

Liens externes



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