Massacre de wounded knee

Massacre de wounded knee

Massacre de Wounded Knee

Fosse commune avec des Lakotas morts après le massacre de Wounded Knee.

Le massacre de Wounded Knee a eu lieu aux États-Unis d'Amérique (Dakota du Sud) le 29 décembre 1890. Environ 200 amérindiens de la tribu Lakota Miniconjou (dont plusieurs dizaines de femmes et des enfants) ont été tués par l'armée des États-Unis. Le terme "massacre" a été employé par le Général Nelson A. Miles dans une lettre du 13 mars 1917 au commissaire aux affaires indiennes.

Cinq cents soldats du 7e régiment de cavalerie des États-Unis appuyé par quatre mitrailleuses Hotchkiss ont encerclé un campement d'indien Lakota avec l'ordre de les convoyer en train vers Omaha dans le Nebraska. Le commandant du 7e avait reçu l'ordre de procéder à un désarmement préalable. Il existe différentes versions du massacre mais les historiens s’accordent sur le fait que les tirs ont commencé pendant le désarmement des Indiens. Un coup de fusil a retenti et les Indiens, désarmés et encerclés, ont été mitraillés. Vingt-cinq soldats de la cavalerie ainsi que 153 indiens Sioux ont alors été tués, y compris 62 femmes et enfants. Les cadavres indiens furent enterrés dans une fosse commune sur le lieu du massacre. D'autres Sioux sont morts de leurs blessures ultérieurement. Les soldats tirant de quatre cotés à la fois, certaines des victimes militaires ont probablement été touchées par leurs camarades.

Sommaire

Préludes

En février 1890, le gouvernement des États-Unis a rompu un traité passé avec les Lakota en divisant la Grande réserve indienne Sioux de l'État du Dakota du Sud (qui englobait la plus grande partie de l'État) en cinq réserves dont la totalité était plus petite. Ceci a été réalisé pour satisfaire les intérêts des propriétaires de l'Est et était conforme à la politique clairement affichée du gouvernement "de rompre les relations tribales" et d’obliger "les Indiens à se conformer au mode de vie de l'homme blanc, pacifiquement si possible ou sinon par la force".

Une fois les réserves "ajustées", les tribus ont été séparées en unités familiales sur des parcelles de terrain de 320 acres. En raison de la sécheresse, les récoltes de 1890 étaient insuffisantes pour assurer l’alimentation des Sioux. Malheureusement pour les Indiens, le gouvernement avait aussi réduit les rations de moitié, les Indiens étant jugés "paresseux". Comme le bison avait de plus été pratiquement éradiqué de la plaine quelques années plus tôt, les Sioux subirent une famine.

La Danse des esprits (Ghost Dance)

En 1890, Jack Wilson, un chef religieux amérindien connu sous le nom de Wovoka déclara que pendant l'éclipse totale du soleil du 1er janvier 1889 il avait reçu la révélation qu'il était le Messie de son peuple. Le mouvement spirituel qu'il créa devint connu sous le nom de "Danse des esprits" (Ghost Dance), mélange syncrétique de spiritualisme Paiute et de christianisme Shaker. Bien que Wilson ait prédit la disparition des hommes blancs, il a également enseigné que jusqu'au jour du Jugement dernier, les amérindiens devaient vivre en paix et ne pas refuser de travailler pour les blancs.

Chez les Sioux, les deux premiers convertis à cette nouvelle religion furent Kicking Bear et Short Bull, de la réserve de Pine Ridge. Tous deux ont reconnu que Wilson avait fait de la lévitation devant eux mais ils interprétèrent différemment ses paroles. Ils ont rejeté la prétention de Wilson d'être le Messie et ont cru que le Messie n'arriverait pas avant 1891. Ils ont aussi refusé le pacifisme de Wilson et estimé que des vêtements spéciaux, les "chemises des esprits" ("ghost shirts") les protégeraient des balles.

La danse des Esprits se propage rapidement chez les Sioux, démoralisés et affamés. Effrayés, les agents indiens demandent l'aide de l'armée. Bien que probablement une majorité des Indiens de la réserve de Pine Ridge ait été convertie, le chef Sitting Bull n'en faisait pas partie. Cependant, il a garanti la liberté religieuse ; les fonctionnaires fédéraux ont cependant interprété cette tolérance comme un appui total et le Général Nelson Miles a ordonné son arrestation. 43 policiers indiens ont essayé de l'arrêter le 15 décembre 1890 à la "Standing Rock Agency". Pour des raisons peu claires, une fusillade s'est ensuivie et Sitting Bull était parmi les douze tués.

400 Hunkpapa Lakota fuirent à la réserve indienne de Cheyenne River des Lakota Miniconjou. 38 Hunkpapa Lakota du village de Sitting Bull trouvèrent refuge dans le campement des Miniconjou de Big Foot dans la réserve de Cheyenne River. Miles ordonna aussitôt l'arrestation de Big Foot mais l'armée temporisa, espérant que sa réputation de pacifiste préviendrait les hostilités. Quand les Hunkpapa arrivèrent, apeurés par l'arrivée de nombreux soldats dans la réserve, les 300 Minniconjous décidèrent d’abandonner leur village et de rejoindre le chef Red Cloud (qui ne faisait pas partie du mouvement de la Danse des Esprits) à l’agence de Pine Ridge.

Ignorant les intentions des Indiens, et craignant que la destination de Big Foot ne soit le bastion des danseurs des Esprits dans les Bad Lands, le général Miles déploie le 6e et le 9e régiment de cavalerie pour bloquer les Minniconjou.

Canon Hotchkiss à Wounded Knee

Le clan de Big Foot est intercepté par le Major Samuel Whitside et environ 200 hommes du 7ème régiment de cavalerie (massacré à Little Big Horn par les Sioux 14 ans auparavant). Whitside transfère Big Foot qui souffre d'une sévère pneumonie vers une ambulance de campagne et escorte les Lakota à leur camp pour la nuit à Wounded Knee Creek. L'armée fournit aux Lakota des tentes et des rations. Les Indiens sont comptés : il y a dans le village 120 hommes et 230 femmes et enfants.

Le matin suivant, les Lakota trouvèrent face à eux le reste du régiment, avec son commandant, le colonel James W. Forsyth, arrivé pendant la nuit, ainsi qu'une batterie de canons Hotchkiss du 1er régiment d'artillerie. Les armes étaient disposées sur une petite colline surplombant le campement. Forsyth informa Whitside que les Lakota devaient être transférés dans un camp militaire à Omaha dans le Nebraska.

Le massacre

Le chef Miniconjou Big Foot, abattu par un soldat, gît dans la neige.

La 7e de cavalerie avait reçu l'ordre du commandant du département de la Platte, le Général John Brooke, de désarmer le clan de Big Foot avant le transfert vers le Nébraska. La veille au soir, après avoir été escortés au camp et avoir été encerclés de toute part, les Lakota ont été considérés comme des prisonniers virtuels. Forsyth a choisi de ne pas essayer de les désarmer dans la soirée.

Au matin, les hommes Lakota sont rassemblés et informés qu'ils doivent remettre toutes leurs armes à feu. Les soldats craignant que des armes restent cachées commencent à fouiller les tentes, provoquant la colère des Lakota, qui selon l'armée, étaient sous l'influence d'un chaman Miniconjou, Yellow Bird.

Lorsque les soldats tentent de désarmer un Lakota nommé Black Coyote, un coup de feu part. Une fusillade générale s’ensuit. La plupart des hommes Lakota, encerclés par les soldats, sont abattus. Les survivants se dégagent. C’est alors que les canons bombardent le village des femmes et des enfants.

Quand le tir s’est arrêté, 146 Lakota avaient été tués ainsi que 25 soldats de la cavalerie des États-Unis qui eut également 35 blessés. Big Foot figure parmi les morts. Les soldats tirant de tous les cotés, on pense que certains des soldats ont été tués par leur propre régiment mais aucune enquête n'a permis de connaître la vérité.

Conséquences

Lorsque la tempête de neige qui s'est abattue entre temps s'est calmée, les militaires embauchent des civils pour enterrer les victimes Lakota. 146 Lakota ont été ainsi enterrés dans une fosse commune: 84 hommes et garçons, 44 femmes, et 18 enfants. De plus, 7 blessés Lakota sont morts à l'hôpital de Pine Ridge des suites de leurs blessures.

Le Colonel Forsyth, désavoué par le Général Nelson Miles, a été immédiatement relevé de son commandement. Une enquête militaire approfondie menée par Miles critique les dispositions tactiques prises par Forsyth tout en l'exonérant de sa responsabilité. Le Secrétaire à la guerre rétablit alors Forsyth dans son commandement du 7e régiment de cavalerie. La cour a jugé que, pour la plupart, les soldats de la cavalerie avaient essayé d'éviter les atteintes aux non-combattants. Néanmoins Miles continua à critiquer Forsyth qui selon lui avait délibérément désobéi aux ordres. C’est du général Miles que vient l'opinion selon laquelle Wounded Knee est un massacre délibéré plutôt qu'une tragédie provoquée par des décisions malheureuses (l’opinion publique américaine étant alors généralement favorable à Forsyth).

Vingt "médailles d'honneur" ont été attribuées à des soldats du 7e de cavalerie pour leur conduite durant le massacre. Actuellement, les Amérindiens réclament encore instamment qu'elles soient requalifiées en "médailles du déshonneur".

Beaucoup de non-Lakota vivant près des réserves ont interprété la bataille comme la défaite d'un culte meurtrier, la "Danse des esprits", faisant l’amalgame entre les adeptes de ce culte et les amérindiens en général. Peu après le massacre, un jeune rédacteur de journal, L. Frank Baum, qui deviendra plus tard célèbre en tant qu'auteur du Magicien d'Oz écrit dans le journal Aberdeen Saturday Pioneer du samedi 3 janvier 1891 :

"L'Aberdeen Saturday Pioneer a par le passé déclaré que notre sûreté dépendait de l'extermination des Indiens. Après leur avoir fait du tort pendant des siècles, nous devrions, afin de protéger notre civilisation, insister encore et débarrasser la terre de ces créatures indomptées et indomptables. De cela dépend la sécurité des colons et des soldats commandés par des incompétents. Autrement, nous pouvons nous attendre à ce que les années futures nous apportent autant de déboires avec les Peaux Rouges que les années passées. "

Vers la fin du XXe siècle, les critiques se font plus vives. Beaucoup considèrent l'évènement comme une des plus grandes atrocités de l'histoire des États-Unis. Il a été commémoré par la chanson engagée "Bury My Heart at Wounded Knee" ("Enterre mon cœur à Wounded Knee") écrit par Buffy Sainte-Marie. Il est aussi le sujet d'un livre à succès de l'historien Dee Brown publié en 1971 :"Enterre mon cœur à Wounded Knee : la longue marche des Indiens vers la mort" (Bury my heart at Wounded Knee, an Indian history of the American West). New York : Holt, Rinehart & Winston.

Dernier conflit armé avec les amérindiens?

Wounded Knee est généralement considéré comme l'évènement qui met fin à 400 ans de guerres indiennes. À strictement parler pourtant, le massacre n'a pas été le dernier conflit entre les amérindiens et les États-Unis. Une escarmouche a eu lieu à la Mission Drexel le lendemain du massacre de Wounded Knee, qui a entrainé la mort d'un soldat de la cavalerie et la blessure de six autres appartenant au 7 ème régiment de cavalerie des États-Unis). Cet évènement à la Mission Drexel fut presque totalement éclipsé par la tragédie de la veille. Les danseurs Lakota qui avaient été persuadés de se rendre ont plutôt fui en apprenant ce qui s'était passé à Wounded Knee. Ils ont brûlé plusieurs bâtiments de la mission puis ont attiré un escadron du 7e de cavalerie dans un guet-apens et l'ont harcelé jusqu'à l'arrivée des renforts du 9 ème régiment de cavalerie des États-Unis. Le lieutenant James D. Mann, un des principaux responsables du tir à Wounded Knee est mort de ses blessures dix-sept jours plus tard, le 15 janvier 1891, à Ft.Riley dans le Kansas.

Février 1973 : renouveau de la cause indienne

Plus de quatre-vingts ans après le massacre, le 27 février 1973, Wounded Knee a été le théâtre d'un affrontement entre les autorités fédérales et les militants de l'"American Indian Movement".

Ce jour là, près de trois cent Sioux Oglala ainsi que des sympathisants de la cause indienne se rendirent au village de Wounded Knee et l'occupèrent pour exiger qu'on reconnaisse leurs droits et leur terre.

Cet évènement est raconté dans un livre publié par les "Akwesasne Notes" en 1973 : "Voices from Wounded Knee". Il a été mis en film dans Lakota Woman, siège à Wounded Knee, à travers la participation à l'événement de Mary Crow Dog.

En quelques heures, plus de 2.000 agents du FBI, des policiers fédéraux et des représentants du Bureau des affaires indiennes cernent la ville et organisent un blocus avec des véhicules blindés, des mitrailleuses etc.

Le siège dura 71 jours et fit deux morts dont Franck Clearwater, un indien qui se reposait dans une église. Une paix fut signée et les deux camps acceptèrent de désarmer. Les Indiens avaient instauré une communauté remarquable, avec des cantines communautaires, un service de santé et un hôpital, au sein du territoire assiégé. Un indien Navajo, vétéran de la guerre du Vietnam a alors déclaré :

"Le calme des gens était réellement stupéfiant étant donné qu'on nous tirait dessus sans arrêt.. mais ils restaient parce qu'ils avaient une cause à défendre. C'est pour çà qu'on a perdu au Vietnam, parce que la cause était mauvaise. On a fait une guerre de riches pour les riches... A Wounded Knee on a fait du bon boulot et le moral était bon. On continuait à rigoler malgré tout."

Bibliographie

  • Black Elk, Raymond J. DeMallie, Le sixième Grand Père, Black Elk et la Grande Vision, Editions du Rocher, 1999. (Témoignages de première main d’indiens Lakota sur le massacre)
  • David Cornut, Little Big Horn, autopsie d'une bataille légendaire, Parçay-sur-Vienne, Anovi, 2006 ISBN : 2-914818-10-6 (un chapitre entier sur le massacre du point de vue indien et américain)
  • George E. Hyde, Histoire des Sioux. Tome 2. Conflits sur les Réserves, Editions du Rocher, 1996. ISBN 2268022390
  • Jean Pictet, L'Épopée des Peaux-Rouges, Éditions du Rocher, Monaco, 1994, ISBN 2268017222
  • Gregory F. Michno, Encyclopedia of Indian Wars, Western battles and skirmishes, 1850-1890, Mountain Press Publishing Company, 2005, ISBN 0 87842 468 7

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