Maccabée

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Maccabées

Les Maccabées ou Macchabées (מכבים ou מקבים, Makabim en hébreu) sont une famille juive qui mena la résistance contre la politique d’hellénisation forcée pratiquée par les Séleucides au IIe siècle av. J.-C.. Ils fondèrent la dynastie des Hasmonéens.

Le surnom de « Macchabée » est celui de Judas Macchabée, troisième fils du prêtre Mattathias. L'étymologie en est controversée. Il s’agit soit de l’acronyme « MaKaBi » formé des premières lettres du verset biblique « Mi Kamo’ha Ba-elim Hachem » qui veut dire : « Qui est comme Toi entre les dieux, Seigneur », soit du mot MaQaB, qui signifie « marteau ». De nombreux clubs sportifs israéliens portent ce nom car « marteau » prend le sens de « mouvement ».

Dans la tradition chrétienne, le nom de Maccabées ou Macchabées est réservé aux sept fils et à leur valeureuse mère, dont le martyre est rapporté au chapitre 7 du deuxième Livre des Macchabées. L’insistance de ce deuxième livre sur le martyre et sur la résurrection des morts est probablement à l'origine du sens dérivé de « cadavre » qu’a pris le mot Macchabée.

Sommaire

La révolte des Maccabées

Article détaillé : Révolte des Maccabées.

La Révolte des Maccabées a été à la fois une révolte des Juifs pieux contre la dynastie grecque des Séleucides, et un conflit interne au peuple juif opposant des traditionalistes hostiles à l'évolution de la tradition juive au contact de la culture grecque et des Juifs hellénisants plus favorables au métissage culturel. Cet épisode se situe au deuxième siècle avant JC, entre -175 et -140. Les dirigeants de cette révolte sont Mattathias et ses fils, notamment Judas Maccabée et Simon Maccabée En 175, au moment où meurt le roi Séleucos IV, le Grand Prêtre des Juifs, Onias III, est à Antioche, venu se justifier d’avoir refusé le prélèvement des trésors du Temple par un agent royal, Héliodôros. Il est accompagné de son frère, Joshua, qui se fait appeler Jason. Celui-ci intrigue auprès du nouveau roi, Antiochos IV, frère du précédent, dont la légitimité est contestée : c’est à son neveu otage à Rome que devrait revenir la royauté. Jason fait une triple proposition au nouveau roi : qu’il le nomme, lui Jason, comme Grand Prêtre à la place d’Onias, qu’il lui accorde le droit de transformer la ville de Jérusalem en une nouvelle cité grecque, une polis, et en échange, il lui promet une augmentation du tribut et le versement d’importantes sommes supplémentaires. Antiochos accepte. Premier point essentiel : la transformation de Jérusalem en cité grecque ne se fait pas à l’initiative du roi, mais des Juifs hellénisés. Et cela fonctionne bien.

Rentré à Jérusalem, Jason établit la liste des nouveaux citoyens de cette “Antioche de Jérusalem” (pour la distinguer des nombreuses autres Antioche), fonde un gymnase au pied du Mont du Temple, et crée un éphébéion, c’est-à-dire l’organisme de formation des futurs citoyens. Son pire adversaire, l’auteur de 2Maccabées, un contemporain, ne trouve rien d’autre à lui reprocher. Beaucoup de Juifs aisés souscrivent à ce qui leur apparaît comme une utile modernisation de la société juive : les prêtres se précipitent au gymnase dès que retentit le gong annonçant le début de la distribution d’huile. Est-ce à dire que ces Juifs sont prêts à renoncer à leurs rites et aux préceptes de la Loi ? L’auteur de 2Maccabées est obligé de convenir que non : lorsqu’ils partent assister à Tyr aux concours gymniques en l’honneur d’Héraclès, invités comme tous les habitants des cités grecques de la région, les Antiochiens de Jérusalem dépensent les sommes d’argent à acheter des équipements de bateaux, non à sacrifier aux idoles. Le contraire aurait étonné : qui imaginerait que le Grand Prêtre juif cherche à abolir la religion qui est le fondement de son pouvoir ? Il est clair que Jason, poussé par une partie des élites hellénisées de Judée, cherche à gommer les différences entre les Juifs et leurs voisins, à les faire entrer en quelque sorte dans le monde moderne, qui est largement hellénisé. Cela ne signifie pas qu’il est prêt à renoncer aux préceptes essentiels de sa religion.

Le réforme de Jason ne va cependant pas sans problème. D’abord, il a obtenu son poste par l’intrigue et en promettant de l’argent : c’est le peuple qui paie. De plus, aux yeux des Juifs traditionnels, ceux qui sont étrangers aux modes nouvelles, il est difficile de comprendre comment on peut rester Juif en adoptant des mœurs aussi étrangères à la tradition que la nudité du gymnase. D’autant que les Juifs qui fréquentent le gymnase en viennent soit à masquer leur circoncision (« ils se firent faire des prépuces »), soit à y renoncer pour leurs enfants mâles : et là, ils violent la Loi ! De plus, en achetant sa charge, Jason a ouvert la porte à la concurrence : de fait, en -172, un parent à lui, Ménélas, dont le nom dit assez l’hellénisme, obtient la charge de Grand Prêtre en promettant au roi davantage d’argent. S’ouvre alors une période de guerre civile entre deux factions hellénisantes, celle de Ménélas étant visiblement beaucoup plus radicale que celle de Jason, et plus prompte à renoncer aux traditions juives.

Le peuple, impuissant, assiste à cette guerre civile dont il paie la facture. Certains fuient au désert, d’autres s’agitent. On passe de l’indignation muette à un début de révolte à laquelle Ménélas est incapable de faire face. Il fait appel aux troupes royales, tandis que Jason, vaincu, se réfugie d’abord chez le roi des Nabatéens à Pétra, puis à Sparte. Les troupes séleucides – deuxième fait capital – interviennent donc d’abord pour mettre fin à des troubles entre Juifs.

Nous sommes alors en -170--169. Antiochos IV, qui ne s’est guère soucié de l’affaire, sauf pour nommer le Grand Prêtre et empocher le plus d’argent possible (il a une lourde dette de guerre envers les Romains et compte lancer de nouvelles expéditions contre l’Égypte et en Iran), commence à s’inquiéter. Pourquoi les Juifs s’agitent-ils ? Il doit faire campagne contre l’Égypte au printemps -169, et il ne convient pas de laisser sur ses arrières un foyer de rébellion susceptible de le couper de ses bases syriennes. À ses questions sur les causes des troubles en Judée, on a dû lui répondre que les Juifs se disputaient au sujet de la Loi : le texte de 2Maccabées oppose constamment ceux qui font preuve de zèle pour la Loi (Torah), et ceux qui font preuve de zèle contre la Loi (les Hellénistes qui ne sont pas hostiles à la Loi mais en proposent une interprétation moderne). Antiochos IV en déduit une mesure politique radicale et désastreuse mais logique : si les Juifs se disputent au sujet de la Loi, supprimons la Loi ! D’ailleurs, il est habituel qu’un peuple révolté perde le privilège de s’administrer selon ses propres lois.

Courant -168, Antiochos IV promulgue donc un édit pour abolir la Torah. C’est ce que l’on nomme abusivement l’édit de persécution, qui aboutit de fait à l’interdiction du judaïsme. On voit par quel enchaînement on en est arrivé là. Il n’y a chez Antiochos nul fanatisme, nulle intention de réaliser l'unité de ses États ou d’étendre la religion ou la culture grecque : on se demande où il aurait puisé une telle idée, totalement étrangère aux Grecs. Aucun roi hellénistique, pas plus Antiochos IV qu’un autre, ne s’est soucié d’helléniser ses sujets dont il attend seulement qu’ils paient le tribut et se tiennent tranquilles. Rien dans la politique d’Antiochos IV, bien connue par ailleurs, ne laisse entrevoir la moindre volonté d’une politique d’hellénisation forcée, ou de promotion des cultes grecs. Mais, comme ses prédécesseurs et ses successeurs, lorsque des indigènes suffisamment hellénisés souhaitent acquérir le statut favorable d’une polis, il le leur accorde si cela ne contredit pas ses intérêts.

Là où Antiochos IV commettait une magistrale erreur politique, c’est qu’il n’avait pas compris qu’abolir la Torah ne revenait pas seulement à priver les Juifs de leurs lois civiles, mais conduisait à l’abolition du judaïsme. Nombre de Juifs pieux préférèrent le martyre (d’où les récits édifiants de 2Maccabées), alors que d’autres fuirent au désert. La répression fut d’autant plus sanglante que beaucoup de Grecs et de Syriens accusaient les Juifs d’arrogance : on leur reprochait de nier la divinité des dieux des autres, de refuser de partager leurs repas, d’éviter tout contact sous prétexte de pureté rituelle.

C’est à ce moment-là (courant -168, début -167), et à ce moment-là seulement, qu’intervinrent Mattathias et ses fils, notamment Judas, le seul à qui convienne le nom de Maccabée (d’étymologie incertaine). La révolte est déjà bien commencée, mais sans chef, et sans objectifs clairs. Pire, les révoltés sont si pieux qu’ils se laissent massacrer le jour du shabbat pour ne pas violer la Loi ! Judas et ses frères commencent à organiser une troupe efficace et s’entourent d’exégètes de la Loi compréhensifs, qui les autorisent à se défendre tous les jours de la semaine.

S’engage alors ce qui apparaît bien comme une lutte de libération rapidement couronnée de succès. Dès décembre -165, Jérusalem est délivrée et le Temple à nouveau dédié à Yahweh. Après la mort d’Antiochos IV en Iran à l’automne -164, et l’avènement d’un roi mineur, Antiochos V, des négociations s’ouvrent : non seulement les deux principaux ministres du roi défunt s’affrontent, mais une mission sénatoriale romaine de passage dans la région a fait savoir qu’elle apportait son plein soutien aux Juifs. Dès le printemps -163, l’édit de persécution est rapporté. La guerre se poursuit néanmoins dans la confusion, probablement parce que les communautés juives dispersées aux abords de la Judée se sentent menacées : on connaît ainsi des expéditions de Judas et de ses frères en Syrie du Sud, en Transjordanie, en Idumée (Négev) pour secourir des Juifs persécutés. D’autre part, les troupes séleucides n’ont pas été vaincues : elles continuent à occuper la citadelle de Jérusalem, l’Akra. En fait, il s’agit d’une guerre impossible : les Juifs révoltés mènent une guérilla contre laquelle les troupes régulières séleucides sont désarmées, alors que les Juifs sont incapables de battre les Séleucides en rase campagne.

La guerre s’essouffle d’autant plus qu’un accord politique est intervenu entre les Maccabées (Judas a été tué au combat au printemps -160), conduits désormais par Jonathan, et leurs adversaires. Alors que les Hellénistes les plus extrémistes sont éliminés (Ménélas a été exécuté de façon atroce à Alep), un nouveau grand prêtre, Alcime, choisi parmi les Hellénistes modérés, a été désigné : preuve que même aux yeux des révoltés, les Hellénistes n’étaient pas tous des impies ! Après sa mort en -159, pourtant, il n’est pas remplacé. La chronologie des années -157--152 pose problème, mais pour faire court, on peut dire qu’en -152, Jonathan, profitant de la guerre civile qui oppose deux prétendants au trône à Antioche, parvient à se voir reconnaître le titre de Grand Prêtre (auquel il n’a aucun droit) en même temps qu’il est honoré de titres de cour séleucides. Contrairement à ce que l'on prétend parfois, jamais, à aucun moment, aucun Séleucide ne reconnaît formellement l’indépendance juive : des tentatives sont d’ailleurs lancées en -131--130 (avec succès), puis en -87 (sans succès) pour récupérer la Judée. Mais, de fait, les rois d’Antioche, affaiblis par une querelle dynastique qui empoisonne la vie du royaume jusqu’à sa disparition en 64, sont la plupart du temps incapables de contester l’indépendance de fait conquise par ceux que l’on nomme désormais les Hasmonéens, fondateurs d’un nouvel État juif fortement hellénisé, jusqu’à ce qu’Aristobule Ier prenne le titre de basileus en -104--103.

L’imagerie chrétienne s'est emparée de la révolte des Maccabées pour en faire une sorte de préfiguration du martyre chrétien[réf. nécessaire]. Cela a conduit à gommer totalement le rôle des Hellénistes et à présenter Antiochos IV comme une sorte d'Antéchrist, voire un précurseur des empereurs romains persécuteurs les plus fanatiques. Toute la documentation disponible, y compris celle d'origine juive contemporaine des faits, dément cette interprétation.


Maccabées, toile de Wojciech Stattler, 1844

Le royaume des Maccabées, ou Hasmonéens

Article détaillé : Hasmonéens.

Après la mort de Judas (160), son frère Jonathan prit la tête des révoltés. Dans des conditions qui nous échappent largement, il parvint à s'installer à Jérusalem, en 157 ou en 152. Il fut le vrai fondateur de la dynastie qui gouverna la Judée jusqu'en 40 av. J.-C., à laquelle on donne le nom d'Hasmonéens. Se succédèrent d'abord deux frères de Judas, Jonathan (160-143), puis Simon (143-135), puis le fils de Simon , Jean Hyrcan (135-104), son fils Aristobule (104-103), le frère de celui-ci Alexandre Jannée (103-76) et sa femme Salomé (jusqu'en 67), avant que leurs deux fils Hyrcan II et Aristobule II ne se disputent le pouvoir. Pompée, après la prise du Temple en 63, accorda le pouvoir religieux à Hyrcan mais le priva du titre royal tandis que son frère Aristobule était emmené à Rome pour figurer au triomphe de Pompée. Le dernier Hasmonéen, un fils d'Aristobule, Antigone Matthathias, résista jusqu'en 37.

Les Hasmonéens bâtirent à partir de 152 un véritable État en profitant de la rivalité entre deux rois séleucides. Jonathan se fit ainsi accorder non seulement des titres à la cour séleucide, mais aussi la fonction de grand prêtre (à laquelle il n'avait aucun droit) et d'ethnarque (c'est-à-dire chef du peuple) des Juifs, c'est-à-dire l'unique interlocuteur du pouvoir royal. Profitant de la paralysie du royaume séleucide, il entreprit sur le champ une politique de conquête de toute la Palestine, qui fut poursuivie par tous ses successeurs. Cette politique de conquête s'accompagnait le plus souvent de la judaïsation forcée des populations soumises (Iduméens) ou de leur exil (Grecs des villes de Décapole ou de la côte).

Malgré cela, l'État hasmonéen - qui devient royaume lorsqu'Aristobule Ier se proclame basileus en 104-103) prend l'allure d'un royaume hellénistique, avec une armée largement constituée de mercenaires, un monnayage imité des Grecs à partir de 128, une cour, des palais. Cela choque profondément les Juifs pieux qui avaient soutenu les Maccabées dans leur révolte contre les Hellénistes et les Séleucides, au point que l'on assiste le plus souvent à une rupture de fait entre ceux que l'on nomme désormais les pharisiens et les Hasmonéens. C'est aussi durant cette période que se développe une littérature fortement hellénisée, comme les livres de Judith et d'Esther, écrits sous la forme de romans hellénistiques.

Né de la révolte contre la politique d'hellénisation de Jason puis de Ménélas, le royaume hasmonéen favorise en fait l'entrée progressive du monde juif dans la culture grecque de son temps.

Bibliographie

  • Les 4 Livres des Maccabées sont reconnus par les orthodoxes comme partie de la Bible, tandis que les catholiques ne reconnaissent que les deux premiers, les protestants et les Juifs n'en reconnaissant aucun.
  • Premier livre des Maccabées
  • Deuxième livre des Maccabées
  • Victor Tcherikover, Hellenistic Civilization and the Jews, Philadelphie, 1956
  • Peter Schäfer, Histoire des Juifs dans l'Antiquité, Paris, 1989
  • Klaus Bringmann, Hellenistische Reform und Religionverfolgung in Judäa. Eine Unterschung zur jüdisch-hellenistischen-Geschichte (175-163 v. Chr., Göttingen, 1983
  • Martin Hengel, Judaism and Hellenism : Studies in their Encounter in Palestine during the Early Hellenistic Period, Londres, 1974-1976
  • Doron Mendels, The Rise and Fall of Jewish Nationalims, New York, 1992
  • Maurice Sartre, D'Alexandre à Zénobie. Une Histoire du Levant antique IVe s. av. J.-C.-IIIe s. ap. J.-C., 2e éd., Paris, 2003.
  • Christiane Saulnier, Histoire d'Israël de la conquête d'Alexandre à la destruction du Temple, Paris, 1985.
  • Ernst Schürer, The History of the Jewish People in the Age of Jesus Christ, 3 vol., Edinbourg, 1976-1986.
  • Étienne Nodet et Marie-Françoise Baslez, La crise maccabéenne: historiographie juive et traditions bibliques, Cerf, 2005 (ISBN 2204076414 et ISBN 9782204076418)

Voir aussi

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