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Loi de Say
Pour les articles homonymes, voir Say.En économie, la loi de Say (ou loi des débouchés) est un principe attribué à l'industriel et économiste français Jean-Baptiste Say énonçant que la création d'un bien trouverait toujours un débouché, dans la mesure où le bien est de qualité. Cette « loi » est souvent résumée par « l'offre crée sa propre demande ».
Sommaire
Ce qu'a vraiment écrit Say
En réalité, une telle affirmation est absente de l'œuvre de Say. Les citations exactes, extraites du Traité d'économie politique de 1803 (livre I, chapitre XV, Des débouchés), sont les suivantes:
- « c’est la production qui ouvre des débouchés aux produits »
- « l’achat d’un produit ne peut être fait qu’avec la valeur d’un autre »
- « un produit terminé offre, dès cet instant, un débouché à d’autres produits pour tout le montant de sa valeur. »
En d'autre termes : le producteur d'un produit nouveau a maintenant quelque chose à offrir aux autres, il devient solvable, et leur offre un nouveau débouché pour leurs propres produits parce qu'il ouvre des perspectives d'échanges nouvelles.
La différence est importante : Say n'affirme pas qu'un bien trouve toujours un débouché ou autrement dit que produire est la condition suffisante pour trouver un débouché, il énonce que produire est une condition nécessaire à la création d'un débouché (mais un débouché pour les autres producteurs).
La Loi de Say telle qu'elle est connue résulte surtout de l'interprétation erronée qu'en a donnée John Maynard Keynes.
Les « démonstrations » de la « loi de Say »
Plus il y a de biens produits, plus ces biens peuvent ouvrir une demande pour d'autres biens. Inversement, une nouvelle demande sans production préalable n'offre en réalité aucune perspective d'échange, donc aucun débouché nouveau ; elle ne peut pas stimuler la production et dans ces conditions, la croissance passe par la stimulation de la production et non de la consommation.
Une conséquence centrale de la « loi de Say » est que la récession ne provient pas d'un problème de demande ou de manque de monnaie. Une création monétaire, créatrice de demande, n'entraînerait que de l'inflation : sans production correspondante, il n'y a pas de demande réelle, solvable, mais seulement réduction de la valeur de la monnaie.
Le raisonnement précédent suppose que la monnaie est totalement neutre, c'est à dire qu'elle est un bien sans valeur intrinsèque.
Selon Say, personne n'a intérêt à conserver de la monnaie. On vend un produit, non pas pour récupérer de la monnaie mais pour en acheter un autre (d'où la célèbre citation de Say : « les produits s'échangent contre des produits »). La monnaie ne serait qu'un voile qui masque le caractère réel de l'économie (on parle de dichotomie entre secteur réel et secteur monétaire). Tout se passerait comme si l'économie n'était qu'une série de troc.
Un producteur qui vend un produit utilise sa recette pour acheter d'autres produits et crée ainsi une demande d'un montant équivalent. Conclusion : toute offre crée sa propre demande ; une crise généralisée de surproduction est donc impossible. Il peut seulement exister des crises sectorielles', parce que les producteurs peuvent mal estimer leur demande ( = la production des autres secteurs) et la production de leurs concurrents : il en résulte (presque inévitablement) un déséquilibre entre deux groupes de biens, ceux produits en trop grande quantité et ceux produits en quantité insuffisante, les premiers ne trouvant alors plus leur contrepartie à cause du manque des seconds, jusqu'à ce que les moyens de productions se déplacent vers les biens manquants.
Interprétations et controverses modernes
La « loi de Say » a en particulier été contestée par John Maynard Keynes et sa "réfutation" est une des bases de ses théories. Keynes affirme que des agents peuvent avoir intérêt à conserver de la monnaie, notamment pour des motifs de précaution, de spéculation et de transaction, affirmation qui prend toute son ampleur dans un contexte que Keynes qualifie de « radicalement incertain » (c'est-à-dire que l'avenir est incertain et non-probabilisable). Dans ces conditions, Keynes affirme que la création monétaire peut avoir, et a effectivement, un effet stimulant sur la production.
On notera qu'à la base, le raisonnement est exactement celui de Say, la seule différence étant dans la valeur attribuée à la monnaie (nulle pour Say, non nulle pour Keynes). Dès que l'on admet que la monnaie a une valeur propre, la création monétaire devient une production comme une autre, un produit que des agents peuvent souhaiter acquérir en offrant des biens nouveaux produits à cet effet, et la loi de Say s'applique directement : l'émission de monnaie devient une production qui ouvre de nouveaux débouchés[1].
Keynes, à son tour, s'est trouvé contesté par les monétaristes, qui estiment que la monnaie et sa valeur ont moins d'importance que les anticipations sur leur variation, et qu'en conséquence jouer sur la monnaie pour stimuler l'économie revenait surtout à jouer avec la monnaie, jeu dangereux causant plus de désagréments à long terme que d'avantages à court terme.
Notes et références
- ↑ Cela est cohérent avec l'opposition de Keynes à l'étalon-or : l'émission monétaire n'a pas autant de limites que la la production d'or, le manque d'or pouvant constituer un goulot d'étranglement de l'économie réelle
Voir aussi
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