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L'Autre (film, 2003)
Pour les articles homonymes, voir L'Autre.L'Autre, deuxième long métrage de Benoît Mariage (2003), se situe à la frontière d’une représentation du réel « brut » et de la non-incarnation voire l’abstraction de ce dernier, les œuvres majeures étant celles qui réussissent à respecter ces deux pôles.
Sommaire
Une rencontre entre un handicapé et une personne « normale »
L'Autre est la rencontre entre Laurent (Kuenhen), jeune homme vivant dans une institution spécialisée, et le couple que forment Claire (Dominique Baeyens) et Pierre (Philippe Grand’Henry). Ce couple un peu bo-bo, va avoir son premier enfant mais Claire attend des jumeaux. Elle va lâcher prise face à cette responsabilité supplémentaire et inattendue et recourt à une réduction de grossesse qui ne laisse subsister qu’un des deux fœtus. Cet acte médical reposant « uniquement » sur des motifs psychologiques va éloigner imperceptiblement Pierre de Claire (et inversement). Pierre parti, Claire va alors sortir de sa bulle en travaillant comme éducateur dans l’institution de Laurent.
Le mélo évité
Sur ce canevas peu banal qui aurait pu donner lieu au pire mélo, Benoît Mariage ne surcharge ou ne surligne rien mais il dénoue le fil de son histoire en accordant à tous une même attention. Il déploie certaines séquences qui valent plus que des longs dialogues : celles ou le père fait le deuil de cet enfant qui ne sera pas en roulant seul sur son vélo-tandem, celle où Claire participe à la mise en place d’une crèche de Noël dans l’institution de Laurent (qui donnera lieu à une bien curieuse « maternité » moderne auprès d’un ange à l’aile cassée). Il n'y ni cynisme, ni humour gras lorsqu’est filmée la cérémonie de « départ à la retraite » de Laurent qui, en raison de sa vision déclinante, doit cesser de travailler et ce en dépit de son jeune âge. Le directeur du centre, incarné par Bouli Lanners, montre aussi que la fermeté est parfois nécessaire vis à vis de ses « pensionnaires » et ne cachera s pas à Claire que, si c’est pour apaiser sa culpabilité qu’elle demande à travailler auprès de Laurent, il est préférable qu’elle renonce. Un certain imaginaire « chrétien » est moins présent que dans les films des Dardenne ou dans Une part du ciel de Bénédicte Liénard.
Une résonance universelle
Après un premier long métrage reposant sur la loquacité de Benoît Poelvoorde (Les convoyeurs attendent), L’Autre fait office de film mutique. La musique y est d’ailleurs quasiment absente. Ce qui séduisait dans Les convoyeurs, les points de fuite du récit tels les paysans posant dans leurs champs détruits par la grêle, le plan de l’accident de voiture du fils, l’envol des pigeons lors du départ d’une compétition colombophile, etc., sont ici développés et en quelque sorte magnifiés. En s’affranchissant d’un scénario trop linéaire ou balisé, L’Autre se dote d’un véritable espace où peut s’épanouir le rendu de la nature, des paysages et des éléments : les cheveux dans le vent de Claire qui viennent effleurer le visage de Laurent…
Passage à la couleur
Le passage à la couleur (Les convoyeurs sont en noir et blanc) est à remarquer : on sent qu’une grande attention y a été portée et cela rappelle les derniers films de Kaurismaki comme Au loin s’en vont les nuages et L'Homme sans passé. Si dans le premier film, de Mariage, on pouvait encore sans trop difficulté rencontrer les ombres de Henri Storck et Joris Ivens ainsi que celle de Paul Meyer, on sent ici un véritable affranchissement. Toute une série d’éléments, tels le choix des acteurs et lieux, enracinent L’Autre en Wallonie avec une véritable résonance universelle. On y retrouve l’excellent acteur flamand Jan Decleir dans un rôle clé du film…
Voir aussi
Articles connexes
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