- Hors-champ
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Le hors-champ désigne au cinéma tout ce qui n'apparaît pas à l'écran mais existant dans l'idée que se fait le spectateur de la scène et sa narration. Le hors-champ est un élément souvent utilisé pour créer un effet d'attente et de suspense. Il utilise alors l'imagination du spectateur qui doit deviner ce qu'il ne peut voir.
On considère parfois que le hors-champ comprend l'ensemble de l'espace diégétique, c'est-à-dire tout ce qui fait partie de l'espace et du temps de ce qui est filmé. Certains cinéastes jouent avec cette notion de hors-champ comme Jean-Luc Godard dans le Mépris.
Le hors-champ désigne donc bien tout ce qui ne se trouve pas à l'image à un instant donné du film mais qui est censé malgré tout exister dans l'univers du film.
Par opposition, on utilise le terme « hors-cadre » pour désigner tout élément qui non seulement n'est pas visible à l'image mais n'est pas non plus censé exister dans l'univers du film.
Ainsi par exemple, dans un film tourné à Paris de nos jours, et lorsque la tour Eiffel n'est pas visible à l'écran:
- si le film se déroule de nos jours, ou en tout cas après 1889, date de construction de la tour Eiffel, celle-ci est « hors-champ », étant non visible mais existant dans l'univers du film.
- si le film se déroule avant 1889, alors que la tour Eiffel n'existait pas encore, celle-ci est « hors-cadre », étant non visible et n'existant pas dans l'univers du film.
L'équipe de tournage et la caméra constituent le principal « hors-cadre » du cinéma : jamais visibles à l'écran dans la majorité des films et n'étant bien évidemment pas censés exister dans l'univers du film non plus. Cependant, dans certains films, le réalisateur s'amuse à utiliser la caméra ou la prise de son comme acteur du film, donnant un aspect « reportage ». Dans ce cas précis, la caméra n'est donc pas « hors-cadre » mais bien « hors-champ ». C'est le cas par exemple de certains films de Peter Watkins comme La Commune (Paris, 1871) ou Punishment Park.
Lecture
D'après certains critiques (Michel Colin, Roger Odin), l'œil d'européen est éduqué par la lecture des textes écrits, donc lorsqu'il regarde une image, l'œil la balaie de gauche à droite et de haut en bas. Ainsi, l'œil fixe d'abord un objet en haut à gauche, puis va vers la droite ; si aucun objet (ou personnage, mur...) ne se trouve à la droite de l'image, le regard sort du cadre avant de revenir vers la gauche de l'image. Ainsi, en ne mettant aucun objet à droite d'une image (on dit que l'image est « ouverte »), le réalisateur laisse un espace de liberté, d'inconnu, le spectateur s'inquiète de ce qui se trouve hors-champ à droite, alors que la gauche le laisse indifférent. Dans de nombreuses scènes d'angoisse (notamment dans les films policier ou fantastiques), les personnages sont serrés à gauche et se dirigent vers la droite (l'inconnu), l'image étant ouverte à droite et fermée à gauche.
Dans les pays ayant un sens de lecture différent, l'effet n'est pas ressenti de la même manière.
Cette théorie de l'image « lisible » comme un texte et pas seulement « visible » n'est cependant pas admise par tous ; certains cinéastes comme Eisenstein considèrent que l'oeil est attiré d'abord par l'espace occupé et se dirige ensuite vers l'espace libre, ce qui est plus en accord avec les expériences scientifiques sur la question (par exemple, sur une sculpture de visage, le regard s'attarde sur les éléments saillants, comme la bouche ou les yeux, et pas sur les espaces de peau vides de tout détail).
Voir aussi
Wikimedia Foundation. 2010.