Circuit Keynesien

Circuit Keynesien

École du circuit

L’école du circuit ( ou « circuit monétaire ») est un petit courant de pensée économique, en partie français, italien et suisse qui démarra a la fin des années 1970. Issu partiellement du marxisme économique, le courant est cependant très proche du post-keynésianisme car il base sa théorie a partir de deux ouvrages clés de Keynes, la Théorie Générale (1936) et surtout le Traité de la monnaie. (1930); en effet cette théorie reprend la notion de demande effective et d'anticipation, et souligne l'importance du temps qui justifie l'appellation de « Circuit Dynamique ».
Ses principaux représentants sont en France Frédéric Poulon, Alain Parguez et Bernard Schmitt, en Italie Augusto Graziani. La théorie du circuit s'oppose nettement à l’école néoclassique.

Ce courant de pensée économique repose sur l'emploi de la Comptabilité Nationale. L'économie est ainsi modélisée sous forme de pôles (Administration, Ménages, Banques, Entreprises, Reste du Monde), et permet d'observer les flux entre les pôles au cours d'une période.

Contrairement à l'école néoclassique qui voit la monnaie comme un élément n'ayant aucun effet sur la production (comme un simple intermédiaire des échanges ou un « voile »)[1], la théorie du circuit établit son analyse sur la thèse de la monnaie endogène. La monnaie tient une place centrale pour au moins quatre raisons: elle est la base de la production et de son niveau, elle modifie les structures économiques et les comportements des agents, elle donne un nouveau sens au concept d'équilibre et de répartition des revenus, et elle est enfin, le cœur des crises économiques capitalistes (héritage marxiste).

Sommaire

Fondement de la théorie du Circuit

La théorie du circuit retrace la création et la circulation de la monnaie, elle est le coeur d'une économie monétaire: le pôle Banque prête aux pôles Ménage et Entreprise, et ces derniers consomment ou produisent. On peut étendre cette vision en économie ouverte avec le Reste du Monde, et avec la présence étatique via le pôle Administration.

Une économie hiérarchisée

Ici, l'état n'est pas l'agent économique principal des économies capitalistes. Le courant du circuit met en lumière trois pôles principaux, qui se hiérarchisent via leurs flux et leurs fonctions.

  • Les Banques (notées B), pôle financier, a pour fonction de financer l'investissement par le crédit, c'est le premier flux du circuit ( F ). Il s'agit du flux de financement net
  • Les Entreprises ( E ), décident de la production (deuxième flux dans l'analyse). Cette production effective résulte d'une anticipation de la demande agrégée, suivant la pensée Keynésienne. Le niveau de l'emploi et du revenu national dépend de ces anticipations. Cette production est financée par la production vendue de la période précédente (entre entreprises par les consommations intermédiaires ou directement par la consommation finale des ménages et Administration), par les emprunts contractés auprès des banques.

Elles vont aussi avoir une fonction d'investisseur ( I ), néanmoins la vision de l'investissement reste un simple artifice étant donnée qu'elle ne sort pas du pôle Entreprise.

  • Les Ménages ( M ), vendent leur force de travail aux firmes, perçoivent un salaire ( W ), des dividendes ( P ), achètent des biens ( C ), et placent leur épargne ( S ), résiduelle selon Keynes, auprès du pôle B. Le circuit se clôt donc par le flux S.


L'État et le Reste du Monde ne sont pas des éléments strictement nécessaires pour utiliser cette théorie. L'État a trois fonctions: il est banquier, entrepreneur et consommateur. Le Reste du Monde peut consommer comme les ménages, mais peut également dégager une capacité de financement pour financer les banques, cela a été repris pour expliquer les déficits jumeaux aux États-Unis. Toutefois, leur présence dans un circuit à cinq pôles (A pour Administration et RdM pour Reste du Monde) est nécessaire afin de modéliser les politiques de sorties de crise keynésienne.

Le circuit monétaire et le motif de finance

La représentation consiste a décrire le flux monétaire partant des banques et se dirigeant vers les entreprises, puis de ces dernières vers les ménages et son reflux vers les banques. Le motif de finance prend, dans la théorie du circuit, une importance capitale. L'investissement, qui crée le revenu, donc l'épargne, ne peut se réaliser que si un montant suffisant de monnaie est mis à la disposition des producteurs de biens capitaux par le système bancaire. Il en est donc de même par la suite pour les producteurs de biens de consommation. La séquence des flux dans une économie monétaire est donc:
Finance (crédits) -> Investissement -> Revenu -> Consommation (épargne)
La conséquence de cet enchaînement est l'endogénéité de la monnaie: la monnaie de crédit n'est pas créée de manière exogène par le système bancaire, elle est le résultat d'un flux de revenus de dépenses provenant de la production anticipée par les entrepreneurs.

La crise des économies capitalistes

Là ou les post-keynésiens parlent "d'instabilité des économies capitalistes", les circuitistes emploient le terme de crise. Il y a une condition d'apparition de la crise. Lorsque cette condition est remplie, la crise se manifeste principalement par la récession et le chômage ainsi que l'inflation.

La condition de crise

La condition d'équilibre dégagée antérieurement (positivité du profit ou I - F > 0) signifiait que les entreprises pouvaient rembourser leurs crédits F a l'aide de l'épargne existante. Mais si I - F < 0, c'est a dire lorsqu'il y a thésaurisation par les ménages, les firmes ne peuvent plus rembourser qu'une partie de leurs dettes; si ces dernières s'accumulent, nombre d'entreprises peuvent connaître des difficultés et être accumulé à la cessation d'activité. La condition de crises est donc l'inégalité I - F < 0.

Manifestation de la crise

Renouvellement de crédit

Les entreprises peuvent se voir refuser le renouvellement de leurs crédits par les banques. Elles ne réaliseront donc par leurs anticipations de production, la demande effective sera donc moindre, le déséquilibre se fera ressentir sur le marché des biens et services puis sur le marché du travail: le chômage involontaire Keynésien se développe. D'autre part, les entreprises en état de faillite seront des proies faciles pour les repreneurs (agents ayant fortement thésaurisé). Ce qui conduit a une restructuration et à un mouvement de concentration, entrainant des licenciements qui accentuent la tendance du chômage involontaire.

L'inflation

L'inflation peut représenter une porte de sortie de la crise pour les entreprises. En effet, l'inflation diminue les coûts salariaux, ainsi que la valeur des crédits sur le long terme. Néanmoins, il y a une limite négative: on peut tomber dans une spirale inflationniste, à la hausse des profits suscitée par la baisse des coûts salariaux et à la concentration des entreprises (économies d'échelle), les salariés obtiennent a la période suivante une hausse des salaires équivalente à celle des prix, ce qui va accroitre les coûts, et donc provoquer une hausse des prix, et ainsi de suite.

Bibliographie

  • Jean-Gabriel Bliek et Alain Parguez, Le plein emploi ou le chaos, ed. économica.
  • Augusto Graziani, The Monetary Theory of Production, Cambridge University Press.
  • Frédéric Poulon. Chapitres 2 et 10 in "Economie Générale". Paris : Dunod, 6èd.
  • Frédéric Poulon. "La pensée économique de Keynes". Paris : Dunod, 2èd.

Notes et références

  1. L'idée est ancienne et commune à l'école classique et à l'école néoclassique, avec en particulier les travaux de Jean-Baptiste Say
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