Château de Grignan

Château de Grignan
Château de Grignan
Image illustrative de l'article Château de Grignan
Vue d'ensemble du château
Période ou style Classique / Renaissance
Début construction XIIe siècle
Propriétaire actuel Conseil général de la Drôme
Protection Monument historique[1]
Coordonnées 44° 25′ 13″ N 4° 54′ 32″ E / 44.4202, 4.908844° 25′ 13″ Nord
       4° 54′ 32″ Est
/ 44.4202, 4.9088
  
Pays Drapeau de France France
Région historique Rhône-Alpes
Département Drôme
Commune de France Grignan

Géolocalisation sur la carte : France

(Voir situation sur carte : France)
Château de Grignan
Vue d'ensemble
Châtelet d'entrée
Extrémité de la galerie des Adhémar
Galerie des Adhémar sur la cour du puits
Cour du puits
Détail de la façade Renaissance des logis
Tour de l'aile sud et cour du puits vues de la terrasse
Aile des prélats
Aile des prélats(partie non restaurée)

Le château de Grignan, est un château du XIIe siècle construit sur un piton rocheux dominant Grignan en Drôme provençale, transformé en forteresse au XIIIe siècle par la famille des Adhémar.

Sommaire

Historique

Premier château

Le site de Grignan est d'abord un domaine agricole gallo-romain qui est devenu une dépendance de l'évêque de Die.

Au Xe une fortification est construite par la petite aristocratie locale.

Avant 1035, le propriétaire du premier château devient Rostaing de Grignan.

Dès 1106, la présence du château va permettre le regroupement des habitations à son pied. C'est probablement au XIIe siècle qu'est construite la première enceinte du bourg castral primitif.

Dans la seconde moitié du XIIe siècle, les Adhémar de Monteil vont progressivement capter la seigneurie.

Un branche cadette des Adhémar, les Adhémar de Grignan, vont posséder la seigneurie en 1239.

Pour assurer la sécurité de leurs terres, les seigneurs de Grignan obtiennent du comte de Provence, en 1257, qu'elles portent le titre de "terre adjacente de Provence", donnant des privilèges et l'autonomie fiscale et judiciaire.

Au XIIIe siècle le village s'agrandit nécessitant une modification de l'enceinte vers le nord. La chapelle Saint-Romain est construite pour le château ansi qu'un corps de salle allongé au nord dans le prolongement de la tour carrée résidentielle.

À la fin du XIIIe siècle la seigneurie devient une baronnie.

Au XIVe la défense des portes du château se renforce.

Le château Renaissance

Entre 1478 et 1495, Gaucher Adhémar (1450-1516)[2], qui fut au service de Louis XI, double la largeur de la salle, crée des espaces résidentiels et remanie les façades de l'ancienne forteresse du Moyen Âge .

C'est probablement le mariage de Gaucher Adhémar avec Diane de Montfort, héritière des titres de comte de Campobasso et de duc de Tremoli, qui a permis d'introduire de nouvelles formes architecturales. Ces formes sont déjà connus des Provençaux à Avignon et Marseille grâce aux œuvres de Francesco Laurana et de son école. Par ailleurs des membres de la famille de Grignan étaient au contact des comtes de Provence, tel Guyot Adhémar, bisaïeul de Gaucher, qui a été chambellan de Louis III d'Anjou en 1419. La sœur de Gaucher, Jeanne Adhémar, a épousé en 1439 Pierre de Glandevès, grand échanson du roi René.

En 1495, Gaucher Adhémar obtient de l'évêque de Die d'ouvrir une fenêtre dans la chapelle Saint-Romain pour construire la grande galerie d'apparat des Adhémar. L'état du château fait en 1516 après la mort de Gaucher Adhémar de Grignan cite deux fois la galerie qui est donc terminée à cette date.

Louis Adhémar (1474-1558), fils de Gaucher, a été ambassadeur du roi François Ier à Rome en 1538, puis lieutenant-général pour le roi en Provence en 1541. Il avait épousé en 1529 Louise de Tournon, nièce du cardinal de Tournon, ce qui lui permît d'approcher le roi François Ier.

Le roi François Ier, revenant de Marseille, où il avait rencontré le pape Clément VII et marié le futur Henri II avec Catherine de Médicis, accompagné de ses fils, de la reine et du duc de Vendôme, est venu visiter le château en novembre 1533.

Entre 1540 et 1545, Louis Adhémar entreprend la construction du corps de logis sud, probablement par Antoine Soysson qui a succédé, après 1539, au maître maçon Jean de l'Occhia, ou Jean Delauche, pour terminer l'édification de la collégiale Saint-Sauveur entre 1539 et 1543 en contre bas du flanc sud-ouest du château. L'ensemble formé par la grande galerie, les espaces résidentiels est et le nouveau logis sud entoure la cour du puits.

C'est au milieu du XVIe siècle qu'est construite la terrasse du château au-dessus de la collégiale.

Louis Adhémar est appelé par le roi pour être son ambassadeur à la diète de Worms de 1545 où devait être prises des mesures contre les protestants. Louis Adhémar parla au roi des Vaudois en disant qu'ils étaient 15 000 pouvant s'armer et attaquer les villes de Provence. Les prélats présents à Paris comme le cardinal de Tournon pressèrent le roi de prendre des mesures contre eux. Bien qu'absent de Provence, il a donc joué un rôle grave dans le massacre des Vaudois par les troupes du baron d'Oppède à Cabrières-d'Aigues et Mérindol en 1545 en poussant le roi à envoyer des lettres au président d'Oppède pour purger l'hérésie en Provence. Après la mort de François Ier, son fils, Henri II, étant opposé aux ministres de son père, permis un procès sur ce massacre. Il est condamné après une enquête, en 1547, et est jeté en prison. La construction du château s'arrête alors.

Grâce à l'appui du duc de Guise, Louis Adhémar obtient en 1551 d'Henri II un arrêt du Conseil privé accordant son absolution.

Un second chantier est entrepris entre 1551 et 1556 pour la façade sud dite façade François Ier. Elle est construite entre deux tours médiévales réhabillées dans le style Renaissance. Elle a 18 mètres de hauteur et 52 mètres de long. Elle est composée de 14 travées, de colonnes, de pilastres, de fenêtres à doubles croisillons.

Louis Adhémar est nommé par le roi lieutenant au gouvernement du Lyonnais.

En 1558, le roi Henri II érige la terre en comté au profit de Louis Adhémar.

En novembre 1558, Louis Adhémar meurt sans enfants. Bien que Louis Adhémar ait légué son château au duc de Guise en 1552, un jugement annule cette donation en 1563. Son domaine revient à sa sœur Blanche, mariée à Gaspard de Castellane, baron d'Entrecasteaux. Leur fils, Gaspard de Castellane relève alors le nom des Adhémar de Monteil.

Suit ensuite Louis de Castellane, fils de Gaspard de Castellane-Adhémar de Monteil, comte de Grignan en 1563, qui avait épousé le 24 mai 1559 Isabelle de Pontevès. Il a reçu le collier des ordres du roi en 1584. Il a été lieutenant général au gouvernement de Provence. Décédé en 1er août 1598.

Puis Louis François Adhémar de Monteil, mort en 1620. Il a épousé le 4 janvier 1595 Jeanne d'Ancézune. Il est le père de François Adhémar de Monteil, archevêque d'Arles,et de Jacques, évêque d'Uzès.

Son fils, Louis-Gaucher de Castellane-Adhémar de Monteil[3], comte de Grignan, est maître de camp du régiment d'Adhémar. Il a épousé le 16 mai 1628 Marguerite d'Ornano. Il est le père de François de Castellane-Adhémar de Monteil (1629 - 30 décembre 1714), de Jean-Baptiste Adhémar de Monteil, archevêque d'Arles où il succède à son oncle, de Louis Joseph, évêque de Carcassonne, et de Joseph, dit le chevalier de Grignan. Il est mort le 4 août 1668.

En 1654, Louis-Gaucher de Castellane-Adhémar s'est engagé à entretenir et refaire les voûtes et les toits de l'église Saint-Sauveur selon les besoin car la terrasse avait des infiltrations d'eau pouvant les mettre en péril. En 1675 et 1676 Mme de Sévigné s'inquiète de la situation critique de la terrasse. Une réparation intervient en 1680. C'est à cette époque que le parapet de la terrasse est remplacé par une balustrade.

Façade des prélats

Le 29 janvier 1669 François de Castellane-Adhémar de Monteil, seigneur du lieu épouse Françoise-Marguerite de Sévigné (née à Paris le 10 octobre 1646). Ce mariage était le troisième du comte de Grignan. Françoise de Sévigné était qualifiée de « plus jolie fille de France ». Elle avait fait ses débuts à la cour à 17 ans. La Fontaine célèbre sa beauté :

« Sévigné, de qui les attraits
Servent aux grâces de modèle
Et qui naquîtes toute belle
A votre indifférence prés »

— J. de la Fontaine, Fable I, livre VI.

La chute de Fouquet dont elle est l'amie va progressivement éloigner Madame de Sévigné de la cour. Cet éloignement de la cour va rendre difficile le mariage de Françoise de Sévigné malgré une dot importante de 300 000 livres.

Comme l'écrit Madame de Sévigné à son cousin Bussy-Rabutin : « la plus jolie fille de France épouse, non pas le plus joli garçon, mais un des plus honnêtes hommes du royaume ».

Lorsque le comte de Grignan est nommé lieutenant-général en Provence en 29 novembre 1669, il quitte Paris pour la Provence en 1670. La fonction de lieutenant-général nécessitait de réunir annuellement l'Assemblée des communautés, de prononcer le discours d'ouverture et de présider la première séance à Lambesc. C'était tout ce qu'on lui demandait. L'essentiel du pouvoir est passé progressivement à partir de 1672 à l'Intendant Jean-Baptiste Rouillé, comte de Meslay, auquel Colbert envoie ses instructions pour le gouvernement de la province et non à Grignan.

Le 4 février 1671, Françoise de Sévigné quitte à son tour Paris pour rejoindre son mari après la naissance de leur première fille, Marie-Blanche.

Mme de Sévigné étant, depuis Paris, séparée de sa fille, elle entama sa fameuse correspondance, et se rendit à Grignan trois fois pour de longs séjours. Son premier voyage dure quatorze mois entre le 30 juillet 1672 et le 5 octobre 1673. Le deuxième dure treize mois d'octobre 1690 à novembre 1691. Le dernier va de mai 1694 à sa mort le 17 avril 1696 où elle est au chevet de sa fille gravement malade.

Ce serait du château, dont elle aimait "la vue triomphante" de son immense terrasse, qu'elle écrivit à Jean Racine le fameux "Ici, nos nuits sont plus belles que vos jours"...

Madame de Sévigné s'inquiète des dépenses des Grignan dans ses lettres à sa fille en 1680 :

« Quand je considère votre château, ma bonne, rempli de toute votre grande famille et de tous les survenants, et de toute la musique, et des plaisirs qui attirent M. de Grignan, je ne comprends pas que vous puissiez éviter d'y faire une fort grande dépense. Il n'y a point de provisions dont on ne trouve très promptement la fin avec tant de monde. C'est une affaire d'en racheter; c'est un gouffre que la consommation de mille choses qu'il faut acheter. Cela n'était point ainsi du temps de feu, monsieur votre beau-père, et je ne puis concevoir le château de Grignan comme un lieu de rafraîchissement pour vous. Ainsi l'intérêt continuel que je prends à vos affaires, ma bonne, ne me laisse point jouir du repos que je me suis imaginé dans ce lieu, où vous croyez toujours que vous vivez pour rien. C'est où il n'y a point de remède. »

François Adémar de Grignan obtient l'aide de des frères, Jean-Baptiste, l'archevêque d'Arles et Louis Joseph, l'évêque de Carcassonne, pour construire l'aile des prélats à l'est du château, entre 1684 et 1690, permettant de régulariser les constructions édifiées du XIIe au XVIe siècle.

Au XVIIe siècle, le comte a fait ajouter à la façade de l'aile sud des percements de grandes niches à décor classique dans les quelques trumeaux nus de la façade et détruire l'aile ouest permettant d'ouvrir la cour du puits.

Le 17 avril 1696, Madame de Sévigné meurt au château. Elle est inhumée le lendemain dans la collégiale Saint-Sauveur.

Le fils du comte, Louis-Provence, né à Lambesc en 1671, meurt à Thionville de la variole le 10 octobre 1704. Pour rétablir la fortune des Grignan, il avait fait une mésalliance en se mariant avec Anne-Marguerite de Saint-Amans, fille d'un fermier général, qui a apporté 400 000 livres de dot. Cette mort prématurée va obliger la famille à rembourser cette dot.

Ruiné, le comte de Grignan meurt le 30 décembre 1714.

Sa fille, Pauline, née à Paris en 1674, hérite des biens et des dettes. Elle a épousé en 1695, le marquis Louis de Simiane. Pauline de Simiane devra régler la succession de son père et, devant l’étendue des dettes, devra se résoudre à vendre tous les biens.

Les Félix de Muy acquièrent le château le 5 avril 1732 avec ses dépendances pour 290 000 livres.

Après des éditions "sauvages", Pauline de Simiane décide de contrôler la publication des lettres de sa grand-mère, la Marquise de Sévigné, avec la collaboration d’un éditeur aixois, le Chevalier Denis Marius Perrin.

Destruction et reconstruction

Son neveu Jean-Baptiste de Félix du Muy, marquis de Saint-Mesmes, hérite du château. Il est nommé en 1792 général de division des armées, puis chargé de mission en Suisse par le gouvernement de la République. Malgré cela, il a été déclaré émigré. Le district de Montélimar, par arrêté du 11 nivôse an II (20 décembre 1793) ordonna la démolition du château comme l'un de ces « monuments qui insultent l'égalité en rappelant ces temps de servitude, de féodalité et de superstition, dont le fardeau a trop longtemps pesé sur un peuple rendu à la liberté ». Le mobilier du château est vendu du 18 au 27 décembre 1793. Pendant les premières années qui suivirent la destruction du château, le vandalisme fit rage au milieu de ses ruines.

Vue de Grignan en 1825

Le général du Muy meurt en 1820, laissant les ruines du château à son neveu Joseph de Félix.

Malgré ses ruines, le château a attiré des touristes anglais dans leur Grand Tour : John Hughes, maître-es-arts du collège Oriel à Oxford, en 1819, les sœurs Francesca et Caroline Colnaghi en 1845.

Léopold Faure de Grignan, acquit le château le 8 juillet 1838 de Ferdinand de Félix, comte du Muy, et se mit à l’œuvre pour sauver ce qu’il en restait. Il restaure vers 1850 les toitures du châtelet d'entrée. Il meurt en 1889 et sa femme en 1902.

Après sa mort, le comte Boniface de Castellane, célèbre dandy parisien s’en rendit acquéreur le 19 décembre 1902. Marié à la richissime américaine Anna Gould, il pensait que la fortune de sa femme permettrait la restauration du château. Malheureusement leur divorce rapide en 1906 arrêta le projet. Pour payer ses dettes le comte Boni de Castellane dispersa les quelques éléments architecturaux encore vendables. Il céda le château à son cousin, le comte Raymond de Castellane.

Le château fut finalement reconstruit au début du XXe siècle à l'identique grâce aux soins de Marie Fontaine qui l’acheta le 18 décembre 1912 et qui mit toute sa fortune pour restaurer cet édifice entre 1913 et 1931, haut lieu de l'histoire régionale. Le projet de restauration a été inspiré par Mgr Meffre, prélat du pape, et architecte diocésain de l'Isle-sur-la-Sorgue. Ils s'aident pour faire une restauration la plus authentique possible, et rétablir la beauté initiale de l’édifice, des peintures et croquis d’époque. Marie Fontaine meurt à Paris le 7 avril 1937. Le château revient ensuite à ses neveux Yvonne et Georges Baroux.

Le 10 janvier 1979 le château est vendu au conseil général de la Drôme.

La visite permet de découvrir des pièces remarquables : Tapisserie d'Aubusson, cabinets d'apparat, plan de Rome.

Dès la première cour intérieure on a devant soi, formant l'angle oriental de la façade restaurée, dite de François Ier, une tour légèrement en relief : la tour Sévigné. Elle est à deux étages et en pur style Renaissance original du XVIe siècle. Le premier étage était occupé par le cabinet de travail de Madame de Sévigné d'où son nom. La tour échappa au vandalisme et Léopold Faure la fit immédiatement consolider et réparer.

La façade François Ier est en restauration en 2009 et 2010.

Les fêtes nocturnes du château

Depuis 1987 et leur création par Didier Capeille, sont organisées dans la cour du château les « Fêtes nocturnes du château de Grignan », à savoir un spectacle en extérieur, représenté en juillet et août.

Notes et références

  1. Notice no PA00116961, sur la base Mérimée, ministère de la Culture
  2. Généalogie des Adhémar de Monteil [1]
  3. Généalogie des de Castellane-Adhémar de Monteil [2]

Bibliographie

  • Geneviève Jourdan, Cécile Rémond, Christian Trézin - Le pays de Grignan (Drôme) - Images du patrimoine - 2001 - ISBN 2-9516970-0-7
  • Roger Duchêne - Au château de Grignan avec Mme de Sévigné - 1994 - ISBN 2-9503912-0-6
  • Christian Trézin - Le château de Grignan au XVIe siècle - pp. 165-191, dans Congrès archéologique de France - Moyenne vallée du Rhône - 150e session - 1992 - Société Française d'Archéologie - 1995
  • Sous la direction de Roger Duchêne - Madame de Sévigné (1626-1696) : Provence, spectacles, "lanternes" - Colloque international du Tricentenaire de la mort de Madame de Sévigné au château de Grignan - 1998 - ISBN 2-9512152-0-7
  • Jean-Pierre Babelon - Châteaux de France au siècle de la Renaissance - Flammarion / Picard - 1989 - ISBN 2-08-012062-X, ISBN 2-7084-0387-7
  • Chrystèle Burgard et Michèle Bois - Fortifications et châteaux dans la Drôme. Des premières positions défensives aux châteaux de plaisance - Éditions Creaphis - Paris - 2004 - ISBN 2-913610-43-9

Liens externes

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