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Chef d'orchestre
Un chef d'orchestre est un musicien chargé de coordonner le jeu des instrumentistes des orchestres symphoniques, de jazz, d'harmonie ou de fanfare. Sa tâche consiste, sur le volet technique, à rendre cohérent le jeu de l'ensemble des musiciens par sa gestuelle, notamment en leur imposant une pulsation commune. Il règle par ailleurs l'équilibre des diverses masses sonores de l'orchestre. Sur le volet artistique, c'est à lui que revient la tâche d'orienter l'interprétation des œuvres, un processus qui s'étend à partir du choix du répertoire, de la première répétition jusqu'à la représentation finale.
Arturo Toscanini disait en substance : "Le chef d'orchestre est un prisme, une sorte de diamant, par lequel passe les faisceaux de toutes les individualités de l'orchestre"[réf. nécessaire]. De même, si le metteur en scène est au texte théâtral un intermédiaire au service du dramaturge, le chef d'orchestre est à l'œuvre orchestrale un intermédiaire au service du compositeur.
Sommaire
Fonction et travail du chef d'orchestre
Le chef d'orchestre peut être permanent ou invité. Dans le premier cas, un contrat le lie à l'orchestre avec qui il doit effectuer un certain nombre de concerts ou d'enregistrements dans l'année. Il participe également à l'administration de la phalange, aux recrutements des nouveaux membres et établit son programme. Le chef invité ne l'est que pour une courte période correspondant aux répétitions et à l'exécution d'un ou de quelques concerts.
Le travail proprement dit du chef d'orchestre se divise en trois phases : la préparation, la répétition, et le concert.
Phase de préparation
Durant cette phase, le chef d'orchestre acquiert une grande connaissance et une grande compréhension de l'œuvre à diriger. On pourrait dire que c'est la partie « structurante » de son travail.
Le chef analyse consciencieusement la structure de la pièce musicale, sa construction harmonique et son essence musicale. Il en retire une sorte d'« axe de lecture », qu'on appelle l'« interprétation ». C'est généralement une vision personnelle, une manière de comprendre le travail d'un autre. Une bonne interprétation traduit au plus près les intentions du compositeur, en exploitant au maximum les libertés laissées aux interprètes, justement.
À partir de cette compréhension, le chef d'orchestre cherche ensuite à apprendre et à intégrer les gestes qui communiqueront au mieux aux musiciens de l'orchestre la pensée du compositeur.
Phase de répétition
Après cette phase de préparation, le chef est prêt à faire travailler l'œuvre par les musiciens. Il est généralement l'organisateur du plan de répétition : timing, section de partition à travailler plus particulièrement, recherche de l'équilibre du son... Il peut aussi, par exemple, convoquer l'ensemble de l'orchestre, ou des pupitres séparés, comme vents d'un côté et cordes de l'autre. Si l'œuvre à interpréter comporte un soliste, il fait généralement travailler l'orchestre seul avant l'arrivée du soliste afin de rechercher un son d'ensemble et une cohérence musicale. Au bout du compte, il doit obtenir le son voulu, l'interprétation exacte qu'il désirait atteindre.
Cette phase, comme la phase suivante, requiert autant de qualités musicales que de qualités de communication avec les musiciens qui composent l'orchestre : communication gestuelle et diplomatie, bonne relation humaine afin de réduire tout stress, sensibilité musicale.
Phase de concert
En phase de concert, le chef d'orchestre a plusieurs outils pour communiquer avec ses musiciens, le principal étant ses gestes. Ses bras indiquent principalement :
- le tempo principal (vitesse), et ses variations ;
- la mesure ;
- les démarrages de chacun des solistes et pupitres ;
- les nuances ;
- les progressions harmoniques ;
- et tout autre facette de l'œuvre communicable d'une manière ou d'une autre par le geste.
Le chef d'orchestre ne néglige pas pour autant son expression faciale, qui pourra indiquer des subtilités supplémentaires : caractère du mouvement, nuance ou ambiance générale de l'œuvre.
Ainsi, on distingue dans l'action de diriger un orchestre deux catégories distinctes de gestes:
- un ensemble de signaux de commandement, établi selon un code conventionnel au cours des répétitions, et que l'instrumentiste déchiffre et traduit; on trouve dans cette catégorie les signes de départs, de mesure, de nuance, de nuances de jeu (amplitude du vibrato, timbre du son, etc.)
- un ensemble de gestes expressifs non conventionnels, qui ne traduisent aucun ordre explicite mais compréhensibles par les instrumentistes.
Ce sont souvent les gestes de la deuxième catégorie qui donnent son caractère à la direction d'un chef d'orchestre:
« Furtwaengler remplace à peu près tous les signaux impératifs et volontaires [...] par des gestes expressifs [...]. Avant de battre la mesure, il s'avise qu'il ne plaît peut-être point à la mesure d'être battue. Il renonce donc très souvent à "faire savoir" les départs aux musiciens par le geste de convention. Mais il ne le leur suggère qu'avec plus de précision. Et les musiciens partent avec une simultanéité absolue et, partant sous une impulsion directe et non pas "par ordre" [...] »— Fred Goldbeck, La Revue Musicale n°147 juin 1934
En concert, le chef est donc capable de « corriger » l'interprétation brute émise par les musiciens, en direct et discrètement... puisqu'il tourne généralement le dos au public. Le chef pourra également rattraper un décalage — rythmique, ou concernant la justesse — au moment même où celui-ci intervient.
Les chefs d'orchestre sont généralement formés en conservatoire : la formation comprend des cours d'harmonie, de solfège, d'orchestration, de pratique devant l'orchestre et de pédagogie.
Le bâton de direction, utilisé pendant l'époque baroque, a laissé la place à la baguette, dont l'usage n'est plus du tout systématique. Le bâton de direction servait surtout à taper la pulsation commune à l'ensemble des musiciens (Lully en est mort après s'en être donné un violent coup sur le pied). Cet usage s'est perdu à l'époque classique et les musiciens ont été dirigés soit par le claveciniste (quand il y avait un continuo), soit par le premier violon. Ce dernier donnait des indications avec son archet : respirations, coups d'archet, phrasé, attaques, etc... La partie la plus visible de l'archet était la mêche de par la couleur blanche des crins. Quand les fonctions de premier violon et de chef se sont séparées, cette ligne blanche de direction s'est matérialisée par une baguette dont la couleur est aujourd'hui celle du matériau la composant : fibre, carbone, bois ou autre.
Un orchestre sans chef ?
Cette situation est courante dans les petits ensembles (orchestre de chambre) mais n'est pas concevable pour de plus grandes formations. Par contre, le rôle de chef d'orchestre peut être cumulé avec celui de soliste (pour un concerto typiquement), voire avec le premier instrumentiste d'un pupitre (cas fréquent pour la musique baroque).
Durant plusieurs années, un orchestre sans chef a existé en URSS de 1922 à 1932, le Persimfans (l'abréviation du russe "Perviy Simfonicheskiy Ansambl bez Dirizhora" - Premier ensemble symphonique sans chef). Sa disposition était particulière : les musiciens se réunissaient de sorte à former un cercle de musiciens, certains devant tourner le dos au public. Les plus grands musiciens de l'époque ont collaboré avec eux, et cet ensemble réclamait énormément de répétitions.
Citations
- « C'est le public qui doit transpirer, pas le chef... » (Richard Strauss)
- « Un chef (d'orchestre) doit avoir la partition dans la tête et non pas la tête dans la partition » (Igor Markevitch)
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- (de) Julia Spinola, Die großen Dirigenten unserer Zeit. Mit ausführlichem Lexikonteil, Henschel, Berlin, 2005 (ISBN 3894874805)
- (en) Norman Lebrecht, The maestro myth: great conductors in pursuit of power, Pocket, Londres, 1997, 393 p. (ISBN 067101045X)
- (fr) Louis Hector Berlioz, Le Chef d'orchestre : théorie de son art (Grand traité d'instrumentation et d'orchestration modernes), 1856, 47 p.
- (fr) Édouard Marie Ernest Deldevez, L'art du chef d'orchestre, Firmin-Didot et Cie., 1878, 236 p.
- (fr) Désiré Émile Inghelbrecht, Le Chef d'orchestre parle au public, Paris, 1957, 227 p.
- (fr) Robert Parienté, La symphonie des chefs, Ed. La Martinière - 2005
- Ilya Musin, The Technique of Conducting (Техника дирижирования), Muzyka Publishing House, Moscow, 1967
- Ennio Nicotra, "Introduction to the orchestral conducting technique in accordance with the orchestral conducting school of Ilya Musin " book+DVD; english, italian, spanish text (Edizioni Curci Milano, Italy 2007)
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