Michèle Monjauze

Michèle Monjauze

Michèle Monjauze, née Michelle Milcent, (1931 à Saint-Jean-de-Monts dans le département de Vendée en France - ) est une écrivain et psychothérapeute française.

Sommaire

Biographie

Michèle Monjauze est née de parents tôt divorcés. Après un premier mariage, elle épouse Pierre Monjauze en 1973 et gardera ce nom après la mort de Pierre qui survient abruptement en 1987. Monjauze est un nom issu de la langue d'Oc, il vient du verbe “jauzir” qui veut dire jouir, “Monjauze” peut être traduit par “mon plaisir”.

Formations personnelles et activités professionnelles

Diplômée pharmacien de la Faculté de Nantes en 1958, elle exerce la pharmacie d'officine plus d'une dizaine d'années. Pratiquant l'écoute et l'assistance dans ce métier, elle sent la nécessité de se former à la relation, tout en souhaitant mieux se connaître et se comprendre. Elle entre donc en cure psychanalytique avec Guy Vannier, puis en relaxation psychanalytique avec Blandine Folliot et, parallèlement à son travail à l'officine, elle entreprend des études de psychologie à l'Université Paris X Nanterre. Là, elle fait partie des étudiants de maîtrise qui font du psychodrame avec Didier Anzieu. Elle fait ensuite avec lui un parcours psychothérapeutique qui aboutit à l'abandon de la pharmacie pour l'exercice de la psychologie clinique losqu'elle obtient un DESS (master 2) en 1980, puis à une supervision des prises en charge qu'elle mène dans le service de psychiatrie de l'hôpital de Saint-Germain-en Laye. Elle poursuit sa quête psychanalytique personnelle avec Joyce McDougall pendant huit ans. Bien qu'elle se sente extrêmement proche des pratiques psychanalytiques kleiniennes dans l'exercice de la psychothérapie, sa liberté de pensée fondamentale lui interdit d'appartenir à une société quelle qu'elle soit.

A l'hôpital de Saint-Germain en Laye, elle est chargée d'animer le groupe de parole des alcooliques. Cherchant à comprendre le dysfonctionnement de ces patients et insatisfaite des écrits sur le sujet, elle constitue une équipe de recherche incluant Marie-Madeleine Jacquet, recherche subventionnée par Le Haut comité d'étude et d'information sur l'alcoolisme (1982-1986). C'est alors que Jean-Michel Petot, professeur à Nanterre-université, suggère une thèse à deux voix intitulée “L'alcoolique, son corps et l'autre. Contribution à l'étiologie de la dépendance à l'alcool. Etude psychopathologique comparative de trois populations d'alcooliques et d'un groupe témoin (1087p.), 1987.” Cette étude comprenait l'application du test du Village par Marie-Madeleine Jacquet et celle du Test des Trois personnages par Michèle Monjauze. C'est dans son exposé de soutenance que Michèle Monjauze ose s'opposer aux idées reçues et ouvrir une nouvelle approche de l'alcoolisme. Didier Anzieu, président du jury de la thèse, lui propose aussitôt d'écrire un ouvrage dans sa collection “Psychismes” chez l'éditeur Dunod. Ce sera en 1991, La problématique alcoolique.

En parallèle à son activité de psychothérapeute dans le service de psychiatrie (1980- 1991), elle est vacataire à Nanterre dès 1982 : elle enseigne en psychologie sociale la dynamique des groupes restreints, en psychologie clinique elle reprend le psychodrame avec les étudiants de maîtrise, en psychopathologie elle supervise les stages et conduit un séminaire de recherche par les techniques projectives. Parallèlement, elle intervient auprès des étudiants en pharmacie, section officine, à l'université René Descartes, en communication, management, et travail en groupe, utilisant le test du Village. En 1991, Michèle Monjauze devient maître de conférences à Paris-X où elle élargit ses enseignements par un séminaire sur la problématique alcoolique, illustré par une filmographie comparative. Abandonnant en 1996 ses activités d'enseignement et de psychothérapeute, elle écrit plusieurs ouvrages dont le dernier en 2011.

Michèle Monjauze est sociétaire de la Société des gens de lettres de France depuis 2008.

L'approche psychanalytique monjauzienne de l'alcoolisme et ses conséquences thérapeutiques

En décrivant la problématique alcoolique en termes de sémiologie, psychopathologie et psychogenèse, Michèle Monjauze démontre la spécificité d'une pathologie aussi désastreuse que fascinante, par ses angoisses spécifiques, ses remarquables modalités défensives et ses capacités d'auto-guérison.

Hypothèse préalable : les relations intérieures

A la suite de nombre de psychanalystes kleiniens notamment, l'auteure souligne que nous conservons tous dans notre fonctionnement psychique des modalités psychotiques issues de la phase préverbale du développement (voir les “noyaux agglutinés” de Bleger”, les “poches autistiques” de Francès Tustin). Les acquisitions secondaires, toujours présentes néanmoins, sont marquées par la qualité des intégrations primaires et par les relations internes entre la part “psychotique” de notre fonctionnement et sa part “adaptative”. Récusant les étiquettes nosographiques, Michèle Monjauze parlera de “fonctionnement psychotique prévalent”, lorsque les angoisses primaires sont actives au point de perturber les fonctionnements adaptatifs, et de “fonctionnement névrotique prévalent” lorsque les angoisses primitives sont bien contenues. Chaque personnalité présente ainsi une relation interne spécifique entre ces deux modes : relation maternante de soi à soi, clivage, rejet et conflit... Il suffit de s'interroger sur le dialogue intérieur de chacun pour le comprendre.

Le paradoxe alcoolique

La part psychotique de la personnalité se manifeste pour certains par un besoin irrépressible de boire de l'alcool. Le remède inventé par les alcooliques eux-mêmes est essentiellement paradoxal : s'abstenir d'alcool puisqu'on ne peut pas s'en passer. La relation interne entre la part alcoolique et la part pensante du sujet est un clivage, soit le sujet ne se voit pas alcoolique, soit il pratique une amputation radicale dans l'abstinence.

Le traumatisme initial et les angoisses associées

Les quantités énormes d'alcool, qui est le meilleur des anxiolytiques, devrait attirer l'attention des thérapeutes sur la cause des conduites alcooliques : les angoisses primitives submergeantes, qui appellent l'alcool. Chaque personne alcoolique a sa façon répétitive d'utiliser l'alcool. Or toute répétition signale un traumatisme initial. Michèle Monjauze fait l'hypothèse que chaque façon de s'alcooliser provoque la reviviscence d'un trauma dont l'auteure définit la spécificité. Cette faille qui cherche en vain à se cicatriser reste inaccessible à la pensée et à la représentation.

La part alcoolique est d'ordre autistique et s'exprime par la création

Il ressort des tests projectifs, comme des entretiens, que la part alcoolique, d'ordre psychotique, n'est pas dissociative, mais est une “psychose associative” : l'angoisse surgit de toute rupture de continuité (entre les lieux, les personnes, etc.) Michèle Monjauze démontre dès 1991 que cette part alcoolique est d'ordre autistique. Cette enclave muette et souffrante peut s'exprimer par une médiation, et uniquement par une médiation, en individuel ou en groupe : l'objet créé, autour duquel on parle, se répare au-dehors. S'il est préférable que l'abstinence soit acquise auparavant (grâce notamment aux anxiolytiques et à la relaxation), la création, accompagnée par un fort soutien narcissique, peut se substituer à l'alcool en douceur. Il n'est pas impossible alors qu'une cure analytique du type de celles pratiquées par Gisela Pankow guérisse l'alcoolisme et permette une consommation contrôlée.

Les psychothérapies

Elles consistent à rendre le sujet apte à gérer sa pathologie lui-même : personne ne posera le verre à sa place. Il s'agit donc premièrement de soigner la honte inhérente à la pathologie par un soutien narcissique intensif en évitant de parler d'alcool : valoriser ce qui va bien et renforcer le positif. Ensuite, calmer les angoisses en utilisant comme médiation privilégiée la relaxation. Puis ouvrir au sujet un espace potentiel de création. On accompagne, on ne choisit pas, on n'impose pas. Une souffrance si précoce, comme la psychogenèse le laisse supposer, ne se guérit pas par un effort de volonté du patient ni une prescription du thérapeute. C'est un travail de patience à long terme pour mettre au jour des capacités insoupçonnées.

En référence aux artistes alcooliques des plus brillants, Michèle Monjauze voit dans chaque personne alcoolique des potentialités extraordinaires. Elle ouvre son dernier livre par cette phrase : “A mes yeux la problématique alcoolique témoigne de l'humanité la plus pure, dans sa détresse originaire, son audacieuse survie et l'invention de sa liberté.”

Publications

Principaux articles

  • 1986, “Fluctuations quantitatives et qualitatives des trios des alcooliques au Test des Trois personnages”, Bulletin de psychologie no376, tome 39
  • 1987, “Alcoolisme et imaginaire du corps”, in Les relations thérapeutiques aujourd'hui, tome I, L'Harmattan
  • 1990, “Racines culturelles de la dépendance alcoolique en Irlande à travers l'autobiographie de Kathleen Behan”, Etudes irlandaises, no XV-2 nouvelle série
  • 1991, “Les alcooliques au Test des Trois personnages”, Bulletin de psychologie no406, tome 45
  • 1996, “Les hypothèses psychopathologiques au service de la prise en charge”, Psychologues et psychologies, no 129
  • Monjauze M. et Jacquet M.M., 1985, “Essai de psychogenèse de l'alcoolisme”, La revue de l'alcoolisme, hors série, Masson
  • Monjauze M., Baudinet M., Van Amerongen P. 1988, “Un groupe de parole en évolution”, Alcool ou santé, revue de l'ANPA, 187
  • Zarka J. et Monjauze M., 2002, “Au coeur de l'incohérence, les alcooliques au Rorschach”, Bulletin de psychologie, tome 55, (2)458

Livres

  • 1991, La problématique alcoolique, Dunod, Paris, rééditions 2000, 2008 In Press
  • 1999, La Part alcoolique du Soi, Dunod, Paris épuisé
  • 2001, Comprendre et accompagnerle patient alcoolique, rééditions In Press, 2008, 2011
  • 2009, La vie psychique, In Press Paris
  • 2011, Pour une nouvelle clinique de l'alcoolisme, la part alcoolique du Soi, In Press, Paris (Sélectionné par le Choix des libraires, voir extraits sur lechoixdeslibraires.com)
  • Anzieu D. et Monjauze M. 1993, Francis Bacon ou le portrait de l'homme désespécé, Seuil/Archimbaud, Paris, 2004

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Michèle Monjauze de Wikipédia en français (auteurs)

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