Zéphirin Jeantet

Homme politique socialiste et résistant français.

Né en 1879, Zéphirin Jeantet abandonne à 28 ans sa qualité d'agent cantonal à Châtillon-en-Michaille pour acquérir la petite usine électrique de Coz, dont il va faire une des premières centrales électriques de l'est de la France, et une centrale déjà importante pour l'époque (1910-14), qui illuminera toute une série de villages déshérités. Il acquiert au même moment la source de Coz, dont naît la rivière de la Valserine qui traverse Bellegarde. Mobilisé en 1914 comme sous-officier du génie, après 52 mois de campagne qui lui valurent deux blessures, plusieurs citations, et la Croix de la Légion d'honneur, il termine la guerre avec les galons de capitaine. Rendu à la vie civile, cet homme à l'activité débordante crée une nouvelle entreprise, la scierie de Trébillet, devenue un important établissement industriel, qu'il dirigera pendant 25 ans.

L'engagement politique et la mairie de Bellegarde-sur-Valserine (Ain)

Défenseur actif d'une politique socialiste, il devient maire de Châtillon-en-Michaille. À la mort de Joseph Bertola en 1932, qui porte un rude coup au parti Radical-Socialiste régional, le parti lui propose de démissionner de la mairie de Châtillon pour se présenter à la candidature de la mairie de Bellegarde, deuxième ville en importance de l'Ain. Il accède à la mairie en 1932 et aide au développement de la ville, favorisant la création d'une vingtaine d'entreprises qui profitent directement de l'énergie du Rhône et de la Valserine grâce à la centrale électrique. Il sera maire de Bellegarde et conseiller général jusqu'en 1945.

La Résistance et les maquis du Jura

En 1940, après l'effondrement de la charnière de Sedan, les hordes allemandes motorisées déferlent sur l'Ain. Les Bellegardiens assistent avec stupeur à l'occupation de Coupy, la ligne de démarcation étant dessinée par la rivière de la Valserine. Les ponts de Coupy et de la Pierre servent alors de passage entre les deux zones. La Kommandantur étant installée à la Maison Carraz (rue Jules Ferry). Petit à petit les conditions de vie et de travail se dégradent, les restrictions sont draconiennes, l'essence est remplacée par le gazogène (bois) et l'alimentation soumise aux tickets réglementés. 1942-43 furent des années terribles pour la région, les jeunes des Chantiers de jeunesse se retrouvèrent systématiquement embarqués vers l'Allemagne, au travail obligatoire dans les usines d'armements. Nombre désertèrent et réussir à rejoindre les "maquis" du Jura ou de Savoie. Dans la région de Bellegarde, le plateau de Retord et le Crêt de Chalam devinrent vite des "maquis" importants. Les chefs des maquis étaient le plus souvent des officiers de réserve et même des sous-officiers que l'armée avait mis en disponibilité. La résistance commença ainsi grâce à des parachutages d'armes, qui permirent de créer des commandos de guérillas et des coups de mains permettant à ces jeunes d'être ravitaillés et de perpétrer des actes de sabotage. Une résistance du chemin de fer s'organisa ainsi pour faire sauter les convois allemands. À Bellegarde, le dépôt fut dynamité et la rotonde resta quelque temps sans fonctionner. Des cheminots, anciens combattants de 14-18 acceptèrent d'y laisser leur vie avec abnégation.

Zéphirin Jeantet, capitaine du Génie, fut un pionnier et un des premiers organisateurs de la résistance régionale, tout en gardant la mairie. Grâce à celle-ci, il put avec la collaboration de son secrétaire général, M. Prandini, établir un service de fausses cartes d'identité aux déserteurs des Chantiers de Jeunesse et à ceux recherchés pour le STO (Service de Travail Obligatoire) en Allemagne. Il s'occupa dès 1940 autant de la propagande, du camouflage des réfractaires, que de l'organisation des groupes armés. En février 1944, dénoncé, il réussit de justesse à échapper aux Allemands qui le traquaient, mais les représailles sont lourdes : ses maisons de Bellegarde et de Trébillet, ainsi que plusieurs fermes et bois sont incendiés par les Allemands. Et à 64 ans, il doit rejoindre la clandestinité et les groupes de maquisards qui vivent sous la neige. Pendant un an il est contraint de se cacher dans des caves froides pour poursuivre son action de chef local de la résistance. Mais il apprendra bientôt la mort de son fils, Marcel Jeantet, entré dans la résistance en 1940 et tué dans une escarmouche avec l'ennemi en mai 1944. Abattu par ces événements, il retourne à la vie civile après la libération, il est nommé président du comité local de libération et reprend ses fonctions de maire, en faisant la promesse de ne démissionner que lorsque tous les prisonniers seraient rentrés. C'est ainsi qu'il laissera la mairie de Bellegarde en 1945, après avoir offert à la ville la source de la Valserine. Il rejoint sa villa de Menton, où il décèdera en mai 1950 à l'âge de 70 ans. Il laissera derrière lui deux filles, dont l'aînée Denise (épouse Daniel Laval), au fils aîné de laquelle le grade de Chevalier de la République est accordé avec devoir de "relever" le nom des résistants Zéphirin et Marcel Jeantet. Ainsi Maurice Laval deviendra Maurice Laval-Jeantet à la mort de son grand-père.

Sources Marcel Berthet, maire de Bellegarde (de 1977 à 1994), dans "La Tribune Républicaine", 13 février 1992, et 9 avril 1992, Journal de Bellegarde-sur-Valserine. Discours de M. Ballet, maire de Montanges, représentant des Anciens de la Résistance, mai 1950. Discours de M. Georges Allera, adjoint au maire de Bellegarde, mai 1950.

• Portail de la Résistance française
• Portail de la politique