Trois dialogues entre Hylas et Philonous

Trois dialogues entre Hylas et Philonous

Les Trois dialogues entre Hylas et Philonous est un texte du philosophe irlandais George Berkeley de 1713 qui entreprend de convaincre les intellectuels londoniens que, loin d'être extravagantes et folles, les thèses immatérialistes sont valides et conformes au sens commun. Ces dialogues voient s'affronter deux personnages, Hylas, défenseur de la doctrine matérialiste (et contraire à celle de Berkeley) et Philonous, pour qui seuls existent les esprits et les idées. En trois entretiens, Philonous-Berkeley va convaincre Hylas du bien-fondé de ses thèses philosophiques.

Sommaire

Résumé des Dialogues

Premier dialogue

La discussion a lieu dans un jardin Philonous rencontre Hylas de bon matin. Philonous (philo-nous, étymologiquement "ami de l'esprit") défend les vues de Berkeley, l'auteur des Dialogues. Hylas (hylè, la matière), au contraire, croit en lexistence de la matière. Hylas rapporte à Philonous quil est considéré comme un sceptique, car il nie lexistence de la matière. Philonous réplique quHylas est plus sceptique que lui dans la mesure même il croit à lexistence de la matière. La question est donc de savoir qui est le plus sceptique. Définition du sceptique par Hylas : quelquun qui nie lexistence réelle des choses sensibles ou prétend quon ne peut rien connaître à propos delles ; pour Hylas lexistence réelle est lexistence dune chose à lextérieur de lesprit. Les choses sensibles sont les sensations des cinq sens (chaud-froid, goût, odeurs, couleurs, sonorités) et les figures, les grandeurs, le mouvement, la solidité des choses que lon peut percevoir. Pour Philonous les choses sensibles nont aucune existence hors de lesprit. Il commence par traiter du premier groupe de qualités : chaud-froid, odeurs, saveurs. Son premier argument consiste à noter le caractère plaisant ou déplaisant de ces sensations ; le second argument sappuie sur le fait que ces choses apparaissent différemment à différentes personnes. Il passe aux sons et aux couleurs et note que la sensation est toujours intime à lesprit et non extérieure à lui. Conclusion : ce premier groupe de qualités nest rien dautre que des sensations dans lesprit. Pour lautre groupe de qualités (figure, taille, mouvement et solidité) Philonous prétend que les mêmes arguments quil a employés précédemment fonctionnent (la variabilité de la perception). Il ajoute quon ne peut séparer la perception des qualités du second groupe de la perception des qualités du 1er groupe : elles sont liées les unes aux autres. Donc si les premières sont de simples sensations qui existent dans lesprit, les secondes aussi. Philonous présente en outre deux arguments pour montrer que la notion de quelque chose qui existerait hors de lesprit est une notion incompréhensible : limpossibilité de percevoir cette chose ; le fait quune idée ne puisse ressembler à autre chose quune autre idée. Fin du premier dialogue : Hylas reconnaît quon ne peut rien connaître de la « matière » entendue comme chose extérieure à lesprit, et que ce concept est incompréhensible. On ne connaît rien de la sorte. Hylas apparaît donc comme un grand sceptique, alors quil se prétendait le représentant du sens commun.

Deuxième dialogue

Hylas prétend que Philonous est dans la même position que lui : un sceptique, ce que Philonous récuse. Si Hylas a conclure que nous navons aucune connaissance des vraies propriétés des choses, cest parce quil a posé que les choses sensibles existent réellement hors de nous : on ne peut pas connaître de telles choses. Si lon change de conception, nous ne seront pas acculés au scepticisme. Pour Philonous une chose sensible existe réellement dans la mesure elle est perçue. La réalité consiste à apparaître. Nous sommes donc assurés que les choses quon perçoit existent réellement et quelles sont telles quelles nous apparaissent. Berkeley soppose à lidée dune existence « absolue » au sens de quelque chose qui existerait hors de nous : une chose « matérielle » ou une substance matérielle hors de notre esprit. De Berkeley tire un argument qui doit prouver lexistence de Dieu. Nous ne sommes pas les causes de toutes les idées qui se trouvent en nous, il faut donc un esprit qui les cause : Dieu. Berkeley distingue ensuite ses propres conceptions de celles de Malebranche. Enfin, Hylas essaie en vain de montrer que la matière occupe une sorte de position intermédiaire entre Dieu et nous.

Troisième dialogue

Ce dialogue commence par le désespoir dHylas, qui a été contraint au scepticisme. Il espère toutefois pouvoir réfuter la position de Philonous, comme Philonous a réfuté la sienne. Berkeley sadresse alors à lui-même toutes les objections quon a pu faire contre sa philosophie ; il y en a plus de 20. Ces objections ne sont pas présentées dans un ordre très clair. Toutefois, on peut les regrouper de manière thématique : - Le premier groupe dobjections concerne la notion de substance. Berkeley a conclu quil nexiste quun seul type de substance : la substance spirituelle ; tout le reste sont des idées qui existent dans lesprit. Mais la notion dune substance spirituelle est-elle plus intelligible que celle dune substance matérielle ? - Le second groupe dobjections porte sur ce que signifie « exister ». Est-ce être capable dêtre perçu ou est-ce être effectivement perçu ? Est-ce quun esprit qui perçoit peut se tromper sur ce quil perçoit ? Est-ce que deux esprits perçoivent le même objet ? - Le troisième groupe dobjections concerne la science naturelle. La science est fondée sur lidée que le monde matériel existe indépendamment de notre esprit. Elle est fondée sur un préjugé métaphysique. Est-ce que la science est encore possible avec la philosophie de Berkeley ? Sa prétention à expliquer le fonctionnement interne des choses est-elle recevable ? - Le dernier groupe dobjections concerne la question de savoir si le Dieu qui est la cause du monde, selon Berkeley, est assez parfait pour être le Dieu chrétien. Si Dieu est cause de nos idées, il est cause de nos douleurs et de nos mauvaises actions, ce qui semble impliquer une imperfection.

Après avoir répondu à ces objections Berkeley termine par la description des avantages de son « immatérialisme » par rapport au « matérialisme ». Il met en garde contre les erreurs qui poussent à rejeter limmatérialisme. A la fin du dialogue nous comprenons que Philonous nest pas le sceptique quil semblait être dans le premier dialogue : il ne soutient pas quon ne peut rien connaître du monde, au contraire il établit la réalité de nos perceptions. Le monde de Berkeley nest pas le monde dune substance matérielle qui nous serait inconnue ; ce nest pas un monde dont Dieu est absent. Dieu est immédiatement en contact avec les esprits qui perçoivent les idées. Ni le scepticisme, ni lathéisme ne peuvent triompher, la voie est ouverte pour le sens commun et la religion, qui doivent lemporter sur la philosophie abstraite.

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