- Sibylle Grimbert
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Sibylle Grimbert Activités écrivain Naissance 1967
ParisLangue d'écriture français Genres roman Œuvres principales - Il n'y a pas de secret (2004)
- Toute une affaire (2009)
- Le vent tourne (2011)
Sibylle Grimbert est une romancière française née à Paris en 1967.
Œuvres
Son premier roman paraît en 2000. Il a suffi de trente pages à son éditeur, Jean-Marc Roberts, pour décider de le publier[1]. Birth Days est le portrait d'une jeune femme, Muriel Ortisveiler, qui semble renaître à chaque bifurcation de sa vie, comme si son passé, à chaque étape, s'abolissait, et qu'elle pouvait repartir, neuve, sans âge. On la retrouve tour à tour mariée, seule, chanteuse, danseuse, voyageuse, seule à nouveau, seule surtout peut-être, mais semblable à toute femme. « Muriel est faite dans une terre meuble où tout se mélange. Elle renaît sans cesse sous vos doigts, se reforme entre vos mains. » Ce roman de l'identité éclatée, entre conte fantastique et introspection, est salué par la critique pour sa singularité et la force de son écriture, dont Hugo Marsan écrit : « Sibylle Grimbert ne serait qu'une jeune romancière parmi tant d'autres si elle n'imposait d'emblée un style solide, étonnant de précision et de subtilité, un rythme musical pénétrant, loin de toute gratuité complaisante[2]. »
Le Centre de gravité paraît deux ans plus tard. Claire est debout sur un terrain vague, dans une robe sale, les cheveux en désordre, quand Éric la rencontre. Il l'entraînera dans un voyage de huit jours, au cours desquels elle retracera le parcours qui l'a amenée jusque-là. Elle s'est peu à peu détachée d'elle-même, dégradation dont elle se rappelle trois étapes, trois états connus en quelques mois. Au début, elle vivait dans un accord parfait avec son corps, multipliant les rencontres, prête à s'abandonner. Mais elle s'éloigna de ce corps « élastique et disponible » et, son mari disparu, se retrouva seule, avant de devenir la proie d'une secte, et d'aboutir sur le terrain vague, où s'ouvrit la troisième étape, le temps des « déserts », de l'oubli total de soi. Désormais, elle n'avait plus de corps du tout. Elle flottait, insensible, inutile. Jusqu'à l'arrivée d'Éric qui, lui permettant de vivre à nouveau pour quelqu'un, la ressuscitera. « Le deuxième roman de Sibylle Grimbert porte incontestablement la marque d'un style en plein épanouissement[3]. »
En 2004, Les Inrockuptibles écrivent : « C'est avec son troisième roman », Il n'y a pas de secret, « que Sibylle Grimbert prend de l'ampleur, passe à un autre niveau d'écriture. Plus abouti, plus sensible, plus fort[4]. » La presse salue avec enthousiasme[5] ce récit à l'écriture « puissante, aiguë, retorse, insistante, épousant au plus près les tours et détours de la narratrice[6] ». Celle-ci s'interroge, vingt ans après sa disparition, sur les raisons qui ont poussé sa mère à tout abandonner sans rien dire, à s'évaporer « comme une buée sur une vitre ». Elle imagine ce qu'aura été cette vie « après », en invente les péripéties, multiplie les hypothèses à l'infini. Mais au-delà de tout, domine en elle la certitude qu'elle avait prévu ce départ, qu'elle peut tout prévoir. « Il n'y a pas de secret » : tout est transparent, on ne peut rien dissimuler, et l'avenir sera comme le passé. « De manière générale, je n'ai conservé de l'époque miraculeuse de mes quatorze ans, lorsque je croyais diriger les événements, qu'une faculté de prévision. Je l'applique ainsi aux sujets ordinaires de ma vie, si bien que je ne suis jamais surprise. Tout semble arriver comme je l'avais imaginé. Cette idée me rend folle. Je sais très bien que je la crée, qu'il faudrait ne pas chercher à anticiper les événements pour ne pas être déçue de les voir s'accomplir, mais j'en suis incapable, mon désir de maîtrise est beaucoup trop puissant et parfois j'en veux à l'univers entier d'être si logique et attendu. »
En 2006, Sibylle Grimbert quitte les Éditions Stock pour les Éditions du Seuil, qui publient Une absence totale d'instinct. Cette histoire d'amour racontée comme une guerre, en trois parties marquant les étapes d'un échec inexorable : « Le terrain », « La bataille », « La défaite », déconcerte et déçoit (à de rares exceptions[7]). « Si Grimbert est toujours d'une acuité singulière et d'une grande finesse d'observation et d'écriture concernant ses contemporains, et sans doute elle-même, la construction bancale de cette histoire d'amour et sociale (bancale, elle aussi), finit un peu par essouffler son propos[8]. »
Toute une affaire, qui paraît trois ans plus tard aux Éditions Léo Scheer, lui permet de renouer avec le succès critique[9]. Comme certains le soulignent[10], ce roman renouvelle la manière de Sibylle Grimbert : la dimension comique est plus accusée, le monologue intérieur s'ouvre sur une action romanesque plus précise, plus concrète[11] ; si l'on reconnaît ses thèmes centraux (les errances de l'identité, le poids du destin, la peur d'être coupé de la vie, la lucidité destructrice, la connaissance de l'avenir...), son univers a gagné en ampleur, en puissance romanesque. La narratrice travaille dans l'entreprise de confection masculine fondée par son père, et a le sentiment d'être prisonnière de cet héritage, de ne plus pouvoir vivre par elle-même, jusqu'au jour où elle décide de s'en aller. Mais elle ne supporte pas plus la liberté que la contrainte familiale, et ne pense qu'à revenir. Mathieu Lindon écrit d'elle : « Au sein de son accablement exalté, (elle) est perpétuellement dans une condition à la fois abominable et déplacée, presque loufoque. (...) Elle a un aspect irresponsable envers elle-même tout en s'estimant, quoique l'estime ne soit pas son fort, redevable du sort de tout et de chacun (...). “Tout d'un coup je me suis vue tel le personnage de ces affreuses blagues d'adolescents, ce premier de la classe disgracieux, ennuyeux, invité à une soirée dont on lui fait croire qu'il s'agit d'un bal costumé sur le thème fruits et légumes, et qui, croyant être enfin intégré, arrive déguisé en groseille comme le clou ridicule de la fête.” Plus personne ne paraît se souvenir de cette “personne intégrée” qu'elle aurait été. (Elle) est comme un personnage de film burlesque errant dans les débris des décors qu'elle contribue à détruire. (...) (Elle) se retrouve affublée d'une enfance inappropriée qui la couvre de ridicule pour mieux mettre en valeur son désespoir[12]. »
Son sixième roman, Le vent tourne, paraît en janvier 2011.Bibliographie
- Birth days, Éditions Stock, 2000
- Le Centre de gravité, Éditions Stock, 2002
- Il n'y a pas de secret, Éditions Stock, 2004
- Une absence totale d'instinct, Éditions du Seuil, 2006
- Toute une affaire, Éditions Léo Scheer, 2009
- Le vent tourne, Éditions Léo Scheer, 2011
Notes et références
- Cf. Hélèna Villovitch, « Nos dix romancières de la rentrée », Elle, septembre 2000.
- Hugo Marsan, « L'esprit de fuite », Le Monde, 25 août 2000.
- Franck Mannoni, « Les âmes errantes », Le Matricule des anges, juin/août 2002.
- Les Inrockuptibles, 18 août 2004.
- « Sibylle Grimbert (...) impressionne. (...) un texte fort et (...) un véritable écrivain » (Nelly Kapriélian, Les Inrockuptibles, 25 août 2004) ; « Un talent (...) exceptionnel : chapeau, Marcelle Proust... » (Gilles Chenaille, Marie-Claire, septembre 2004) ; « Sibylle Grimbert (...) fascine son lecteur » (Michel Abescat, Télérama, 22 septembre 2004) ; « Magistral » (Christine Rousseau, Le Monde, 8 octobre 2004) ; « Il n'y a pas de secret est un roman qui enlace pour laisser k.-o., sur le carreau » (Olivia de Lamberterie, Elle, 15 novembre 2004).
- Michel Abescat, loc. cit.
- Agnès Séverin, Le Figaro, 15 octobre 2007.
- Nelly Kapriélian, Les Inrockuptibles, 22 août 2006.
- « Sibylle Grimbert provoquera quelques séismes chez ses lecteurs. Ceux de l'introspection ou ceux du rire. » (Jeanne de Ménibus, Femmes, février 2009) ; « Ce qui frappe, de prime abord (...), c'est son style ample, envoûtant, emporté par une plume précise et décapante. » (Marianne Payot, L'Express, 5 février 2009) ; « Un style à la fois serpentin et précis, que (l')ironie constante et légère rend savoureux. » (Laure Mentzel, Le Figaro Magazine, 14 février 2009) ; « L'élégance du style et des idées, évidente dès le premier roman de Sibylle Grimbert (...) est plus que jamais présente. Elle est désormais teintée d'une nouvelle liberté, follement audacieuse. » (Hélèna Villovitch, Elle, 21 février 2009) ; « Sibylle Grimbert signe un roman extraordinaire sur la vie ordinaire. » (Gilles Chenaille, Marie-Claire, mars 2009).
- « Toute une affaire (...) va plus loin : cette fois, Sibylle Grimbert met en danger la torpeur de (sa) musique intérieure. » Gladys Marivat, Les Inrockuptibles, 18 février 2009.
- « Mon rapport à l'écriture demeure une lutte permanente contre la désincarnation. » Entretien avec Christine Rousseau, Le Monde, 8 janvier 2009.
- Mathieu Lindon, « Grimbert, suicide mode de non-emploi », Libération, 5 mars 2009.
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