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René Ménil
René Ménil Nom de naissance René Ménil Naissance 1907
Gros-Morne, MartiniqueDécès 29 août 2004 (à 97 ans)
MartiniqueNationalité Française, Martiniquaise Profession(s) Professeur de philosophie René Ménil (né en 1907 au Gros-Morne en Martinique - mort le 29 août 2004) est un philosophe et essayiste martiniquais. Il était professeur de philosophie au lycée Victor-Schoelcher de Fort-de-France. Il est avec Césaire, Fanon et Glissant l'un des plus grands penseurs martiniquais.
Sommaire
Son combat contre l'assimilation, l'aliénation culturelle et le colonialisme
René Ménil fait ses études en France métropolitaine où il côtoie les écrivains surréalistes. Il est également très proche du Parti communiste français qui le forme à l’idéologie marxiste. Il est un des intellectuels qui, au contact des mouvements de décolonisation et formés à l'idéologie marxiste, entreprirent de sortir la pensée antillaise de l'assimilation vers l'autonomie. Une prise de position qui, dans le contexte historique de l’époque, s’apparente à de la résistance. En 1932, alors professeur de philosophie, il publie un manifeste connu sous le nom de Légitime Défense avec un groupe d’intellectuels : Étienne et Thélus Léro, Jules Marcel Monnerot ou Auguste Thésée, aussi impliqués que lui dans une réflexion sur l’avenir de la Martinique et sur leur identité. Dans ce manifeste, ils dénoncent le colonialisme et le danger que représente, selon eux, la notion d’assimilation pour l’identité et la culture antillaise. René Ménil déclarait : "Dans le système colonial, la conscience des colonisés est façonnée, modelée conformément aux valeurs et aux vérités des maîtres. C'est dire que, dans chaque colonisé, le colonisateur a introduit, dans l'âme même du colonisé, les sentiments, les idées du maître. Dans chaque colonisé nous aurons une âme blanche dans un corps noir [1] ".
Dans le manifeste "Légitime Défense" on pouvait lire cette déclaration sur les comportements et attitudes de l'antillais victime d'aliénation culturelle : « l'Antillais, bourré à craquer de morale blanche, de culture blanche, de préjugés blancs, étale dans ses plaquettes l'image boursouflée de lui-même. D'être un bon décalque d'homme pâle, lui tient lieu de raison sociale aussi bien que de raison poétique[2]. » En outre, René Ménil et ses compagnons se dressent aussi contre « l’aliénation culturelle des populations noires des Caraïbes au modèle occidental ». C’est donc à travers la résistance politique qu’une littérature martiniquaise dite « engagée » s’est structurée et développée. Avec la Seconde Guerre mondiale, le régime de Vichy, alors incarné par l’amiral Robert, prend place au cœur de la Martinique. Face à l’arbitraire, René Ménil s’engage alors aux côtés d’Aimé Césaire, Suzanne Césaire, Aristide Maugée et Georges Gratiant dans la publication de Tropiques, en 1941. Dans une veine littéraire classique et soutenue, ces intellectuels fustigent clairement la colonisation, l'assimilation et le nationalisme français. La revue est interdite deux années plus tard. Après la guerre, Aimé Césaire, son compagnon de route, fonde le Parti progressiste martiniquais mais, lui, restera fidèle au Parti communiste.
L'un des pères de l'identité et la culture antillaise
En 1946, la Martinique devient département français et une partie des intellectuels de l’île s’intéressent de plus en plus aux mouvements internationaux de décolonisation. René Menil, quant à lui, reste fidèle à son parcours politique et publie Tracées, qui, plus tard, devait devenir Les Antilles déjà jadis, un ouvrage de référence. Dans tous ses écrits, René Ménil à proposé à ses lecteurs une vision toujours critique de la société dans laquelle il vivait et de la littérature contemporaine. Il n’a cessé durant toute sa vie de plaider pour une véritable littérature antillaise et de chercher à définir l'identité martiniquaise. En effet, il fut l'un des premiers penseurs à donner une définition de la culture antillaise et à indiquer les voies de son émergence. La culture antillaise dit-il : « c'est une façon d'être, de se comporter, de parler...Ce sont les croyances répandues dans nos campagnes et nos villes, ce sont ces fêtes et ses danses, ces objets fabriqués par nos artisans, cette littérature publiée par nos écrivains, ces gestes, ces attitudes corporelles dans la marche ou dans la danse, les expressions du visage dans la conversation, la façon de raconter et les tours du langage, les éléments spécifiques de l'habitat, toutes choses pour l'essentiel inimitables et dont l'ensemble a donné lieu à la formation d'une communauté psychique, d'une mentalité commune... Antillaise est notre culture, pour avoir réuni au cours de l'histoire et combiné ensemble dans un syncrétisme original tous ces éléments venus des quatre coins du monde, sans être aucun de ces éléments en particulier[3] ".
René Ménil, l'autonomiste
Les 21 et 22 septembre 1957, René Ménil, Georges Gratiant, Léopold Bissol et Victor Lamon fondent le Parti communiste martiniquais. Le PCM aura comme mot d'ordre l'autonomie pour la Martinique. René Ménil et le PCM considèrent que, malgré la transformation de la Martinique en département d'outre-mer, sa situation économique et sociale n'a guère évoluée et préconisent purement et simplement pour elle une évolution statutaire. Mais il faudrait selon René Ménil préparer le peuple martiniquais à accepter ce changement en accélérant la prise de conscience nationale. René Ménil déclarait " Si le peuple antillais existe et s'il a conscience de former une communauté vivante, il a par là même le droit imprescriptible de se gouverner souverainement[4] ". En outre, il considérait que "l'action idéologique et pratique doit viser la triple opération de rétablir la conscience des antillais dans la vérité de la vie, de procéder à l'appropriation de notre économie qui est une partie de nous-mêmes, de nous approprier le pouvoir politique sans lequel nous sommes des jouets aux mains des autres... Enfin, une troisième condition sans laquelle la culture ne peut pas exister, c'est la reprise, la récupération du pouvoir politique dans la société antillaise par les antillais eux-mêmes, ce qu'aujourd'hui nous appelons l'autonomie [5] ".
Le 14 février 1960, le PCM adopte un nouveau projet de statut pour la Martinique en proposant un territoire autonome fédéré à la République française. Les pouvoirs du territoire seraient exercés par une Assemblée législative et par un Conseil de Gouvernement. René Ménil sera l'un des inspirateurs de ce projet de statut pour la Martinique.
De 1963 à 1981, René Ménil publiait la revue trimestrielle "Action" qui présentait des études fouillées sur la politique, l'économie, les problèmes de société, la culture et le mouvement révolutionnaire mondial.
En 1999, il recevait le Prix Franz Fanon pour son essai "Antilles déjà jadis".
Le philosophe et écrivain martiniquais, René Ménil meurt le 29 août 2004 à 97 ans.
Œuvres
- Tracées : identité, négritude, esthétique aux Antilles, éditions Robert Laffont, 1992
- Légitime défense, 1932, réédité 1997
- Antilles déjà jadis, 1999
René Ménil est l'auteur de nombreux articles politiques dans le journal Justice, organe du Parti communiste martiniquais.
Notes
- ↑ Extrait de "Tracées", identité, négritude, esthétique aux Antilles publié en 1992, par René Ménil
- ↑ extrait du manifeste Légitime Défense
- ↑ Extrait de "Tracées", identité, négritude, esthétique aux Antilles publié en 1992, par René Ménil
- ↑ Extrait de "Tracées", identité, négritude, esthétique aux Antilles publié en 1992, par René Ménil
- ↑ Extrait de "Tracées", identité, négritude, esthétique aux Antilles publié en 1992, par René Ménil
Sources
- Pour l'émancipation et l'identité du peuple martiniquais, de René Ménil, 2008, L'Harmattan, auteur : Geneviève Sézille-Ménil
- Armand Nicolas, Histoire de la Martinique. Tome 3, Paris, L'Harmattan, 1998, 309 p.
- Guy Cabort-Masson, Martinique : comportements et mentalités, Saint-Joseph, La Voix du Peuple, 1998
- Patrick Chamoiseau et Raphaël Confiant, Lettres créoles
- Commentaires d'Edouard Glissant dans la postface de l'essai de René Ménil Tracées
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