Pyramides bosniennes

Pyramides bosniennes

Pyramide de Bosnie

Visočica surplombant Visoko

43°59.335′N 18°10.2162′E / 43.988917, 18.17027

L’hypothèse des pyramides de Bosnie (en bosnien, Bosanska piramida), appelées aussi « pyramides bosnienne » ou « colline de Visočica », est une hypothèse à prétention archéologique dont la presse s'est faite l'écho en octobre 2005.

Vue sous certains angles, la colline de Visočica, haute de 213 mètres et qui a été le centre de la capitale médiévale bosnienne Visoko, au nord-ouest de Sarajevo a une forme symétrique pyramidale. C'est à partir de cette constatation que Semir Osmanagić, écrivain bosnien, a formulé une théorie selon laquelle cette forme serait d'origine humaine. Sa théorie n'a reçu aucune reconnaissance de la part de la communauté archéologique internationale et a été dénoncée par une pétition d'archéologues comme un « canular cruel » et un « gaspillage de ressources » [1].

Sommaire

L'hypothèse de Semir Osmanagić

Semir Osmanagić avance la théorie suivante : bien que la plus grande partie de l'Europe fût, il y a 12 500 ans, couverte d'épaisses couches de glace, le bord méridional-européen, de l'Espagne à la Turquie, en passant par l'Italie, la Croatie et la Bosnie était favorable au développement de civilisations. Le développement des civilisations du Pacifique, de l’Atlantique et des pays du Moyen Orient, a laissé de fortes traces sur l’architecture et la vie spirituelle des civilisations du sud de l’Europe. La présence multimillénaire de la civilisation des Illyriens sur ces espaces a laissé derrière elle ces pyramides comme le témoignage de leur civilisation.

Les couches glaciaires qui ont fondu à cette période, ont provoqué l’augmentation du niveau de la mer de plusieurs centaines de mètres. Les traces de ces civilisations auraient été ainsi couvertes par la mer. Puis avec le temps le niveau de mer a reculé laissant place au développement de la vie végétale sur les ruines de ces civilisations.

Les auteurs ont successivement publié plusieurs datations. Ainsi, en 2005, au moment de la découverte du site, Osmanagić déclarait que ces pyramides avaient été construites en 12 000 av. J.-C. Puis il a précisé, quelque temps plus tard, que la datation de ce site n’était pas encore certaine et que les pyramides ont peut-être été construites entre 500 et 12 000 av. J.-C.[2], pour ensuite, après les découvertes faites dans l’année 2006, déclarer que ces pyramides sont peut-être les plus anciennes découvertes à ce jour[3].

Cette incertitude quant à la datation exacte de cette pyramide, ainsi que ses théories discutables concernant l'existence de la cité d'Atlantide[4], lui ont valu de fortes critiques des experts internationaux.

Les fouilles de la « Fondation du parc archéologique de la pyramide bosnienne du Soleil »

La vallée des « Pyramides »

Semir Osmanagić a créé la « Fondation du parc archéologique de la pyramide bosnienne du Soleil » laquelle est chargée des fouilles depuis l'année 2005. La fondation se présente comme composée d’une équipe internationale d’archéologues, d'historiens, d’anthropologues, et d'égyptologues venus d’Australie, d’Autriche, de Bosnie-Herzégovine, d’Écosse, de Slovénie, d’Égypte et des États-Unis[5],[6]. Les fouilles ont commencé en avril 2006, et pour le moment, aucune échéance n'a été annoncée.

Les fouilles ont commencé en avril 2006 sur la plus haute des trois collines de Visočica, présentée aujourd’hui comme « la pyramide bosnienne du Soleil ». Puis les travaux se sont élargis sur les deux collines voisines nommées « la Pyramide bosnienne de la Lune » et « la Pyramide bosnienne du Dragon », repérées par le satellite de la NASA (satellites haute résolution, NASA Landsat-7), et par photographies aériennes (le rapport fait mention de deux autres pyramides, dont l’une nommée pyramide de la Terre ). La dénomination de ces collines trouverait sa source, selon Osmanagić, dans leur ressemblance avec les pyramides mexicaines du Soleil et de la Lune. Un rapport émis par la fondation énumèrant ses conclusions sur sa recherche[7]. Ce rapport n’a obtenu aucune validation de la communauté scientifique internationale. Les avis des experts internationaux divergent sur l'hypothèse d’une première pyramide européenne. La majorité des archéologues et géologues réfutent toute hypothèse d’une construction humaine.

Les points de vue scientifiques

« Pyramide de la Lune »

Les déclarations de la fondation ont été remises en cause par des experts qui l’ont accusée de promouvoir des notions pseudo-scientifiques et d’endommager des sites archéologiques médiévaux par ses fouilles.

Ainsi, Garrett Fagan, professeur à la Pennsylvania State University, a dit « Ils ne devraient pas être autorisés à détruire des sites authentiques dans leur quête d’illusions [...] C’est comme si on autorisait quelqu’un à ravager Stonehenge pour chercher au-dessous les chambres secrètes d’une ancienne sagesse perdue[8]. » Par une lettre ouverte dans le journal The Times le 25 Avril 2006, le professeur Anthony Harding, président de l’European Association of Archaeologists, a qualifié les théories d’Osmanagić de « farfelues et absurdes » et exprimé son inquiétude qu’aucune sauvegarde suffisante ne soit mise en place pour protéger le « riche patrimoine » bosnien de « pillage et de développements sauvages non contrôlés[9] ». Le professeur Hermann Parzinger (Président de l’Institut archéologique allemand de Berlin), le professeur Willem Willems (Inspecteur général du Rijksinspectie Archeologie (RIA) de La Haye), le Dr. Jean-Paul Demoule (président de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) de Paris), le professeur Romuald Schild (directeur de l’Institut d'archéologie et ethnologie de l’Académie polonaise des sciences de Varsovie), le professeur Vassil Nikolov (directeur de l’Institut d'archéologie de l’Académie bulgare des sciences de Sofia), le professeur Anthony Harding (président de l’Association européenne des archéologues de l’Institut de c/o d'archéologie de l’Académie tchèque des sciences de Prague) et le Dr. Mike Heyworth (directeur du Conseil pour l'archéologie britannique de York) ont lancé en décembre 2006 une pétition internationale pour dénoncer « le canular cruel » et le « gaspillage de ressources » que constituent les recherches de la fondation[10]. Enver Imamovic de l’Université de Sarajevo, ancien directeur du Musée national de Sarajevo, inquiet que les fouilles endommagent des sites historiques comme la capitale royale médiévale de Visoki, a déclaré que les fouilles « détruiraient de manière irréversible un trésor national »[11].

Les détracteurs de la fondation mettent aussi en avant le manque de compétence de certaines personnes ayant soutenu ces hypothèses. Ainsi le directeur du musée de Visoko, Senad Hodovic, qui a au début appuyé la fondation était un professeur de marxisme dans la république yougoslave et n'a donc pas de compétence reconnue en archéologie ou géologie et s'est depuis éloigné du projet[12]. Ces critiques indiquent également que Harry Oldfield a une formation initiale en médecine traditionnelle indienne[13], c’est aussi le cas du medium allemand Karin Tag[14].

Curtis Runnels, expert en préhistoire de la Grèce et des Balkans à la Boston University, dit que : « Entre -27 000 et -12 000, les Balkans étaient pris dans le dernier maximum glaciaire, une période d’un climat très froid et sec, avec des glaciers dans certaines chaînes de montagnes. Les seuls occupants étaient des chasseurs-cueilleurs du haut Paléolithique, qui ont laissé derrière eux des sites de campement en plein air et des traces d’occupation dans des grottes. Ces restes consistent en de simples outils de pierre, foyers, et restes d’animaux et de plantes consommés comme nourriture. Ces peuplades n’avaient ni les outils ni les connaissances pour construire des monuments architecturaux[15]. »

Selon une source ancienne, le 8 mai 2006, des membres d’une équipe universitaire, avec à leur tête le professeur Vrabac, ont opéré des fouilles sur Visoko et ont donné une conférence de presse à Tuzla afin de présenter les résultats de leurs recherches. Les universitaires du Département des mines et de géologie[16] de l’université de Tuzla[17] et dirigés par le professeur Dr. Sejfudin Vrabac[18], ont conclu que la colline est une formation géologique naturelle, composée de couches de sédiments classiques de densités variées, et que sa forme est la conséquence de processus endodynamiques et exodynamiques au cours de l’ère post-miocène. Selon le professeur Vrabac, spécialiste en paléogéologie, il existe des douzaines de formations de morphologie semblable dans le seul bassin minier de Sarajevo-Zenica. Le rapport de l’équipe géologique sur Visoko, basé sur les données de six carottages de 3 à 17 mètres de profondeur, est appuyé par le Conseil de recherche et d’enseignement du Département des mines et de géologie, ainsi que par l’Association des géologues de Bosnie-Herzégovine[19].

Pour Stjepan Coric, géologue à l'université de Vienne, invité par Osmanagic à examiner le site, celui-ci s'explique par des formations naturelles. Les blocs de rocher ont été formés au fond d'un lac il y a 7 millions d'années, ce sont des brèches, ils ont été soulevés par des forces tectoniques qui leur ont donné leur forme géométrique. Les tunnels appartiennent sans doute à une ancienne mine sans que l'on puisse préciser leur âge[20].

Robert M. Schoch, de l’université de Boston, s'est déplacé sur le site. Après un examen du site, il a conclu qu'il s'agit d'une formation uniquement géologique de blocs de grès rompus par les forces tectoniques. Chaque trait mis en avant par Osmanagic comme d'origine humaine peut selon lui recevoir une explication géologique parfaitement raisonnable (« a perfectly reasonable geological explanation for each of the same features »). Selon R.M. Schoch, qui a par ailleurs écrit deux ouvrages sur les constructeurs de pyramides, il n’y a donc aucune pyramide à Visoko, mais en revanche une richesse géologique (« I believe that the real treasure of Visoko may be a huge fossil biota just waiting to be uncovered, not some imaginary pyramids ») et d’importants sites archéologiques pour les époques médiévales et néolithiques. L’inscription trouvée par l’équipe d’Osmanagic dans les tunnels n’est pour lui qu’un canular récent[21].

Le 14 mars 2007 un collectif de chercheurs géologues, historiens et archéologues de Bosnie, d'Europe et d'Amérique a envoyé une lettre ouverte à M. Schwarz-Schilling, représentant de l'Union Européenne en Bosnie. Ils y dénoncent l'amateurisme des fouilles[22] pratiquées à Visoko et les interprétations de la fondation[23].

La fondation ni aucun des experts dont elle se recommande n'ont jusqu'à présent publié de résultat dans un colloque scientifique ou dans une revue scientifique à comité de lecture. Quelques personnes abondent cependant dans le sens de cette hypothèse. Ainsi le docteur Aly Barakat[24] précise que le site de Visoko pourrait abriter, les « premières pyramides européennes », qui présenteraient des similitudes avec les célèbres pyramides de Íîza. Selon lui, les blocs de pierre retrouvés sur le site bosnien ont été taillés par des humains et ont été polis de la même manière que ceux des pyramides de Íîza[25]. Zahi Hawass (secrétaire général du Conseil suprême des Antiquités égyptiennes), critique ces déclarations le 27 juin 2006 une lettre à Archeology Magazine où il dit que le Dr. Barakat s'est auto-intronisé expert et qu'en fait il est un imposteur se faisant passer pour égyptologue[26].

Senad Hodovic, directeur du musée de Visoko, dit ne pas mettre en doute les hypothèses des chercheurs. « Ces pyramides sont évidemment l'œuvre d'une civilisation. Mais nous devons effectuer des analyses sérieuses pour démontrer par qui et quand elles ont été construites[27]. » Le professeur russe Oleg B. Khavroshkin a conclu quant à lui : « Les structures sur le site de Visoko ne sont pas des formations naturelles[28]. »

Annexes

Images du site nommé par S. Osmanagic « Pyramide du soleil »

Ces images peuvent être décrites comme des formations géologiques naturelles (grès et roches sédimentaires)[29].

Images du site nommé par S. Osmanagic « Pyramide de la lune »

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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Notes et références

  1. [pdf] (en) Déclaration de l'European Association of Archaeologists du 11 décembre 2006
  2. Article de Vesna Peric Zimonjic pour The Independant
  3. Osmanagic, Bosnian Pyramid of the Sun Candidate for « Mother » of all Pyramids, FENA News, 20 avril 2005.
  4. (en) The World of the Maya
  5. La fondation a mis en avant le nom de l'archéologue australien Royce Richards, nom qui a été ensuite repris dans les médias, ainsi dans le Australian in Bosnia pyramid riddle, Sydney Morning Herald, 20 janvier, 2006. Royce Richards a par la suite déclaré que son nom a été utilisé à tort[1].
  6. Bosnian "Pyramids" Update, Archaeology Magazine Online, 14 juin, 2006
  7. (en) piramidasunca.ba
  8. Nick Hawton, Indiana Jones of the Balkans and the mystery of a hidden pyramid, Times Online, 15 avril 2006
  9. Anthony Harding, Bosnia's rich heritage, Times Online, 25 April 2006
  10. Texte de la pétition : « Nous sous-signés, les archéologues professionnels de toutes les parties de l'Europe, protestons fortement contre l'appui continu des autorités bosniennes pour le prétendu projet de « pyramide » étant conduit sur des collines, chez et près de Visoko. Cet arrangement est un canular cruel sur un public confiant et n'a aucun droit dans le monde de la science véritable. C'est un gaspillage de ressources rares qui seraient bien mieux employées en protégeant l'héritage archéologique véritable et qui détourne l'attention des problèmes urgents qui affectent quotidiennement les archéologues professionnels en Bosnie - Herzégovine. » source : e-a-a.org
  11. Lucian Harris, Amateur to dig on site of medieval capital in search of Bosnia's own Valley of the Kings, The Art Newspaper, 15 avril 2006
  12. Senad Hodović[2][3]
  13. [Le site d’Irna] Vérifications pseudo-scientifiques
  14. [Le site d’Irna] Vérifications pseudo-scientifiques
  15. Rose, Mark. "The Bosnia-Atlantis Connection". Archaeology Magazine Online. URL accessed 2006-04-29.
  16. the Faculty of Mining and Geology
  17. University of Tuzla
  18. Professeur Dr. Sejfudin Vrabac
  19. Stop Osmanagich NOW!, 8 mai, 2006
  20. Cité par J. Bohannon dans Science, traduit pour Le Figaro
  21. (en) R.M. Schoch, « The Bosnian Pyramid Phenomenon », The New Archaeology Review, volume 1, issue 8, pages 16-17, September 2006 en ligne
  22. « amateurish excavations ». La source est donnée à la note suivante.
  23. [pdf] (en) Texte de la lettre ouverte
  24. Aly Barakat est parfois présenté comme égyptologue ou archéologue ; selon d'une part l'Observatoire zététique ([4]) et d'autre part Zahi Hawass, il est docteur en géologie, la confusion pouvant provenir du fait qu'il est de nationalité égyptienne
  25. [pdf] egyptologues.net
  26. [pdf] [5]
  27. tf1.lci.fr
  28. (en) bosnian-pyramid.com
  29. [6]
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