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Mode bi-pentaphonique
Dans la musique occidentale contemporaine, le mode bi-pentaphonique est une échelle de sons découverte par Christophe Looten, et caractérisée par la superposition (avec deux notes communes) de deux hexaphones à composition intervallique symétrique. Le nom et l'adjectif peuvent s'écrire également bipentaphonique (au pluriel : bi-pentaphoniques ou bipentaphoniques).
Le mode sur ut est donc composé de ces notes : ut - ut# - ré - mi - fa - fa# - sol - la - si♭ - si un ensemble de 10 sons, donc, qui se décompose en deux sous-ensembles de 6 sons chacun :
- ut - ut# - ré - mi - fa - fa#
- fa - fa# - sol - la - si♭ - si
Il convient de noter que
- ces deux hexaphones sont de composition intervallique identique : 1/2 ton - 1/2 ton - ton - 1/2 ton - 1/2 ton
- que cet agencement des intervalles est non-rétrograble ou, si l'on préfère, symétrique
- superposés, ces deux hexaphones, étroitement liés par leur composition, ont deux notes communes (dans notre exemple, le fa et le fa#)
- d'autre part, comme il est logique pour un mode de 10 sons, deux notes sont exclues (ici, le mi♭ et le la♭). Sans entrer dans les détails, on peut remarquer que ces notes sont à un intervalle de quarte.
La valeur spécifique des deux notes communes a conduit l'inventeur du mode (Christophe Looten) a décidé que ces notes ne pourraient jamais être entendues en même temps. Le mode bipentaphonique est donc constitué de 10 sons "mélodiques" mais de 9 sons "harmoniques" seulement. Le compositeur aimant, comme Olivier Messiaen, le "charme des impossibilités", le mode bipentaphonique lui a semblé un extraordinaire instrument de mise en ordre du discours musical puisqu'il induit une grammaire nouvelle et renoue avec une syntaxe musicale qui n'est pas sans rappeler - dans son principe - la modulation tonale. En effet, les notes "absentes" du mode permettent au musicien de :
- changer les couleurs de la musique comme une modulation permettait de le faire dans le système tonal,
- organiser le déroulement de l'œuvre en fonction de la présence ou l'absence, de l'apparition ou la disparition de tel ou tel son,
- structurer le continuum rhétorique de la pièce en assignant à la "nouvelle" note un rôle symbolique,
- concevoir la structure générale de l'œuvre en fonction des "modulations" bipentaphoniques ce qui permet la mise en place d'une macro-structure logique et symbolique même dans des œuvres longues (voir par exemple la mise en œuvre de cette structure dans une œuvre de 100 minutes, l'opéra Médée de Thessalonique).
Pour terminer ce rapide exposé du mode bipentaphonique, on attirera l'attention du lecteur sur le grand intérêt des transpositions intra-modales. Si, en effet, on met "en forme" - sous l'aspect d'un thème ou d'une série - les 10 notes du mode dans une de ses transpositions et que l'on transpose la série - en restant dans le mode - on obtiendra une transposition "parfaite" (celle où toutes les notes font partie du mode), 2 transpositions "semi-parfaites" (dans lesquelles seule une note est "fausse") et 7 transpositions avec deux notes "fausses". Le mode bipentaphonique permet de remplacer très facilement les mauvaises notes par les bonnes (qui se trouvaient exclues des transpositions arbitraires). À partir d'une seule matrice "parfaite", on obtient donc 9 thèmes, ou séries, entièrement issus de la matrice mais qui en diffèrent d'au moins une note (c'est le cas des 2 transpositions "semi-parfaites") et sinon de 2 notes. Un modèle mélodique donc et 9 "variations", 9 "visages" qui en sont issus.
Il nous faudrait encore parler de l'intérêt harmonique du mode bipentaphonique (lors par exemple de multiplication d'accords).
On espère du compositeur un exposé général de son système. En attendant, on pourra consulter un opuscule ancien : Organiser le chaos, pour l’élaboration d’un système de composition musicale, Mélanges de la Casa de Velázquez, 1987
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