Ichiro Ozawa

Ichiro Ozawa

Ichirō Ozawa

Affiche électorale d'Ichirō Ozawa

Ichirō Ozawa (小沢 一郎, Ozawa Ichirō?), né le 24 juin 1942 dans le bourg Mizusawa qui aujourd'hui fait partie de la ville d'Ōshū dans le sud-ouest de la préfecture d'Iwate, est un homme politique japonais, ancien secrétaire général du Parti libéral démocrate et chef du principal parti d'opposition, le Parti démocrate du Japon, de 2006 à 2009.

Sommaire

Origines familiales et formation

Ichirō Ozawa est le fils d'un ancien représentant du 2e district électoral de la préfecture d'Iwate auprès de la Chambre basse, Saeki Ozawa, qui fut l'un des principaux lieutenants de Shigeru Yoshida au sein du Parti libéral ainsi que plusieurs fois ministres des Transports (1948-1949), des Communications (1949) puis des Postes et Télécommunications (1949-1950) et de la Construction (1954).

Ichirō Ozawa obtient un baccalauréat en arts à la faculté d'économie de l'Université Keiō, dans l'arrondissement de Minato à Tōkyō, en 1967. Il entre ensuite à l'école supérieure de droit de l'Université Nihon dans l'arrondissement de Chiyoda, mais le décès de son père et son entrée rapide en politique le fait interrompre ses études.

Une ascension au sein du Parti libéral-démocrate

En 1969, après le décès de son père en 1968, il est élu pour la première fois (à seulement 27 ans) à la Chambre des représentants pour sa circonscription du 2e district de la préfecture d'Iwate puis, suite à la réforme électorale de 1994, pour le 4e district de cette même préfecture. Il est l'un des principaux soutiens de Kakuei Tanaka au sein de sa formation le Parti libéral démocrate dans les années 1970.

Dans les années 1980 il gravit les échelons au sein du PLD et devient un jeune et populaire leader. Il obtient ainsi ses seules responsabilités ministérielles à cette époque, en étant ministre de l'Intérieur et président de la Commission nationale de sécurité publique (organe gouvernemental chargé de coordonner les actions des forces policières et de sécurité publique) dans le second gouvernement de Yasuhiro Nakasone du 28 décembre 1985 au 22 juillet 1986.

Il se fait par la suite remarquer pour ses qualités de négociateurs, tant avec l'opposition sur le plan national que sur le terrain diplomatique. Ainsi, en tant que président de la Commission de la Règlementation et de l'Administration de la Chambre des représentants de 1986 à 1987 puis secrétaire général adjoint du Cabinet de Noboru Takeshita du 6 novembre 1987 au 3 juin 1989, il mène dans l'ombre les discussions pour convaincre les partis d'opposition d'accepter la réforme fiscale engagée par Nakasone (comprenant, en 1987, des coupes dans l'impôt sur le revenu, la suppression de l'exemption d'intérêts d'épargne, la diminution des charges sur les entreprises et la création d'une TVA à 5 %) et reprise par son successeur Takeshita. Il est ainsi considéré comme l'un des principaux artisans de l'adoption de l'impopulaire loi de la taxe sur la consommation du 1er avril 1989 qui crée une taxe indirecte nationale à la consommation sur certains biens et services. Il est également particulièrement présent dans les négociations commerciales qui commencent à avoir lieu avec une administration américaine de plus en plus critique vis-à-vis de la fermeture des marchés japonais : il est chargé ainsi directement des discussions concernant l'obtention de contrats pour des entreprises américaines dans le domaine du bâtiment et des travaux publics en 1987-1988, dans celui de l'armement (il gardera toujours de cette période une relation très proche avec les officiels du domaine de la Défense) en avril 1989 et au sujet de l'accès au marché des télécommunications dans certaines régions japonaises du groupe américain Motorola durant l'été 1989. Il adopte une stratégie du « résultat », se fixant à chaque fois pour objectif d'arriver coûte que coûte à un compromis et refusant de commencer toute négociation tant qu'il n'a pas reçu l'assurance de ses interlocuteurs qu'eux mêmes souhaitent un accord. Cette tactique, rompant avec la traditionnelle attitude nuancée et contrite des officiels japonais, lui vaut une réputation de redoutable négociateur et lui attire généralement l'estime de ses interlocuteurs[1].

Fort de ces succès, Ichirō Ozawa est élu secrétaire général du PLD en août 1989, et le reste jusqu'en avril 1991. Il est ainsi le numéro 2 du parti, juste derrière le Premier ministre Toshiki Kaifu, et son rôle principal est de gérer les troupes de la majorité en maintenant l'équilibre entre les différentes factions internes au mouvement.

La dissidence et l'opposition

La mise en retrait du PLD

Mais, devenu secrétaire général, il se distingue de plus en plus des dirigeants traditionnels du parti. Membre au sein du PLD du « Club du Jeudi » (木曜クラブ, Mokuyō kurabu?) ou « faction Tanaka », qui se transforme en 1985 en « Groupe d'études d'Heisei » (平成研究会, Heisei Kenkyūkai?) ou Heiseikai ou « faction Takeshita », il devient rapidement l'un des meneurs au sein de cette faction, avec Tsutomu Hata, d'une tendance favorable aux réformes libérales menées dans les années 1980 par Margaret Thatcher au Royaume-Uni et à une transformation de l'image du Heiseikai, plusieurs de ses figures historiques (dont Tanaka et Noboru Takeshita) ayant été entachées par des scandales politico-financiers.

Mais c'est surtout dans le domaine de la politique étrangère qu'il souhaite un réel changement. Il souligne ainsi les difficultés de la diplomatie japonaise, appelant à ce que le Japon « devienne une nation ordinaire » (普通 の 国 に 成る, Futsū no kuni ni naru?) pouvant intervenir sur le plan militaire sous couvert de l'ONU[2]. Il milite ainsi pour que son pays participe à la guerre du Golfe[3]. Pour ce qui est de la réforme de l'État, il défend un renforcement du poids politique du Premier ministre, notamment en augmentant le nombre de ses conseillers ou en faisant annoncer les grandes réformes et orientations politiques du gouvernement directement par son porte-parole et non plus par les différents ministères concernés, et veut réduire la bureaucratie japonaise. Il expose ses opinions dans un livre qui remporte un rapide succès d'édition : Plan pour réformer le Japon (日本 改造 計画, Nihon Kaizō Keikaku?), paru aux éditions Kodansha le 20 mai 1993[2],[4].

Souvent critiqué pour son autoritarisme, il s'attire de nombreux adversaires au sein même de son camp. Lorsqu'en 1992 sa faction lui préfère pour devenir son président un représentant de sa vieille garde, le modéré Keizō Obuchi, Ozawa la quitte pour créer avec Tsutomu Hata son propre groupe de pression, le « Forum Réforme 21 » (改革 フォーラム 21, Kaikaku fōramu ni-jū-ichi?). Fialement, Ozawa quitte le parti en 1993 et fonde, encore une fois avec Hata et sur la base du Forum Réforme 21, un nouveau parti d'opposition, le Shinseitō ou Parti de la Renaissance.

L'adversaire du PLD

Il entraîne avec lui de nombreux dissidents du Parti libéral-démocrate et sa formation politique participe au gouvernement à partir de 1993 au sein de la coalition menée par le Premier ministre Morihiro Hosokawa (Nouveau Parti du Japon) en 1993. C'est la première fois depuis 1955 que le Parti libéral-démocrate est écarté du pouvoir.

Ozawa devient ainsi un redoutable opposant au Parti libéral-démocrate et contribue avec succès à sa déstabilisation.

Il publie la même année un livre à succès qui prône de transformer le Japon en un pays plus actif sur la scène internationale.

Cependant ses positions pour un Japon plus fort sur le plan international lui vaut des critiques de la part des socialistes (principal membre de la coalition au pouvoir). En 1994 alors que son nom est cité en temps que premier-ministrable, il perd de l'influence au profit de ces derniers.

Les socialistes quittent par la suite la coalition non PLD qui devient minoritaire et Ozawa est rendu responsable de cette perte par le nouveau Premier ministre et ancien allié Tsutomu Hata.

Ichirō Ozawa devient le secrétaire général du Shinshintō, ou « Parti de la nouvelle frontière », fondé par l'ancien Premier ministre Toshiki Kaifu en décembre 1994 et dans lequel le Shinseitō s'est alors fondu. Ce nouveau parti - principale force d'opposition à la nouvelle majorité formée par le PLD, le Parti socialiste et le Nouveau Parti pionnier (petit parti centriste avec une frange écologiste) - rassemble alors, outre les anciens du Shinseitō, la plupart des membres de l'ancienne coalition anti-PLD qui ont rejeté le retour du vieux parti majoritaire au pouvoir (notamment de nombreux dissidents socialistes et sociaux-démocrates ainsi que la quasi totalité du vieux Kōmeitō, bras politique centriste de l'organisation bouddhiste Sōka Gakkai), mais aussi de nouveaux transfuges du Jimintō qui s'offusquent que leur parti ait soutenu l'accession au poste de Premier ministre du socialiste Tomiichi Murayama.

En 1996, Ichirō Ozawa s'empare de la présidence du Shinshintō, entraînant une première scission au sein de ce mouvement : plusieurs membres du parti, emmenés par Kunio Hatoyama, lui aussi ancien membre du PLD, rejoignent les partisans de l'ancien social-démocrate Naoto Kan et de Yukio Hatoyama, frère de Kunio, qui viennent quant-à-eux de quitter le Nouveau Parti pionnier, pour former le Parti démocrate. Malgré cela, aux élections de 1996, le Shinshintō s'impose comme le deuxième parti du Japon, derrière le PLD, et le premier de l'opposition, avec près de 28 % des voix et 156 sièges sur 500, soit seulement 4 de moins par rapport à la précédente législature.

La dissolution du parti en 1998, amène à la création de nombreux petits partis, avec toutefois trois principaux groupes : un premier qui se rassemble petit à petit avec d'autres grandes formations d'oppositions, dont le Parti démocrate du Japon des frères Hatoyama et de Naoto Kan fondé en 1996 mais aussi le Parti socialiste, pour former un nouveau grand parti d'opposition, le PDJ ; les anciens membres issus du Kōmeitō font renaître de ses cendres ce mouvement ; une majorité continue à soutenir Ozawa en le suivant au sein du Parti libéral.

Le Parti libéral prend part à une brève coalition avec le PLD menée par le Premier ministre Keizō Obuchi de 1999 à 2000. Toutefois, une nouvelle scission a lieu en vue des élections de 2000 entre les partisans du maintien de l'alliance avec le PLD qui fondent alors le Parti conservateur, et ceux, emmenés par Ozawa, qui désirent retourner dans l'opposition et restent donc membre du Parti libéral. Sur les 36 représentants que comportaient le groupe libéral à la fin de la législature, 18 choisissent la première option et 18 la seconde. Mais les élections donnent raison à Ozawa et à ses partisans, puisque le parti libéral obtient alors 22 élus contre 7 aux conservateurs.

Suite à ce scrutin, le parti libéral ne cesse de se rapprocher du PDJ, toujours principale force d'opposition et devenu entretemps, sous la présidence de Naoto Kan et de Yukio Hatoyama, un parti de centre-gauche. Le 25 septembre 2003, son parti fusionne avec le Parti démocrate du Japon pour tenter de briser le monopole politique du PLD, un peu plus de deux semaines avant les élections législatives, et Ozawa devient président délégué du parti. Lors du renouvellement de la Chambre des représentants, le PDJ réduit plus que jamais son écart sur le PLD : il obtient ainsi 177 sièges, soit 50 de plus qu'en 2003 et 40 supplémentaires par rapport à la fin de la législature précédente, et surtout, avec 37,4 % des voix contre à peine 35 % pour le PLD, ses listes au scrutin à la proportionnelle battent celles du parti majoritaire pour la première fois de son histoire.

Au sein du PDJ, les anciens du Parti libéral forment une faction appelée Isshin-kai (一新会?) ou « Comité du Renouveau » qui soutien au sein du parti Ichirō Ozawa. Il s'agit de l'une des principales tendances internes au PDJ avec la faction de Yukio Hatoyama, et se positionne plus à droite que cette dernière qui est plutôt modérée et centriste. Ichirō Ozawa est pressenti comme le favori à la course à la présidence du parti suite à la démission, le 10 mai 2004, de Naoto Kan, mais il doit se retirer le 17 mai après avoir admis n'avoir pas payé ses cotisations de retraite pendant 6 ans jusqu'en mars 1986 (avant donc que ces cotisations ne deviennent obligatoires, mais le contexte politique de l'époque avait rendu sa situation instable, plusieurs autres personnalités politiques d'importance, dont Naoto Kan, ayant perdu leur poste les semaines précédentes pour les mêmes raisons)[5].

Le leader de l'opposition

À la suite de la démission de Seiji Maehara en mars 2006, Ichirō Ozawa est élu à la tête du PDJ par les parlementaires du parti avec une nette avance sur son adversaire, Naoto Kan, par 119 voix contre 72. Il hérite d'un mouvement politique certes meneur de l'opposition mais discrédité par la succession de trois présidents en moins de deux, une série de scandale et surtout n'arrivant pas à bousculer la domination du PLD comme le montre ses résultats lors des élections à la Chambre des représentants de 2005 au cours desquelles le PDJ perd 64 sièges (et donc ne dispose plus que de 113 sièges sur 480) tandis que le PLD en gagne 84 de plus qu'en 2003 et donc retrouve à lui seul la majorité absolue (296 élus sur 480). Pour relancer le mouvement et dans un souci d'unité et d'efficacité, il confie la présidence déléguée à Kan et laisse le poste de secrétaire général à Yukio Hatoyama, réunissant les deux pères fondateurs du parti à ses côtés[6].

Faire du PDJ un parti pouvant accéder au pouvoir

Déterminé « à fonder un nouveau Japon », il bénéficie largement du départ du populaire Premier ministre Jun'ichirō Koizumi le 26 septembre 2006 et se montre un opposant efficace face à ses successeurs et à un PLD qui, ayant perdu un leader charismatique, semble en quête d'idéologie.

Il s'engage alors personnellement et avec force dans la campagne des élections pour le renouvellement de la moitié de la Chambre des conseillers du 29 juillet 2007, y voyant non seulement le moyen pour le PDJ de se redresser mais aussi « la meilleure opportunité et la dernière chance » pour l'opposition d'obtenir le contrôle d'au moins une partie de la Diète, promettant de démissionner de la présidence du mouvement si ce devait encore une fois ne pas être le cas[7]. Brillant tacticien, il se concentre sur les campagnes et les zones rurales, connues pour être des bastions jusque là considérés comme imprenables du PLD, une stratégie qui s'avère payante. En effet, le jour du scrutin, les démocrates devancent largement le PLD au vote majoritaire (24 millions de voix soit 40,45 % des suffrages, soit plus que les scores cumulés des deux composantes de la majorité qui atteignent ensemble difficilement les 22 millions de vote et les 37,3 %, le PDJ remporte ainsi 40 sièges sur 73 par ce mode de scrutin) et à la proportionnelle (la liste démocrate arrive en tête avec 23 millions de votants, soit 39,5 % des voix, et 20 sièges sur 48 contre 16,5 millions, 28,1 % et 14 élus au parti au pouvoir).

Alors que 32 conseillers démocrates remettaient leur siège en jeu, le PDJ en obtient, suite au scrutin, 60 sur les 121 à pourvoir. Avec désormais 109 élus sur 242, il est le premier parti de la chambre haute, et forme avec le Shin-Ryokufūkai et les partis fondés en 2005 par des dissidents du PLD opposés à la privatisation de la poste (le Nouveau parti du peuple et le Nouveau parti Nippon) un groupe commun de 120 membres. Ichirō Ozawa apparaît dorénavant comme le premier chef de l'opposition pouvant prétendre réellement au poste de Premier ministre et détient donc désormais la majorité à la chambre haute de la Diète du Japon[8]. Si cela ne permet pas au PDJ d'arriver enfin au pouvoir, cela lui donne un nouveau poids qu'il n'avait eu auparavant que pendant quelques mois en 1998, et laisse entrevoir la possibilité d'une alternance. Après la démission de Shinzō Abe, qui a tenté sans succès de se maintenir à la tête du gouvernement, le 12 septembre 2007, Ichirō Ozawa est élu le 25 septembre Premier ministre par la Chambre des conseillers tandis que le successeur d'Abe à la tête du PLD, Yasuo Fukuda, est choisi par la Chambre des représentants (qui a le dernier mot)[9]. Ce cas de figure ne s'était plus reproduit depuis 1998 (où Naoto Kan avait été élu par la chambre haute plutôt que Keizō Obuchi).

Entre projet de « grande coalition » et opposition systématique

Peu de temps après la mise en place du gouvernement Fukuda, dans un contexte de débat intense entre la majorité et l'opposition au sujet du renouvellement de la mission de ravitaillement des troupes de la coalition internationale en Irak et en Afghanistan, il apporte son soutien, après un rendez-vous avec le Premier ministre le 2 novembre 2007, à l'idée d'une grande coalition qui unirait le PLD au PDJ. Désavoué par son propre parti, il annonce son départ de la présidence du mouvement le 4 novembre[10] avant de se rétracter et de retirer sa démission dès le 6 novembre[11].

Défendant l'idée d'une réforme profonde de la manière de faire de la politique au Japon, nécessaire selon lui pour régler la crise économique, il s'est engagée avec son parti depuis fin novembre dans une stratégie d'opposition systématique au PLD. Il se sert ainsi de la majorité obtenue par le PDJ à la Chambre des conseillers pour mettre en difficulté le Cabinet sur les principaux textes présentés, le poussant à les retirer ou à passer en force en les faisant revoter par une majorité des 2/3 des membres de la Chambre des représentants. Appelant à l'organisation d'élections législatives anticipées, arguant que la Chambre basse actuelle avait été élu dans un contexte particulier de soutien au Premier ministre Jun'ichirō Koizumi (désormais retiré) et de ses réformes, il fait voter par la Chambre des conseillers une motion de censure (par 131 voix contre 105) ayant uniquement pour but de déstabiliser le gouvernement (une censure votée par la chambre haute n'a pas le pouvoir de forcer un cabinet de démissionner, seule la chambre basse peut le faire)[12].

Cette opposition acharnée a été l'un des principaux facteurs de l'impopularité de Yasuo Fukuda qui finit par démissionner le 1er septembre 2008. Tandis que Ozawa est une nouvelle fois élu Premier ministre par la Chambre des conseillers (127 contre 108), Fukuda est remplacé à la tête du gouvernement par le populiste Tarō Asō (élu par la Chambre des représentants par 337 voix contre 117 à Ozawa)[13] sur un programme de baisse des impôts, de ralentissement des réformes libérales et de rejet d'une politique de rigueur budgétaire. Désormais, l'idée d'une dissolution de la Chambre des représentants n'est plus uniquement défendue par le PDJ mais également par plusieurs personnalités du PLD (afin de profiter de la période « d'état de grâce » du nouveau Premier ministre)[14]. Ichirō Ozawa, reconduit à la tête du PDJ lors de son congrès du 21 septembre 2008 (seul candidat à sa succession, il avait été réélu triomphalement le 8 septembre 2008)[15], a pour sa part très vite repris une attitude offensive à l'encontre du nouveau gouvernement et rappelé sa volonté de voir rapidement organisées des élections anticipées, jugeant que : « Si les partis au pouvoir ont perdu leur capacité à gouverner, il est logique dans une démocratie parlementaire de confier le gouvernement à l'opposition et d'organiser une élection »[16].

Un leader ne faisant pas l'unanimité

Initialement marqué à droite, il changea souvent de camp pour maintenant être leader d'un parti centriste voire qualifié parfois de centre-gauche. Le fait que chaque mouvement qu'il a présidé avant le PDJ ait disparu sous sa direction (le Shinshintō a éclaté en 1998 en une multitude de petits partis, le Parti libéral s'est dissout dans le PDJ en 2003) lui a valu le surnom au sein des médias japonais du « Destroyer » ou « Roi de la Destruction » (破壊王, Hakainō?).

Il est foncièrement libéral, mais prit un virage tactique vers la gauche. Il est partisan d'un Japon plus fort sur le plan international, voulant obtenir un siège permanent à son pays au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, une réforme de la Constitution pour lui permettre d'avoir une véritable armée (ayant même appelé en 2002, pour contrer la course à l'armement des Chinois, de développer un programme militaire de dissuasion nucléaire[17]) et une diplomatie favorisant le multilatéralisme, plus proche des Nations unies et donc plus indépendante des États-Unis (en s'opposant notamment au soutien à la coalition militaire en Irak[3]) ; il était également anticommuniste militant durant la Guerre froide.

C'est un opposant déterminé et fort ; cependant son caractère parfois autoritaire ne fait pas l'unanimité au Parti démocrate du Japon qui lui reproche parfois de prendre seuls les décisions, comme en témoigne l'épisode de la « grande coalition ». Il a aussi une santé fragile (problèmes cardiaques) qui l'obligea à se reposer durant la campagne sénatoriale. Il a été hospitalisé pendant quelques jours à partir du 7 octobre 2008 pour un « refroidissement »[18].

Si l'impopularité du gouvernement Fukuda semble avoir donné plus de chances que jamais au PDJ d'arriver enfin aux affaires, le parti d'opposition ne fait pas pour autant l'unanimité. Ainsi, une enquête réalisée pour le Yomiuri Shimbun au début du mois d'octobre 2008 fait état de 58 % des sondés prêts à voir le PDJ arriver au pouvoir, tandis que seulement 46 % d'entre eux le pensent capable de gouverner (contre 47 % ne le pensant pas et 67 % des interrogés considèrant en revanche le PLD capable de le faire). De plus, 57 % des sondés disent avoir une bonne impression de Tarō Asō, contre seulement 35 % pour Ichirō Ozawa[19]. Mais, en raison de la crise financière et de nombreux dérapages, Asō a atteint à son tour des sommets d'impopularité, favorisant de ce fait Ozawa : un autre sondage du Yomiuri en fait le deuxième choix potentiel des personnes interrogées pour devenir Premier ministre, avec 13,3 % de soutiens, derrière l'ancien chef de gouvernement PLD (resté très populaire) Jun'ichirō Koizumi (avec 14,4 %) mais loin devant Tarō Asō (4,7 %)[20].

Néanmoins, l'arrestation au début du mois de mars, pour avoir accepté illégalement de l'argent d'un grand groupe de construction, de son secrétaire en chef, l'affaiblit lui ainsi que l'opposition : des sondages montrent qu'une majorité de Japonais attendent sa démission de la présidence du PDJ[21], ce qu'il a promis qu'il ferait si les effets de ce scandale devait se révéler réellement handicapant pour le parti en vue des élections législatives qui doivent se tenir quoiqu'il arrive au plus tard en septembre 2009[22], tandis que certains observateurs imputent à cette affaire la contre-performance réalisée par les candidats soutenus par le mouvement à des élections de gouverneur dans les préfectures de Chiba[23] et Akita[24]. Un nouveau sondage réalisé par le Yomiuri Shinbun à la fin du mois d'avril 2009 ne le place plus qu'à la quatrième position des éventuels Premiers ministres avec 6,5 % des personnes interrogées le choisissant, derrière l'éternel préféré des enquêtes d'opinion Jun'ichirō Koizumi (14,8 %), le ministre de la Santé Yoichi Masuzoe (9 %) et le chef du gouvernement en exercice Tarō Asō (7,1 %)[25].

Après un mois d'incertitude, il annonce finalement sa démission de la présidence du PDJ le 11 mai 2009[26]. Toutefois, les parlementaires du parti élisent pour lui succéder le 16 mai son secrétaire Yukio Hatoyama qui a fait preuve jusqu'au bout d'une fidèle sans faille à son égard au point que ses adversaires le considère comme sa « marionnette »[27], et Ichirō Ozawa conserve une influence notable au sein de la direction du parti. Connu pour ses talents de tacticien et son efficacité dans les campagnes électorales, il est nommé dès le lendemain de l'élection d'Hatoyama à la tête du PDJ président délégué, rejoignant à ce poste Naoto Kan et Azuma Koshiishi, en charge tout spécialement d'organiser la stratégie du mouvement en vue des élections législatives qui ont finalement lieu le 30 août 2009[28].

Il est ainsi considéré par les observateurs de la vie politique japonaise comme l'un des principaux artisans de la victoire historique de son parti (qui obtient 308 sièges sur 480) lors de ce scrutin, si bien que les médias ont appelé la masse des nouveaux et jeunes élus démocrates lors de ces élections les « Enfants d'Ozawa » (小沢チルドレン, Ozawa chirudoren?), en référence aux « Enfants de Koizumi » qui avaient fait leur entrée au Parlement grâce à la large victoire du Premier ministre Jun'ichirō Koizumi en 2005[29]. Il avait notamment organisé depuis 2008 le recrutement et la formation aux campagnes électorales de femmes issues de la société civile et au parcours remarquable afin de les présenter dans des circonscriptions clés face à des poids lourds de l'autre camp : pendant des « Assassins » (刺客, Shikyaku?) mis en avant par Jun'ichirō Koizumi et le PLD en 2005, les « Ozawa Girl » (小沢ガールズ, Ozawa gaaruzu?) remportent un large succès (le PDJ fait ainsi élire 40 de ses 46 candidates, portant à 54 le nombre de femmes à la Chambre des représentants)[30]. Même s'il n'est plus à la tête du parti et ne peut donc accéder au poste de Premier ministre, son influence au sein de la scène politique japonaise paraît alors plus forte que jamais, comme semble en témoigner la décision de Yukio Hatoyama de le nommer comme secrétaire général (et donc numéro 2) du PDJ[31].

Bibliographie

Il a exposé sa vision politique dans deux essais[2] :

  • Plan pour réformer le Japon (日本 改造 計画, Nihon Kaizō Keikaku?), éd. Kodansha, 1993, réédité à plusieurs reprises, 258 p. (ISBN : 4062064820) : il parle surtout de politique intérieure et de réforme de l'État.
  • Restauration d'un bras fort (剛腕 維新, Gōwan Ishin?), éd. Kadokawa Shōten, 2006, 267 p., (ISBN : 404621088) : sur la politique étrangère et la défense.

Références

  1. (en) T. Shinoda, « Ozawa Ichiro as an Actor in Japan's Foreign Policy Making », IUJ Research Institute, 03/1999
  2. a , b  et c (en) F. Halloran, « NBR'S JAPAN FORUM (POL) Ozawa Ichiro's Strong Arm Restoration », Book Review NBR, 15/09/2008
  3. a  et b (en) A. Horvat, « Why Ichiro Ozawa is America's True Hope and Why Shinzo Abe Never Was », Policy Forum Online, 30/11/2007
  4. ja:日本改造計画
  5. [pdf](en) K. Nanri, « Asahi’s Fuhenfutō Principle », ASAA Biennal Conference, 2006
  6. (en) VietNamNet/Xinhuanet, « Japan's DPJ formally approves new leadership », Vietnam Net, 11/04/2006
  7. (en) M. ITO, « Ozawa vows to exit if opposition camp fails to win majority », Japan Times, 06/07/2007
  8. (en) N. ONISHI, « Premier’s Party Suffers Big Defeat in Japan », The New York Times, 29/07/2007
  9. AFP, « Japon: les députés approuvent Yasuo Fukuda comme Premier ministre », Dépêche AFP, 24/09/2007
  10. (en)L. Lewis, « The Destroyer, Ichiro Ozawa, quits after party rejects deal with the Willow Tree », The Times, 05/11/2007
  11. (en)L. Lewis, « Straight-talking Ichiro Ozawa cautions of political and economic meltown in Japan. », The Times, 15/11/2007
  12. L.Sieg, traduit en français par H-P.André, « L'opposition censure le Premier ministre japonais Yasuo Fukuda », dépêche Reuters dans L'Express, 11/06/2008
  13. C. Martin, « Taro Aso a été élu Premier ministre du Japon », Le Point, 24/09/2008
  14. (en)« Credit crisis led to poll rethink / LDP eyeing later election date to ensure passage of extra budget », Yomiuri Shimbun, 02/10/2008
  15. « Japon : approbation de la réélection d'Ozawa comme le chef du DPJ », Xinhua, 21/09/2008
  16. « Japon: L'opposition veut des élections anticipées », Journal du dimanche, 01/10/2008
  17. (en) J. R. Nyquist, « JAPANESE REARMAMENT AND THE CHINA THREAT », Financial Science, 12/02/2005
  18. AFP, « Japon: le chef de l'opposition hospitalisé », Le Figaro, 07/10/2008
  19. (en)« Survey: 58% of voters favor DPJ govt », Yomiuri Shimbun, 11/10/2008
  20. (en) T. Hyuga, « Ozawa More Suitable Japan Premier Than Aso, Yomiuri Poll Says », Bloomberg, 04/02/2009
  21. (en) R. BUERK, « Japan's Ozawa pressured to resign », BBC News, 09/03/2009
  22. (en) Kyodo World News Service, « Ozawa mulls resignation's effects on election », The Black Ship, 31/03/2009
  23. (en) T. HARRIS, « The electoral consequences of Mr. Ozawa », J@pan-Inc, 30/03/2009
  24. (en) « Ozawa future hangs in balance / Party execs give DPJ leader space to make decision on future himself », Yomiuri Shinbun, 16/04/2009
  25. (en) « Poll: Koizumi still top choice as PM » Yomiuri Shimbun, 06/05/2009
  26. Xinhua, « Japon: le chef de l'opposition Ozawa sa démission », Xinhua Net, 11/05/2009
  27. (en) K. NAGATA, « Hatoyama must unite party quickly », Japan Times, 17/05/2009
  28. Kyodo News, « Okada to become DPJ secretary general », One News Page, 17/05/2009
  29. (en) Y. NISHIKAWA, « Seven election words to watch for », Blog Reuters, 29/08/2009
  30. (en) « Handpicked 'Ozawa girls' learn fast to become political 'assassins' (Part 1) », The Mainichi Daily News, 14/09/2009
  31. (en) Thompson Reuters, « NEWSMAKER-Japan political mastermind Ozawa back in spotlight », Forbes, 04/09/2009

Voir aussi

Liens internes

Lien externe

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Ryūtarō Hashimoto
Secrétaire général du
Parti libéral démocrate
1989 - 1991
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Toshiki Kaifu
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