Système européen de surveillance du trafic ferroviaire

Système européen de surveillance du trafic ferroviaire

Le système européen de surveillance du trafic ferroviaire (en anglais, European Rail Traffic Management System, ERTMS) vise à harmoniser la signalisation ferroviaire en Europe.

Inscription sur un Thalys signalant qu'il est équipé d'ERTMS.

Sommaire

Différents systèmes de signalisation

Jusqu'à présent chaque pays a son propre système de signalisation ferroviaire, ce qui oblige les trains internationaux à pouvoir fonctionner sur chacun des systèmes nationaux. En effet, la signalisation ferroviaire ne consiste pas seulement à l'observation des signaux latéraux : la détection du train sur une voie est d'une importance capitale. Or cette détection fonctionne par un courant envoyé dans les rails ou par des compteurs de types variés. Ce courant ou ces appareils utilisent donc des fréquences Hertz bien spécifiques. Le problème principal est que chaque type de locomotive et automotrice - du fait de leurs moteurs - émet des courants "vagabonds" qui peuvent, s'ils ne sont pas correctement filtrés, engendrer des perturbations dans la chaîne de détection au sein des voies. Le signaleur aurait alors une mauvaise information sur son écran et ne pourrait plus gérer les circulations. Pour corser le tout, la détection des trains est aussi associée à la protection des trains, avec ci et là des systèmes mécaniques permettant le freinage d'urgence d'une locomotive. Ces systèmes sont forcément très variés et ne fonctionnent qu'en fonction de la détection du réseau national, donc pas avec celle du voisin. Pour résumer : chaque réseau a élaboré ses règles, ses fréquences et ses précautions, ses règles écrites. Voilà pourquoi ce qui roule chez l'un ne peut pas rouler chez l'autre sans créer de gros problèmes.

Rappelons qu'en l'absence d'Europe d'après-guerre, chaque réseau était tenu d'installer ses propres normes, ses propres fréquences et ses propres filtres et de garantir l'intégrité nationale, ce qui est bien la mission d'une administration d'État : on n'intervient que dans ses frontières nationales, pas plus loin. Dans les années 60, le trafic international prend de l'ampleur. Pour faire passer une locomotive d'un réseau à l'autre, la seule solution était d'incorporer à bord le ou les systèmes du ou des voisins chez qui la locomotive était susceptible de circuler. Les Belges furent à la pointe en ce domaine puisque trois petites séries de locomotives dédiées à l'international sortirent des ateliers entre 1960 et 1970 : série 15 entre Amsterdam et Paris, série 16 principalement entre Ostende et Cologne, et série 18, cousine de la CC40100 française, affectée entre Bruxelles, Liège et Paris, voire Ostende-Cologne.

Cette accumulation de systèmes nationaux ne changea pas en 1996 avec le TGV Nord Europe. Ainsi le Thalys PBKA (Paris-Bruxelles-Cologne-Amsterdam) doit être équipé des systèmes :

Voulant instaurer un réseau à grande vitesse européen, l'Europe prit le problème à bras le corps et mit autour de la table les six principaux fournisseurs de signalisation : Alstom, Siemens, Thalès, Ansaldo STS, Bombardier et Invensys. Ce groupe des "six" se mit d'accord sur les normes, les fréquences et les systèmes de signalisation et de détection du futur : ERTMS était né. Pour aller vite, la Commission européenne sortit alors en 1996 les toutes premières Spécifications Techniques d'Interopérabilité (STI), à appliquer à toutes lignes nouvelles à construire à partir de cette date. Les nouvelles lignes à grande vitesse sont ainsi équipées de ce système de signalisation. C'est le cas de la LGV Est européenne, ouverte en juin 2007, et de la LGV Rhin-Rhône en construction.

Mise en œuvre

Voir ETCS - Mise en œuvre

Sous systèmes

L'ERTMS niveau 2 est composé de deux sous-systèmes:

Historique

Années 60-80

Très tôt après la création de l'Europe économique, le problème de circulation d'un train à travers différents pays de la communauté se pose. En effet, des différences importantes en termes d'infrastructure, de signalisation et de normes existent comme évoqué plus haut.

Les chemins de fer nationaux constataient depuis longtemps les limites de la circulation des trains par blocs. Aussi certains réseaux, en fonction de leurs intérêts propres, s'attelaient à rechercher un nouveau système de signalisation pouvant accepter davantage de trains par heure. Ainsi en France, un projet ASTREE financé par l'État s'attachait à :

  • augmenter le trafic des lignes et la souplesse d'exploitation en utilisant un block mobile;
  • mettre à disposition des agents et de l'exploitation des informations en temps réel;
  • recourir aux nouvelles technologies pour diminuer les coûts d'achat de l'ensemble du matériel de détection et de contrôle;
  • affiner le contrôle de vitesse des trains en temps réel, et non plus par palier de vitesse, ce qui impose une interface solide entre la voie et la machine.

1989

L'Allemagne de son côté, s'était lancée dans DIBMOF (radio mobile à intégration de services), présageant déjà de la volonté d'utiliser la radio pour l'exploitation ferroviaire. En 1989, la France alors se joint à une démarche commune aux deux pays en associant leur chemins de fer et constructeurs respectifs (DB-SNCF et Alcatel-Siemens-Alstom-CSEE) : c'est le programme ARTEMIS, intégré dans le cadre de la coopération technico-scientifique franco-allemande Deufrako. L'initiative était suivie de près par l'UIC, qui avait elle-même lancé son propre programme de recherche. De congrès en séminaires, les premiers résultats s'avérèrent prometteurs.

1993

Voulant instaurer un réseau de train à grande vitesse européen, et surtout faciliter l'accès des trains d'un réseau à l'autre, l'Europe reprend en 1993 le programme ARTEMIS et met autour de la table un groupement d'entreprises européennes dont Ansaldo STS en a été le principal maître d'œuvre et comprenait : Ansaldo Signal N.V., Alstom, Thales, Invensys (en), Siemens et Bombardier Transport. Le soutien de l'Europe est décisif au travers de l'ancienne DG VII (aujourd'hui DG TREN), ainsi qu'au travers des programmes du 4e PCDR.

Pendant que le groupe des "Six" étudie un nouveau système sous l'angle strictement technique, la Commission européenne constate que le frein à l'Europe des chemins de fer sans frontière se situait précisément à l'absence d'harmonisation technique ainsi qu'à la position monopolistique de tous les transporteurs ferroviaires européens. À l'époque, l'idée d'une amélioration drastique du service passait par la séparation entre le transporteur et l'infrastructure. C'est l'Angleterre qui fait office de laboratoire sur le sujet, suite aux privatisations successives initiées par Margaret Thatcher, et réalisées entre 1994 et 1997. L'ouverture à la concurrence du rail passe ainsi par la séparation économique des infrastructures (gérées par Network Rail depuis 2003 au Royaume-Uni) et du matériel roulant historiquement regroupés au sein de même entreprises nationales (British Rail, SNCF, Deutsche Bahn, Renfe, etc.). La France prend aussi cette mesure par la création de Réseau ferré de France en 1997. Pour autant, la séparation, par ailleurs très inégale d'un pays à l'autre, ne présageait pas d'une Europe ferroviaire sans barrières. Restait à régler la technique.

1996

Les "Six" fournissent au milieu des années 90 une réponse fiable pour la signalisation du futur : ERTMS. Ce système, qui reprend notamment certains développements mis en service sur les TGV et ICE, est surtout conçu comme un ensemble normalisé, ce qui en soit est une performance. Fréquence de courant, fréquence radio, balises, filtres, tout doit être désormais unifié. C'est en Italie où l'exploitant du réseau ferré italien R.F.I. filiale des FS a utilisé en premier ce nouveau système sur tout son réseau à grande vitesse.

Le système ERTMS étend les objectifs initiaux d'ARTEMIS en garantissant :

  • l'interopérabilité des circulations sur le réseau européen, d'abord à grande vitesse puis par la suite en conventionnel;
  • une baisse des coûts d'exploitation et des fournitures industrielles (ce qui ne s'avéra pas exact par la suite);
  • une amélioration sensible du niveau de sécurité des circulations combiné à un débit plus élevé;
  • l'extension possible à d'autres domaines ferroviaires tels la fluidification des circulations, la maintenance, la régulation,...

Cet ensemble est couché sur papier aux travers des fameuses Spécifications Techniques d'Interopérabilité (STI) diffusées, pour le réseau à grande vitesse, dès 1996 sous les directives européennes 1996/48 et, plus tard pour le conventionnel, la 2001/16, rendant obligatoire son application à tous les États membres.

La LGV-Est européenne, les lignes TGV belges L3 (Liège-Allemagne) et L4 (Anvers-Rotterdam), ainsi que Perpignan-Figueras, sont notamment les premières a en être équipées. Les lignes TGV-Nord Paris-Bruxelles, ainsi que la branche Lille-Eurotunnel-Londres, restent en revanche équipées de la TVM 430 française.

Le système ERTMS a été exporté par Ansaldo STS en Chine dans une version adaptée et soutenue très fortement par la Suisse, mais tarde encore à s'imposer en Europe, en France notamment qui ne voit pas l’intérêt d'investir dans une dualité de systèmes sans contreparties financières ou sans y être obligée comme dans toute création de ligne à grande vitesse sans pour autant vouloir rester sur l'ancien système Alstom. La migration des matériels roulants existants peut prendre de nombreuses années comme lorsque les rames TGV Atlantique ne pouvaient rallier la gare de Chessy-Marne la Vallée pour incompatibilité même si certains pensent que la suppression du monopole des entreprises nationales historiques soit difficile.

Enfin, bien que ce système soit depuis longtemps soutenu par la Commission européenne, les organes de coordination n'ont pas réussi à s'imposer sur ce sujet. Le plus récent en date est l'Agence ferroviaire européenne.

Cependant l'ERTMS a déjà été installé :

  • sur toute la ligne italienne AV/AC Turin-Milan-Bologne-Rome-Naples-Salerne d'une longueur de 1 000 km (ERTMS2)[1];
  • sur la ligne espagnole AVE Madrid-Tarragona (ERTMS Niveau 1, ayant permis de relever la vitesse à 300 km/h le 7 mai 2007[2]) ;
  • et sur la LGV 3 en Belgique, mais qui n'était empruntée, à l'origine, que par les trains ICE, les THALYS n'étant progressivement équipés qu'à partir du 8 janvier 2009.

En outre, il est en train d'être installé sur les lignes Novara-Milan, Milan-Bologne et Bologne-Florence; ces lignes ont été ouvertes fin 2009[3].

Articles connexes

Lien externe

Notes


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