- Ravage (roman)
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Ravage est un roman de science-fiction écrit par l'écrivain français René Barjavel, en 1943. Ce roman est suivi du roman Le Voyageur imprudent du même auteur.
Sommaire
Synopsis
Ravage présente le naufrage d'une société mécanisée, dans laquelle, un jour, l'électricité vient à disparaitre. Les habitants, anéantis par la soudaineté de la catastrophe, sombrent dans le chaos, privés d'eau courante, de lumière et de moyens de déplacement. Un thème typique de la science-fiction post-apocalyptique, brossant le portrait de la fin de l'humanité technologique.
Un étudiant en chimie agricole, François Deschamps, décide avec quelques autres personnes, de quitter Paris, mégapole de vingt-cinq millions d'habitants, en proie à l'anarchie et aux flammes pour retrouver son village d'enfance en Provence. Il espère pouvoir y reprendre une vie normale mais paysanne... Mais le chemin est long et difficile, pour ceux qui n'ont jamais connu autre chose que le confort qu'offrent la technologie et la science.
Analyse
Plus qu'un simple roman de science-fiction, Ravage est une dystopie révélant le pessimisme de l'auteur vis-à-vis de l'utilisation du progrès scientifique par les hommes. Véritable parcours initiatique, le voyage des personnages pour retrouver l'Eden perdu se révélera encore plus terrible que la catastrophe elle-même.
Le roman écrit durant l'Occupation met en scène un protagoniste qui se méfie du progrès et prône le retour à la terre. Il fonde une nouvelle civilisation agricole sur laquelle il règne de manière autocratique. Dans cette description plutôt favorable du culte du chef, appelé « le patriarche », certains ont vu une allusion directe au Maréchal Pétain, d'autant que le texte contient nombre d'allusions à l'idéologie du Régime de Vichy. Enfin les scènes de pillage à Paris et la déroute des survivants rappellent nettement l'exode de 1940 des populations civiles.
Bien que Barjavel soit tout sauf un idéologue, il est incontestable que Ravage est une anticipation pessimiste influencée à divers degrés par l'idéologie du retour à la terre, qui néanmoins n'était pas exclusivement pétainiste. Les critiques du progrès « ramollissant » l'être humain ou l'asservissant faisaient largement débat à l'époque chez nombre d'intellectuels, inquiétés par la technique dévorante telle qu'elle est décrite dans Métropolis ou Les Temps modernes, de La France contre les Robots de Bernanos ou du Monde sans âme de Daniel-Rops (Plon, 1932), aux invectives d'un George Orwell qui pouvait écrire en 1937 : « Il faut bien avouer que le passage du cheval à l'automobile se traduit par un amollissement de l'être humain »[1]. Barjavel était également lecteur de René Guénon et l'influence de La crise du monde moderne est patente dans cette vision romanesque très critique du progrès technique matérialiste ne pouvant conduire qu'à la fin du monde. Ainsi, Ravage est un roman typique de l'époque.
Par ailleurs la description du monde futur, un siècle en avant (l'action se situe en 2052), ne laisse pas de rappeler Wells dont Barjavel était certainement un grand lecteur : les ressemblances avec les villes futures décrites dans Quand le Dormeur s'éveillera ou Histoire des temps à venir sont évidentes, tout comme Le Voyageur imprudent n'est pas sans emprunter à la Machine à explorer le temps. Mais le Paris de 2052 est surtout une satire au vitriol de la prospective de l'époque (les vêtements moulants, l'agriculture intensive, l'agrochimie, les aliments synthétiques) et du « monde de l'avenir » selon Le Corbusier et Science et Vie, avec ses gratte-ciel, ses villes tentaculaires, ses « autostrades », ses avions à décollage vertical sillonnant le ciel de Paris et ses meubles en matière plastique (Orwell parlait pour sa part de « meubles en verre et caoutchouc » à la même époque). Ce type de vision de l'urbanisme futur, « table rase », a eu cours jusque dans les années 1960. Si l'on a pu déceler une influence pétainiste dans Ravage, l'État français n'est pas épargné par les passages clairement pamphlétaires du roman, qui raille les ministères aux titres pré-Orwellien (ministère du Progrès social, de la Moralité publique, de la Production et de la Coordination, de la Médecine gratuite et obligatoire…) les « artistes diplômés par le gouvernement » seuls autorisés à peindre, ou encore les « aïeux » surgelés veillant sur leurs descendants au milieu même des habitations : la satire, on le voit, est parfois très grosse.
En tant qu'anticipation, et comme toutes les anticipations, le roman est daté : Barjavel ne s'est guère intéressé aux développements de l'informatique avant les années 1960, contrairement à d'autres écrivains comme Francis G. Rayer ou Murray Leinster (1896-1975), il ignore les robots et la conquête de l'espace.
Cependant Ravage reste saisissant par sa description vivante de l'effondrement soudain de la civilisation machiniste, le retour immédiat de la barbarie et le passage brutal d'un monde aseptisé à la peste du Moyen Âge, aux pillages, aux meurtres et aux incendies monstres. Certaines descriptions sont très prophétiques et n'ont pas vieilli, et, comme chez tous les bons auteurs de SF, on mesure l'intérêt d'une œuvre au nombre d'idées originales qu'elle contient, celle de la fin générale de l'électricité n'étant pas la moindre.
Dans Le Voyageur imprudent, suite de Ravage publiée la même année, le personnage principal, voyageant dans le temps, assiste ainsi à quelques-uns des événements décrits dans ce roman-ci.
Classique de la science-fiction
Ce roman est considéré comme un grand classique de la science-fiction dans les ouvrages de références suivants[2] :
- Annick Beguin, Les 100 principaux titres de la science-fiction, Cosmos 2000, 1981 ;
- Jacques Sadoul, Anthologie de la littérature de science-fiction, Ramsay, 1981 ;
- Science-fiction. La bibliothèque idéale, Albin Michel, 1988 ;
- Lorris Murail, Les Maîtres de la science-fiction, Bordas, coll. « Compacts », 1993 ;
- Stan Barets, Le science-fictionnaire, Denoël, coll. « Présence du futur », 1994 ;
- Bibliothèque idéale du webzine Cafard cosmique.
Lien externe
Notes et références
- Le Quai de Wigan, Champs libre, 1982, p. 219
- Top des Tops. Pour consulter les listes complètes, voir le site
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