Psychopathie

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La psychopathie est un trouble du comportement caractérisé par le déni de l'individualité d'autrui et un comportement généralement impulsif et antisocial pouvant aller jusqu'au crime. En psychologie, ce type de personnalité se caractérise par des conduites antisociales fondées sur des impulsions sans éprouver de culpabilité.

Cela se traduit en général par des actes de délinquance, des mensonges ou le mépris du danger. La vie sociale est instable avec de nombreux changements professionnels, des absences ou des fugues. Les règles normatives de la vie sociale et des valeurs sont enfreintes. Les personnes atteintes sont enclines à infliger des mauvais traitements à leur famille. Pour elles, manifester des émotions est un signe de faiblesse et de la déchéance de leur influence sur autrui.

Environ 3 % des hommes et 1 % des femmes sont touchés par le comportement antisocial[1]. En général, un psychopathe est un sujet qui a sa propre vision du bien et du mal, qui n'est pas celle acceptée socialement, pouvant donner lieu à une multitude de manifestations singulières asociales, antisociales délictueuses ou criminelles à divers degrés.

Sommaire

Évaluation

L’entretien clinique reste l’outil privilégié du clinicien français. Néanmoins, il existe différents outils pour évaluer la psychopathie :

  • l’Échelle de Psychopathie de Hare et al. qui distingue deux grands facteurs : le premier concerne le détachement émotionnel et pathologique narcissique et le second les comportements antisociaux et d’impulsivité ; cela dit, au-delà de la quarantaine, ces derniers comportements ont tendance à décliner (l'âge serait donc un allié thérapeutique).
  • Le test de Rorschach, système intégré d’Exner, très utilisé dans ce domaine, a permis par exemple de dégager un motif de réponses psychopathiques avec une mise en avant de caractéristiques narcissiques pathologiques (grandiosité et perception égocentrique de soi, omnipotence, etc.) et un détachement émotionnel marqué (Gacono, Meloy, etc.).

D’autres chercheurs, grâce à l’utilisation du Rorschach-Exner, ont validé l’hypothèse d’un conflit entre haute valeur personnelle et image de soi détériorée (Réveillère, Pham).

  • Le Test de Szondi a par ailleurs fait largement son entrée dans le domaine de l'analyse de la psychopathologie. Son utilisation dans le cadre de la criminologie lui vaut une place particulière dans l'approche thérapeutique de la psychopathologie.

Psychopathie et sociopathie

Selon Robert Hare, la différence entre psychopathie et sociopathie peut s'expliquer par l'origine du trouble[2]. La plupart des sociologues, des criminologues et même certains psychologues pensent que le trouble s'explique par l'environnement social et préfèrent parler de "sociopathes". Ceux qui, comme Hare, pensent que le trouble s'explique par une combinaison de facteurs psychologiques, biologiques, génétiques et environnementaux utiliseront de préférence le terme "psychopathe".

Selon David Lykken, la psychopathie et la sociopathie sont deux manifestations différentes du trouble de la personnalité antisociale. Il avance que les psychopathes naissent avec des caractéristiques psychologiques particulières comme l'impulsivité ou l'absence de peur, qui les conduisent à chercher le risque et les rendent incapables d'intégrer les normes sociales. Par opposition, les sociopathes ont un tempérament plus "normal"; leur trouble de la personnalité tient davantage à un environnement social défavorable (parents absents, proches délinquants, pauvreté, intelligence extrêmement faible ou développée). Ces deux troubles de la personnalité résultent d'une interaction de facteurs génétiques et de facteurs environnementaux, mais la psychopathie tient surtout à des facteurs héréditaires, tandis que la sociopathie tient surtout à des facteurs environnementaux[3].

Théories psychologiques sur les causes

Parmi les théories psychologiques permettant d'approcher la question de l'étiologie du caractère psychopathique les recherches de Melanie Klein sont parmi les plus significatives.

Klein postule chez le bébé, à partir de ses observations cliniques, deux modalités normales de rapport aux "objets" environnementaux : la position schizo-paranoïde et la position dépressive. Celles-ci sont liées à une temporalité, que Klein décrit et date d'ailleurs de manière assez précise : la position schizo-paranoïde serait grossièrement liée à la première année de vie, et la position dépressive se mettrait en place ensuite, vers l'âge de un an. Le terme de "position" est préféré au terme de "phase" car Klein fait remarquer que la seconde modalité ne vient pas remplacer totalement la première, mais que, bien plutôt, elles vont par la suite coexister et travailler côte à côte dans le psychisme.

Dans la position schizo-paranoïde, les objets sont perçus de manière "partielle", c'est-à-dire qu'ils sont considérés, en quelque sorte, de manière simpliste et "manichéenne" : ils sont bons ou mauvais selon qu'ils sont gratifiants ou frustrants.

Le nourrisson, par ailleurs, projette ses propres pulsions agressives orales sur les objets reconnus comme mauvais ; l'archétype du bon objet est ainsi le sein qui "apparaît" quand le bébé le désire, et le mauvais objet le sein absent et frustrant.

Melanie Klein date vers l'âge de un an le développement progressif de la seconde modalité de rapport aux objets, la position dépressive, dans laquelle les objets sont reconnus de manière plus complexe et élaborée, non plus simplement bons ou mauvais, mais "composés". En parallèle de cela se développe progressivement la capacité "dépressive" qui ouvre la possibilité, en quelque sorte, de "s'en faire" (terme "concern" en anglais) pour les "objets" (le terme "objet" étant utilisé en psychologie analytique dans une large acception qui désigne fréquemment les personnes avec lesquelles on est en relation).

Le bébé, en reconnaissant progressivement la "personne totale" maternelle va se faire des reproches sur la manière dont il a pu l'attaquer par son avidité orale, en craignant de l'avoir endommagé. Par suite il va adopter des comportements "réparateurs" envers cet objet.

On peut ainsi entendre que c'est par des accidents dans le fil du développement psychique du jeune enfant, venant entraver la mise en place correcte de cette "position dépressive", qu'on peut arriver à des écueils psychopathiques.

Suivant ce fil théorique le caractère psychopathique serait donc lié à des difficultés dans l'élaboration de la position dépressive et par suite un "ancrage" dans la position et la modalité schizo-paranoïde ce qui peut s'avérer éclairant dans les liens que peuvent entretenir caractère psychopathique et paranoïa.

Dans le cadre d'une approche psychodynamique le caractère psychopathique apparaît ainsi comme fondé sur des éléments de l'histoire archaïque du sujet, sans que cela amène pour autant à penser une totale fixité ou irréversibilité.

Thérapeutique

La psychopathie est souvent décrite comme incurable ; certains facteurs ont néanmoins une influence sur l’efficacité des traitements des psychopathes : une capacité, même précaire, à mettre en place une relation d’alliance, une comorbidité dépressive ou des signes de dépressivité, une réceptivité aux relations familiales soutenantes.

On peut décrire brièvement plusieurs approches (dont on ne présume pas de l'efficacité) :

  • la médication dans un cadre thérapeutique dit « institutionnel ou communautaire » qui inhibent certains symptômes, comme l’agressivité.
  • la thérapie familiale peut permettre une réduction des récidives d’actes criminels en centrant la thérapie sur la gestion de la situation par les parents.
  • la thérapie communautaire qui se base sur le lien entre les membres du groupe, en se soumettant à l’autorité de ce groupe, par système de récompenses ou de sanctions. Une régulation thérapeutique se fait au sein des réunions journalières. Le groupe de recherche Darkstone propose ainsi un programme thérapeutique basé sur un environnement favorisant notamment la socialisation et la neutralisation des attitudes prédélinquantes.
  • Pour réduire les comportements impulsifs et antisociaux, on peut proposer une approche cognitivo-comportementale multiple : gestion de soi individuelle, travail sur les aptitudes sociales, prévention de comportements agressifs. Templeman et al. proposent par exemple une thérapie par jeux de rôle et opérationnalisation de problèmes pour traiter les distorsions cognitives.
  • La pauvreté des processus primaires et la manipulation spécifiques des sujets psychopathes ont amené les thérapeutes d’obédience psychanalytique à modifier le cadre afin d’apaiser les excitations ; il va s’agir ici d’être actif pour atteindre les conditions qui rendent possibles l’émergence de la pensée, des affects, de la représentation de soi entraînant une identification à l’autre et de l’empathie : le patient peut alors revivre les états traumatiques, cette fois sans effondrement, puisqu’il se sentirait conforté dans son narcissisme de base par le partage affectif de nature empathique de ses expériences avec le clinicien.

On peut relever enfin que la plupart des auteurs s’accordent sur l’importance du contrôle, de la maîtrise et de la gestion des réactions contre transférentielles du thérapeute ; le risque étant pour ce dernier de se sentir dévalorisé, trompé, agressé, ou croire en une alliance thérapeutique qui n’existe pas, ce qui entachera le projet thérapeutique.

Notes

  1. DSM-IV
  2. Robert D. Hare, Without Conscience: The Disturbing World of Psychopaths Among Us, (New York: Pocket Books, 1993) page 23.
  3. David T. Lykken, The Antisocial Personalities (1995).

Voir aussi

Films documentaires :

  • The Corporation : mesure du caractère - éventuellement psychopathe - d'une entreprise à l'aune du DSM-IV
  • Je suis un psychopathe : Ian Walker filme les étapes d'un diagnostic qui doit déterminer si un patient est ou non psychopathe.

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Psychopathie de Wikipédia en français (auteurs)

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